46- Un nouvel hôte
Le joli drap blanc cache le sexe du bébé. Alors, à votre avis, garçon ou fille?
Siam ferma les yeux un instant et les réouvrit après avoir sentit la secousse familière. Elle venait d'être transplantée à l'infirmerie royale, et une armée de médecins s'activaient devant elle.
-- Comment vas-tu ma chérie? lui demanda le roi qui lui serrait très fortement la main.
Elle écarquilla les yeux et ouvrit la bouche mais aucun son ne sortit. Elle avait la gorge très sèche et des difficultés respiratoires qui n'étaient pas là auparavant.
La reine ferma les yeux. Il avait suffit d'une seconde pour qu'ait lieu un retournement de situation brutal. Dix secondes plus tôt, tout allait bien. Elle se tenait dans la salle à manger et s'apprêtait de faire la connaissance de ceux qui avaient sauvés sa fille et tous les autres captifs de la nation. Une contraction violente la transperça de toutes part. Elle ne put retenir un cri.
-- Votre Majesté, comment vous sentez-vous?
-- Mal, très mal.
En un éclair, elle se projeta des années en arrière et revécu ses deux premiers accouchements.
La naissance de César s'était déroulée de façon normale. Il y avait eu quelques contractions difficiles, probablement liées au stress de cet enfantement caché mais l'accouchement s'était bien déroulé.
Celui de Merryl' en revanche avait été particulier, et presque trop rapide. La reine avait perdu les eaux le jour et l'heure exacte du terme et quelques secondes plus tard, son médecin attitré réceptionnait la princesse dans ses bras.
Les accouchements des bébés royaux étaient toujours les plus instables et imprévisibles. Le sang doré était tellement chargé de magie que des réactions étaient provoquées avec le corps de la maman.
-- Restez allongée et écartez les jambes, nous allons vérifier l'état de votre col votre Majesté.
La reine fit ce qu'on lui demandait alors que le médecin la débarassait d'un jet de magie du bas de sa robe d'apparat. Il posa ses mains sur son ventre maintenant dénudé et ferma les yeux pour tenter de comprendre l'état du bébé.
-- Le bébé a des difficultés à respirer lui aussi. Nous ne pouvons pas nous permettre d'attendre et votre col n'est pas assez ouvert. Nous devons vous faire une césarienne, sous avis royal.
-- Je donne mon accord, balbutia Siam.
-- L'opération est-elle sans risques pour ma femme?
-- Je ne peux rien vous garantir mais nos meilleurs chirurgiens sont affectés.
La reine lui prit la main et le regarda fixement.
-- Lionel...
-- Je donne mon accord.
Le médecin magique leva ses mains. Une poussière dorée en jaillit et vint s'enrouler autour des tempes de la reine. Celle-ci se sentit sombrer dans le sommeil et ferma les paupières.
-- Son rythme cardiaque n'est plus bon depuis plusieurs semaines, expliqua le médecin. L'état de grossesse accentue les émotions. Avec l'enlèvement de sa fille, son fils retrouvé et la mort de son amour de jeunesse, sa majesté a été plus que secouée. Son flux sanguin est beaucoup trop rapide et irrigue mal les organes, notamment l'utérus.
Une équipe de chirurgiens allaient et venaient sur le ventre de la reine. Tous leurs instruments étaient en or massif car c'était le métal le mieux adapté à la composition du sang royal. Le roi voyait sa femme étendue, livide mais si belle. Ses longs cheveux blonds flottaient tout autour de son visage, l'encadrant d'un halo lumineux. Quoiqu'il faille faire pour cela, jamais il ne laisserait mourir...
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De leur côté, les invités du palais royal n'étaient pas restés les bras ballants. Tess et Alys accompagnées de leurs mères Noémie et Avril avaient pris le parti de rejoindre Merryl' dans ses appartements. La princesse avait beau être bien entourée du personnel domestique, Tess savait que ça lui ferait plaisir d'avoir un peu plus de compagnie.
César se faisait un sang d'encre et Chiara savait qu'il ne voudrait pas quitter le palais royal. Il avait d'abord songé à rejoindre ses deux soeurs.
-- Non, lui avait-dit Chiara, laisse les entre filles. Allons plutôt voir l'état de Dravil.
Il hocha la tête et ils s'y rendirent, accompagnés de quelques uns des anciens disparus. Le vieux savant était réveillé et leur adressa un grand sourire à leur approche.
-- Comment ça va les jeunes?
-- Nous vous retournons la question, répondit César.
-- Mon état se détériore mais ce n'est qu'aubaine. Bientôt, je retrouverai ma femme dans les cieux.
-- Ne dites pas cela, vous avez encore de grandes choses à accomplir sur Dencachar, appuya Jadina.
Le vieil homme sourit énigmatiquement.
-- J'ai entendu beaucoup de remue-ménage à l'étage des médecins. Que se passe-t-il?
-- La reine est sur le point de donner la vie.
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En salle d'opération, le front des médecins luisait de sueur.
-- Nous ne pouvons pas sortir le bébé maintenant. Son cerveau est mal irrigué. Si nous ouvrons plus, la reine va perdre une quantité trop importante de sang ce qui conduira à un choc cérébral.
-- Que pouvons nous faire? cria le roi affolé.
-- La refermer et attendre que le col s'ouvre naturellement.
-- Mais le bébé va être atteint, vous l'avez dit!
-- Nous allons essayer de stabiliser le rythme du bébé.
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Les traits du vieil homme se froncèrent.
-- Le terme est trop tôt, la reine n'est pas prête.
-- Toute une horde de médecins est sur le coup pour assurer sa sécurité, ce n'est pas un hasard, répondit Robin.
-- Dites leur que je peux les assister. Je parie qu'il n'ont pas prévu un scientifique dans cette opération.
-- Non, Dravil, reposez-vous, vous n'êtes pas en état de vous lever.
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-- Il y a forcément un autre moyen!
-- Il faudrait réguler le rythme cardiaque de la reine et diriger son flux sanguins vers les organes supérieurs. Il n'y a qu'une poignée de savants qui seraient capables d'une telle chose...
Il s'interrompit avant de reprendre.
-- L'un d'eux se trouve justement dans votre palais.
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Chiara, César et Dravil et les anciens captifs virent débarquer en courant le chef de la chirurgie royale. Celui-ci se pencha vers la couche de Dravil et ils échangèrent une poignée de paroles à toute vitesse dans un dialecte inconnu.
Lorsqu'ils cessèrent, le vieux savant se leva de son lit et vacilla quelques instants.
-- Reposez-vous, cria Jadina.
-- La reine a besoin de moi mon enfant. Tu l'as dit toi-même, je suis encore appelé à faire de grandes choses.
-- Est-ce qu'il s'en remettra? demanda Chiara au médecin.
Celui-ci secoua la tête.
-- M. Etna est parfaitement conscient de la situation. Il vivra ses derniers instants en tant qu'héros de la nation mais ne se relèvera pas de l'opération.
Le vieillard avait presque gagné la porte. Tous ceux qui étaient présents fondirent sur lui pour le serrer dans leurs bras mais il tendit la main pour les arrêter.
-- Ne m'affaiblissez pas avant l'heure mes enfants. Je veillerai sur vous de là-haut. Aujourd'hui pas d'adieu, rien qu'un au revoir. Nous nous retrouverons dans les cieux, je vous le promets.
Chiara tenta de le retenir en l'empoignant par le bras.
-- Tu sais petite, ils faut laisser les anciens avoir le droit de choisir leur fin.
Elle sourit tristement et laissa retomber sa main. Elle l'avait laissé partir.
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Quelques étages plus haut et quelques instants plus tard, la porte s'ouvrit pour laisser entrer Dravil Etna. Il posa ses mains sur le coeur de la reine et psalmodia des mots dans une langue étrange. Au fur et à mesure de sa litanie, le corps de la reine reprenait des couleurs tandis que celui du vieil homme devenait de plus en plus pâle.
Il acheva son enchantement et s'effondra dans les bras d'un médecin qui le recueilli. Celui-ci l'allongea par terre. Une mort pour une vie. Il vérifia le pouls de la reine.
-- Son rythme est stable! Nous reprenons l'opération.
Plusieurs minutes passèrent. Le roi était si anxieux qu'il n'ouvrit pas la bouche. Enfin, le chirurgien principal sorti le bébé des entrailles de la reine. Celle-ci, libérée de son sommeil ouvrit des grands yeux.
Le bébé poussa son premier cri. Il s'agissait d'une petite fille. Le roi laissa perler des larmes à ses paupières.
-- Bienvenue au monde Ezeryls Dravile Chiara, déclara-t-il.
A l'entente du nom, Siam comprit. Elle tourna par terre un visage baigné de larmes et vit le corps sans vie du vieillard.
-- Merci infinimment, déclara-t-elle.
Le roi recueillit la princesse dans ses bras tandis qu'elle se débattait. Il sentit son petit coeur qui battait vigoureusement dans son corps tout chaud.
Dravil était mort, Ezeryls était née.
Une mort pour une vie.
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Voili voilou, le bébé est donc une fille (sans blague!) Son prénom se prononce [É]-[ZEU]-[RIL]-[SE] (c'est moi qui l'ait inventé!)
Bises et à bientôt,
Ewww
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