III - Chapitre 12 : Entre ciel et terre
Oh ! Un chapitre un peu en avance. Je repasse mon concours dans pas longtemps donc je révise beaucoup et j'ai besoin de me détendre je crois - et vos commentaires me détendent !
Ah et j'ai vécu l'une de mes meilleurs expériences en temps qu'écrivaine, je voulais vraiment le partager parce que je n'avais jamais ressenti ça en écrivant et c'était extraordinaire. Je vous en parlerais pour le chapitre en question mais sachez-le : écrire, définitivement, c'est l'une des meilleures sensations au monde. Merci à ce moment de me l'avoir rappelé.
Encore une fois merci beaucoup pour vos commentaires sur le chapitre 11, très contente qu'ils vous ait plu ! Pour ceux qui l'ignorent, les premières parties d'un nouveau Bonus sont disponibles dans mon Bonus Book !
Bon. Encore d'autres choses? Non je pense que c'est bon. J'ai carressé mon chat et mon oeil me gratte mais ça on s'en fiche. BONNE LECTURE !
PS : en plus de la citation, je vous mets une chanson que vous pourrez mettre dans le 3e "morceau" du chapitre, c'est l'une de mes chanson préférées et je l'avais dans la tête en décrivant le paysage.
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Octobre, Francis Cabrel ==> &ab_channel=RCADistribution
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J'ai cueilli ce brin de bruyère,
L'automne est morte, souviens-t'en.
Nous ne verrons plus sur terre
Odeur du temps, brin de bruyère,
Et souviens-toi que je t'attends.
- Guillaume Apollinaire, L'adieu
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Chapitre 12 : Entre ciel et terre.
-Callum, rends la douche !
-J'ai du savon plein les yeux !
-Ce n'est pas mon problème ! Dépêche-toi, je suis pressée !
-Il ne fallait pas traîner avec Eden ! Je vais finir par prévenir Jordane qu'elle a la concurrence chez les ... Comment ils nous appellent les français, déjà ? Rosbeef ?
Je poussai un grognement de frustration face à la porte qui menait à notre salle de bain qu'Arnold privatisait depuis près de dix minutes. Je sortais d'une séance harrassante où Dalia avait à nouveau lancé les quatre poursuiveurs sur moi pour me forcer à faire les arrêts les plus économiques en temps possible et Cameron, le batteur espoir, s'était fait une joie de me compliquer la tâche d'un cognard qui m'avait déboité l'épaule. J'avais ignoré la douleur pour poursuivre une séance d'entrainement en petit comité avec Swan et Eden et ça m'avait mis un retard fou sur mon planning. Je massai mon épaule et jetai un regard furieux à la porte jusqu'à ce que Swan éclate de rire.
-Prends-la chez toi, va, ça ira plus vite !
-Je ne rentre pas chez moi, je dois passer par chez des amis ...
-Alors use de la manière forte, me conseilla Eden avant de froncer les sourcils. Ça va ton épaule ?
Pas vraiment, elle ne cessait de me lancer depuis que j'avais posé pied à terre. Je n'avais pas réellement senti la douleur tant que j'étais en action, mais maintenant que mes muscles se refroidissaient, elle devait lancinante. Je me laissai manipuler par Swan et devant mon grognement de douleur, elle partit chercher notre guérisseuse, Emma Spielman. Elle examina mon épaule recouverte d'un bleu qui virait au violet d'un œil critique.
-Sacré coup, tu aurais dû t'arrêter, marmonna-t-elle en appliquant une pommade sur ma peau. Exemptée d'entrainement mercredi, repose-toi et jeudi reste sur du cardio, ne monte pas sur un balai. Je vais te poser une attelle ...
-C'est nécessaire ?
-Si tu veux que ton épaule se ressoude correctement, oui.
Je tentai de cacher mon agacement face à ce nouveau contre-temps. L'avantage, c'était qu'Emma en tant que guérisseuse avait assez d'autorité pour libérer la douche de la présence d'Arnold et je pus rapidement me laver avant qu'elle ne me pose l'attelle qui serrait mon bras contre mon flan. Swan avait fait mon sac pour m'aider et je quittai les vestiaires en coup de vent, terrifiée par le temps qui avançait. Je remontais tous les étages du centre Plumpton au pas de course, mon balai dans une main et mon sac sur l'épaule et fus une nouvelle fois coupée dans mon élan par quelqu'un :
-Victoria !
Je retins un soupir de découragement. Je ne pouvais pas éviter le président Grims en personne ... L'homme s'était appuyé contre une fenêtre, une cigarette aux deux-tiers entamés entre les doigts et un sourire charmeur aux lèvres.
-Quel plaisir de vous revoir. Vous allez bien ?
-J'ai un petit problème d'épaule et euh ... Désolée, monsieur Grims, mais je suis attendue et ...
Leonidas Grims essuya un petit rire avant de prendre une bouffée de sa cigarette et de la recracher dans l'air. Il sortit sa baguette et cette fois sa fumé ondula pour prendre la forme d'un cheval qui galopa vers la liberté.
-Je ne vais pas vous retenir longtemps. Je voulais juste vous remercier ... d'avoir transmis mon message.
-Oh.
Après le dîner avec les Selwyn puis la discussion avec Emily que j'avais relaté à Simon, j'avouais avoir perdu de vue ses réflexions sur sa tante. Ce fut pour cela que je clignai stupidement des yeux et Leonidas eut un sourire indulgent.
-Oui. Nous avons reçu hier la visite – furieuse, il faut le dire – de Rose Bones, visiblement outrée qu'on ait réussi à passer au-dessus son autorité. Alors elle nous a rien dit sur les pensées de Simon, mais ... ça nous a servi « d'accusé-réception », si on veut.
-Ah. Bien ... Un plaisir.
Je crus qu'il allait insister, me demander où en étaient les réflexions de Simon, mais il me surprit en écrasant simplement sa cigarette sur le bord du mur avant de me souhaiter une bonne journée et retourner dans son bureau en sifflotant. Je vérifiai ma montre et poussai un cri de surprise. J'allais me faire trucider.
***
J'arrivais avec près d'une heure de retard sur le Chemin de Traverse et gravis quatre à quatre les marches qui menaient à l'appartement des jumeaux. J'arrivais devant la porte essoufflée, me tenant l'épaule qui malheureusement avait recommencé à m'élancer pendant le trajet – je soupçonnais le transplanage d'avoir réveillé la douleur – et mon sac sur le coude. Le jumeau qui m'ouvrit éclata ouvertement de rire.
-En retard ! Ça a un côté jouissif, vous passez trop pour parfait vous, les Poufsouffle.
-Oh tais-toi, maugréai-je en levant les yeux au ciel. Et pose ta question !
-Qui t'a demandé à aller au bal avec toi : Fred ou moi ?
-Toi, Fred y est allé avec Angelina.
-Pas tout à fait exact, mais passons.
George s'effaça pour me laisser entrer et lui jetai un regard surpris en déposant mes affaires dans le salon. Depuis la petite cage d'escalier émanait le brouhaha incessant de leur boutique et un immense chaudron aux senteurs exquises était installé au centre de la pièce.
-Ah mais oui, me souvins-je avec un sourire. J'avais parlé à Fred pendant le bal : vous vous échangiez Angelina, c'est ça ? Sympa pour elle.
Je fus étonnée de voir les joues de George quelque peu s'échauffer devant mon accusation. Il s'approcha du chaudron avec une grimace et rajouta le contenu d'une fiole qu'il sortit de sa robe magenta.
-Disons qu'elle a accepté de danser quelques chansons avec moi, éluda-t-il en tournant la potion de sa baguette. D'ailleurs, elle est passée la semaine dernière. Elle a réussi à trouver un poste à la fabrique de balai Nimbus et on s'est donné rendez-vous pour ton prochain match. Les Faucons ?
-Les Canons, rectifiai-je, brusquement nerveuse. Qu'est-ce que c'est ?
Une bulle venait d'éclater à la surface du chaudron, répandant un parfum délicieux dans l'air, un parfum. Je le humai machinalement et laissai l'odeur se diffuser en moi et détendre absolument tous les muscles de mon corps. Je tentai de les identifier sans parfaitement y parvenir ... L'une d'entre elles me marquait un peu plus que les autres ...
-C'est drôle, on dirait que ça sent le chocolat ...
-Alors ça, ça ne m'étonne pas toi, s'esclaffa George, l'œil étincelant. C'est de l'amortentia, Bennett, le plus puissant filtre d'amour au monde. Il a une odeur différente pour chacun, une odeur qui reflète ...
-... Ce qu'on aime le plus, me souvins-je avec l'impression d'entendre depuis les profondeurs de ma mémoire la voix d'Emily qui répétait la définition des différentes potions. Il y autre chose, mais ...
-C'est difficile parfois de tout démêler, et si tu t'y mets maintenant, tu vas être encore plus en retard que tu ne l'es déjà.
Mes joues s'embrasèrent devant le regard moqueur de George et il m'indiqua l'étage du menton. Je m'y précipitai, avant de revenir sur mes pas et de lui jeter à mi-chemin :
-Et si j'apprends que tu as utilisé les oreilles à rallonges, je te fais boire ta potion de force pour que tu tombes immensément amoureux de Maugrey !
-Comment oses-tu ? Mon amour pour Alastor est déjà infini !
Réprimant le fou rire qui me venait, je gravis les quelques marches qui me restait jusqu'à la trappe qui menait au grenier et dans laquelle je donnais quelques coups. Elle s'ouvrit alors sur le visage souriant de Remus Lupin qui m'aida à me hisser dans la pièce malgré mon bras en écharpe.
-Un cognard ? devina-t-il avec un fin sourire.
-Féroce, haletai-je, soulagée d'être enfin arrivée. Désolée du retard ...
-Ce n'est pas grave, assura une voix grave dans le fond de la pièce.
Je vrillai mon regard vers un homme grand et chauve, installée sur l'une des chaises branlantes des jumeaux. Il portait une robe bleu-roi qui tranchait avec sa peau noire et son oreille était percée d'un anneau doré. Il m'adressa un sourire aimable en me tendant la main.
-Victoria, enchanté. Je suis Kingsley. C'est moi qui vais procéder à ton entretien ... Remus y assistera également, si ça te convient.
Je serrai la main sur sorcier, assez impressionnée par sa carrure et sa voix grave et apaisante. C'était le premier membre de l'Ordre que je rencontrais – à l'exception de Lupin et de Maugrey. Si Kingsley officiait dans les entretiens, j'en déduisais qu'il devait être l'une des têtes pensantes de l'organisation.
Il m'invita à m'assoir sur le vieux sofa qui prenait la poussière dans le grenier et qui était troué et brûlé par endroit depuis que Fred avait tenté d'entrer dans les coussins pour s'y cacher en utilisant un sortilège d'extension qu'il était visiblement incapable de pratiquer. Je fus rassurée de voir Lupin s'assoir à côté de moi et non en face comme le faisait Kingsley : je me sentais plus soutenue que jugée.
-Bien, je ne vais pas commencer à juger tes motivations, à vérifier que tu es bien prête pour ce qui t'attend : j'ai les rapports de Maugrey, Lupin mais également de tes camarades. Née-moldue, meilleur ami tué par Voldemort et famille menacé par un aspirant Mangemort ... Je suppose que ce sont des motivations solides.
Le constat, même s'il était prononcé avec toute la douceur du monde, me glaça jusque la moelle et je me contentai de continuer de fixer l'homme en face de moi sans répondre. Kingsley échangea un bref regard avec Remus avant de poursuivre :
-Et contrairement aux autres, tu as fait tes preuves. Plusieurs fois, dont pour une mission aiguillée par l'Ordre. Ça n'a pas dû être facile de te retrouver face à Kamila Tokarsky ...
-Non, admis-je du bout des lèvres, consciente que je devais prendre la parole pour qu'il me jauge. Mais j'avais besoin de mettre les choses à plat avec elle.
-Mission réussie. Tu seras sans doute heureuse de savoir qu'on a reçu une lettre de sa part : elle parcourt la Pologne pour étendre le réseau et nous a mis en contact avec un homme qui a résisté contre Gindelwald dans les années quarante.
Je gardais le silence. Personnellement, j'attendais toujours la lettre de Viktor Krum m'assurant que Kamila n'avait pas de lien avec les Selwyn pour être parfaitement rassurée. Le regard sombre de Kingsley se planta dans le mien et malgré son absence de sourire, je sentis une certaine bienveillance émaner de lui.
-Quelles sont tes forces, Victoria Bennett ?
-Pardon ?
-Tu as été amenée à mesurer ton niveau magique et ton mental face à des épreuves, que ce soit à Bristol ou à Cracovie. C'est face à l'adversité qu'on se découvre alors dis-moi, quelles sont tes forces ?
Je déglutis. Moi qui me concentrais sur mes faiblesses, réfléchir objectivement sur mes forces était une véritable épreuve.
-Je suis occlumente, trouvai-je tout de même puisque c'était principalement ce qui me distinguait. Je suis capable de soutenir un duel parce que je suis endurante et ...
J'échangeai un bref regard avec Remus, qui m'encouragea d'un signe de tête bienveillant. Ma main se perdit dans mon cou et effleura la chaine qui portait deux pendentifs, ma médaille de baptême à l'effigie de Saint George et l'étoile de David que ma grand-mère m'avait offert à noël. Mon combat et ma force.
-Ecoutez ... Je ne suis peut-être pas la sorcière la plus brillante de ma génération – mais vous avez de la chance, vous avez réussi à attirer celui qui peut prétendre au titre. La seule chose que j'ai à offrir de plus que les autres, c'est mes capacités d'occlumente et ma place dans le Quidditch professionnel qui a évidemment un lien avec l'économie de marché magique. C'est sans doute peu, mais vous l'avez dit vous-mêmes : mes motivations sont solides. Je n'ai pas d'esprit de vengeance, pas de de volonté d'absolument faire mal à l'adversaire. Je veux juste tout mettre en œuvre pour que cette guerre n'atteigne pas mes parents. Et moi, accessoirement.
Un faible sourire se dessina sur les lèvres de Kingsley.
-Et c'est donc pour ça que tu t'y jettes à corps perdu ?
-Euh ... Oui. Pour éviter le pire, parce que le pire est à venir. Alors moi et mes maigres compétences, on se tient à la disposition de l'Ordre ...
Kinglsey hocha la tête, sans me lâcher de son regard sombre et magnétique. Il émanait de lui une sensation de calme et de force qui avait un effet apaisant : je ne me sentais pas agressée ou jugée. Tout au plus étudiée. Ses longs doigts lissèrent les liasses de parchemin devant lui et ajouta d'une voix douce :
-Tu sais que tu pourrais mourir, dans cette affaire ? Tu t'approcheras des Mangemorts, de la noirceur, de leur volonté d'éradiquer tout ce que tu représentes – à savoir le monde moldu qui pollue le monde sorcier ... Oui, mourir serait même un petit mot. Bellatrix Lestrange serait ravie de faire subir une ou deux tortures à une fille aux veines souillées comme toi.
-Kingsley, cingla Lupin, les sourcils froncés.
-Je ne faisais qu'emprunter son langage, Remus. Tu sais bien que je n'en pense pas un mot ...
Et même en sachant ça, mon cœur s'était mis à tambouriner dans ma poitrine. J'avais vu les effets du sortilège Doloris trois fois dans ma vie, dont une pratiquée sur mon propre frère. Le cri qu'il avait poussé hantait encore mes pires cauchemars, tout comme les yeux gris ouverts sur les étoiles de Cédric. L'idée de pousser un pareil cri m'arrachait un violent frisson que Kingsley fit semblant de ne pas percevoir. Je déglutis péniblement et mes mains se refermèrent sur mes pendentifs.
-J'en ai conscience, oui.
Je ne voyais pas quoi répondre d'autre face au regard pénétrant de Kingsley. Que j'étais effrayée ? Que je risquais d'être paralysé face au danger ? Que je tremblais à l'idée de subir ce que mon frère avait subi ? Il le savait parfaitement. Je le voyais dans l'éclat de compassion qui avait éclairé ses prunelles, mêlée d'une certaine pitié, comme s'il anticipait la peine qu'il aurait pour moi dans le futur. Il baissa enfin le regard et enroula lentement les feuilles de parchemins qu'il tenait entre ses mains.
-Evidemment que tu en as conscience. On ne voit pas son meilleur ami mourir ou son frère être torturé sans en avoir conscience ...
Je ne répondis pas mais échangeai un autre regard avec Lupin, qui hocha lentement la tête avec un sourire rassurant. Ce n'était pas la première fois que Kingsley évoquait mon frère et Cédric et je commençais à me demander si ce n'était pas à dessein. Pour me faire miroiter précisément ce qui pourrait me faire flancher. Pour faire montrer mon anxiété.
C'était réussi.
Je fis un effort pour décrisper mes doigts de ma chaîne et décroisai mes jambes étroitement serrée l'une contre l'autre. En face de moi, Kingsley achevait de prendre une ou deux notes avant de lever les yeux sur moi. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres quand il remarqua mon changement te posture.
-Tu peux te détendre. Pour tout te dire, Victoria, cet entretien n'est que pour la forme. Ce n'est que sur le terrain qu'on réalisera parfaitement si vous êtes aptes ou non.
-Oh ... Je doute être utile « sur le terrain » ...
-Dommage, c'est précisément ce que j'envisage pour toi.
Je clignai des yeux, surprise et le sourire de Kingsley s'agrandit. Il sortit sa baguette de sa manche et donna un coup sur ses parchemins qui s'enroulèrent sur eux-mêmes puis disparurent dans un « pouf » sonore.
-Oui. Pour tes premiers pas, on va vous mettre en binôme avec des membres plus expérimenté. Et la personne qu'on a choisi pour toi est justement une Auror, une femme de terrain qui s'occupe de mission de surveillance de certaines personnes qu'on soupçonne mêlées aux activités des Mangemorts.
-Tu as une bonne analyse des choses, et certains de tes camarades ont insisté sur le fait que tu es dotée d'une certaine clairvoyance : tu sens les choses, tu as un bon instinct, enchérit Lupin avant que je n'aie le temps d'ouvrir la bouche. Et dans cette affaire, on a besoin d'instinct et de clairvoyance.
Je les considérais tous les deux, abasourdie. Mon cœur s'était mis à battre la chamade dans ma poitrine.
-Vous voulez réellement que je surveille des Mangemorts ?
-Un en particulier, confirma sombrement Kingsley. Le nom de Yaxley t'est-il familier ?
-Non ...
-C'est une grande famille de Sang-Pure, affiliée aux Black, aux Lestrange, m'éclaira Lupin avec la patience du professeur. Bref, toutes ces familles qui ont données elles aussi des Mangemorts. On sait qu'ils ont un penchant certain pour la suprématie du sang sorcier, la puissance et certain pour la magie noire ...
-Pendant la première guerre, on n'avait pas réellement pu les confronter, ajouta Kingsley avec une certaine amertume. Ils étaient restés à la marge, mais on soupçonne fort qu'ils aient participé au financement des activités de Voldemort.
Mes yeux se fixèrent sur lui, sur ses traits calmes et la détermination dans ses prunelles alors qu'il prononçait ce nom honni par tous. Je n'avais entendu que deux personnes le prononcer : mon grand-père qui pensait avoir vécu pire avec Grindelwald et Dumbledore.
-Et vous pensez qu'ils ont repris le financement ?
-Pire, on pense que cette fois ils sont actifs dans la lutte. Le patriarche est mort il y a quelques années, laissant son héritage à son fils, Corban. Un ami de longue date de Rabastan Lestrange, et on sait tous ce qu'il est devenu ...
-Et surtout ce qui nous inquiète, reprit Lupin avec un coup d'œil entendu en ma direction, c'est que Corban Yaxley est un puissant lobbyiste qui travaille beaucoup avec du personnel de la Justice Magique ... Au cœur même du Ministère.
-Ah.
Les rouages de mon cerveau se mettaient enfin en marche et les liens se multipliait entre moi et la mission qui se dessinait. De nouveau, ma main se perdit sur ma chaîne et je la fis rouler entre les doigts.
-Vous attendez de moi que je traîne les oreilles chez les Bones, c'est ça ?
-Et ce serait infiniment plus utile si Rose Bones reprenait enfin le travail, soupira Kingsley. Mais je suppose que George suffira, il travaille plus près de Yaxley je pense ... Effectivement, il serait intelligent de ta part de récolter discrètement des informations de ce côté-là, je pense que tu es assez chez eux pour le faire.
-Mais il va surtout falloir suivre Corban, ses allées-et-venues, noter qui il rencontre, de qui il s'approche trop prêt ... Sa position est notamment idéale pour mettre certains membres de la Justice Magique sous Imperium.
Mon sang se figea dans mes veines. J'avais tant l'image de Mangemort en marge de la société, caché derrière leurs cagoules noires, que je n'avais pas une seconde songer qu'ils puissent circuler à visage découvert au Ministère et puissent infecter nos têtes pensantes. Un sourire tordu retroussa les lèvres de Lupin.
-Tu saisis l'enjeu, donc. Il s'agit pour toi d'un travail de terrain mais aussi d'un travail de recherche – ce qui devrait aussi te ramener à des choses plus connues, pas vrai ? Tu te sens prête pour ça, Victoria ?
Je gardais longuement le silence, le regard perdu par de là la fenêtre mansardée qui donnait sur le ciel bleu que l'automne rendait froid, glacial. Deux chouettes la traversèrent, lettre accrochée à la patte et s'élevèrent à tire-d'aile dans le ciel. J'aurais voulu être l'une d'entre elle et m'envoler, loin, fuir tout ce qui me tendait les bras mais malheureusement, j'étais vouée à rester clouée au sol.
-Oui. Oui, je suis prête.
-Parfait, apprécia Kingsley avec un sourire. On n'en doutait pas. Maintenant, quelques compléments d'information ... Bien sûr, vous pourrez continuer de vous réunir ici, entre jeunes – avec toutes les précautions possibles, évidemment. Restez soudés : nos liens, c'est notre arme la plus forte face aux épreuves qui nous attend. Mais nous avons un quartier général plus central, dirons-nous. Nous vous le ferons visiter la semaine prochaine.
J'acquiesçai et réfléchissait intérieurement à quel moment de ma semaine chargée cela pourrait se faire avant que mes yeux ne se baissent sur mon bras enfermé dans une attelle. Voilà lui allégeait agréablement mon agenda ...
-Quand vous voulez.
-Et on te demandera aussi de garder les détails de ta mission – l'identité de Yawley, notamment – pour toi pour l'instant, ajouta Lupin d'un ton mutin. Je sais qu'on vous exhorte à partager vos craintes mais pour les missions, on préfère ... comment dire ?
-Cloisonner l'information, précisa Kingsley en hochant la tête. Pour éviter les fuites, ou que vous soyez mis en danger par les missions des autres.
-Et ça comprend Simon, Victoria.
Je lui jetai un regard ennuyé – j'étais justement en train d'évaluer dans quelle mesure je pourrais parler de tout cela à Simon. C'était une véritable tombe et son seul nom de famille me mettait en danger. Lupin esquissa un sourire dépité, comme s'il avait parfaitement deviné mes pensées.
-C'est pour votre bien et celui de l'Ordre. On ne t'interdit pas de lui donner l'idée générale, mais on ne veut pas que tu le préviennes de qui, quoi, où et comment. Je sais c'est restrictif, ajouta Lupin quand j'essuyais un petit rire. Et prépares-toi, il a reçu les mêmes instructions.
-Je vois.
L'idée répandait un goût amer dans ma bouche quand je pensais aux efforts que j'avais fait pour qu'il soit parfaitement franc avec moi. Puis mon comportement exagéré liée à Lysandra me revint en mémoire et je sentis mes joues m'échauffer.
-Très bien. Je tiendrais ma langue.
Kingsley m'adressa un sourire que je sentais sincère et se leva de son fauteuil en me tendant une main.
-Parfait, Victoria. Au plaisir de te revoir cette semaine ...
-Oh. (Je serrai machinalement sa main, un peu surprise). Moi également.
-Et bon courage pour la guérison de ton bras. Remus ?
Il désigna la trappe du menton et Lupin se dressa à son tour sur ses pieds. Kingsley fut le premier à s'engouffrer vers la sortie et mon ancien professeur en profita pour me prendre le bras et me souffler :
-Tu te débrouilles très bien jusque là, continue !
Il m'adressa un dernier sourire avec toute sa bienveillance naturelle et sortit à la suite de Kingsley. Je restais une seconde penaude sur le sofa, étonnée de la rapidité de l'entretiens durant lequel j'avais songé souffrir bien plus que cela, avant de me forcer à bouger et à descendre à mon tour. George était seul dans son salon lorsque j'arrivais et la clochette teintait encore du départ de Lupin et Kingsley. La potion au centre de la pièce avait à présent un aspect nacré très agréable et sa fumée s'élevait en douce spirale qui répandait encore cette bouffée de bonheur pur. George, qui était en train de rajouter un ingrédient, me jeta un regard surpris.
-Eh bien, ça a été vite ! s'étonna-t-il, les sourcils dressés. Moi ça a bien duré une heure ! Renata encore plus, j'ai cru qu'ils n'allaient jamais sortir de mon grenier !
-Et bien moi ça a duré dix minutes. Je peux venir vivre ici ? Je suis fan de cette odeur.
Je m'affalais sur une chaise et m'accouée sur la table, les yeux rivés sur la surface blanches aux reflets irisés qui dégageait toujours cette odeur de chocolat, le pur, celle qui émanait de la plaquette quand j'en craquais un carré gourmant. Une senteur plus fraiche, plus végétale, cassait un peu l'amertume sucrée. George paraissait s'amuser de me voir décortiquer les différents parfums.
-Elle n'est pas finie, tu n'arriveras pas à tous les identifier. Reviens dans trois jours, elle sera parfaite.
-Comment tu peux réussir à la faire ?
-Tu me vexes, Bennett. J'ai eu ma BUSE en Potion.
J'écarquillais les yeux, abasourdie alors que George tournait lentement la mixture. Mes yeux firent l'aller-retour entre son visage concentré comme rarement je l'avais vu et la belle surface nacrée avant de revenir sur lui.
-Mais Rogue demandait un Optimal !
-J'ai eu un Optimal. Arrête de faire ta choquée, je vais finir par être réellement vexé !
Mais un large sourire s'étirait sur son visage constellé de tâche de rousseur, fier et heureux. Son nez aussi était grand, mais différemment que celui de Simon. Il était courbé, plus brusqué et la rousseurs de ses tâches étaient accentuées par la couleur de ses cheveux.
-Si Rogue n'avait pas été professeur, j'aurais pu réellement adorer cette matière. Apparemment, ils ont un nouveau professeur cette année, comme je les envie ...
-Susan nous en a parlé dans une lettre, me souvins-je, sans cesser de le dévisager. Tu t'es réellement infligé deux années de Rogue en plus ?
George leva les yeux au ciel. Il prit le temps de baisser le feu de sa baguette – en murmurant la formule, comme s'il était incapable de pratiquer la magie sans parler – et de faire tournoyer une dernière fois la substance avant de se tourner vers moi avec un sourire penaud.
-Eh oui, Bennett. J'aimais les potions et on en avait besoin pour la conception de certains de nos produits. Même si j'avoue, je n'écoutais pas vraiment en cours, je faisais des expériences seul dans ma chambre.
-Seul ? Sans Fred ?
-Fred était une véritable calamité en potion, il faisait exprès de faire exploser notre chaudron – et crois-moi, la tête de Rogue en valait à chaque fois le coup ... Comme celle qu'il avait lorsqu'il m'a vu débarqué en ASPIC ! Ah ! (son sourire se fit rêveur). Bon sang, c'est à ça que je devrais penser pour le patronus !
L'image arracha un éclat de rire. Seigneur oui, qu'est-ce qui avait pu passer par la tête de Rogue lorsqu'il avait vu l'un de ses cauchemars de ses cinq dernières années passer la porte des ASPIC ? Je me laissai allée contre la chaise, détendue par la conversation badine et par les délicieuses effluves que diffusait toujours le chaudron. Le sentiment de plénitude qui m'envahissait dissipait même la douleur qui persistait dans mon épaule. Je surpris néanmoins le regard de George sur moi, plus songeur, moins pétillant. Je dressai les sourcils en une question muette et il poussa un profond soupir.
-J'essaie de déterminer pourquoi ton entretien a duré dix minutes quand moi ils m'ont torturé pendant une heure. « Et dans une situation, tu ferais quoi ? Et si tu es face à ça ? Et si tu dois choisir entre ton frère et la réussite d'une mission ? ». Je suis sorti de là ... un peu moins joyeux que d'habitude. Et toi, tu as littéralement été expédiée et tu ris devant ma potion.
-Oh.
Je détournai les yeux, assez gênée par l'exposé de George qui sonnait étrangement en moi, comme presque contre-nature. Qu'est-ce que c'était un George Weasley « un petit peu moins joyeux » ? Mon embarras fut brisé par son rire, un véritable rire qui résonnait seul dans l'espace.
-Ne t'en veux pas, Bennett, c'est bien pour toi. Tu as l'air d'en avoir assez bavé – et c'est peut-être pour ça que ça a été aussi vite, au final, tu es la seule qui a affronté la réalité ... (Ses lèvres se tordirent et il frotta sa nuque). D'ailleurs, je ne savais pas tout ça. Ce qui s'est passé avec la polonaise, les Selwyn ...
-Je ne tenais pas à ce que tout le monde sache.
-Je me doute bien. Mais quand même, c'est étrange de découvrir que tu as affronté tout ça – en plus du reste. Je veux dire, Diggory ce n'était déjà pas facile ...
Mes lèvres se tordirent machinalement et George parut s'en vouloir d'avoir abordé le sujet. Maladroitement, il se pencha pour me donner une tape sur l'épaule.
-Allez, Bennett. Fais pas genre t'es une fragile, maintenant que je t'ai vu te battre, je sais ce que tu as dans le ventre.
-Pas plus que toi. Pour faire tout ce que tu as fait à Poudlard depuis des années, il en faut dans le ventre quand même.
George essuya un nouveau rire amusé qui parut lui rendre la gaité qui le caractérisait d'ordinaire. C'était étrange, mais c'était si rare de le voir sans Fred que j'avais l'impression que la scène n'était pas complète, que quelque chose dans l'équilibre clochait. Mais l'impression passa rapidement lorsque George attrapa sa baguette et fit léviter jusque sa poigne une bouteille de bièraubeurre.
-Mais on a assez parlé de choses stressantes pour la semaine à venir ! Un verre Bennett ?
Je souris.
-Avec plaisir.
***
-Mission de surveillance ...
-Tu n'aurais rien de plus.
-Alors moi je suis soupçonné de cacher une chose qu'au final je ne cache même pas et tu me le fais payer comme si je t'avais traité de ... Tu-Sais-Quoi, mais toi tu me caches ça et tout va bien ?
-Ce n'est pas moi qui fixe les règles, Bones. D'ailleurs, où en est avec la chose que je pensais que tu cachais et qu'au final tu ne caches pas ?
Simon leva les yeux au ciel devant l'utilisation de tant d'artifice pour ne désigner que Lysandra Grims. Nous montions à raz-de-colline avec une pente si ardue que cela nécessitait qu'il fasse des pauses, lui qui n'avait aucune condition sportive. Son manque de souffle lui jouait par ailleurs des tours dans les duels : s'il ne gagnait pas immédiatement, il finissait par s'épuiser et perdre en lucidité. C'était d'ailleurs l'une des composantes qui étaient sorties de son entretiens, fait lui aussi avec Kingsley : définitivement, il devait faire de l'exercice et c'était bien pour cette visée que vous avions transplaner si loin de notre destination.
Essoufflé, il se laissa tomber à même l'herbe verte qui couvrait le flanc de la colline et profita de sa récupération pour s'abstenir de répondre. Désabusée, je le dépassais pour embrasser le paysage du regard. Un petit village était niché entre les pentes et un ruisseau chantait et dévalait le versant opposé. Au loin, je percevais les contours d'une étrange maison, haute et étrangement circulaire. J'étais en train de la détailler, les yeux plissés, quand une bourrasque de vent plaqua mes cheveux contre mes lèvres. Je les recrachais en toussant et Simon éclata de rire.
-Quelle idée de les faire pousser ! rageai-je avant de lui donner un coup de pied dans la cuisse. Et arrête de rire, toi ! Je sais comment te faire subir le même sort ! Et vu ton état, tu ne seras hyper vif pour parer le maléfice !
La menace parut assez crédible pour qu'il cesse net de rire et s'efforce de se redresser, comme pour paraître plus à l'affut. Je continuai de le lorgner, lui et ce petit sourire effronté qui persistait sur ses lèvres et lâchai avec prudence :
-D'ailleurs, le président m'a parlé. Apparemment, ta mère n'est pas très contente qu'on soit passé au-dessus d'elle ...
-Non, pas du tout, admit Simon sans que la nouvelle n'efface totalement son sourire. Elle essaie de me convaincre que les Croupton n'ont aucune autre valeur que la puissance et l'importance de leur nom chez les sorciers, qu'elle avait tout fait pour me tenir loin d'eux comme ma mère l'avait fait, que Lysandra avait fui dès qu'elle avait pu sans chercher à avoir ma garde ...
-Et qu'est-ce que tu en penses ? Toi ?
Simon grimaça et repoussa d'une main les mèches blondes que le vent poussait devait ses yeux. Cette fois, le sourire s'était effacé sur ses lèvres.
-Je ne sais pas. Je suis assez mal à l'aise à l'idée d'être affilié à Barty Croupton après tout ce que j'ai entendu dire ... Tout ce que j'ai vu ... Il y a du vrai dans ce que dit ma mère, Lysandra a fui, ça fait quatorze ans qu'elle vit à Boston ... Mais je ne sais pas, je repense aux photos que tu as montré ... Ce n'est pas comme si elle avait parfaitement renoncé, non ? Et puis en fuyant, c'est aussi Barty qu'elle a quitté. Peut-être qu'elle n'est pas comme lui comme veut le faire croire ma mère ...
-Je ne sais pas, soufflai-je en me laissant tomber à côté de lui. En tout cas, j'aime assez bien son mari. Je pense que tu devrais bien t'entendre avec lui. Par contre, c'est un véritable corrupteur au tabac.
Simon me lançait un regard de biais que j'ignorais. Lui n'avait jamais touché à la cigarette et avait compté sur le sport pour me faire définitivement arrêter la chose. Je préférais poursuivre sur une pente moins glissante :
-Bref, il ne m'a pas l'air d'un sang-pur étriqué dans ses principes et au-dessus de tout le monde. Peut-être que sa femme est pareille ...
-En clair, la réponse ça reste qu'on ne saura pas tant que je ne la rencontre pas, conclut Simon avec un sourire tordu.
-C'est ça.
Son regard vert se perdit à l'horizon, jusqu'à se fixer sur l'étrange maison perdue dans les collines et le vent. Le temps était clairsemée entre éclaircies et averses et les nuages sombres que le vent charriant nous promettait quelques gouttes de pluie avant d'atteindre notre destination. Je caressai mon attelle qui m'avait épargnée une séance d'entrainement par ce temps avant de prendre le bras de Simon et de le forcer à se remettre en route. Le chemin était encore long.
L'humeur de Simon parut s'assombrir avec le temps et l'approche de notre destination. Lorsqu'enfin nous basculions sur l'autre versant de la colline, la belle propriété entourée d'arbre et de verdure fut en vue. Mon cœur tomba comme une pierre dans ma poitrine et je marquai un bref temps d'arrêt avant de descendre la pente à la suite de Simon.
-Tu vas faire beaucoup de recherche, du coup ...
Mes lèvres s'étaient activées toute seule, dans l'espoir de faire disparaître ce poids s'était abattu sur moi et m'étreignait la cage thoracique. Simon parut soulagé lui aussi d'avoir cette échappatoire et enchaina immédiatement :
-Voilà. Les Mangemorts n'utilisent pas que de la magie brute et meurtrière, mais aussi de la magie recherchée, raffinée ... Tout le monde n'est pas capable de briser leur sort, de contrer les maléfices qu'ils utilisent ou même de détecter leur trace ...
Il fronça les sourcils devant le chemin caillouteux qui descendait en pente raide vers la maison. Sa main basculait pour l'aider à trouver son équilibre – prête à se rattacher à moi et à m'entrainer dans sa chute si nécessaire.
-Apparemment, leur spécialiste de ça, c'était l'un des oncles des jumeaux. Fabian ou Gideon, je ne sais plus mais il avait fait une formation de Briseur de Sort ... Ils ont bien Bill Weasley, le grand frère de Fred et George – c'est avec lui que je vais travailler d'ailleurs – mais ils ont besoin que j'étudie les sortilèges d'un autre ... niveau ...
-Et ça te va ?
Je connaissais mieux que quiconque les motivations qui avaient poussé Simon à s'investir dans l'Ordre : faire quelque chose. Et faire quelque chose, c'était au bout de sa baguette qu'il le faisait le mieux. C'était lui, plus que n'importe lequel d'entre nous, que j'aurais vu sur le terrain. Il en avait la volonté, le talent, la motivation. Mais j'étais secrètement soulagée de savoir qu'il serait éloigné encore un moment du réel danger. Et je vis au pincement de ses lèvres que ce n'était pas son cas.
-Simon, soupirai-je en évitant une pointe de caillou saillant sur le chemin. L'histoire de Jugson, c'est encore tout frai dans ta tête ... Je ne suis pas sûre que tu sois encore assez lucide pour aller te frotter directement aux Mangemorts.
-C'est drôle, ils ont dit exactement la même chose. Ce n'est pas toi qui leur as soufflé par hasard ? Oh ne me regarde pas comme ça, râla-t-il quand je me retournais pour lui jeter un regard noir. Je sais très bien que ce n'est pas vrai, je suis passé avant toi je te signale.
-Alors ça fait trois personnes différentes qui te disent la même chose, Bones. Alors mets ta tête de mule de côté et écoute-nous.
Ses iris flamboyèrent et instant et je vis en instant ses iris passé du vert mousse à l'émeraude que je redoutais tant.
-Tu sais, Victoria, si tu me laissais un peu parler et que tu réfléchissais un peu moins à ma place, tu m'aurais entendu dire que ce n'était absolument pas ça qui me dérangeait dans cette mission. Pour l'instant, je me fiche d'être dans la mêlé, ce n'est pas ce que je recherche. Qu'est-ce que tu crois ? Je perdais systématiquement contre Lupin, je perdais même contre les jumeaux Weasley, parfois – alors même s'ils étaient deux, c'est vexant ! Et l'IRIS ... Bon sang, entrer là-bas, ça m'a fait comprendre que ... j'étais un gamin en matière de magie. Je sors major de promotion d'une excellente cuvée de Poudlard et je me suis rendu compte que je ne sais rien.
Irrité par son propre constat, il allongea le pas et faillit déraper sur un caillou. Je me dépêchai pour lui éviter une chute, mais à peine eut-il le temps de reprendre son équilibre qu'il se remit à dévaler la pente, sans cesser de déblatérer :
-C'est là que tu te rends compte que les personnes en face de toi, les Mangemorts, ce ne sont pas que des blaireaux qui le suivent par stupide adoration ou des brutes épaisses. Bellatrix Lestrange aussi était major de sa promotion, Robert Jugson était un rival de mon père quand ils étaient à Poudlard et Tommy lui-même ! Victoria, Tommy lui-même ne serait pas arrivé à ce niveau, même en magie noire, s'il n'avait pas été exceptionnellement brillant à la base !
Je fus honteuse de n'avoir retenu de cet exposé que Robert Jugson avait côtoyé Edgar Bones à l'école. Leurs liens remontaient à plus loin que je ne l'avais pensé ... Et si l'attaque meurtrière du 13 août avait été aussi politique que personnelle ? Je n'eus pas le temps d'y réfléchir d'avantage car Simon acheva de vider son sac :
-Alors quand je fais la somme de tout ça – ce que je suis actuellement capable de produire et ce qui m'attend en face – je suis capable d'arriver tout seul à la conclusion que non, je ne suis pas prêt. Si je me fais battre systématiquement par Lupin – sans le dénigrer – alors qu'est-ce que ce sera face à des hommes et des femmes qui n'auront aucune retenues, aucune pitié ? Et si je n'acquiers pas un savoir magique qui nous donne un avantage, alors en quoi je suis utile ?
Je restai muette quelques secondes, sonnée par la tirade que m'assénait Simon et que je n'avais pas vue venir. Puis je me mis à réfléchir au comportement de Lupin, qui s'était personnellement réservé Simon pour la plupart des séances de duel. Au début, je m'étais dit que c'était parce qu'il était celui au plus grand potentiel qu'il fallait le plus entraîner, mais je me souvenais du souvenir que Lupin avait de Simon élève : un garçon qui avait un peu trop confiance en ses capacités. En le confrontant à l'échec, il avait voulu le confronter en douceur à ses faiblesses, à ses limites. Et Simon avait fait le reste du cheminement seul ...
-Alors ... Qu'est-ce qui te dérange ?
Il me jeta un bref regard avant de pousser un profond soupir. Maintenant que les mots étaient crachés, ses épaules s'étaient affaissées.
-Vic', la magie que les Mangemorts vont utiliser, ce n'est pas de la magie scolaire, tu te doutes bien ...
-Oh Seigneur ... Tu vas devoir apprendre la magie noire ?
L'idée m'arracha un violent frisson qui fut couplée avec la moue dégoûtée qu'esquissa Simon, signe que l'idée même lui donnait la nausée.
-Apprendre, je ne crois pas. Mais au moins l'étudier, comprendre son fonctionnement ... Je ne suis pas à l'aise avec ça.
-Moi non plus je ne le serais pas mais ... comment on peut lutter si ne connait pas leurs armes ?
-Tu as posé le doigt sur le nœud du problème, Vicky.
Un sourire effleura mes lèvres et l'étreinte sur ma poitrine se desserra quelque peu. Je fus soulagée que mes boucles qui volaient autour de mon visage masque cette bonne humeur aussi surprenante que soudaine et nous descendîmes les derniers mètres dans un silence plus apaisé.
La pente cessa progressivement et nous pénétrâmes dans un bosquet fait de frêne et de saules pleureurs aux larmes de rouilles. Comme une enfant, je laissai mes pas soulever les feuilles mortes qu'emportait le vent. Puis brusquement alors que je donnais un franc coup de pied dans un tas plus haut que les autres, les feuilles s'élevèrent bien plus haut que la normale puis s'animèrent pour former un oiseau gracieux – un phénix ? Un faucon ? – qui étendit ses ailes en un froissement de feuilles et prit son envol. Ce faisant, l'enchantement cessa et les feuilles se déversèrent sur moi telle une pluie rousse et douce comme l'automne. J'éclatai d'un rire qui sonnait comme celui d'une petite fille en me tournant vivement vers Simon. Un léger sourire retroussait ses lèvres et il rangeait tranquillement sa baguette dans sa poche.
-Pas ta poche arrière, idiot, ris-je en retirant une feuille de ma capuche. Tu vas perdre une fesse.
-Toi, tu as trop côtoyé Maugrey. Attends, il t'en reste une dans les cheveux.
Sans me laisser le temps, il avança la main et passa les doigts dans mes boucles brunes pour en retirer quelques feuilles de rouille. Sans préambule, je sentis mes joues rosir devant l'éclat de ses prunelles qui avaient repris leur couleur naturelle, ce vert mousse qui m'évoquait le printemps et l'espoir. Je m'écartai d'un bond et achevai de débarrasser ma chevelure des feuilles, un sourire gêné aux lèvres.
-Bas les pattes ! Je n'ai pas l'intention de me retrouver avec les cheveux violets à nouveau ...
-Oh, l'automne me donne d'autres inspirations, plaisanta Simon avant de perdre subitement son sourire. Bon, tu es prête ?
Nous étions arrivés au pied d'une maison de belle proportion, cachée au milieu des arbres, son toit recouvert par un tapis aux couleurs de l'automne. Mon sourire se fana sur mes lèvres et mon cœur se serra à nouveau quand je me souvins de la raison de notre présence ici. Je hochai timidement la tête et Simon se chargea de frapper à la porte – après tout, lui était déjà venu plusieurs fois ...
La porte s'ouvrit sur une femme très élégante aux longs cheveux bruns qui ondulaient ses épaules et au regard serein. Ses iris grises me transpercèrent et le sourire qu'elle nous accorda me fit monter les larmes aux yeux.
Il y avait plus d'un an que je n'avais pas vu ces yeux et ce sourire.
-Je vous attendais plus tôt, nous accueillit Flavia Diggory. Je vous en prie, entrez !
***
Flavia n'avait visiblement pas pu résister à l'idée de nous enlacer, une fois à l'abri du froid et de la pluie qui commençait à tomber. Dans son étreinte, j'avais senti toute la douceur dont avait hérité Cédric et l'odeur de cannelle qui avait sans cesse flotter sur ses vêtements à Poudlard faillit m'arracher une larme. Jamais son fantôme ne m'avait paru plus vivace, d'autant que la maison était un mausolée en son honneur. Le salon donnait sur une immense baie-vitrée qui ouvrait sur le jardin arboré battu par la pluie et alors que Flavia nous servait le thé – « Mais Victoria préfère le chocolat », avait pris soin de préciser Simon avec le frémissement d'un sourire – je m'étais retrouvée à observer les photos de Cédric sur la cheminée. Une photo de lui sur un balai, une photo visiblement prise entre les branches de l'un de ces arbres, une photo avec ses parents en robe de soirée ... Simon préférait lui s'intéresser à la belle bibliothèque qui prenait tout en pan du mur opposé au jardin, pleine à craquer de livre qui avaient l'air bien plus ancien que ceux des Bones.
-Bon sang, souffla-t-il en passant le doigt sur la tranche de l'un d'entre eux. C'est un exemplaire original de L'abrégé des sortilèges communs et leur contre-attaques...
-C'est cela, confirma Flavia qui revenait avec le thé et mon chocolat, un léger sourire aux lèvres. Tu peux nous l'emprunter, si tu veux, il prend la poussière ici et Amos m'a appris que tu avais été admis à l'IRIS ... Félicitations. (Elle posa un regard désespéré sur l'immense bibliothèque). C'est tellement triste ... C'est tout ce qu'il reste de la bibliothèque des Diggory ... Vous savez, il y a très longtemps, du temps où leur sang était encore pur, c'était une grande famille ... Ils ont même donné un Ministre de la magie ... Mais les siècles ont passés, les clefs et l'argent ont changé de main ... Bon, ça m'a permis de me débarrasser de l'immonde tableau d'Eldritch Diggory, mais les livres, je n'arrive pas à m'y résoudre.
-Vous avez des problèmes d'argent ? demanda Simon avec prudence.
Je lui jetai un coup d'œil et songeai aux centaines de Gallions dont il avait hérité avec la mort de Barty Croupton et qui dormaient à présent dans un coffre à Gringrott. Mais Flavia balaya l'allégation d'un geste de la main.
-Oh, c'est fini ne t'en fait pas. Maintenant Amos travaille dur au Département de la Régulation des créatures Magique et j'ai pris un emploi dans la maison d'édition Les petit trolls rouges. J'ai toujours adoré les livres et ça me permet de m'occuper l'esprit ...
Son regard mélancolique se perdit du côté de la cheminée – du côté de son fils. L'espace d'un instant, son visage se creusa et je revis l'écho de la femme dévastée que j'avais aperçue ce soir-là, dans l'obscurité du stade. Puis son regard se tourna vers moi et un sourire fit disparaître toute la douleur de ses traits.
-Je te trouve changée, Victoria ... Amos m'a dit que tu avais été prise dans une équipe de réserve, c'est vrai ?
-Oh, oui ... Chez les Tornades, comme gardienne.
Ma gorge se serra. J'aurais aimé lui dire à quel point Cédric avait pesé dans ma trajectoire, que sans lui jamais je n'aurais pu arriver à ce poste mais les mots refusaient de franchir mes lèvres. Et surtout, je préférais garder un sourire sur le visage de Flavia. Néanmoins, celui-ci se teinta quelque peu de nostalgie.
-Il disait que tu étais très douée ... Et il s'est rarement trompé. Ce qu'il pouvait être clairvoyant ...
Simon se détourna et leva le visage, si bien que je soupçonnais fort que les larmes lui étaient montées aux yeux. Ses poings s'étaient crispés. Je refoulai ma propre émotion d'un battement de cil et m'enquis du bout des lèvres :
-Mrs. Diggory ...
-Flavia, murmura-t-elle, consciente de notre trouble. Les enfants, ce sera toujours Flavia pour vous.
-Flavia ... Est-ce ... est-ce qu'on pourrait le voir ?
Son sourire se fit entendu et elle hocha doucement la tête. Elle nous expliqua en deux mots le chemin et nous nous précipitâmes dehors malgré la pluie et le vent. Malgré son regard étincelant d'émotion, Simon eut la présence d'esprit de lever la baguette et un voile transparent et chatoyant se déploya au-dessus de nous pour protéger des intempéries. En silence, nous suivîmes les indications de Flavia jusqu'à arriver à un espace délimité par des grilles en fer forgée et un portail aux arabesques sophistiquées, sans doute vestige d'un temps où les Diggory étaient une famille qui méritait tous les ornements.
Je la poussai pour entrer devant le cimetière qui nous confirma l'histoire de la famille : les premières tombes étaient imposantes, surmontée des statues de ses occupants qui nous fixaient de haut avec leurs yeux aveugles, leur gloire recouverte du lichen qu'apportait l'oubli. Puis nous avancions dans l'allée, plus les pierres étaient modestes : les statues furent remplacées par des portraits puis la dalle de marbre fut mise à nue. Les parents d'Amos Diggory ne disposaient que d'une stèle, mais ce n'avait pas été assez pour son fils.
Cédric avait eu le droit au plus beau marbre, d'une couleur charbon qui n'était pas censé rappelé le noir de la maison Poufsouffle sur lequel s'étalait le jaune des lettres d'or. Mon souffle se bloqua dans ma gorge alors que je lisais ce qui était gravé :
Cédric Diggory
13 octobre 1977 - 24 juin 1995
La terre te cache mais mon cœur te voit toujours
Instinctivement, je me rapprochais de Simon et il passa naturellement un bras derrière mon dos avant que sa main ne se referme sur mon bras valide. Nous n'avions pas pu accompagner notre ami dans son dernier voyage : au moment de la mise en terre, nous étions coincés à Poudlard avec notre écrasante douleur. Maintenant que je me retrouvais devant sa tombe, tout ce que j'avais appris depuis résonnait dans mon esprit pour planter des lames piquantes dans mon cœur. Comment il avait atteint le centre du labyrinthe avec Harry. Comment ils avaient pensé apporter le trophée à Poudlard en remportant tous les deux le Tournoi. Comment leurs illusions s'étaient brisées dans un cimetière ... comment sa vie avait été fauchée par un hasard.
-Tu te souviens de ce que Dumbledore a dit ?
Je fis un effort pour lever les yeux sur Simon. Il n'avait pas desserré l'étreinte sur mon bras mais son autre main s'était infléchie, nous livrant quelque peu à la pluie qui paraissait néanmoins s'apaiser. Ses yeux luisaient mais il n'avait laissé échapper aucune larme.
-Quand ?
-Au banquet de fin d'année. Après ... après sa mort. « Souvenez-vous de Cédric. Si, un jour, vous avez à choisir entre le bien et la facilité, souvenez-vous de ce qui est arrivé à un garçon qui était bon, fraternel et courageux, simplement parce qu'il a croisé le chemin de Lord Voldemort. Souvenez-vous de Cédric Diggory. »
La phrase, dit sur un ton très bas, comme une prière, était tant chargé de symbole et d'émotion que je l'en laissais échapper une larme. J'avais oublié ces mots, mais la façon dont Simon s'en souvenait mot pour mot me frappa. Je me demandais à quel point ils avaient pesé dans sa décision d'entrer dans l'Ordre ... La prise de Simon se raffermit sur moi et je sentis sa joue s'appuyer contre mes cheveux alors que je me laissai aller contre lui.
-Et très clairement, Vicky, nous on n'a pas choisi la facilité ...
J'essuyai un petit rire et j'essuyais passivement une larme qui avait roulé le nom de mon nez.
-Seigneur, qu'est-ce qu'il dirait s'il nous voyait ...
-Il dirait que vous n'êtes pas en train de vous frapper.
Nous sursautâmes et je plongeai la main dans la poche de la cape pour agripper ma baguette. Tel un ange émergeant du chaos, Emily venait d'apparaître entre les tombes, ses cheveux blonds encadrant son visage de porcelaine, un sourire mélancolique aux lèvres. Elle aussi avait déployé un parapluie magique au-dessus de sa tête et elle serait contre son sein un bouquet de fleur jaunes et noires en l'honneur des couleurs que Cédric avait porté si haut ... Son sourire s'accentua lorsqu'elle remarqua notre surprise puis notre émotion.
-Et que ça, c'est étrangement anormal. Mais au moins, il a réussi l'impensable ...
Je ne cherchais même pas à vérifier si elle était bien elle, peu m'importait : je lâchai ma baguette dans ma poche et me précipitai vers mon amie pour l'enlacer. Elle me rendit mon étreinte de ses deux bras, et laissa le ciel déverser ses larmes sur nous.
-Merci ...
-Oh, Vic' ...
Elle me prit à bout de bras et me sourit. Un sourire encore retenu, réticent, mais qui sonnait comme une évidence : notre amitié n'était pas morte. La tombe de Cédric n'était pas la sienne. Puis, elle se tourna vers Simon et ils s'observèrent quelques secondes en silence, avant qu'Emily ne décide de faire le premier pas et d'étreindre celui qui avait été le premier son meilleur ami. L'espace d'une seconde, je vis Simon se raidir dans ses bras avant que ses épaules ne s'affaissent et qu'il s'abandonne à elle. Emily avait toujours été l'une des rares, avec Susan, de qui il acceptait les marques de tendresse. Sans doute parce qu'elle avait eu sept ans pour l'apprivoiser.
-Oh, Simon ... Je suis désolée ...
Simon cligna des yeux avant de baisser le regard sur elle.
-Répète-moi ça ?
Aussi vive qu'une chatte, elle fit un bond en arrière et lui donna une tape sèche sur le torse avec une énergie vindicative qui lui ressemblait déjà plus.
-Ne pousse pas le bouchon, Sim' ! Tu sais déjà ce que ça me coûte de venir ici, après tout ce temps ? Et de prononcer ces phrases ?!
Simon haussa les sourcils.
-Et tu es vraiment en train de hurler devant la tombe de Cédric ?
La réprimande parut couper court à toutes les belles protestations d'Emily, qui s'empourpra furieusement malgré le sourire ouvertement cynique de Simon. Elle lui jeta une œillade assassine.
-C'est de ta faute.
-Depuis le temps que je te le dis que c'est toujours sa faute. (Je levai le regard vers les cieux, vers celui qui, je l'espérais de tout mon cœur, nous observait depuis les étoiles, un sourire ému aux lèvres). Tu as entendu, même Em' le dit !
-Et même depuis l'au-delà, tu le prends à parti ...
Nous essuyâmes un rire tremblant, entre hilarité, nostalgie et sanglot. Simon passa un bras autour des épaules d'Emily et Emily un autour de ma taille. Le fier étendard de Poufsouffle, les couleurs pour lesquelles il avait donné la vie, trônaient fièrement au milieu de la pierre tombale et à mes oreilles, le vent apportait comme un son, des brides de phrases, les échos d'un rire qui depuis les cieux m'apportait la chaleur qu'il avait émané de lui de son vivant.
-Joyeux anniversaire, Cédric ...
***
Voilà j'espère que le chapitre vous aura plu ! Moi en tout cas j'ai adoré l'écrire, surtout la dernière partie (et j'écris ça en écoutant Octobre du coup ... Quelle nostalgie cette chanson, elle va vraiment bien avec le moment).
A dans deux semaines <3
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