I - Chapitre 22 : un drôle d'éclat
Yooo ! Comment vous allez? Le Bac s'est bien passé? Vous n'avez pas trop chaud ? (d'ailleurs, le Nord vous salue depuis ses 24º mouahahah).
Bon je poste aujourd'hui parce que demain je vais voir un match (quart de finale femme Italie Pays-Bas, et supporter les Bleues ce soir les gens, une place en demi est jeu !)
Bon, à partir de ce chapitre ça s'accélère un peu : c'est une partie que j'ai écris d'un seul tenant, donc peut-être que le rythme en a un peu pâti, je sais pas, je n'arrive pas à déterminer si c'est trop rapide ou non ... Bref, toujours est-il qu'on est au chapitre 21 et que la première partie en contient 25 donc ... Bref Bref Bref, bonne lecture !
Bon courage à ceux qui passent le Brevet lundi !
Chapitre 22 : Un drôle d'éclat.
Au final, nous avions passé presque toute la soirée dans la cuisine. A s'embrasser, à rire, à discuter avec certains elfes dont Dobby, qui s'était fait une joie durant toute la soirée de nous ravitailler en victuailles, café et chocolat. Puis il avait fallu quitter la douce quiétude de la cuisine, et après un dernier baiser devant les tonneaux dissimulant la Salle Commune de Poufsouffle, j'étais arrivée devant mes amis avec un sourire incroyablement niais, mais avec une caisse de bièraubeurre sur laquelle tous se focalisèrent. Mon anniversaire s'acheva ainsi, alors que j'étais assise entre Cédric et Susan, riant devant l'air blasé d'Emily face à la mièvrerie de Mathilda et Erwin, et fredonnant des musiques sur l'air que Simon jouait à la guitare. Une fois minuit passé et le passage au neuf mai signant la fin de mon anniversaire, Mathilda, Erwin et Susan allèrent se coucher, nous laissant à quatre. Ce fut pour l'ensemble l'une des meilleures soirées que je passai depuis la rentrée, surpassant le bal, et les soirées qui avaient suivis les tâches. Elle finit dans le lit d'Emily, où nous avions parlé jusqu'à une heure avancée de ma relation avec Miles, et d'autres sujets soit plus graves, soit plus légers avant que je ne m'endorme la tête la première quand elle se mit à rager sur Octavia McLairds.
La réalité nous happa dans les jours qui suivirent. Emily se plongea corps et âme dans la révision de sa Potion – cours qui n'avait fait qu'augmenter en intensité et difficulté – et je me retrouvai régulièrement à devoir faire mes traductions de runes avec Simon, qui avait dépassé son désamour du fait que je sois meilleure que lui dans une matière pour gagner du temps sur ses travaux. Cédric nous aider dans chacune de nos révisions, y mettant tout son cœur et l'énergie qu'il ne pouvait pas encore mettre dans la préparation de la troisième tâche. Cela avait pour mérite d'occuper son esprit et de tromper la pression. J'avais dû jeter un nouveau sortilège de Chauve-Furie à Gillian Fawley quand celle-ci s'était avancée pour s'enquérir des progrès de Cédric concernant la tâche. Et après que Warrington et Montague aient parié tout haut alors que nous révisions à la table d'à côté sur les chances de survie de Cédric sur la dernière épreuve, je les avais vu le lendemain entrer dans la Grande Salle avec les cheveux d'une vague couleur violette et une éruption d'acné si forte que j'eus l'impression qu'ils avaient un cas grave et fulgurant de varicelle que cela provoqua le rire général de la Grande Salle. Le sourire immensément satisfait de Simon quand Warrington s'emporta si fort face à un deuxième année de Serdaigle que McGonagall dut intervenir et enlevant quinze points à Serpentard me donna l'identité du lanceur de sort et je le gratifiai d'un discret pouce en l'air qui le fit sourire.
-Vous êtes adorable, me lança Cédric alors que nous sortions de Botanique. L'humiliation de Warrington et Montague avait vraiment quelque chose de jouissif ...
-Mais ? m'enquis-je en le sentant venir.
Emily et Simon s'étaient dépêché de sortir de la serre pour achever un devoir particulièrement houleux de Potion, et comme j'avais fini mon essaie sur l'Europe et le Royaume-Uni pour l'Etude des Moldus, je l'accompagnai dans notre Salle Commune. Nous comptions prendre nos balais pour faire une ballade ce qui me remplissait de joie car je n'avais plus enfourché de balai depuis notre rencontre amicale et la proposition de Viktor Krum concernant Vrasta. Cédric se passa une main à l'arrière de la nuque.
-Ça me touche, mais c'est embarrassant. Je fais de mon mieux pour paraître indifférent face à ça, d'être au dessus de tout ces ragots, et ces provocations. Alors ...
-Je comprends, ça fait mauvais genre qu'ils se retrouvent victime de sortilèges perdus, compris-je en sortant ma baguette car nous arrivions devant la Salle Commune.
Je tapais sur les tonneaux stratégiques au rythme habituel de « Helga Poufsouffle » et la porte pivota sur ses gongs. Le sourire maternel de la fondatrice de notre Maison nous accueillit avec chaleur, et nous nous dépêchâmes de nous munir de nos balais et de tenues plus malléables avant de sortir. Le temps n'était pas idéal : de lourd nuages tapissaient le ciel et un vent frai soufflait sur le terrain de Quidditch, et poussait vers nous des nuages bien plus noirs qui ne m'inspiraient rien. Je rassemblai mes boucles en une queue-de-cheval qui était bien moins courte que lors de notre première course. Je pouvais à présent faire entrer toutes mes mèches dans l'élastique sans qu'elles ne s'en échappent. Emily m'avait proposé de me couper les cheveux, mais j'avais assez peu confiance d'être à la pointe de sa baguette. Et elle n'était pas plus rassurante avec une paire de ciseau entre les mains.
-Cho aurait voulu venir, mais les BUSEs la stresse vraiment, commenta Cédric en évaluant les conditions météorologiques. Je te jure, elle a passé la semaine dernière enfermée dans la bibliothèque. Elle faisait l'ouverture et la fermeture, et a même séché son cours d'Histoire de la Magie pour pouvoir réviser la métamorphose.
-Honte à elle, répliquai-je. Et rassure là, même moi j'ai survécu aux BUSEs. Même les Weasley ont survécu aux BUSEs. Alors elle qui sait déjà quelles sont les cinq exceptions à la loi de Gamp ...
-Bien ... Elle rêve d'être médicomage alors je pense qu'elle ambitionne de ...
Je dressai un sourcil interloqué, et Cédric dut constater que mon regard s'était nettement refroidi. Ses joues rosirent d'embarras.
-Je veux dire, c'est une fille brillante, je pense qu'elle veut avoir que des Optimals et ...
-Tant mieux pour elle, grommelai-je en haussant les épaules. Tu l'aides un peu ?
-J'essaie. Mais ce n'est pas évident, elle dit que je la déconcentre ...
Son visage s'empourpra un peu plus et je poussai un gros soupir, oscillant entre l'attendrissement et l'agacement. Le premier finit par primer car je lui souris avec un air de défi.
-Bon, on y va ? C'est pas en parlant qu'on va se maintenir en forme pour la saison prochaine.
Cédric me répondit par un sourire soulagé et enfourcha son Nimbus 2001. La minute suivante nous étions à plusieurs mètres d'altitude, le vent fouettant notre visage, tutoyant les buts et la cime des gradins. Malheureusement, le bonheur fut de courte durée. Après trois courses effrénées où le balai de Cédric en avait remportée deux, la pluie s'était mise à tomber sur le stade. D'abord doucement, de telle sorte que je puisse égaliser d'une quatrième course étriquée, mais la cinquième fut avortée quand il commença à tomber des trombes d'eaux. Nous nous réfugiâmes dans le vestiaire, dans lequel il faisait un froid glacé et une humidité dérangeante. Malgré l'absence d'entrainement et d'activité dans l'enceinte, l'endroit était propre – les elfes devaient y veiller – et je m'écroulai sur un banc avec un soupir.
-Maudite pluie, grommela Cédric après avoir bu une gorgée d'eau.
-Oh ça aurait fait un temps dantesque pour un match. Mais pas franchement pour se détendre, effectivement.
-On va attendre un peu que ça se calme, proposa-t-il en s'essayant à mes côtés. Et si ça se calme pas ...
-On rentrera à Poudlard en balai. Ça ira plus vite.
Cédric partit d'un petit rire, et il bu une nouvelle gorgée d'eau. L'averse soudaine nous avait laissé trempé jusqu'aux os, mais ses joues gardaient la rougeur que l'effort leur avait donné. Je me dandinai, assez embarrassé. Il y avait une éternité que Cédric et moi ne nous étions pas retrouvés seuls. Les aléas d'un champion qui plus était investi dans une relation de couple : Cédric n'était jamais seul. Quand nous n'étions pas avec Simon et/ou Emily, quelqu'un d'autre prenait la place vacante. La nature avait horreur du vide, et c'était d'autant plus vu vrai quand il s'agissait de Cédric. Mais ces derniers temps, j'avouais volontiers que la situation ne me dérangeait pas : cela me permettait de cacher la relation avec Miles sans réellement culpabiliser. Nous sortions ensemble depuis presque trois semaines, et les marques commençaient doucement à se prendre. Bientôt, Cédric saurait la conteneur de la troisième tâche, et je n'aurais plus de raison de lui cacher. Et si j'avais évité la tempête Emily et les taquineries de Simon, j'avouais n'avoir aucune idée de comment pourrait bien réagir Cédric.
L'unique autre personne au courant avait été Susan, qui m'avait fait remarqué alors que nous travaillions toute deux sur l'une des tables de la Salle Commune que je passais beaucoup de temps avec Miles en ce moment. Le sourire coupable que je lui avais servi avait suffit à lui faire comprendre de quoi il en retournait. Mais Susan était tolérante et respectueuse. Cédric ne n'avait pas autant d'indulgence concernant les Serpentards.
-Et ça va avec Cho ? m'enquis-je, avant qu'il ne puisse poser la moindre question sur ma vie. Je veux dire, à part les BUSEs.
Un sourire s'étira sur les lèvres de Cédric. Le sourire tendre et comblé de celui qui était heureux dans son couple, et qui me donna en soi ma réponse.
-Oui. Oui, franchement, ça va. Je pensais pas ... Qu'une relation pourrait me rendre si content. En regardant Emily galérer avec les garçons et Simon subir Octavia, je me suis toujours dis qu'il n'y avait rien à gagner de bien dans le couple, que c'était juste une accumulation de problème, de concession et négociations que je n'avais aucune envie de faire. Je ne penserais pas que ce serait si simple. Enfin bien sûr qu'il faut faire des concessions mais ... au final quand on aime, c'est si naturel de les faire.
-Quand on aime ? Tu en es là ?
Cédric haussa les épaules.
-Oui, je pense. Je m'en suis rendue compte, sous le Lac ... (Ses traits se tendirent). Franchement, quand on te dit que c'est dans l'adversité que tout t'est révélé, c'est si vrai ... Quand il fait noir, que tu respires difficilement avec cette membrane qui te permet de te maintenir en vie, mais qui t'empêche de bien voir ... Il faisait noir, j'avais froid, si froid que je n'avais plus de sensation au bout de mes doigts et je me demandais toujours si je tenais encore ma baguette entre mes doigts. Et quand je suis arrivée à la statue, que j'ai vu les prisonniers, que j'ai vu Cho ... (Il se prit le visage entre les mains). Par Merlin, Vic'. J'ai cru mon cœur allait s'arrêter de battre. Pourvoir remonter avec elle, la voir respirer, ouvrir les yeux ... ça a été la meilleure sensation du monde.
-C'est pour ça que tu n'as pas attendu avec Harry ? Pour sauver Cho ?
Il me jeta un regard oblique, ses mains couvrant toujours sa bouche. Il nous avait fait le récit de la seconde tâche : comment après avoir galérer dans les méandres d'algues et de ruines marines, et vaincu un strangulot, il avait trouvé les prisonniers avec Harry veillant sur eux. Et il était remonté avec Cho. Mais cela ressemblait si peu à Cédric – de laisser Harry et les autres prisonniers abandonnés à leur sort – que j'avais été surprise sur le coup, mais je n'avais pas eu le temps de lui en faire part. Peut-être qu'à présent, ça s'expliquait.
-Oui, souffla-t-il, comme un affreux aveu. J'ai hésité jusqu'au bout, mais quand j'ai vu Cho pâle, si pâle, et avec les reflets verdâtres du lac ... Il fallait que je la sorte de là, Vic', et le plus vite que possible. Et le pire, c'est qu'une fois en haut j'ai à peine culpabilisé, même quand Harry ne remontait pas, même quand j'ai vu que Fleur avait abandonné et que ça sœur resterait accrochée à la statue. Tout ce qui comptait, c'était que Cho se réchauffe, qu'elle arrête de trembler, qu'elle me regarde, parce que ça m'avait tant effrayer de la voir les yeux fermés comme ... morte.
Il entrelaça ses doigts et serra ses mains l'une contre l'autre, comme si raconter ainsi la seconde tâche faisait remonter l'angoisse. Touchée par son émotion apparente, je posais une main rassurante sur son épaule et il me gratifia d'un pauvre sourire.
-On en est là, lâcha-t-il avec un peu d'amertume. Le grand Cédric Diggory si altruiste, si bon, complétement aveuglé par les bienfaits de l'amour.
-Arrête, lui intimai-je fermement, sentant dans ses propos une pointe de dépit. Tu es humain, Cédric, c'est normal que tu aies eu envie de t'extraire de là, toi et Cho le plus vite que possible. Harry n'est pas resté par simple altruisme : c'était deux de ces meilleurs amis qui étaient accrochés à cette statue. Il n'aura pas pris Donald s'il savait Hermione encore en danger.
-Je pense qu'il s'appelle Ronald, me corrigea Cédric avec un sourire amusé. Ron, en fait.
-Peu importe. Sur cette statue, il n'y avait que Cho qui t'importait. C'est elle qu'il fallait que tu mettes en sécurité et c'est ce que tu as fait. Tu n'as pas à t'en vouloir de ne pas être resté avec Harry. De toute manière ça n'aurait servi à rien.
Cédric garda le silence, le regard perdu quelque part sur le mur d'en face. La pluie martelait toujours violement les fenêtres, et chaque choc sur le toit résonnait si fort dans les vestiaires que nos voix avaient du mal à porter.
-Je lui ai dit que je l'aimais, ce jour là, me confia-t-il alors, si bas que je dus tendre l'oreille. Quand on est sorti et qu'elle m'a remercié de l'avoir sorti de là. Je lui ai dit que je n'allais pas laisser la fille que j'aime pourrir au fond du lac.
-Et comment elle a réagi ? demandai-je avec douceur.
Je n'avais pas l'impression que Cédric ait confié ça à quiconque. Chaque mot sortait de ces lèvres comme s'ils le brûlaient, avec la rapidité de ceux qui étaient resté enfermé trop longtemps. A qui aurait-il peu le faire ? Emily n'aimait ouvertement pas Cho, et Simon avait un certain mépris pour les relations niaiseuses. Un petit sourire gêné fleurit sur les lèvres de Cédric.
-Elle se blottit contre moi, et elle a dit qu'elle m'aimait aussi. Mais je pense aussi qu'elle n'était pas particulièrement sereine dans le lac, et qu'elle était très très soulagée que je la sorte de là.
-L'un n'empêche pas l'autre, fis-je valoir en tapotant son genou. Ravi que ce si plaisant Tournoi t'ait permis de trouver l'amour, Ced'.
-Oui, ricana-t-il. Oui, c'est au moins ça.
Il leva les yeux au ciel, vers la fenêtre sur le toit qui ruisselaient de pluie. Les nuages étaient moins menaçant mais l'averse ne paraissait que peu faiblir.
-C'est quand même un peu mieux, songea Cédric avec une moue. On tente ?
-Le premier arriver au Hall ?
-Ne cherche pas, Vic', ce sera moi.
Je souris d'un air mutin, et récupérai ma Comète que j'avais jetée dans un coin du vestiaire. J'ouvrais la porte pour faire face à un déluge qui, malgré les dires de Cédric, ne me paraissait pas moins vigoureux.
-Mouais, marmonnai-je, dubitative.
-OK, il pleut des cordes, admit Cédric en se positionnant derrière moi.
Mais il regardait la pluie tomber avec un léger sourire, une main posée sur mon épaule. Je levai un regard sceptique sur lui, et il me radoucit en jouant avec les boucles mouillées que contenait ma queue-de-cheval.
-Courage ma grande, on va s'en sortir. Et au fait ... (Il perdit son sourire pour planter son regard dans le mien). Ça reste entre nous, ce que je t'ai dit sur Cho ?
-Promis, assura-je en enfourchant mon balai. Allez champion, on se retrouve dans le Hall.
Là dessus, je donnai un grand coup de pied sur le sol et traversai le rideau de pluie qui tombait lourdement sur moi. Les gouttes heurtèrent ma cornée et m'embuèrent la vue, et je fis le trajet jusqu'au château dans un état second. J'évitai de justesse un groupe de Durmstrang qui remontait vers leur vaisseau, et je pourrai un gros soupir de soulagement quand la porte principale fut enfin en vue, et ne ressentis qu'une déception minime quand je vis la silhouette encapuchonnée de Cédric passer devant moi pour atterrir en tête dans le Hall.
-Même pas la moindre résistance, se moqua-t-il quand je le rejoignis, arrachant d'un geste la capuche gorgée d'eau qui ne protégeait plus rien.
-J'étais trop occupée à lutter contre la pluie, répliquai-je en frictionnant mes doigts engourdie le froid. Je vais aller prendre une bonne douche, là. Brûlante, la douche.
-Tu veux que je donne le mot de passe de celle des préfets ? me proposa chaleureusement Cédric.
-Non, je t'en prie vas-y. Ça te détendra.
Mais Cédric refusa d'un geste de main.
-Non, je dois vite rejoindre Cho à la bibliothèque. Elle a besoin d'aide pour la Potion ...
-Cédric !
Cédric grimaça face à moi, alors qu'une magnifique blonde arrivait dans son dos, un sourire enjôleur aux lèvres. Fleur Delacour posa une main sur son épaule avant de la retirer vivement, consternée.
-Mais tu es trempé ! (Elle posa le regard sur son balai, puis sur moi). Mais enfin Cédric jouer au Quidditch par ce temps c'est insensé !
-Mais ce que ça fait du bien, sourit Cédric en passant une main dans ses cheveux mouillés.
-Mais avec la troisième tâche qui se profile, ce n'est pas prudent, se récria Fleur en fronçant son joli nez. Et si tu tombais malade ?
-Ce n'est pas un rhume qui m'empêchera de te battre en juin, rétorqua tranquillement Cédric, avant de passer un bras derrière mes épaules. Je ne pense pas que tu connaisses mon amie Victoria ?
Les incroyables yeux bleus de Fleur Delacour se posèrent sur moi et je me sentis rougir furieusement. La comparaison était dure à tenir : elle, grande belle et gracieuse avec sa magnifique chevelure d'or et d'argent qu'elle avait ramené en une tresse adorable sur son épaule, et moi en tenue de Quidditch par ailleurs un peu grande pour moi, des mèches trempées que la course avait arraché à ma queue encadrant mon visage cramoisie. Pourtant la championne de Beauxbâton sourit et claqua ses deux joues contre les miennes en produisant chaque fois un bruit de baiser.
-On s'est rencontré à la seconde tâche, tu étais celle qui distribuait les couvertures ? se souvint-t-elle d'un ton affable, alors que je la fixai d'un air consterné.
-C'est ça, répondis-je par automatisme. Enchantée.
-C'est une super joueuse de Quidditch, alors on s'entraine ensemble pour ne pas se rouiller, expliqua Cédric, son bras toujours fermement enroulé autour de mes épaules. Viktor a même dit qu'il allait appuyer sa candidature pour la réserve de son futur club.
-Ça faisait longtemps, jurai-je tout bas, si bien que n'était pas sûr que Cédric ait entendu.
Mais le regard de Fleur m'effleura à nouveau, presque intrigué. Ses yeux étaient si inquisiteurs que je m'empressai de me justifier :
-Mais ce n'est pas quelque chose de sûr, je ne suis même pas sûr de vouloir faire carrière dans le Quidditch.
-Tu devrais, me lança doucement Cédric. Ce que Viktor t'a proposé, c'est une opportunité magnifique. Les Vautours sont l'une des meilleures équipes d'Europe.
-Enfin, faire carrière dans le Quidditch c'est risqué, répliqua Fleur l'air sceptique. Après le championnat de Grande-Bretagne est plus développé que celui de France. Chez nous, ça ne peut pas être une voie sérieuse. (Elle s'adressa un nouveau à Cédric avec un sourire enjôleur). Alors, tu as des idées pour la troisième tâche ? J'ai réfléchi avec Madame Maxime, on pense que ça pourrait être une sorte de chasse aux trésors. C'est quelque chose de complétement différent des autres épreuves, qui pourrait demander des compétences magiques, tactiques et intellectuelles.
-C'est possible, j'avoue que n'y réfléchis pas vraiment, avoua Cédric du bout des lèvres. Je préfère attendre la véritable épreuve, sinon je risque de m'éparpiller. Bon, on va te laisser ...
-On a une douche à prendre, enchéris-je alors un violent frisson me parcourait.
Fleur eut un sourire indulgent à l'égard de Cédric, et fit volte-face pour s'engouffrer dans la Grande Salle. Je profitais de sa disparition pour enfoncer mon coude dans ses côtes.
-Tu étais obligé d'en faire autant avec Vrasta ?
-Mais quoi ? rétorqua Cédric avec un grand sourire. Tu n'es pas fière ?
Non. Un peu. Je n'en savais rien : ça concernait mon avenir et tant que la question n'était urgente je ne voulais pas en entendre parler. Alors pour toute réponse, je me dressai sur la pointe des pieds et ébouriffai ses cheveux qui malgré la pluie étaient étonnement bien coiffé. Il voulut s'écarter souplement mais j'attaquai avec un pincement de côte qui lui arracha un glapissement et il tua ma rébellion en me jetant sur son épaule tel un sac de pomme-de-terre. Je protestai, riant à moitié et martelant son dos de mes poings.
-Cédric, lâche-moi !
-Pas question, tu vas m'attaquer ! Allez, direction la Salle Commune où je te donnerais en pâture à Simon !
***
Il fallut attendre quelques jours encore avant que le professeur Flitwick, à la fin du cours de Sortilège, presse Cédric de se rendre ce soir à vingt-et-une heure au terrain de Quidditch, où Ludo Verpey lui indiquerait la nature de la troisième tâche. Aussitôt, toute couleur avait déserté le visage de mon ami, et la rumeur des conversations avait enflé. Beaucoup à la sortie du cours donnèrent une tape dans le dos de Cédric, lui enjoignant de les tenir au courant ou lui souhaitant bonne chance.
-C'est sans doute la première fois qu'il m'adresse la parole et il croit que je vais lui donner des infos ? ragea Cédric en fusillant du regard la nuque de Grayson Hardley, un garçon de Serdaigle fort vaniteux.
-Ignore-les, lui conseilla Emily avant d'enrouler son bras autour du sien. Comment tu te sens ?
Cédric inspira profondément et relâcha toute la pression en un soupir.
-Après le combat contre un dragon et une épreuve effrayante sous le Lac ... J'avoue que je ne sais pas ce qu'ils peuvent encore nous inventer.
-L'idée de Fleur n'est pas idiote, songeai-je d'un ton prudent. Une chasse au trésor, ça pourrait amener des épreuves diversifiées, aussi intellectuelle que magique.
-On verra, trancha Simon. On va réviser ?
Lui aussi avait pâli de plusieurs teinte à l'annonce du rendez-vous avec Verpey, et ses tâches de rousseurs n'en apparaissaient que plus. Cédric opina du chef et ils partirent tout deux à grand pas, comme si cette retraite dans les révisions pouvait les préserver de l'échéance fatidique.
-Bon, on ferait mieux de faire un stocke de bièraubeurre pour qu'il rentrera de là, maugréa Emily.
-Avant il faut vraiment que je retravaille les métamorphoses corporelles, soupirai-je avec désespoir. Au dernier cours la seule chose que j'ai réussi à faire c'est mettre le feu à mes cheveux.
-Viens, on va s'entrainer à ça dans la chambre, me proposa Emily en m'entrainant vers notre Salle Commune. Ce sera plus tranquille qu'avec Simon qui se moquera et Cédric qui t'encouragera ...
J'acceptai l'échappatoire avec plaisir. Il était vrai que j'aurais voulu rester avec Cédric pour le soutenir avant ce soir, mais le cours de métamorphose de la matinée m'avait angoissé, et les examens se rapprochaient de jour en jour. Nous passâmes aux cuisines prendre à dîner, et nous installâmes devant les miroirs de nos penderies à tenter de colorer nos sourcils. Emily, qui avait réussi ce sort dès la seconde séance, révisait en même temps un chapitre de Potion, tout en supervisant mes efforts. Malgré sa promesse initiale de ne pas se moquer, elle éclata d'un franc rire quand je me retournai sur elle, dépitée, et ayant coloré une partie de ma joue d'une immense tâche rose veinée de violet. Au final, après avoir englouti deux sandwichs au rosbif, je réussis à teindre mon sourcil en jaune et Emily battit des mains.
-Bon je pensais plutôt au orange, commentai-je en observant le résultat. Mais c'est un début ?
-Un très bon début, me rassura Emily en pointant sa baguette sur mon sourcil pour lui rendre sa couleur initiale. Allez, on remonte, les garçons doivent être rentrer ...
-Ouais, et après je vais aller chercher un dessert aux cuisines. Je meurs encore de faim.
Cédric et Simon étaient installés sur l'un des canapés près de la cheminée. La plupart des élèves étaient partis manger, et la pièce était déserte, laissant un peu de tranquillité pour Cédric. Il était en discussion animée avec Simon, qui s'arrêta nette lorsqu'il nous vit émerger de notre dortoir. Simon nous toisa, et exhala un léger soupir en levant les yeux au ciel.
-On ne vous remercie pas de nous avoir lâcher.
-Je devais réviser les métamorphoses corporelles, et je ne voulais pas de tes sales commentaires, répliquai-je en ébouriffant ses épis.
-Et quoi, tu t'es fait poussée une moustache ?
-Exactement, du style Salvador Dali.
Je lui en fus presque reconnaissante de sourire, un sourire qui tranchait avec le regard perplexe qu'échangèrent Cédric et Emily. Lui au moins comprenait mes références, et ce que fut sans doute pour cela que je m'assis sur le bras de son fauteuil.
-C'est à quelle heure déjà ? demanda timidement Emily.
-Neuf, répondit succinctement Cédric, qui avait replié ces genoux contre sa poitrine dans une position enfantine quand nous étions arrivées.
-Au moins tu sauras, positiva-t-elle avec un sourire qui se voulait rassurant. Et là, tu sauras où tu vas on pourra commencer à travailler.
-Je crois que j'ai le tract, en fait, nous confia Cédric du bout des lèvres. Ce n'est même pas de la peur : après avoir survécu au Lac, au bal et aux dragons, je pense que je peux tout supporter. C'est juste ...
Il garda un instant le silence, et nous considéra tous un à un. Ce qu'il vit au fond de nos yeux dut le rassurer car il poursuivit :
-Je suis en tête du Tournoi, avec Harry. Tout le monde s'attend à ce que je gagne. Je suis plus âgé que Harry, j'ai plus d'expérience. Personne n'a confiance en Fleur pour remonter la pente, et je pense qu'il y a un certain désamour de Viktor, maintenant que je suis devant et puis c'est un garçon de Durmstrang ... Je suis le vainqueur idéal. Mon père n'arrête pas de m'envoyer des lettres à ce sujet. Dans sa dernière, il a dit qu'il avait fait de la place au dessus de la cheminée pour le trophée ...
-Quel boulet, aussi, marmonnai-je, arrachant un ricanement à Cédric.
-Oui c'est ce que j'aurais aimé lui répondre mais d'après les codes parentaux ça ne se fait pas.
-Pas d'après les miens, répliqua Emily avant de lui tapoter la main. Dès que ce Tournoi sera fini, n'oublie pas de lui dire qu'il a été un boulet.
J'opinai vigoureusement du chef, et Cédric eut un vague sourire. Emily prit doucement sa main, et la serra fermement.
-Ne prends pas ça trop au sérieux. Nous on s'en fichera totalement que tu perdes, ou non. On contraire, si tu trouves une façon comique de perdre, je m'engage solennellement à me moquer de toi jusqu'au reste de tes misérables jours.
-Amen ma sœur !
-Vous êtes horribles, commenta Simon, avec néanmoins un sourire amusé. Il pourrait gagner aussi.
-Et ça aussi on s'en moquera, enchéris-je malicieusement. Franchement qui aurait cru qu'un blaireau pareil pourrait gagner le Tournoi des Trois Sorciers ?
Cette fois, Cédric s'esclaffa franchement, entrainant avec lui Emily. Il leva les yeux vers la grande horloge de bois chaud qui ornait un coin de notre Salle Commune. L'aiguille des minutes était à présent proche de la demi, et Cédric amorça un mouvement pour se lever :
-Allez, c'est l'heure les enfants. Souhaitez-moi bonne chance.
-On t'attendra avec des bièraubeurre, promis Simon en désignant la caisse qui trainait près de son fauteuil. Dis-toi qu'au moins, quelque soit l'issue, c'est bientôt fini.
-Je t'accompagne, lançai-je en me levant à mon tour. Je dois aller chercher un dessert à la cuisine, je meurs de faim.
-Fais gaffe, bientôt ton balai ne pourra plus te soulever, me taquina Simon en pinçant mes côtés.
Je glapis en faisant un bond sur le côté, et m'échappai en rejoignant rapidement Cédric à la sortie de notre Salle Commune. Nous nous élançâmes dans les couloirs et une fois arrivée à la peinture qui dissimulait l'entrée de la cuisine. Nous échangeâmes un sourire gêné. Les mots furent inutiles, et je me contentais de l'enlacer brièvement. Je sentis dans l'étreinte que me rendit Cédric toute sa pression, toute son stresse, et ce fut en soufflant un gros soupir dans mon cou qu'il s'éloigna. Il ne se retourna pas une seule fois, sans doute pour se donner contenance et j'attendis qu'il tourne à l'angle avant d'entrer dans la cuisine. Dobby me prépara un assortiment de biscuit et de sablée et me donna le tout empaqueté avec nombre de sourire. Quand je sortis de la cuisine, je consultai la montre offerte par les Bones. Plus que vingt minutes, et Cédric saurait. Mon estomac se noua, et je doutais soudainement de ma capacité à enfourner ces sablés si soigneusement emballés par Dobby.
Par Merlin, que pourraient-ils bien inventé cette fois ?
Si plongée que je l'étais dans mes pensées, je ne vis pas l'élève émerger de l'angle du couloir, et le heurtait de bien fouet. J'eus à peine le temps de me remettre du choc que la personne face à moi m'attrapait fermement par les épaules :
-Hey bien, regarde en face de toi, Vic' !
-Miles ?
Je levai des yeux confus sur lui, et il releva un sourcil surpris.
-Qu'est-ce que tu fais ici ? m'enquis-je, étonnée de le voir si loin de la Salle Commune qui se trouvait au niveau d'en dessous, et dont l'entrée était à l'autre bout du château.
-Je n'ai pas mangé, j'avais un devoir de sortilège à rendre en retard. (Il désigna le paquet que j'avais toujours à la main). Dis-moi que c'est de la nourriture.
-Des gâteaux, l'éclairai-je en les lui tendant. A ta guise, je pense que finalement je ne vais pas les manger.
-Tu es sûre ? s'assura Miles en examinant le contenu. Il y en a au chocolat pourtant ...
J'opinai du chef avec un menu sourire, et les sourcils de Miles se froncèrent. Délaissant les gâteaux, il prit mon bras avec douceur.
-Ça ne va pas ? C'est à cause de cette histoire de troisième tâche ?
-Je pense, oui, avouai-je en haussant les épaules. Franchement les deux premières épreuves ont été éprouvantes et celle-ci est la finale. Je n'imagine même pas ce que ...
-Hey. (Sa main remonta jusqu'à mon visage, et il caressa ma joue de son pouce). Norbert Dragonneau disait que s'inquiéter, c'est souffrir deux fois, alors évite-toi cette peine, d'accord ? Tu veux qu'on aille faire un tour ?
J'hésitai un instant, avant d'accepter d'un hochement de tête. Oui, sans doute qu'une balade me ferait du bien, d'autant que le temps était plus clément que lors de notre séance de vol avec Cédric. Devant mon assentiment, Miles prit ma main, et je me laissais mener jusqu'au parc, puis jusque la lisère de la forêt. Je le laissai faire la conversation, me raconter sa journée, comment Gloria Flint avant humilier Warrington après que celui-ci ait soutenu que comme elle était une femme, elle était naturellement moins douée en magie, et que sa jeune sœur Cora, qui n'était pas encore à Poudlard, avant réussi à faire pousser un arbre dans sa chambre. Nous nous étions immobilisé face à la forêt, pas très loin de la cabane de Hagrid. Miles tenait toujours ma main dans la sienne, en caressant le dos de son pouce par intermittence en un contact qui m'apaisait. Le soleil disparaissaient lentement derrière les montagnes et jetait des derniers éclats rosés sur les rares nuages qui tapissaient le ciel. Mon regard vagabonda vers le terrain de Quidditch, dont seules les tours des gradins apparaissaient.
-C'est dommage que tu ne sois pas resté pendant les vacances, lançai-je en désignant du menton les gradins. On a fait un match amical, c'était sympa.
-J'en ai entendu parlé. Il paraît que même Krum y a participé ? Alors, il vole aussi bien que ne le dit la presse ?
-Mieux encore, évaluai-je, me souvenant que j'avais eu l'impression que Krum pourrait voler sans balai. Ah et ... Il a dit que je n'étais pas trop mauvaise, comme gardienne.
Miles me regarda un long moment, la commissure des lèvres relevées. Je rougis en comprenant dans ce très léger sourire qu'il était au courant de la proposition de Viktor Krum.
-Oui, répondit-t-il en secouant doucement la tête, sans me lâcher du regard. Et même un peu plus que ça, non ?
-Je déteste Poudlard, marmonnai-je en rougissant de plus belle. Et la façon dont les rumeurs se propagent plus vite qu'un rhume en plein hiver.
-Quelle comparaison élégante. Mais jusque là, ce n'était qu'une rumeur donc ... tu confirmes ?
Je grognai un assentiment vague en me laissant aller contre l'arbre derrière moi, les bras croisés sur mon ventre. Miles haussa les sourcils.
-Avec des mots ça donne quoi ?
-Que je n'ai pas trop envie d'en parler, maugréa-je. Mais oui, il m'a dit que j'étais assez talentueuse pour tenter ma chance pour la réserve des Vautours de Vrasta.
-Whao. J'ai toujours trouvé que tu étais une super gardienne – peut-être la meilleure de Poudlard à égalité avec moi – mais les Vautours ...
-Ils sont si bons que ça ?
-Huum ... tu suis le foot, toi ? Quelle est la meilleure équipe du monde en ce moment ?
-Euh ... Je crois que c'est l'AC Milan qui a gagné la Ligue des Champions cette année, et ils font encore une bonne saison donc ...
-Ouais, bah disons que les Vautours sont l'AC Milan du Quidditch. Enfin, ils sont moins bons ces dernières années, mais c'est un club mythique, ils ont des supporters partout en Europe ...
-Je vois.
Ça ne m'aidait pas franchement, alors je lui servis un pauvre sourire. Miles serra la main qu'il tenait toujours.
-Ça te fait une porte de sortie pour l'après-Poudlard. Ça ne te rassure pas ?
-Si, mentis-je avec un léger sourire. On peut parler d'autre chose, s'il te plait ?
C'était peut-être injuste pour Miles, mais cette question sur les Vautours m'embarrassait réellement. Tant que je le pouvais, cette question serait en suspend. Miles accepta d'un hochement de tête, et un silence s'installa à nouveau entre nous. Mon regard se fixa à nouveau vers le terrain de Quidditch, où Cédric devait être avec les autres champions. Il était vingt-et-une heure, à présent. Il devait savoir.
-J'ai toujours rêvé d'y entrer.
-Pardon ?
Déboussolée, je reportais mon attention sur Miles. Son regard était comme happé par les profondeurs de la forêt interdite, s'assombrissant comme pour s'accorder à sa noirceur.
-Là-dedans, m'apprit alors Miles d'un ton badin. Rien que le mot. « Interdite ». Quelle idée de l'appeler comme ça. Tu l'aurais appelé « la forêt des papillons », personne n'aurait jamais essayé d'y entrer – enfin à part peut-être cette fille bizarre de Serdaigle, elle a l'air du genre à chasser les papillons. Mais appelle-là « interdite », et tout de suite chaque élève de cette école aura envie d'y pénétrer.
-Pas moi, avouai-je d'une petite voix. Je n'ai aucune envie de me retrouver devant un centaure.
Miles baissa le regard sur moi, et j'y lus une pointe de défi. Je compris parfaitement son intention, et j'arrachai ma main de celle de Miles pour croiser mes bras sur ma poitrine.
-Non.
-Allez, Vic', aie un peu le goût de l'aventure !
-Non, Miles je ne mettrais pas un pied là-dedans.
-Et qui te dis que tu y mettras un pied ?
L'éclat de malice qui jouait sur ses prunelles fit lentement fondre ma combattivité, et je poussai un profond soupir.
-Pas loin, exigeai-je néanmoins, provoquant le grand sourire de Miles. Et pas longtemps.
-Et tu ne mettras pas les pieds dans cette forêt, promit-t-il avant de se retourner. Allez grimpe, petit Demiguise.
A la fois dépitée, et amusée, je pris appuis sur ses épaules et montai sur son dos. Il calla mes jambes contre ses hanches, et je nouai mes bras autour de ses épaules, nichant mon menton contre son cou.
-En fait, ça peut-être agréable de se faire porter, admis-je alors que Miles faisait quelques pas, franchissant ainsi la lisère. Qu'est-ce que c'est, un Demiguise ?
-Une sorte de singe, qui peut deviner le futur très proche et se fondre dans la nature. Une sorte de singe-caméléon.
-Hum.
Tout s'était obscurci autour de nous une fois entrés dans la forêt, et je tournai le visage pour voir la lumière s'éloigner avec mélancolie. Les arbres étaient si proches que Miles dut slalomer entre les épaisses racines apparentes, et le feuillage si dense qu'il ne laissait pas passer le moindre rayon de soleil. Au bout de quelques minutes, je sortis ma baguette de ma poche, et en allumai la pointe pour éclairer le chemin de Miles. La forêt était si silencieuse que chaque son y résonnait avec une sonorité inquiétante. Je n'étais pas particulièrement sereine, alors au premier craquement sinistre, je resserrais ma prise sur Miles et demandai :
-C'est quoi, ça ?
-C'est une forêt, Vic'. Il s'y passe plein de choses – et qui n'ont rien à voir avec des monstres.
-Et ça ? sursautai-je lorsque j'entendis un bruissement sonore dans les branchages, y pointant précipitamment ma baguette.
-Une grosse Acromentule qui va venir t'envelopper dans son tissage pour ensuite te dévorer vivante. Maintenant baisse d'un ton, sinon elles vont vraiment venir te croquer.
Je grimaçai face à son ton moqueur, et décidai de me détendre en constatant que nul centaure coléreux ou créature maléfique. Miles était loin de partager ma crainte. Ses yeux dévoraient chaque centimètre carré, comme s'il espérait voir une créature surgir de derrière les arbres ancestraux. Il obliqua vers la droite, pour ne pas perdre la lisière de vue, avant de s'immobiliser devant un arbre dont la branche la plus basse était accessible.
-Bon, tu ne veux pas y poser un pied, chuchota Miles. Mais tu pourrais disons ... y poser une main ?
-Tu en as marre ? me moquai-je moi aussi à voix basse en tâtant la branche, plus épaisse que pouvait l'être le tronc d'un arbre ordinaire. Je suis trop lourde ?
-Pas du tout, mais peut-être que si on se pose ça va te permettre de ne pas flipper chaque fois que je marche sur une branche. Tu vas réussir à grimper ?
-Ouaip, mais je ne promets pas l'élégance de l'action.
Miles partit d'un petit rire et se positionna sous la branche pour que je puisse l'atteindre, et je l'agrippai de mes deux mains. Je réussi à me hisser à la force de mes bras, et m'écrasai contre la branche avec lourdeur, allongée de tout mon long et mes jambes pendant dans le vide. J'entendis le rire de Miles en contrebas.
-Oui, je sais, grommelai-je en me retournant prudemment pour m'asseoir. Pour l'élégance, on repassera.
-Mais j'ai trouvé ça très élégant, moi, promit Miles en se hissant à son tour.
Là dessus, il picora un léger baiser sur mon nez, puis sur mes lèvres. Je me laissai aller contre lui, l'embrassant en retour dans la pénombre bienveillante de la forêt interdite. Trois semaines, et les marques commençaient réellement à se prendre. Chaque geste se faisait plus naturel, chaque baiser était plus spontanés. Comme celui-ci, où je me retrouvais presque allongée sur la branche lorsque Miles écarta son visage du mien. Un lent sourire ourla ses lèvres.
-Alors ? C'est si terrible, la forêt ?
-Je suis presque persuadée que tu m'y as amené pour que je sois terrifiée et que je me raccroche à toi comme un chaton à sa mère.
-Grillé ...
Je souris face à la malice qui brillait dans ses yeux, et me redressai sur un coude pour l'embrasser doucement. Il passa sa main à l'arrière de ma nuque et approfondir notre baiser. Non. Maintenant que j'étais posée – à bonne hauteur du sol – et que la forêt était retombée dans le calme plat, ça ne paraissait pas si terrible. Et dans les bras de Miles qui me protégeaient du froid, les yeux fermés et savourant son baiser, ça me paraissait presque agréable.
-Ça va encore, admis-je en m'éloignant. C'est toujours moins effrayant quand on est accompagné ...
-Comme la plupart des défis qu'on devra relever notre vie, fit remarquer Miles avec un sourire.
Je penchai la tête sur le côté, lui concédant ce point, et passai une boucle derrière mon oreille. Nous nous regardâmes un instant, un sourire incertain aux lèvres. Ce fut le ventre de Miles qui vint interrompre notre contemplation en grondant sourdement. Nous échangeâmes un regard consterné, avant d'éclater de rire, de façon incontrôlable. Nos éclats se répercutèrent dans la forêt, comblant le vide auditif affreux dans lequel elle était plongée. Je finis par me redresser, haletante, une main plaquée contre mes côtes où une douleur était apparue.
-Chuut, me souffla Miles, réprimant son hilarité de son mieux. Sinon les Acromentules viendront réellement te croquer.
-Adorable, chuchotai-je en lui tendant les gâteaux que j'avais emporté avec nous. Allez tiens. Dobby a été consciencieux.
-C'est l'elfe bizarre qui se balade avec une chaussette sur l'oreille ?
-Hey ! Il n'est pas bizarre, il veut juste être libre !
-Oui, c'est la définition de « bizarre » pour un elfe.
Je fronçai les sourcils, lui donnai un coup de coude qui le déséquilibra et il se rattrapa avec un glapissement. Dans la pénombre de la forêt, je n'arrivais pas franchement à bien distinguer l'expression de son visage. Il n'était qu'une ombre que découpait la très faible luminosité à laquelle je commençais à m'habituer. Je pensais qu'il souriait, parce que je voyais l'éclat de la blancheur de ses dents. Il me prit délicatement la main.
-Alors ? chuchota-t-il, son souffle me caressant la joue. Au bout de trois semaines ... comment tu te sens vis-à-vis de ... nous ?
Un sourire spontané retroussa mes lèvres.
-Plutôt bien. J'essaie de ne pas me prendre la tête, de fonctionner au jour le jour et ... ça marche assez bien.
-Toi, arrêter de se prendre la tête ? se moqua Miles en un souffle. Un véritable miracle.
-Et sache que tu es la seule personne concernée par cette résolution.
-Je suis honoré.
Je levai les yeux au ciel, avant de les baisser sur nos doigts entrelacés, notre peau pâle tranchant avec l'écorce sombre de l'arbre. Je bougeai légèrement le pouce, effleurant le sien au passage.
-Et toi ? m'enquis-je, toujours à voix si basse que je m'étonnais qu'il m'entende. Comment tu te sens ?
-Moi ?
La voix de Miles était sincèrement surprise, et ses doigts se figèrent sur les miens. Il essuya un petit rire qui trembla à peine dans la forêt. Il inclina le visage, et effleura ma tempe d'un baiser.
-Bien sûr que ça va, Vic'.
-Si bien que tu te sens obligé de m'emmener dans la forêt pour te rapprocher physiquement de moi.
-Hey ! Tu es encore farouche dans ton genre.
Cette fois encore mes yeux roulèrent dans mes orbites, et je me penchai pour déposer un baiser à la commissure de ses lèvres.
-Et heureusement sinon je pense que je ne t'intéresserais pas autant, plaisantai-je.
-Je confirme, souffla Miles en se rapprochant à son tour.
Il m'embrassa, dénouant nos doigts pour passer une main derrière mon dos et m'attirer un peu plus à lui. Grisée par son contact, j'agrippai sa nuque, caressant ses cheveux qui soudainement n'étaient plus si bien coiffés. Le baiser ce fit moins chaste, plus brusque, plus enivrant. Les lèvres de Miles quittèrent les miennes pour effleurer ma joue puis courir le long de ma mâchoire, et étourdie, je le laissai faire. Elles s'aventurèrent sur ma gorge, y traçant une ligne d'une douce brûlure. Je passai une main dans ses cheveux, les ébouriffant un peu plus, les paupières mi-closes, étirant le cou pour le lui offrir. Une partie de moi s'abandonnait totalement à toutes ces nouvelles émotions qui tourbillonnaient en moi, si forte et si violente qu'elles embrouillaient totalement mon esprit. Mais une autre part, éveillée lorsque Miles atteint ma clavicule laissée accessible par mon col de chemise, songeait soudainement que cela aller un peu vite – un peu loin. Miles repoussa avec délicatesse mon col pour atteindre mon épaule et y déposer un baiser en toute douceur. En dessous du col ... De la clavicule ... Ce fut cette incompréhension qui me fit ouvrir les yeux, et Miles dut sentir mon changement d'attitude car ses lèvres désertèrent cette partie de mon corps pour revenir sur mon cou, puis mon visage. Rassurée, je me laissai à nouveau aller contre lui, et happai à nouveau ses lèvres, fermant à nouveau les yeux ... Lorsque derrière mes paupières presque closes, une vague lumière rouge m'accroche la rétine. J'ouvrai alors les yeux, stupéfaite, pour à peine percevoir un autre éclat au loin, si loin dans les branchages qui me fit sursauter. Un éclat froid qui se répercuta sur les feuillages alentour, comme un écho que le vent amenait vers nous. Je m'éloignai vivement, prise de court, fixant l'endroit où la lumière avait disparue.
-C'était quoi, ça ?
Miles se figea un instant, puis laissa aller son front contre mon épaule avec un grognement.
-Par Merlin, Vic'. On est encore à la lisère, il n'y a aucun danger ...
-Non, je t'assure, protestai-je en le repoussant. Il y avait une lumière là-bas ...
-Victoria Bennett ...
L'agacement et la perplexité achevèrent de chasser les dernières brumes de plaisir dans lesquelles mon cerveau était plongé, et je descendis vivement de la notre perchoir, malgré les protestations de Miles. Mes pieds heurtèrent le sol, écrasant les feuilles mortes et brindilles qui craquèrent et résonnèrent sinistrement dans les branchages, et je fis quelques pas dans la direction d'où m'étais parvenues les bruitages. C'était peut-être le fruit de mon imagination, mais j'avais l'impression que mes pas n'étaient pas les seuls à se répercuter.
-Victoria ! m'appela Miles dans un chuchotement pressé. Vic', par Merlin, qu'est-ce que tu fais ?
-C'était près de la cabane de Hagrid, évaluai-je en écartant une branche qui me bouchait la vue.
-Mais quoi ?
-J'en sais rien ! répliquai-je avec irritation. C'était rouge ... Non, la seconde était verte et ...
Miles avait lui aussi sauté au bas de la branche, et me contemplai, immobile et consterné, comme s'il ne comprenait pas un traitre mot de ce que je venais de lui dire. Frustrée par ce dialogue de sourd, j'avançai encore un peu vers la maison de Hagrid que j'avais en ligne de mir : ses contours se découpaient de la lisière. Et définitivement, j'avais l'impression qu'il n'y avait pas que mes pas dans cette forêt, et mon cœur s'affola brusquement. Miles dut au moins avoir conscience de ça, car il jeta un regard furtif alentour, et me rejoignit en trois enjambées pour me prendre la main.
-D'accord, me souffla-t-il en prenant les devant. On ferait mieux de retourner au château ...
Je hochai vigoureusement la tête, et nous nous élançâmes entre les branches trop basses et racines trop saillantes. L'orée fut en vue, et le terrain se fit bien plus praticable à mesure que l'on se rapprochait de la cahute de Hagrid. Nous nous apprêtions à bifurquer vers le château pour quitter enfin l'épais tapis feuillu qui nous coupait du ciel quand mon pied butta contre quelque chose, et me fit perdre l'équilibre. Je n'eus pas le temps de me rattraper à Miles et m'étalai de tout mon long, m'écorchant au passage les mains et les genoux. Miles interrompit sa course pour m'aider à me relever.
-Dépêche-toi, marmonna Miles en me remettant sur le pied, avant de jeter un coup d'œil derrière moi. Sur quoi tu as trébuché ?
-J'ai dû m'emmêler les pinceaux, évaluai-je en remarquant le terrain derrière moi semblait plat. Allez, on y va ...
Miles hocha la tête, attrapa à nouveau ma main, et ensemble nous remontâmes vers le château, haletants et courant jusqu'au Hall, comme si la mort était à nos trousses.
Et quand je fermais les yeux et que l'éclat vert et glacé que j'avais perçu dans la forêt jouait derrière mes paupières closes, j'avais réellement l'impression que c'était le cas.
***
-Un labyrinthe ?
Cédric hocha la tête avant de prendre une lampée de bièraubeurre. Il était vingt-deux heures, et j'avais retrouvé mes amis m'attendant pour l'ultime révélation devant la cheminée de Poufsouffle où Cédric et moi avions abandonné Simon et Emily quelques heures plus tôt. Mais ils avaient été rejoins par une partie de notre Maison, qui se massait autour de Cédric de façon presque indécente. Avant de rentrer j'avais pris soin de nettoyer les dernières traces de terre de ma baguette, et rassembler mes cheveux en un chignon lâche – première fois de ma vie que je pouvais faire une chose pareille. De toute manière, Emily et Simon étaient trop concentrés sur ce que Cédric était sur le point de dire pour faire attention à mon état – et à mon retard. Je bus à mon tour de gorgée de bièraubeurre et appréciai la fraicheur du breuvage contre mon gosier. J'avais à peine eu le temps de me remettre de ma folle course qu'une nouvelle tempête s'abattait sur moi.
-Ils ont transformé le terrain de Quidditch en labyrinthe ? s'insurgea Kenneth Callagher, le batteur de cinquième année.
-Je pense qu'il y a plus urgent, évalua Ernie Macmillan, joignant ses mains au niveau du cœur en une parfaite imitation du moine gras. On t'a dit quel genre de labyrinthe ce serait ?
-Du genre avec des licornes et des boursoufflets qui viendront lui faire des bisous, ironisa Emily avec un regard torve pour le granguiloquent quatrième année. A ton avis ?
Ernie rougit comme un souafle, et Hannah Abbot lui mit une main sur l'épaule pour le forcer à reculer. Susan, qui s'était perchée sur les genoux de son frère, fronça son joli nez à l'adresse d'Emily.
-Pas la peine d'être désagréable, c'est une question légitime, répliqua-t-elle avant de se tourner vers Cédric. Enfin je veux dire que si tu as une idée de ce qu'il y a dedans tu pourras mieux te préparer ...
-On ne sait pas exactement ce qu'il y aura dedans, répondit Cédric avec indulgence – mais sans doute était-ce parce que c'était l'adorable Susan qui lui posait la question, et qu'elle était sur les genoux du meilleur lanceur de sort de Poudlard. Le trophée sera au centre, et Harry et moi seront les premiers à entrer dans le labyrinthe. Ensuite dedans ... Des sortilèges à conjurer, des énigmes et apparemment, Hagrid va fournir quelques créatures ...
-Ah, lâcha Kenneth, avant de donner une tape compatissante sur l'épaule de Cédric. Bonne chance mon petit gars. J'ai encore des cicatrices à cause des brûlures des Scroutts à Pétard au début d'année.
-Des Scrouts à quoi ? répéta Simon avec un grimace de dégoût.
-Je vais te faire une liste des créatures que Hagrid a pu nous faire étudier, ajouta Kenneth avant de s'adresser à l'assemblée. Est-ce que quelqu'un sait comme s'écrit « verracrasse » ?
Un rire secoua l'assemblée, y compris Cédric qui jeta un regard reconnaissant pour le batteur. Maintenant que l'épreuve était connue, la foule se dispersait en petit groupe qui parlaient avec animation du labyrinthe, nous laissant seuls avec Cédric – si l'on exceptait Susan qui s'était blottie contre Simon, la tête nichée dans son cou. Un sourire attendri effleura mes lèvres quand je les vis dans cette posture. Emily avait plongé son regard dans les flammes, songeuse.
-Un labyrinthe, répéta-t-elle, le menton calé sur son poing. C'est presque trop classique. Je veux dire, le labyrinthe a une forte consonance magique, c'est un topos de notre monde ... Kenneth n'a pas tord, on ferait mieux de faire la liste des créatures préférées de Hagrid ...
-Et de se mettre aux sorts et maléfices dès maintenant, ajouta Simon par dessus la tête de Susan.
-Je vais faire la liste des créatures préférées de Hagrid, et jevais réviser les sorts et maléfices, rectifia Cédric avec un regard d'avertissement notamment pour Simon, qui le surpassait de loin en sortilège. Merci bien. Maintenant, je vais aller me coucher, avec tout le stresse qui retombe ... (Il étouffa un bâillement au creux de sa main) fatigué.
-Bonne nuit champion, lui lançai-je alors qu'il se levait. Dors bien.
Cédric m'adressa un sourire tenu avant de m'ébouriffer les cheveux et de disparaître dans son dortoir. Emily suivit un instant plus tard et peu à peu la Salle Commune prit le pas. Susan me lorgna, intriguée.
-Tu arrives à faire des chignons, maintenant ?
-Ne m'en parle pas, soupirai-je en tâtant la boule de cheveux que j'avais formé à l'arrière de mon crâne. Rappelle-moi de prendre rendez-vous chez le coiffeur quand on rentre à la maison.
-C'est vrai qu'ils n'ont jamais été aussi longs, admit Susan, avant de se redresser à son tour. A demain, dormez-bien.
Elle tapa deux fois contre la main de Simon avant de s'éloigner d'un pas lourd, me laissant seule avec son frère. J'avais replié mes genoux contre ma poitrine pour les entourer de mes bras, le regard perdu quelque part dans les braises. J'aurais pu aller me coucher, mais je me sentais incapable de m'endormir. Mon esprit était maintenu éveillé par le reste d'adrénaline qui parcourait encore mes veines, et par les éclats vagues que je revoyais encore par à-coup. La remontée vers le château n'avait pas été de tout repos, car à peine étions-nous arrivés dans le Hall que Dumbledore et Rogue étaient descendu en trombe de l'escaliers, suivant un élève que je ne pris pas la peine de reconnaître, tout occupés que nous étions à nous cacher – le couvre-feu était passé. Miles avait tenté de me convaincre que ce j'avais vu étaient les aléas de la forêt, ou alors les préparations de la troisième tâche, et m'avait quitté à la fois serein quant à cette question, mais tendu face à nous. Après tout, cette fois j'avais réellement gâché notre moment. Mais cette fois, je m'en moquais. Les explications de Miles sonnaient désagréablement à mes oreilles.
-Tu étais où ?
Je sursautai, et portai mon regard vers Simon. Il me fixait – et depuis un certain moment car ses yeux était plissés, inquisiteurs et sérieux, fermement ancrés sur moi. Je raffermis ma prise sur mes jambes, les serrant un peu plus contre moi.
-Je me baladais, répondis-je évasivement. J'étais stressée, j'avais besoin de me vider la tête.
-Et c'est en te vidant la tête que tu t'es écorché les mains, et les genoux ?
Instinctivement, je contemplai mes mains, effectivement égratignées, et mon genou droit où saignait une petite plaie. Je mouillais mon pouce de ma salive et le passai sur la légère blessure. Simon poussa un soupir dépité et sortit sa baguette pour donner un coup sec sur mon genou. Avec une grimace, je vis la plaie se refermer, ne laissant qu'une trace de sang séché. Simon planta son regard dans le mien.
-Maintenant, tu vas me dire où tu étais ?
-Dans la forêt, avoua-je, bien trop facilement.
Cela me frustrerait presque ... si je n'éprouvais pas une envie incommensurable d'en parler. Maintenant que les premiers mots étaient sortit, les autres se bousculaient dans ma bouche, brûlant de faire part de ce que j'avais pu apercevoir – ou non. Je reconnus la sensation avec une désagréable impression de déjà-vu.
La dernière fois que j'avais eue autant envie de me confier, c'était concernant le cinq novembre.
Les sourcils de Simon se rejoignirent au dessus de son nez.
-Dans la forêt ? Interdite ?
-Ouais, bon, éludai-je d'un haussement d'épaule. Sur un malentendu, ça arrive.
-Pas à toi, répliqua vertement Simon. Je ne pense pas que tu irais de ton gré proche de l'endroit où Nestor Selwyn a voulu te brûler.
Le peu de couleur qu'il me restait déserta complétement mon visage, et je sentis la chair de poule hérisser les poils de mes bras. Je les frottai pour les réchauffer.
-Tu étais avec Bletchley, c'est ça ? demanda Simon, avec une certaine prudence.
-Bones, gémis-je, cognant mon front contre mes genoux. On peut faire l'impasse sur les détails ?
-Je ne trouve pas que c'est un détail, mais passons. Ça veut dire qu'il y a des choses plus urgentes ?
-Je te déteste.
-Ça ce n'est pas un scoop.
Je le lorgnai longuement, lui et le petit sourire agaçant qui s'était étiré sur ses lèvres après sa dernière pique, à demi cachée derrière mes jambes. Puis finalement, ma langue qui avait si besoin de se dégourdir se délia, et je décris les deux éclats que j'avais cru voir, à travers mes paupières et les branchages. Le sourire de Simon s'effaça lentement, jusqu'à que je me taise, et qu'il s'enquise :
-Et Bletchley n'a rien vu ?
-Nop.
-Et ces « éclats » ... Tu avais l'impression qu'ils étaient ... Je ne sais pas, de provenance magique ?
-J'avais cette impression, évaluai-je avec lenteur. Le premier je n'ai pas bien vu mais le deuxième ... Il était vert, et ça m'a vraiment rappelé ...
Je laissai ma phrase en suspend, de crainte de dire une bêtise. Quand j'avais fait part de cette hypothèse, Miles m'avait presque ri au nez – ce qui m'avait agacé. Si Simon faisait la même chose, je ne garantissais rien sur ma capacité à me retenir de me jeter sur lui toute griffe dehors. Mais il n'y avait aucune trace d'hilarité sur le visage de Simon, et ce fut d'une voix d'outre-tombe qu'il souffla :
-Avada Kedavra.
-Oui, confirmai-je dans un filet de voix. C'est ça.
Simon se laissa aller contre son fauteuil, se passant les deux mains sur le visage comme pour se donner contenance. Maintenant que c'était dit à voix haute dans un contexte où je n'étais pas moquée, ça me semblait autant absurde que glaçant.
-Miles a dit que c'était peut-être les préparations de la troisième tâche, proposai-je, puisque c'était l'explication la plus crédible. Je n'ai pas bien vu, c'était loin, à peine plus qu'un écho ... Simon, on ne peut pas avoir tuerquelqu'un à Poudlard ?
-Non, répondit-t-il d'une voix étouffée par les deux mains qu'il avait gardé devant son visage. Non, c'est ... invraisemblable. Les délégations ne prendraient pas ce genre de risque et dans Poudlard ... (il écarta enfin ses mains pour me jeter un bref regard). Et après ça, tu as dis que tu avais vu Rogue et Dumbledore descendre ? Genre, pressés ?
Je hochai la tête. Pressés, oui, sinon Rogue et ses yeux à qui rien n'échappaient nous aurait vu, si maladroitement cachés que nous étions.
-Il a dû se passer quelque chose alors, conclut-t-il, faisant écho à mes pensées. Tu vois deux « éclats » magiques et deux des professeurs les plus importants descendent immédiatement après ... Ça ne peut pas être une coïncidence. Alors effectivement c'est peut-être en rapport avec la troisième tâche ... Oui, c'est l'explication la plus probable ...
-Mais si ce n'est pas ça ?
-Si ce n'est pas ça, entonna Simon après un moment de silence, alors de toute manière Dumbledore est au courant. Et on ne peut rien faire de plus, je pense. Il va gérer la situation ...
Il me jeta un long regard, mais j'avais la désagréablement impression qu'il me fixait sans réellement me voir, comme si son esprit était à des miles de là.
-Les messages, finit-t-il par lâcher du bout des lèvres. Tu n'en reçois plus ?
-Pas depuis la seconde tâche.
-Bien. C'est au moins ça.
-Il se passe quelque chose, cette année, soufflai-je avec un frisson. J'ai l'impression que chaque fois il se passe quelque chose, de peut-être pas foncièrement grave, mais qui crispe. La dernière fois que j'ai été si peu sereine c'était quand un monstre assoiffé de sang se baladait dans les couloirs. Sauf que cette fois c'est différent. Au moins il y a deux ans on savait la source de l'angoisse latente. Là je ne suis même pas certaine que tous se rende compte de ce qui ne va pas. Et ce qui ne va pas vient de partout, pas uniquement d'un événement. Je ne sais pas, j'ai l'impression qu'un avertissement pullule de partout. Simplement je n'arrive pas à en saisir le sens.
Simon était resté silencieux, me laissait parler sans m'interrompre. Il me fixait encore de ce regard vide, mais je voyais dans la crispation de ces traits qu'il réfléchissait intensément.
-C'est idiot ? murmurai-je devant son silence.
-Non, répondit-t-il alors. Non, Vicky ce n'est pas idiot, tu as sans doute raison.
Il posa ses coudes sur ses genoux, et se prit la tête entre les mains. Quelques furent ces réflexions, elles n'avaient pas dû aboutir bien loin.
-J'ai la même impression. Depuis la coupe du monde de Quidditch et ...
-La marque des ténèbres ?
Simon hocha la tête. Embarrassée, je me rappelais qu'il avait été au stade ce jour là, voir la finale de la coupe du monde. Et qu'il avait vu en direct un groupe de suprématistes s'attaquer à des moldus ... et une immense tête de mort aux éclats verts et glacés se former dans le ciel. Pour la première fois, je me rendis compte du traumatisme que cela avait dû être pour Simon, lui qui était d'une grande tolérance – sauf en ce qui me concernait – et dont beaucoup d'amis étaient des moldus. Sans doute la marque des Ténèbres devait-elle le hanter bien plus qu'elle ne me hantait moi.
-Ça devait être horrible, soufflai-je, une boule au ventre.
-Oui, ça l'était et c'est pour ça que je n'ai pas envie d'en reparler, répondit Simon sur un ton plus sec. On ferait bien de nous sortir cette idée de la tête et ... d'aller nous coucher.
-Bon courage, alors.
Simon vrilla ses yeux sur moi, où l'orangé des flammes se supposait au vert de ses iris. Il me dévisagea un long moment avant de se laisser aller contre son fauteuil, plantant sa joue contre son poing.
-Ouais, bon courage, effectivement.
Et aucun de nous deux de bougea.
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