II - Chapitre 10 : Jour de match


Bonjour à tous ! Je poste deux jours en avance parce que j'ai un week-end très très chargé, mais je ne suis pas sûre que ça vous déplaise ! 

Allez, le grand retour triomphal du Quidditch dans O&P, j'espère que ce sera à la hauteur de vos attentes ahah 

En parlant du Quidditch, je vais devoir un peu modifié les scores par rapport au livre (même si là il n'était pas précisé pour le match entre Serdaigle et Poufsouffle). 

BONNE LECTURE ! 


Chapitre 10 : Jour de match.

-Bonne chance Vic' !

-On se retrouve après le match, Bennett ? Petite fête dans les cuisines ?

-Davies va t'envoyer à travers tes buts !

-Les écoute pas Victoria, tu vas gérer !

J'adressai un sourire presque reconnaissant à Isabel McDougal, qui me défendait de ses camarades de Serdaigle en m'adressant un signe engageant de la main. Même la petite Cora Bletchley, malgré sa cravate aux couleurs azurs et cuivres, insista pour frapper sa paume contre la mienne. Malgré ses marques d'encouragement, ce fut le ventre en vrac que je m'assis sur la table presque déserte de Poufsouffle. Il était sept heures et demi du matin, et seuls quelques élèves, notamment des fans de Quidditch, étaient déjà descendus. J'avais passé une nuit presque blanche, écrasée par l'échéance du match qui se rapprochait de minute en minute. J'avais pris le temps de réveiller chacun de mes joueurs et notamment Aaron, qui appréhendait réellement son premier match et avec lequel j'avais longuement parlé la veille pour qu'il se détende.

Mais j'aurais aimé avoir quelqu'un moi aussi pour me détendre.

Je frottai mes yeux, pressant mes paumes contre mes paupières à m'en brûler les globes, tentant de chasser la fatigue qui menaçait d'emplir mon cerveau et mes muscles. A contrecœur, je me servis un café, espérant que les saveurs fortes et amères dissiperaient la brume et que sa chaleur dénouerait mes entrailles. Emily fut l'une des premières à me rejoindre, baillant à s'en décrocher la mâchoire, suivie de Judy et Kenneth qui s'installèrent non loin l'un en face de l'autre. Je me servis un chocolat en leur adressant un sourire que je savais peu rassurant, alors que Kenneth se servait déjà en œuf brouillé et en bacon.

-Tu as l'air malade, s'inquiéta Emily devant mon mutisme. Tu es sûre que ça va ?

Je lui jetai un regard noir par-dessus mon bol de chocolat chaud. Non, ça n'allait pas. Mes entrailles formaient un nœud informe et douloureux au creux de mon estomac, le plafond magique déversait toujours ses flocons, et pire que tout, je me rendais maintenant compte que je n'avais même pas envie de boire mon chocolat. Emily posa sa main sur la mienne.

-Ça ira, Victoria, ce n'est qu'un match ...

Mais je la fusillai à nouveau du regard et elle et sa main rassurante battirent en retraite. Le match de la confrontation contre Serdaigle avait fini par arriver et j'étais descendue en tenue, mes doigts tremblants crispés sur mon balai, les yeux rendus rouges par la nuit infernale que j'avais passée. Je passai ma paume sur ma robe de Quidditch pour en atténuer la moiteur.

Ce n'était pas qu'un match. C'était mon premier en tant que Capitaine.

Et surtout, c'était mon premier sans Cédric.

Emily paraissait comprendre ce qu'il n'allait pas, parce que je sentais le nom de notre ami transpirer dans son inquiétude, sans qu'elle ne l'ait prononcé une seule fois. Miles l'avait fait lorsque je l'avais croisé dans le Hall en arrivant, mais il avait abandonné l'idée lorsque des larmes s'étaient accumulées à mes yeux. Impuissant, il avait songé que le chocolat me remonterait le moral et m'avait conduit à la table des Poufsouffle pour me forcer à y prendre mon petit-déjeuner alors que j'aurais plutôt voulu m'isoler dans le vestiaire. Mais j'étais incapable d'avaler quoique soit. Pourtant non loin, Kenneth engloutissait des tonnes astronomiques de nourriture sous les yeux incrédules de Judy, et Smith donnait sereinement ses dernières recommandations à Owen et Evelyn – ce qui n'était pas pour me calmer. Je me pris la tête entre les mains, les coudes posés de chaque côté de mon bol et le regard rivé sur le liquide brunâtre qui tournait laconiquement sur lui-même. Angelina et Alicia passèrent me souhaiter bonne chance, mais je les entendis à peine, tétanisée par mon angoisse intérieure. Pourtant, tout devrait bien se passer. Kenneth et Judy étaient de bons Batteurs, et je me trouverais sans doute démunie sur mon but mais au moins nous marquerions beaucoup et aux derniers entrainements, Evelyn avait montré un certain talent pour les interceptions de souafles. Je devais avoir eu la préparation la plus sereine des quatre équipes, mais c'était plus fort que moi : à la veille de l'échéance, le fantôme de Cédric avait resurgi avec tant de force que j'en avais suffoqué, la poitrine écrasée par la douleur de la perte. Je fermai les yeux et expirer tout l'air de mes poumons, espérant extraire par ce geste tout ce stress néfaste. Après quelques minutes de l'exercice, mes entrailles s'étaient dénouées et je respirai mieux – mais je savais que le résultat ne serait que temporaire. Judy et Kenneth parurent le comprendre, car ils s'approchèrent pour parler avec moi de choses et d'autres, qui n'avaient rien à voir avec le Quidditch et qui me détendirent bien plus que l'inquiétude silencieuse d'Emily.

-Je n'ai toujours pas inaugurée ma batte, rappela Judy d'un ton joyeux. J'espère le faire sur la tête de Davies, j'ai toujours rêvé d'effacer son sourire de tombeur. Même en jouant au Quidditch, bon sang ! Ça me rappelle un petit peu Lokhart en un sens, vous vous souvenez ?

-« Cinq fois lauréats du « sourire le plus charmeur » décerné par Sorcière-Hebdo », cita Kenneth en imitant la voix de notre ancien professeur de Défense contre les Forces du Mal. C'est vrai qu'il y a quelque chose ...

-Oh par Merlin, lâcha Emily, horrifiée. Ne compare pas Roger à cet homme ... Ils n'ont rien à voir ...

-Et tu le sais parce que ... ? insinua Judy avec malice.

Les yeux d'Emily se levèrent au ciel d'un geste somptueusement dédaigneux et s'abstint de répondre en ingurgitant une lampée de thé. Kenneth et Judy échangèrent un regard complice qui me fit sourire.

-Cela dit, tu ferais bien de surveiller ton Sourire-Charmeur, poursuivit mon Batteur en balançant son pouce par-dessus son épaule. Il a l'air de faire son numéro à Chang ...

Nous nous retournâmes de façon peu discrète vers la porte où une partie de l'équipe de Serdaigle venait de faire son apparition. Roger était effectivement du nombre, tenant par l'épaule une Cho qui semblait triste et fragile dans ses bras, à l'inverse de son Capitaine qui souriant à tous avec un air qui, maintenant que Judy le disait, ressemblait à s'y méprendre à celui de Gilderoy Lokhart. Et j'ignorais si c'était cette constatation ou comment il tenait Cho par l'épaule qui provoqua l'étincelle de colère dans les yeux d'Emily, qui se retourna sèchement. Je dressai un sourcil et me penchai vers elle :

-Tu veux en parler ?

Elle poussa un grognement qui n'était ni une désapprobation, ni un consentement. Aaron se traina jusqu'à nous pour s'asseoir à côté de sa sœur, le teint légèrement verdâtre, mais une lueur déterminée dans le regard qui me plut assez. Quelque que soit sa peur de se retrouver sur son balai face à Cho Chang, reconnue comme étant une excellente attrapeuse, il tentait de le surmonter.

Peut-être que je devrais prendre exemple sur lui, moi.

Avec soulagement, je constatai que le petit-déjeuner m'avait fait du bien : voir mon équipe aussi énergique et sereine avait fini par déteindre sur mon humeur. Je réussis à avaler mon chocolat, quelques toasts et à éclater de rire après une imitation de Crabbe frappant un cognard de la part de Kenneth. Ce fut donc plus d'allant que je me levai, attrapant résolument mon balai avant d'asséner le manche sur la tête d'Aaron.

-Allez les mômes, en route.

-Tu oses nous appeler les mômes alors que tu es la plus petite de l'équipe ? plaisanta Kenneth en posant sa main à plat sur mon crâne.

-Aînée et Capitaine, rappelai-je néanmoins. Alors je pense que j'ai gagné le droit de vous traiter de môme. Smith ! (le poursuiveur, qui ne s'était toujours pas levé, m'adressa un regard ennuyé). J'ai dit on y va !

Fort heureusement, Evelyn et Owen avaient été plus réactifs et m'avaient vite rejoint, suivis du pas trainant de Smith. Je tapai dans les mains tendues de Susan et Hannah en passant et gratifia chaque personne qui nous encourageait d'un sourire assez gêné. Malgré tout, le nœud à l'estomac restait contracté – et j'espérais que monter sur un balai pourrait l'aider à se dénouer. Certains yeux brillaient d'espoir, l'espoir que la remontée de l'équipe qu'avait opéré Cédric n'était pas morte et que je poursuivrais son œuvre. Dans d'autres regards, c'était le nom de Cédric que je lisais en lettres capitales, et l'éclat déçu dans ces prunelles me faisait songer que je ne serais jamais à la hauteur de ce qu'il avait pu accomplir. Je quittais enfin la Grande Salle et les yeux angoissants des Poufsouffles sur moi, et dans ma fuite dans le Hall je heurtais de plein fouet quelqu'un qui arrivait en sens inverse.

-Vicky, bon sang !

-Simon ?

Simon me jeta un regard consterné à travers ses mèches folles qu'il n'avait pas pris le temps de coiffer et bailla à s'en décrocher la mâchoire avant de répondre :

-Non, le pape.

Je levai les yeux au ciel en m'écartant souplement, un sourire passant furtivement sur mes lèvres.

-Je ne suis même pas sûre que tu saches ce qu'est un pape, plaisantai-je.

-Euh. Le grand patron de ton père ?

-Pas vraiment, le grand patron de mon père c'est la reine et l'archevêque de Canterburry, mais passons. Qu'est-ce que tu fiches ici ?

Simon haussa un sourcil, visiblement surpris par la question abrupte.

-Bah il paraît que tu joues à onze heures non ?

C'était vrai, mais ça n'expliquait pas ce qu'il faisait là. Il n'avait jamais été grand amateur de Quidditch – tant et si bien que j'avais considéré comme miraculeux qu'Octavia arrive à l'amener à la Coupe du Monde l'été dernier. Il profitait des jours de match pour jouir du calme de la Salle Commune ou rattraper du sommeil en retard. Il n'assistait généralement qu'aux matchs de Poufsouffle, et uniquement parce que Cédric le menaçait de verser de la un flacon d'empestine dans son jus de citrouille tous les matins s'il ne faisait pas acte de présence. Mais Cédric n'était plus là, et je n'avais pas une seule fois implorer sa présence – d'autant plus qu'il avait encore des cernes violettes sous les yeux qui auraient exigées une matinée de repos. Je fis signe à Judy de partir en avant avec le reste de l'équipe et m'approchai de Simon :

-Tu peux retourner te coucher, tu sais. Tu n'aimes pas le Quidditch, et tu as une tête à faire peur.

-Je te remercie, railla Simon en passant une main dans ses épis blonds. Bah, de toute façon je suis réveillé. Autant que j'admire Davies te faire tomber de ton balai.

-Tu irais jusqu'à aller contre ta propre Maison pour me nuire ? me scandalisai-je en le frappant sèchement à la poitrine. Honte à toi, Simon Bones ! D'ailleurs, c'est quoi ton second prénom ? Ce genre de phrase, ça a plus de résonnance quand le nom est prononcé en entier.

-Comme « Victoria Anne Jadwiga Bennett, pitié ne tourne pas Poufsouffle en ridicule » ?

Cette fois j'usais de mon balai pour taper l'arrière de son crâne, ce qui lui arracha un glapissement et me valut un regard noir – réellement noir, car les cernes assombrissaient si fort ses yeux verts qu'ils paraissaient d'onyx.

-Finalement, tu as peut-être raison, marmonna-t-il en se frottant la tête. Que tu perdes ou que tu gagnes, tu me frapperas alors je ferais bien de fuir très loin.

-Tu es d'humeur susceptible, Bones. Qu'est-ce qui t'arrive ?

Un faible sourire retroussa les lèvres de Simon, et il s'étira tel le chat paresseux qu'il était la plupart du temps, quand ses obligations de préfet-en-chef et petit génie ne l'obligeait pas à devenir un bourreau de travail.

-Boh, la fatigue, Bennett, ne t'inquiète pas. D'ailleurs, tu peux parler de moi mais toi aussi t'as une sale tête. Tu n'as pas fermé l'œil de la nuit ?

Le ton était loin d'être moqueur, mais il ne véhiculait pas la même inquiétude affolante d'Emily. Et étrangement, ça m'apaisa. J'ignorais si c'était parce que c'était Simon, parce qu'il avait toujours fait parti de ma vie et que ces derniers temps qu'il n'y avait qu'à lui que je confiais mes angoisses, mais toutes mes peurs s'entremêlèrent bientôt dans ma bouche et je me retrouvai à rétorquer :

-Non, pas de la nuit ! Parce que Aaron a flippé toute la soirée parce qu'il pense qu'il ne sera jamais à la hauteur de Cédric et que tout Poufsouffle va le détester pour ça ! Et moi, moi ça m'a rappelé que oui, Cédric n'était pas là, qu'il ne serait pas là ce matin pour me prendre par la main et me dire que ce match va bien se passer, pas là pour faire le discourt d'avant-match : il était tellement fort pour mobiliser l'équipe, même Smith, tout le monde buvait de ses paroles ! Et à la place de Cédric, attrapeur de génie et Capitaine charismatique ils ont ça ! (je me désignai en ouvrant mes bras sur ma maigre silhouette qui rendait n'importe quelle robe de Quidditch trop grande pour moi). Je ne suis pas Cédric moi, je ne sais toujours pas ce que je vais bien pouvoir leur dire à cette causerie d'avant-match, je ne sais pas comment rassurer Aaron parce que j'ai exactement les mêmes peurs que lui et je n'ai aucune prise sur Smith : il porte tellement mes poursuiveurs vers l'attaque que peu importe le nombre d'arrêt que je ferais, je me prendrais une belle volée de but et je hais Smith pour ça !

-Oh oh, stop ! ordonna Simon en me prenant fermement par les épaules. Arrête Vicky, commence par respirer !

Je me mordis la lèvre inférieure et me rendis effectivement compte que ma voix était partie dans les aigus et que j'étais à bout de souffle après l'étalage de mes peines. Je fermai les yeux, les mains sur les tempes, et m'efforçai de prendre plusieurs inspirations et de tout cracher dans la foulé, jusqu'à la dernière parcelle d'air et d'angoisse. L'exercice porta ses fruits car mon ventre fut vidé du plomb qui l'alourdissait depuis des heures et que mes idées s'éclaircissant – donnant par la même un éclairage sur les dernières minutes qui me fit monter le rouge aux joues. Je poussai un gémissement de lamentation, et me laisser aller mon front contre l'épaule de Simon, agrippant un pan de sa cape avec un certain désespoir.

-Tu parles d'un Capitaine ...

Je remarquai que Simon s'était tendu à mon contact, pourtant je ne bougeai pas d'un pouce : j'avais besoin de m'appuyer sur quelqu'un. Physiquement comme moralement. Et depuis cet été, c'était Simon qui tenait ce rôle. Ça aurait peut-être dû me surprendre, mais en définitive assez peu. Quand après la mort de Cédric nous avions tenté d'extirper la haine de nos relations, il s'était avéré qu'il nous restait ça : une sorte de soutien indéfectible qu'on pourrait trouver, comme une certitude que quoiqu'il se passe dans nos vies, l'un sera toujours là pour l'autre. Et il me le confirma en frictionnant mon dos, avec des gestes maladroits mais qui avaient pour mérite d'exister.

-Evidemment que tu n'es pas Cédric. Ça me semble évident, il y a quand même une petite différence de taille. (J'étouffai un rire) Après ça ne change rien au fait que tu es Capitaine. Tu auras beau te lamenter pendant des heures que tu n'es pas Cédric, ça ne changera rien à ce qui t'attend, à ce que tu dois faire, non ? Tirer les oreilles de Smith, te mettre devant tes buts et gagner le match.

-Si c'était si simple ...

-Je n'ai jamais dit que ça l'était, convint Simon avec une certaine douceur dans la voix. Pour ça il faut extirper Cédric de ton esprit, et je sais que c'est sans doute ce qu'il y a de plus difficile ... Mais essaie. C'est le premier match, ton premier sans Cédric et en tant que Capitaine, en soi je comprends que tu appréhendes ... Mais c'est comme toutes les premières fois : elles seront douloureuses, mais elles vont passer. Quand tu es remontée sur un balai, quand j'ai dormi dans ma chambre ... C'est dur de mettre un pas dedans, mais une fois qu'il est mis on avance. Alors concentre-toi sur le souafle, fais un maximum d'arrêt ... Essaie de ne penser qu'à ton jeu, et le reste découlera. Enfin, je suppose je n'y connais rien au Quidditch.

Un nouveau rire me secoua, avant de mourir étranglé dans ma poitrine. Les mots de Simon résonnaient comme ceux que j'avais dû lui prononcer pour qu'il daigne enfin dormir dans sa chambre – mais Seigneur, ce que c'était dur d'appliquer ses propres conseils. Surtout lorsqu'ils devaient être appliqués sous les yeux du tout-Poudlard. Je fermai les yeux, pressant un peu plus mon front contre son épaule. Mon dieu, il était devenu si grand que je lui arrivais à l'épaule, constatai-je soudainement, quelque peu horrifiée.

-Bones ? Il faut que tu arrêtes de grandir. Non, vraiment, je préférais quand on faisait la même taille, tes oreilles étaient plus atteignables.

-J'ai toujours été un peu plus grand que toi, rappela Simon avant de planter un index ferme sur le sommet de mon crâne et de me repousser gentiment. Et toi tu empiètes sur mon intimité, Bennett.

-On a dormi dans le même lit, je te rappelle, plaisantai-je avec plus d'entrain. Alors je suis déjà entrée plus que ça dans ton intimité ...

Les joues de Simon prirent une délicate teinte rosée. J'avais vite remarqué qu'il était embarrassé de cette fois où j'avais dû l'accompagner pour qu'il s'endorme – m'endormant d'un même élan dans son lit – et nous n'en avions que peu reparler.

-Oui bon, ce n'est qu'une étape malheureuse de notre histoire.

-Plus malheureuse que la fois où tu m'as poursuivie avec le cadavre d'un rat mort ?

Simon haussa des sourcils incrédules et se pointa de l'index.

-J'ai fait ça, moi ?

-On avait sept ans, me souvins-je en fronçant du nez au souvenir du cadavre que Simon avait découvert dans les champs et qu'il tenait par la queue pour effrayer les demoiselles farouches – effroi qui avait si peu marché sur moi qu'il avait coursé dans Terre-en-Landes avec. Bon, peut-être un peu plus jeunes ... Mais oui, je te jure que tu as fait ça.

Il fronça les sourcils, cherchant sans doute dans sa mémoire le jour où il avait bien pu faire une telle idiotie. Il finit par hausser les épaules, vaincu et m'adressa un triste sourire.

-Bah, laisse tomber Vicky. La plupart des étapes de notre histoire sont malheureuses.

-Quelle joyeuse conclusion ...

-Mais cela dit, si je n'ai pas réussi à t'effrayer avec un rat mort quand on avait six ans, ce n'est pas la perceptive d'un match dans un sport que tu adores qui devrais te faire peur.

Il me planta là, avec un dernier sourire qui avait repris du sarcasme habituel, et s'engouffra dans la Grande Salle en sifflotant gaiement. Je restai un moment immobile, sans réellement savoir que faire ni penser, avant de constater que le match commençait dans moins d'une heure et qu'à ma grande surprise, mes entrailles semblaient dénouées. Serrant mon balai contre moi, je fis volte-face vers le parc et courus à perdre haleine vers le stade, espérant que mes doutes et mes peurs resteraient dans le Hall où je les avais jetés à la face de Simon.

***

Je ne m'étais pas trop mal débrouillée pour le discours d'avant-match, si j'en jugeais par le sourire de Kenneth et Judy, l'éclat d'appréciation dans les yeux d'Evelyn et Aaron, et le hochement de tête déterminé de Smith, si bien que, contre toute attente, j'arrivais presque sereine dans le tunnel qui menait au terrain, en tête de file et l'insigne de Capitaine soigneusement épinglé sur ma robe. Les Serdaigles étaient déjà installés, attendant avec une certaine tension l'arrivée de Madame Bibine et les onze heures annonçant le début du match. En queue de groupe, Cho regardait le mur en face d'elle d'un œil vide, et lorsque je tentais de lui adresser un sourire d'encouragement, je vis ses yeux s'emplir de larme et elle détourna le regard. Ce fut donc assez mortifiée que j'arrivai devant Roger, juste devant les portes de bois qui donnaient sur le terrain. Malgré tout une petite partie de moi ne pouvait s'empêcher de songer : « au moins, Aaron a une chance d'attraper le Vif d'Or ». Et si j'en jugeai par l'œil critique que Roger jetait sur son attrapeuse, c'était également sa crainte. Il me servit un sourire – ce fameux « sourire charmeur » à la Lockart – qui m'obligea à réprimer mon rire. Avant que nous n'ayons pu échanger le moindre mot, Madame Bibine remonta l'espace entre les deux files et faucha rudement nos coudes respectifs pour nous entrainer un peu à l'écart. Ses yeux jaunes se dardèrent sur nous avec une intensité qui me fit déglutir.

-Vous me connaissez, je tiens particulièrement au fair-play, entonna-t-elle de but-en-blanc. Je trouve que le sport ne peut être appréciable qu'avec et qu'une attitude déloyale fait perdre tout son intérêt et sa magie au Quidditch.

-Nous sommes entièrement d'accord, madame, assura Roger avec professionnalisme.

Mais les yeux de Bibine se plissèrent un peu plus.

-Si vous êtes d'accord, vous comprendrez donc que ma mise en garde soit plus vive qu'ordinaire, lorsqu'on voit ce qu'il s'est passé au dernier match entre Gryffondor et Serpentard. Des insultes lâches, une bagarre idiote et trois des meilleurs joueurs de cette école exclus à vie ! Vous trouvez que c'est du Quidditch ?

-Bien sûr que non, la rassurai-je, le cœur serré. Vous pouvez compter sur nous, Roger et moi n'entretenons qu'une saine rivalité.

Roger hocha vivement la tête pour m'appuyer. Bibine nous contempla encore un long moment avant d'acquiescer sèchement et nous ordonna de nous mettre en place. Un instant plus tard, les portes s'ouvraient et sans me laisser le temps de réaliser, je me trouvais propulsée sur le terrain à la suite de l'arbitre, retrouvant l'incandescence du stade et les commentaires enthousiasmes de Lee Jordan :

-Et les deux équipes entrent sur le terrain ! Ah le professeur MGonagall adore que je commente les matchs où Gryffondor ne joue pas, c'est les seuls où je risque de ne pas m'emporter, pas vrai professeur ?

McGonagall s'abstint de répondre, mais je la vis lever les yeux au ciel avec un sourire qu'elle ne put masquer. Quelqu'un avait pensé à déblayer la neige sur le chemin que nous empruntions – et je lui en étais fort reconnaissante car le tapis qui recouvrait le reste du terrain m'arrivait presque aux genoux, à présent. De gros flocons continuaient à tomber mais ils étaient plus épars qu'en début de semaine et la visibilité était meilleure. Pour peu j'aurais considéré cela comme des conditions idéales.

-Avec le blanc, le Vif d'Or n'en ressortira que plus, lançai-je à Aaron lorsque nous nous immobilisâmes au niveau du rond central. Tu l'as remarqué aux entrainements, mais ce qui est vrai pour toi est aussi vrai pour Cho, alors ouvre l'œil, d'accord ?

-Normalement tu as un meilleur balai qu'elle, ajouta Smith en lorgnant le Brossdur 9 d'Aaron. Chang n'a qu'une Comète ...

-Mais elle a battu beaucoup d'excellents attrapeurs avec sa Comète, rappelai-je vertement, avant de sourire d'un air rassurant à mon attrapeur. Mais je suis sûre que tu peux lui tenir tête, tu te débrouillais très bien aux entrainements. Ça va aller ?

Aaron eut un bref hochement de tête : sans doute l'émotion menaçait-elle de le submerger si jamais il ouvrait la bouche. Je pressai brièvement son épaule pour lui donner du courage et le confiai à Judy pour prendre Smith à part :

-Sérieusement, quand vous n'avez pas le souafle, ne restez pas passifs. N'oublie pas que c'est aussi dans votre rôle de défendre.

-Capitaines ! appela Bibine, empêchant Smith de répondre. Serrez-vous la main !

Avec un dernier regard insistant pour mon poursuiveur, je rejoignis Bibine et Roger au centre du terrain. Le Capitaine de Serdaigle m'adressa un sourire qui se voulait plein d'assurance, mais ses yeux restaient sérieux et alerte. Même le grand Roger Davies paraissait avoir un certain tract. Je retirais mes gants de gardienne pour lui tendre la main.

-Allez Davies. Sans rancune si je gagne.

-Promis, je t'apporterais des mouchoirs en Etude des Moldus, plaisanta-t-il en serrant ma main. Bon courage, Bennett.

Bibine parut satisfaite de notre échange d'amabilité – qui contrastait avec le bras de fer chinois qu'avaient opéré Montague et Angelina – et se pencha pour prendre le souafle dans ses mains. Je remis mes gants en trottinant vers mes joueurs et reprit le balai que j'avais confié à Judy.

-Premier match, les enfants. Vous avez été tops aux entrainements, il n'y a pas de raison que vous ne le soyez pas ici. Bonne chance à tous et on se retrouve à la Salle Commune pour fêter notre victoire.

L'équipe cria son approbation, levant son balai en signe d'encouragement, et chacun l'enfourcha pour retourner à son poste. Aaron s'éleva quelques mètres au-dessus de nous pour faire face à Cho Chang et je me mis en queue de formation pour vite voler vers mes buts une fois le souafle libéré. Le coup de sifflet retentit et je me dépêchai de voler à l'autre bout du terrain.

-Et c'est parti pour cette deuxième rencontre de la saison ! s'enthousiasma Lee Jordon depuis les hauteurs des tribunes. Avec deux équipes assez remaniées par rapport à il y a deux ans, mais ne vous en faites pas, j'ai fait mon travail et appris les noms des nouveaux joueurs par cœur ! C'est donc Bradley qui a récupéré le souafle, qui fait une passe à Davies, Davies qui évite la petite nouvelle de Poufsouffle Evelyn Shelby, il n'est pas attaqué, file vers les buts de Bennett et ... AHAH !

Roger avait tenté une feinte de corps pour me dépasser, mais j'avais étendu au maximum ma maigre carcasse pour capter le souafle entre mes mains sans trop d'effort. Pour une première frappe, il était faible et je pensais qu'il avait été troublé par l'échec de sa feinte – et donc pas assez appliqué dans le tir. Je lui adressai un sourire victorieux et il me jeta un regard noir.

-Laisse-moi le temps de m'échauffer, on en reparle dans dix minutes !

-Ce sera fini dans dix minutes Davies !

Je relançai le souafle à Evelyn, qui n'attendit pas son reste pour filer dans le camp adverse et combiner avec Owen.

-La première frappe de Serdaigle manquait de conviction et elle a été facilement capté par la gardienne et Capitaine de Poufsouffle Victoria Bennett. Personnellement, je m'étonne toujours qu'avec la puissance d'un tir, elle ne passe pas à travers l'anneau, comme quoi la taille ne fait pas la valeur ... Bon bref, maintenant c'est Poufsouffle qui est à l'attaque avec Owen Cadwallader, il passe en force entre Davies et Bradley et ... non ! C'est intercepté par Bradley, Bradley qui évite un cognard lancé par Summerby – quelle force, quelle femme cette Judy ! – il trouve Shelby sur son chemin et passe à Davies, Davies devant Bennett ...

Cette fois, Roger ne me laissa aucune chance et frappa droit dans l'anneau central un souafle que je touchai du bout des gants. Je frappai le manche de mon balai du poing alors que les exultations s'élevaient du côté de Serdaigle et que Roger me saluait d'un salut militaire. 10-0.

Je suis trop visible, pensai-je alors que Smith repartait avec le souafle en me lançant un regard brûlant. Mon principe c'est de me cacher, mais je l'ai oublié en travaillant aux entrainements ... Et en m'entrainant pour les autres et non pour moi-même, mais c'était la dure vie d'un Capitaine. Mais il fallait à présent que je me rattrape à quelque chose de plus connu et de plus efficace me concernant. Je baissai en altitude, zigzagant entre les poteaux, surveillant l'avancée du souafle à l'autre bout du terrain. Smith avait fait une chevauchée solitaire tout le long du terrain et parvint à égaliser d'une frappe puissante qui passa dans l'anneau latéral du gardien de Serdaigle. Je brandis discrètement le poing alors que les tribunes de Poufsouffle hurlaient leur joie. Je profitai de l'accalmie occasionnée par le but pour lever les yeux vers les attrapeurs, qui tournaient tels des vautours autour du terrain sans qu'aucun mouvement ne soit détecté. Puis les Serdaigles se retrouvèrent à nouveau en possession du souafles, et Roger tenta de me tromper en faisant une passe de dernière minute à Bradley, mais je surgis de sous les buts, les deux poings en l'air pour boxer le souafle que rattrapa Cadawaller pour partir en contre.

-Voilà Bennett, ça c'est des gestes qu'on aime voir ! approuva Jordan alors que les tribunes de Poufsouffle applaudissaient. Et c'est de nouveau Poufsouffle à l'attaque avec Cadawaller, qui passer à Shelby, Shelby qui évite le cognard d'un tonneau mais ah ! Elle semble étourdie, elle lâche le souafle et c'est Davies qui récupère pour partir en contre-attaque assez rapidement, Davies qui lance à Chambers, Chambers face à Bennett ... Où est Bennett ? Ah elle est là, elle bloque le souafle en surgissant du haut des buts, toujours 10 à 10 !

-Pressez un peu plus ! criai-je à Evelyn avant de lui jeter le souafle.

Evelyn acquiesça, mais la pratique fut plus laborieuse. Deux arrêts en deux minutes, j'ignorais si je pourrais tenir la cadence et la suite me le prouva : dans les dix minutes qui passèrent ensuite, j'arrêtai autant de souafle que j'en encaissai, ce qui porta le score de 50 à 30 en faveur de Serdaigle. Notre attaque était plutôt bonne quand elle avait le souafle en main, mais complétement passive quand il s'agissait de le récupérer et comme je m'y attendais je me retrouvais souvent livrée à moi-même quand un Serdaigle attaquait. La plupart du temps, Smith restait en arrière dans l'attente d'une contre-attaque qui ne venait jamais car Owen restait avec lui et Evelyn était trop tendre. Néanmoins cette situation m'agaçait autant qu'elle m'obligeait à me transcender et alors que Roger frappait dans l'anneau latéral, je me jetai de mon balai, une main sur le manche, l'autre sur la trajectoire pour botter le souafle en touche. Le frémissement qui monta dans les tribunes m'arracha un sourire, mais j'eus besoin de l'aide de Judy pour me remettre sur mon balai.

-Hey bien tu prends des risques, maugréa-t-elle une fois que je fus stable.

-Quel arrêt de Bennett ! hurla Jordon, extatique. Je savais que tu étais capable de faire des arrêts spectaculaires mais chaque match tu me scotches un peu plus ! On peut dire que tu n'as pas peur de la balle !

Je grimaçai. C'était vrai, mais mon exploit m'avait déchiré l'épaule et je demandai un temps mort, passablement agacée. Il fut accordé d'un coup de sifflet par Madame Bibine et les deux équipes piquèrent sur le sol. J'atterris à un endroit où la neige atteignait mes genoux, non loin de Smith et Owen qui discutait à voix basse. Un immense sourire fendit le visage du pousuiveur.

-Whao, bien joué ! Continue comme ça Capitaine !

Cette fois ce fut trop. Ignorant l'enthousiasme d'Owen et la douleur qui me lançait dans l'épaule après mon arrêt acrobatique, j'agrippai le col de Smith et tirai d'un coup sec pour le forcer à se mettre à ma hauteur.

-Je ne peux pas continuer comme ça, martelai-je en détachant chaque syllabe. C'est physiquement impossible, je vais finir par me blesser en voulant sauver un souafle, et vous finirez le match sans gardien ! (Je pointai l'équipe de Serdaigle qui parlementait plus loin). Dès qu'ils ont la balle, il faut que vous soyez dessus, que vous pressiez ! Grattez-leur le souafle, bon sang ! Je ne peux pas faire le boulot défensif seule, pas si on veut s'en sortir avec un minimum de buts encaissés ! (Je tirai un peu plus sur le col de Smith, ce qui lui arracha une grimace). Tu comprends ça ?

-Ça va, grogna-t-il en se dégageant. J'essaierais de faire des efforts ...

-Evelyn, rôde en dessous d'eux quand ils combinent, ajoutai-je pour la jeune fille. Et quand ils ont une passe ...

-J'intercepte, comprit Evelyn en hochant la tête. J'essaie, mais l'occasion ne s'est pas présentée ... Je ferais mieux.

J'opinai du chef, rassurée qu'elle comprenne ses erreurs et par la lueur déterminée dans son regard. Judy massait les épaules de son frère comme pour l'encourager, et Kenneth m'apprit que Bradley n'était pas particulièrement à l'aise quand le souafle lui arrivait dessus. « Imagine si un cognard le frôle », ajouta-t-il innocemment et Judy eut un sourire carnassier. Je levai le pouce en signe d'approbation et je pus enfin m'arracher à la neige pour remonter vers mes buts. Le froid avait commencé à m'engourdir les jambes et les mains, et je fis quelques tours autour de mes poteaux pour me réchauffer. La neige avait cessé, et le temps était plus clair. Si Aaron pouvait rapidement repérer le Vif d'Or ...

-Allez, un petit moment de mise au point entre les Capitaines et leurs joueurs ! reprit joyeusement Jordan. Il me semble que Bennett a salement remonté les bretelles de Smith – sache que si c'est le cas, je te déclare mon amour éternel, tu es une sainte de supporter ce type à longueur de saison ! Bref, le match reprend avec le souafle en possession des Poufsouffles, Smith qui s'élance, il évite Chambers qui fonçait sur lui, passe à Shelby, Shelby qui avance et ... SHELBY QUI MARQUE, 50 à 40 en faveur de Serdaigle !

Evelyn salua son premier but dans la partie – et dans sa carrière – avec des loopings parfaitement exécutées et le poing brandi en direction des Poufsouffles qui exultaient. Galvanisée par ce compteur qui se débloquait, son jeu s'améliora. Alors que Bradley filait en ma direction avec le souafle, un cognard lancé par Kenneth passa à un cheveu de son oreille et de terreur il lâcha la balle. Evelyn, qui attendait juste en dessous qu'une telle situation se présente, s'en empara et mena seule la contre-attaque pour égaliser, déchainant les supporters de Poufsouffles et Lee Jordan, qui après les nombreux refus d'Angelina Jonhson avait trouvé une nouvelle poursuiveuse à épouser. J'applaudis à l'autre bout du terrain, satisfaite de la réaction des joueurs et par le frisson qui suivit un instant plus tard :

-Ça bouge enfin du côté des attrapeurs ! s'égosilla Jordan en pointant le ciel. Summerby a repéré le Vif d'Or, il s'élance ! Chang réagit trop tard, elle est bien trop loin et honnêtement, une Comète contre un Brossedur faites le calcul ... Aaaaaaaah !

Un cri de déception déferla depuis les tribunes de Poufsouffle quand un cognard envoyé par Serdaigle arrêta net Aaron dans sa course. Cho tenta de poursuivre, mais dans la confusion le Vif d'Or s'était échappé et elle frappa le manche de son balai de son poing. Je ne pus retenir un grognement, mais j'applaudis Aaron quand il passa devant moi pour retourner sur les hauteurs. Il me sourit et se remit à tourner. J'observai un instant Cho, dont le vol était loin d'être assuré et qui collait Aaron de façon moins rigoureuse qu'elle ne le faisait d'accoutumée. Les commentaires exaltés de Lee m'arrachèrent à ma contemplation :

-Smith perd le souafle avec un contact avec Chambers – il n'y aurait pas un petit quelque chose ? Bon Madame Bibine dit que non, du coup Chambers passe à Davies, Davies qui donne immédiatement à Bradley, il s'avance ... Allez Vic', bloque-le et ... Ah non ! Ah non Madame Bibine ça, ça ne se fait pas !

Des cris d'indignation montèrent depuis les supporters de Serdaigles quand Owen déboula d'un côté pour foncer sur Bradley : le poursuiveur fut désarçonné et se rattrapa in extremis au manche de son balai alors que le souafle lâché était récupéré par Evelyn. Mais la jeune fille ne partit pas en contre : elle avait bien vu qu'il y avait eu une faute grossière sur Bradley et Madame Bibine le confirma un instant plus tard en sifflant un pénalty pour Serdaigle. Je rivai un regard furieux sur Owen.

-Quand je dis « presser », ce n'est pas au point de faire tomber les joueurs de leur balai ! râlai-je sur le ton de l'évidence.

-Il faut savoir ce que tu veux ! protesta Smith en venait se poster aux côtés d'Owen. Presser, mais trop ...

-Exactement ! Ça me semble évident que l'objectif n'est pas de commettre une faute dans la surface d'en-but ! Mais c'est trop subtil pour toi ?

Smith s'empourpra furieusement mais n'eut pas le temps de répondre car Bibine pour demanda de nous placer pour que Roger puisse tirer le pénalty. Je voyais le regard du Capitaine de Serdaigle pétiller d'ici, et cela fit gonfler mes veines de rages et d'adrénaline comme seul le sport pouvait le provoquer. Mon épaule était encore endolorie après l'arrêt miraculeux, mais j'ignorais la douleur pour fixer mon attention pour Roger, la façon dont ses yeux se posait sur chacun de mes buts, évaluant quel anneau il pourrait choisir au moment où il entama sa course. Je me mis à tournoyer entre mes buts et accélérai la cadence lorsque Roger s'approcha et tira. Un nouvel éclat de douleur traversa mon épaule quand j'étendis mes bras pour capter le souafle, mais la souffrance fut atténuée par l'immense soulagement lorsque je refermai mes gants sur la balle, à la grande frustration des Serdaigles et de Roger qui me jeta un énième regard noir.

-Et Bennett arrête le pénalty ! Quelle gardienne épatante, décidemment ! Et elle ne prend pas le temps de savourer que le souafle est déjà remis en jeu après une longue passe pour Smith, Smith qui passe à Shelby ...

J'avais peut-être sauvé ce but, mais l'équipe reprit bientôt son déséquilibre habituel : honteux d'avoir provoqué un pénalty, Owen n'osait plus défendre et ne faisait qu'attendre avec Smith les quelques souafles qu'Evelyn interceptait avec l'aide de Kenneth et Judy. Comme au début du match, pour chaque souafle que j'arrêtai, un passait dans mes buts et Serdaigle ne tarda pas à prendre son envol, malgré un nouvel arrêt spectaculaire où je me pendis à mon balai pour repousser le souafle des poings, la tête à l'envers et les jambes fermement croisées sur mon balai. Cet arrêt-là arracha des applaudissements qui retentirent dans tout le stade, y compris dans les rangs des Serdaigles. Mais ceux-ci pouvaient se permettre d'être bons joueurs car ils menaient de soixante points, au moment où la voix de Jordon s'emballa à nouveau :

-Nouvelle alerte « Vif d'Or » ! Cette fois il me semble que c'est Chang qui l'a repéré mais Summerby est juste en dessus, il gagne du terrain sur l'attrapeuse de Serdaigle ! Par Merlin, j'ai l'impression que la Comète de Chang tremble, c'est une hallucination ou vous le voyez aussi ?

Lee Jordan n'hallucinait pas : Cho tremblait si fort que ça réduisait la vitesse de son balai. La puissance de celui d'Aaron fit le reste et ils furent bientôt côte à côte, les mains tendus vers un minuscule point doré qui virevoltait désespérément pour leur échapper. Cho tenta un geste pour l'attraper, mais sa main était trop fébrile et elle le manqua à quelques centimètres. En revanche, Aaron fut plus ferme : il avança résolument la main et un instant plus tard, je le vis remonter en piquet, deux ailes d'argent dépassant de son poing fermé.

Mon cœur manqua un battement, et le stade explosa de jaune et de noir.

-Fantastique ! hurla Jordan en tentant de couvrir les cris de joie des Poufsouffles. Quelle autorité dans le geste d'Aaron Summerby qui attrape le Vif d'Or sous le nez de Cho Chang ! C'est Poufsouffle qui l'emporte dans cette partie, 220 à 140 mes amis ! Ils rejoignent Gryffondor en tête de classement – ce qui fait que le match de février sera déjà décisif !

Bientôt, les commentaires de Jordan se perdirent dans les cris de la foule. Cris qui pour ma parut furent recouvert par mon cœur qui battait sourdement et brusquement à mes tempes, assourdissant tout le reste. Instinctivement, j'effleurai l'insigne de Capitaine sur ma robe, incapable de croire que j'avais gagné mon premier match – et que je l'avais gagné sans que Cédric soit là pour me tenir la main. En contre-bas, Judy avait déjà posé pied à terre et se frayait un chemin dans la neige pour rejoindre son frère qui sautillait partout, le Vif d'Or toujours coincés dans son poing, sous les applaudissements d'Evelyn. J'aurais dû être heureuse, les rejoindre pour partager leur bonheur, et enfoncer le visage de Smith dans la neige. Mais je levai plutôt mon visage vers le ciel, l'offrant aux flocons qui avaient recommencés à se déverser, fixant un point à travers les nuages, passant outre l'éclat du soleil qui ternissait celui des étoiles et les masquait à notre vue, et pourtant c'était bien d'elles dont j'avais besoin. L'adrénaline se tarit dans mes veines et avec elle s'envola la couverture qui atténuait mes souffrances morales et physiques. Soudainement, tout m'assaillit avec plus de force et les larmes me montèrent aux yeux. Une s'échappa et alla se perdre sur ma joue, alors que je baisais mes doigts pour ensuite les lever vers le ciel, si tendu, comme si ça pouvait me permettre d'atteindre les étoiles cachées par le jour et les nuages.

Seulement alors quand le vent emporta mon baiser pour l'élever toujours plus haut vers son destinataire, je m'autorisai à incliner mon balai et descendre vers le terrain envahi par une partie de ma Maison. La fierté qui brillait dans leurs yeux répandit une chaleur agréable dans ma poitrine : l'orgueil de Poufsouffle insufflé par Cédric n'était pas mort. Je finis par atteindre un endroit déneigé et fut vite rejointe par Chourave, qui avait enfilé une paire de cache-oreille jaune et noire pour l'occasion. Son regard brillait quand elle me prit par le bras avec une douceur surprenante.

-C'était parfait, Bennett. Je savais que j'avais raison de vous faire confiance.

-Il n'y avait que vous qui le saviez, répliquai-je d'une voix enrouée par l'émotion.

Chourave m'adressa un sourire complice et me laissa entre les mains de mon équipe pour quelques instants de jouissances. Miles fut l'un des premiers à m'atteindre et me fit brièvement tournoyer avant qu'Emily ne me happe en plaquant un baiser sur ma joue. Mais ce fut en voyant Simon apparaître derrière eux qu'un éclat de rire franchit mes lèvres.

-Oh non c'est pas vrai, pas lui ! Comment Susan a-t-elle osé te laisser faire ça ?

Pour toute réponse, Simon agrippa deux pans de son immonde bonnet orange pour le fixer un peu plus sur sa tête, un léger sourire aux lèvres. Derrière lui, Susan écarta les bras en signe d'impuissance, mais son air radieux détrompait son soupir dépité. Je poussai un grognement de mécontentement et posai la pointe du manche de mon balai sur sa poitrine.

-Ça valait la peine de t'acheter un nouveau bonnet pour ton anniversaire !

-Tu as marqué « Minus » dessus, rappela Miles, qui m'avait aidé dans cette entreprise. Personnellement, je comprends qu'il ne le mette pas. Mais c'était une jolie attention ! ajouta-t-il précipitamment quand je le fusillai du regard.

-Bennett !

Je fis volte-face pour voir les jumeaux Weasley courir vers moi, Alicia et Angelina dans leur sillage. Les poursuiveuses et Miles se fixèrent en chien de faïence alors que George donnait dans mon épaule un coup qui en réveilla la douleur et m'arracha un gémissement.

-Ce n'était pas trop mal. Le coup du pendu, c'était peut-être un peu trop ...

-Oh fermez-la, elle a fait un super match, râla Angelina avant de me sourire. Hagrid nous a proposé de venir chez lui boire le thé, tu veux venir ? Je sais que tu préfèrerais sans doute fêter la victoire avec ton équipe mais ...

-Non, assurai-je en jetant un coup d'œil au garde-chasse qui nous faisait de grands signes. Non, un thé chez Hagrid, ça me va parfaitement. Euh. Vous venez ?

Je m'adressai à Miles, Emily, Simon et Susan, qui s'empressèrent d'acquiescer et je leur servis un sourire reconnaissant. Je n'avais pas envie d'une grande foule dans l'immédiat. Peut-être après, mais à l'instant, il fallait que je digère, que je me calme. Emily disparut un moment dans la foule pour réapparaitre avec un Roger Davies singulièrement contrarié qui grommela en parvenant à ma hauteur qu'il se vengerait en Etude des Runes mais que ça n'avait pas été trop mal. Je me laissai entrainer par la main de Miles qui tenait la mienne, les pitreries des jumeaux et les tentatives d'Emily de faire sortir Roger de sa bouderie. Susan avait sauté sur le dos de Simon car elle peinait à se frayer un chemin dans la neige, mais ils se retrouvèrent tout deux à terre quand Angelina les bouscula dans le but de les faire tomber. En réponse, Simon ensorcela la neige qui se constitua en boules qui poursuivirent Angelina sur la route qui menait à la maison du garde-chasse, sous les rires tonitruants de celui-ci. Je souris et entrai dans la maisonnette à la suite de Miles, jetant un ultime coup d'œil au stade de Quidditch qui se découpait au loin. 

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