Chapitre 15-2


Je m'approchai d'elle avec appréhension et poussai un soupir de soulagement en voyant ses yeux toujours clos et sa respiration profonde et régulière. À première vue, j'avais encore un peu de temps devant moi. C'est en posant le matériel au pied du lit et en approchant la fiche de mes yeux fatigués que je me rendis compte d'à quel point je tremblais. À un tel degré que je dû saisir le rectangle cartonné à deux mains pour pouvoir le déchiffrer correctement. Bon, niveau technique cela ne paraissait pas très compliqué à réaliser. Le problème c'était la pratique et les risque pour Cat si je loupai la moindre étape. La première était de désinfecter soigneusement l'endroit où l'on voulait placer le cathéter, lus-je une nouvelle fois avant de me retourner pour me saisir du matériel adéquat.

— Votre kit n'est pas complet, criai-je à Eva d'une voix rendue tremblotante par la fatigue et tous le stress accumulé. Il manque le désinfectant.

— Pas besoin de désinfectant ! Dépêche-toi ! aboya-t-elle.

— Bien sûr que si ! Elle pourrait attraper une mala...

— Mais non idiote ! Nous sommes immunisés contre ses choses-là. Bouge-toi les fesses !

Comme au point où j'en étais, plus rien ne me surprenait, j'acceptai son affirmation sans sourciller. Au moins un problème de moins à me soucier. Mais si j'arrivai à sortir vivante de cette pièce et de ce cauchemar, cette pétasse allait se prendre mon poing dans la figure ! me dis-je tandis que je ravalai ma réplique cinglante, qui de toute façon, n'aurait servi à rien. Le plus dur restait à faire et je devais rester concentrée. Je sorti le cathéter de son emballage et d'une main hésitante attrapai le poignet de Cat.

Dès que mes doigts touchèrent sa peau, ses yeux s'ouvrirent et son corps s'arqua subitement sur le matelas. Dans un cri je me reculai, le cœur dans la gorge. Mais son torse retomba mollement sur les draps et ses yeux se fermèrent de nouveau sans qu'elle ait semblé me voir, ni me reconnaître.

— Qu'est-ce qu'il se passe ?

— Elle...elle s'est réveillée quand je l'ai touché...et maintenant elle semble dormir de nouveau.

— C'est un réflexe automatique de défense, pas de danger. Mais cela veut dire qu'elle est proche du réveil, alors dépêche-toi.

Si je n'avais pas été enfermée dans cette pièce à la merci d'une bande de tigre-garou dégénérés, Je lui aurais dit d'aller au diable ! Mais je n'avais malheureusement pas le choix et c'est donc contrainte et forcée que je retournai près du lit. Cette fois-ci, je ne fis pas dans la dentelle et pris son poignet fermement entre mes doigts, avant de tourner son bras pour avoir accès au creux de son coude.

La sentant s'agiter légèrement, je n'hésitai pas et d'un geste que j'espérai sûr, piquai dans la veine, heureusement très visible, qui roula sous mon aiguille me faisant rater ma cible de plusieurs bons millimètres.

— Merde ! jurai-je à voix basse, tandis que du sang sourdait de ma piqure maladroite et qu'un bleu se formait déjà sous sa peau pâle.

— Quoi ? Encore un problème ? s'enquit Eva d'une voix excédée.

Comment avait-elle pu m'entendre ? J'avais à peine chuchoter.

— J'ai manqué la veine, elle saigne et...

— Pas grave ! Ce sera guérit dans deux secondes. Recommence !

— Hein ? Mais je...

Je m'interrompis net, lorsque mes yeux se posèrent de nouveau sur le bras de Cat. Là où se trouvait la piqure quelques secondes auparavant, il n'y avait plus rien ! Le bleu était toujours là, mais la trace de l'aiguille avait totalement disparue. Dans mon esprit, tout se bousculait. La stupéfaction, la surprise, la peur...stop ! Ce n'était pas le moment. Je ne pouvais pas la blesser gravement apparemment, alors il n'y avait plus à hésiter. Avec des gestes un peu plus assurés, je réessayai et cette fois réussi du premier coup.

— ça y est ! m'écriai-je avec soulagement alors que retirai l'aiguille, laissant le cathéter en place, avant de le fixer avec un bout de sparadrap. Je n'ai plus qu'à fixer le tuyau et...

— Ne lâche surtout pas la perfusion, m'ordonna Eva. Si tu ne la maintiens pas, son corps va la rejeter et tu devras tout recommencer.

— Tu plaisantes ? ne pus-je m'empêcher de répliquer. Comment veux-tu que je récupère les poches de sang ?

— Tu ne les as pas près de toi ? T'es vraiment gourde, ma parole !

— Et toi t'es complètement conne de ne pas me l'avoir dit avant ! contrattaquai-je, ma colère renforcée par mon état de nerf qui frôlait l'hystérie à cet instant précis.

Elle ne répondit pas et curieusement le silence pesant et oppressant qui régnait dans la petite pièce ne m'aida pas à rassembler mes pensées éparpillées. Mon cerveau n'arrivait pas à appréhender tout ce qu'il venait d'apprendre en si peu de temps. La prise de conscience et les explications seraient pour plus tard, me dis-je en prenant une grande inspiration. Je devais en finir rapidement pour sortir de cet enfer de béton qui commençait à me rendre claustrophobe.

N'ayant guère d'autre choix, je fixai le tuyau à la perf, puis lâchai cette dernière l'espace de quelques secondes, le temps de récupérer les poches de sang que je balançai sur le lit. Je parvins in-extrémis à remettre mon doigt sur le cathéter au moment où celui-ci était presque sortit...c'était dingue ! Essayant de ne pas penser à ce phénomène flippant, je finis de raccorder le dispositif, avant d'ouvrir les vannes.

— C'est bon, c'est en place.

— Enfin ! Maintenant, prends le scalpel que tu as dû trouver dans la valise et entaille-lui le poignet opposé.

— Quoi ?! Mais tu es folle ! m'écriai-je, ayant l'impression de plonger plus profondément dans la folie au fur et à mesure que les minutes passaient.

— Il faut purger son organisme des drogues qu'il contient. Ce nouveau sang ne servira à rien et sera même dangereux pour elle si le sang contaminé n'est pas évacué, du moins en partie. Un litre devrait suffire.

— Mon dieu...mais c'est qu'elle est sérieuse ! m'entendis-je gémir pathétiquement.

— Dépêche-toi, tu réfléchiras ensuite !

Complètement à l'ouest je fourrageai sans vraiment les voir dans les fournitures éparpillées sur le lit et finis par trouver le fameux scalpel. Je me rendis vite compte qu'il me serait impossible de faire ce qu'elle me demandait avec une seule main, je devais trouver une solution pour faire tenir le cathéter. J'entourai ce dernier de plusieurs épaisseurs de sparadrap en espérant que cela serait suffisant, puis j'attrapai l'autre bras de Cat, le scalpel glissant dans ma main moite au moment où je le posais sur sa peau.

— Non...je ne peux pas faire ça ! gémis-je à l'instant d'inciser la peau.

— Rose, vous pouvez le faire...

La voix grave qui résonna soudain dans mes oreilles, bien que voilée par l'épuisement et la distance, me fit comme un électrochoc. Je sentis un étrange soulagement que je ne m'expliquai pas complètement, m'envahir.

— Nicolas ?! m'exclamai-je surprise et soulagée de l'entendre, me rendant compte que quelque part au fond de moi, j'avais craint qu'il ne soit mort.

— Vous ne la blesserez pas, reprit-il d'une voix pressante, n'ayez pas peur...faites-moi confiance.

Sa voix sembla s'insinuer plus profondément en moi, calmant mes tremblements et ma panique. Je secouai la tête, perturbée ! Mais que se passait-il avec ce mec ? Ma réaction à sa présence n'était pas normale, ni naturelle...et j'avais horreur de ça !

— Il faut le faire...maintenant ! m'ordonna-t-il soudain d'un ton radicalement différent, qui me fit armer mon bras et entailler la peau de Cat sans la moindre hésitation, avant que je n'aie eu le temps de me rendre compte de ce que je faisais !

Dès que le sang de Cat se mit à couler sur sa peau, souillant les draps immaculés d'un rubis brillant ; je sentis l'emprise, ou quoi que ce fut qui m'ait fait agir contre ma volonté, se dissiper et je lâchai immédiatement le scalpel, qui tomba sur le sol dans un tintement cristallin. Un mélange de peur, de panique et de colère tourbillonnait en moi sans que je puisse encore consciemment faire le tri.

— Vous devez maintenir la lame dans la plaie, sinon elle va se refermer et vous devrez recommencer !

— Et tiens la poche de sang bien haut, sinon ça ne servira à rien ! ajouta Eva d'une voix qui me parut moqueuse malgré l'épaisseur de chêne qui nous séparait.

Je crois que l'unique raison pour laquelle je n'étais pas en train de tambouriner sur la porte en les traitant, elle et Nicolas, de tous les noms d'oiseaux, était que je comprenais qu'ils avaient raison et...je n'avais pas fait tout ça pour rien ! D'un mouvement rageur, je me baissai pour ramasser le scalpel et avec une grimace de dégoût fit ce que l'on venait de me demander.

Le temps me semblait interminable tandis que la quatrième poche de sang s'écoulait lentement dans la perf. Le sang de Cat qui commençait à goutter par terre en un ploc, ploc lancinant me tapait sur le système et commençait à me donner la nausée. Sans compter la fatigue, implacable qui faisait trembler mes membres et m'empêchait de réfléchir correctement. C'est dans une sorte de brouillard que j'entendis la voix de basse d'Aaron retentir dans la pièce.

— Son sang est purifié, vous pouvez nous laisser entrer à présent.

Trop soulagée pour me poser plus de question, je lâchai tout et d'une démarche incertaine allait ôter la barre de sécurité, avant de m'écarter pour les laisser entrer. 

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