Chapitre 17-2
J'étais sonnée. Autant par tous les évènements récents que par son comportement. Il ne pouvait pas être parti en m'enfermant là, encore ! Après tout ce que je venais de faire et de risquer pour les aider, ils me gardaient encore prisonnière ! Une fois le choc et la surprise dissipés, je me précipitai sur la porte et me mis à tambouriner sur le battant de toutes mes forces en hurlant. Au début c'était des « ouvrez-moi » qui se transformèrent très vite en invectives plus ou moins polies, pour finirent en injures. Je ne savais pas depuis combien de temps je faisais ce tapage mais malgré ma voix éraillée et mes mains douloureuses je ne comptais pas m'arrêter...je ne pouvais pas...il ne fallait pas. Si j'abandonnais, cela équivaudrait à renoncer, à accepter mon sort et ça, c'était hors de question !
— Vous ne pouvez pas me laisser enfermer là, espèce de mutant dégénérés ! Ouvrez-m...
Comme si elle répondait à ma demande, la porte s'ouvrit brutalement. Surprise, je perdis l'équilibre et atterris durement sur le sol, tandis que Nicolas pénétrait dans la pièce, son regard dur et hostile semblant lancer des éclairs.
— Vous voulez vraiment aggraver la situation à hurler comme ça ? commença-t-il avant de s'interrompre brusquement lorsque ses yeux se posèrent sur moi.
Son regard s'adoucit imperceptiblement et s'est avec plus de douceur qu'il referma la porte sans la verrouiller cette fois-ci.
— Aggraver la situation ! m'exclamai-je en tentant maladroitement de me relever. Car de votre point de vue cela pourrait être pire ?
— Vous n'avez pas idée, me répondit-il la mine sombre en tendant la main vers moi pour m'aider à me redresser.
— Ne me touchez pas, le prévins-je en reculant pour éviter le contact de sa main.
Ce qui eut pour seul effet de me faire perdre le peu d'équilibre que j'avais gagné et de me renvoyer...par terre.
— Ne soyez pas ridicule, je ne vais pas vous mordre et vous risquez de rouvrir votre blessure à gesticuler comme ça.
— Je me contrefiche de ce que vous pensez ! Vous m'avez menti ! lui criai-je à la figure d'une voix plus larmoyante qu'elle n'aurait due.
— Non, me répondit-il d'une voix sourde. Je ne vous ais pas tout expliqué pour votre bien mais je ne vous ai pas menti...je ne mens jamais, ajouta-t-il d'un ton plus contrôlé en me tendant une nouvelle fois la main.
— Foutaise ! m'exclamai-je de nouveau en reculant jusqu'au mur sur lequel je pris appuis pour me redresser seule. Je suis toujours votre prisonnière, vous n'avez jamais eu l'intention de me libérer ou de me ramener chez moi !
Je sentis la panique et le découragement faire leur retour en force et je me mordis fortement la lèvre pour ne pas que les larmes de stress, de rage et d'abattement que je sentais poindre derrière mes paupières ne coulent, anéantissant le peu de courage qu'il me restait.
— J'ai toujours eu l'intention de vous ramener chez vous, me dit-il d'une voix vibrante, son regard franc braqué dans le mien. C'est juste que...la situation est inédite et...
— Pourquoi ce petit numéro d'intimidation dans ce cas ? le coupai-je, ne voulant pas entendre ses excuses bidon. Et pourquoi m'avoir de nouveau enfermé dans cette foutue chambre si je ne suis libre de partir quand je veux ?
— Si je vous ai enfermé, c'est pour votre bien !
— Pour mon bien !
— Si je n'avais pas verrouillé derrière moi, vous m'auriez suivi, m'accusa-t-il d'un ton agacé.
— Pas si vous m'aviez dit de ne pas le faire, lui rétorquai-je avec mauvaise foi.
— Mais bien sûr ! Soyez honnête...
— Et vous, mettez-vous cinq minutes à ma place, le contrai-je instantanément bien consciente que sur ce point précis il avait raison. Vous auriez certainement fait pareil.
Il ne me répondit pas, mais son mutisme soudain était aussi éloquent qu'un long discours.
« Nick, dépêche-toi ! Aaron s'impatiente. » cria une voix d'homme de l'autre côté du battant, me faisant violemment sursauter.
— Rose, vous devez venir avec moi, me dit-il soudain d'un ton pressant et extrêmement sérieux.
— Je n'irais nulle-part si ce n'est pas pour sortir de cette maison de fou !
Un éclair de colère et de tristesse traversa fugacement son regard à l'entente de ma pique volontairement blessante. Mais au point où j'en étais, lui faire de la peine ou même le mettre en rogne était un peu le cadet de mes soucis !
— Cette « maison de fou » comme vous dites, appartient à Aaron justement et votre seule et unique chance d'en sortir et de me suivre, maintenant !
Son ton et son comportement avaient subtilement changés, une distance supplémentaire venait de s'installer et aussi idiot cela pût-il être...ça me dérangeait. Nicolas était ce qui se rapprochait le plus d'un allié dans cet... « univers parallèle » dans lequel je venais de tomber, me le mettre à dos, n'était peut-être pas l'idée du siècle ! me dis-je tandis que je cherchais frénétiquement un moyen de rattraper le coup. Mais était-ce réellement la seule raison ?
— Excusez-moi, je n'aurais pas dû dire...
— J'imagine de quoi ça peut avoir l'air pour quelqu'un comme vous, me coupa-t-il d'une voix froide et légèrement guindée. Vous venez ?
Ne sachant plus quoi dire et ne voulant pas accroitre le malaise, je hochai timidement la tête et fis même un pas vers lui pour confirmer ma réponse muette. Je n'avais aucune envie de revoir cette brute de Aaron, mais je n'avais visiblement pas le choix, alors autant y aller de mon plein gré, j'aurais peut-être une opportunité de fuir ! Comme s'il avait lu dans mes pensées, Nicolas me saisit par le bras et d'un geste vif m'attira à ses côtés, me faisant comprendre de manière on ne peut plus claire, qu'il m'avait à l'œil.
Nous sortîmes dans le couloir toujours aussi peu éclairé et je fus étonnée de le trouver désert. Seconde surprises, Nicolas m'entraîna d'un pas rapide vers la gauche, où nous longeâmes une série de portes fermées et anonymes avant de déboucher sur un palier immense où débouchait un escalier magnifique que nous descendîmes. A priori je m'étais compliqué la vie la première fois, me dis-je lorsque nous arrivâmes dans le hall d'entrée que Nicolas me fit traverser d'une démarche pressée.
En passant non loin de la porte d'entrée, je constatai que les morceaux de verres avaient été ramassés et que l'on avait couvert le vitrail cassé d'une planche de contreplaqué. Comme je commençais à m'en douter, il me conduisit vers la porte située à droite de l'entrée et qui menait à un nouveau couloir dans lequel s'ouvrait deux portes. Nous nous dirigeâmes vers la plus éloignée, qu'il ouvrit après avoir brièvement frapper sur le battant.
C'était un bureau. La pièce était, sur trois de ses murs, entièrement recouverte de bibliothèques croulant sous les volumes, anciens comme plus récent, rangés avec soin. Un bureau massif était disposé face aux grandes fenêtres donnant sur le parc extérieur et un immense tapis épais beige, recouvrait le parquet brillant et ciré. Tout respirait le luxe et la propreté. Cet endroit était calme et reposant, enfin aurait dû l'être si un Aaron visiblement au comble du stress ne s'y était pas trouvé, faisant les cents pas comme un tigre en cage, téléphone vissé à l'oreille.
— Pourquoi nous ne sommes au courant que maintenant ? rugissait-il dans l'appareil à l'instant où nous entrâmes. Depuis deux jours, vous aviez largement le temps de nous prévenir ! Vous n'êtes qu'un...Argh !!!! cria-t-il alors qu'il envoyait le portable voler à travers la pièce dans un mouvement de rage incontrôlé.
Terrifiée par l'aura de colère qu'il dégageait, je me rapprochai instinctivement de Nicolas qui venait de refermer la porte derrière nous. Des rides de préoccupation barraient son front, mais il n'avait pas l'air effrayé plus que ça par l'attitude d'Aaron, ce qui me rassura légèrement.
— Que ce passe-t-il ? lui demanda Nicolas en s'avançant dans la pièce, me faisant signe de m'assoir dans l'un des deux fauteuils en cuir brun disposés de l'autre côté du bureau, ce que je m'empressai de ne pas faire.
— Il se passe que c'est beaucoup plus grave que ce que nous pensions ! Des clans ont été attaqués par des groupes armés un peu partout dans le pays !
Nicolas sembla accuser le coup difficilement, même s'il essayait de ne pas le montrer.
— Beaucoup de morts ? se contenta-t-il de lui demander d'un ton résigné.
— Certains clans ont été entièrement décimés, lui répondit Aaron d'un ton un peu plus doux me sembla-t-il. Dans d'autres ils ont fait des prisonniers. Mais maintenant que la nouvelle se répand, les clans fuient ou se protège...
— Tu crois qu'ils vont venir ici ? l'interrompit-il d'une voix serrée par le stress.
— Je ne le crois pas, j'en suis sûr, lui répondit Aaron la mine sombre. La seule question importante c'est...quand ?
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