37- Liens du sang, liens du cœur
Chiara hoqueta en serrant fort contre son cœur le visage de son compagnon.
César avait du sang doré...
Il était de sang royal!
Tous les gens qui s'étaient approchés contemplaient la scène, bouche-bés. Si elle avait appris quelque chose de son enseignement, c'était bien qu'il fallait prendre des décisions rapidement!
- Mais ne restez pas plantés là, hurla-t-elle. Qu'on aille chercher un médecin!
A l'aide de sa cousine, elle étendit César sur le flan. Erwan et Simon faisaient la même chose avec le corps de Christian. Celui-ci avait drôlement pali à la vue du jeune garçon. Les deux blessés furent couchés côte à côte. Leurs visages arboraient la même expression, ce qui était assez troublant.
L'un des médecins du royaume arriva. Il posa une main sur la tempe de César avant d'examiner sa blessure.
- Ce jeune homme fait une hémorragie externe. Le cœur est touché, il va falloir lui faire une transfusion sanguine ou bien il ne survivra pas.
Chiara sentit son cœur se recroqueviller sur lui-même. Elle lutta contre l'envie de se laisser aller et serra les dents.
- Il est le fils de la reine... On l'embarque jusqu'au palais royal alors!
- Nous sommes à mille lieues de là-bas, je ne sais pas si on aura le temps de...
- Non, attendez!
Une voix avait surgit, à côté d'eux. Erwan et Simon s'écartèrent. C'était Christian, couché par terre qui avait parlé.
- J'ai été touché, moi aussi, hoqueta-t-il, et ma blessure est plus grave que celle de César. Peu importe si je m'en sortirai ou pas, mais je veux sauver ce jeune garçon.
- Non monsieur, intervint le médecin, vous ne pouvez pas...
- Laissez-moi essayer!
- Vous n'avez pas compris, reprit-il, il nous faut une transfusion du même groupe sanguin que celui du jeune homme. Seul un membre de sa famille peut le sauver.
- C'est vous qui ne comprenez-pas, le coupa Christian en s'efforçant de garder contenance malgré ses forces qui le quittaient peu à peu. Je peux encore le sauver...
Il haleta.
- C'est moi qui suis son père...
Un murmure d'ahurissement secoua l'assemblée. Chiara elle-même ne savait plus quoi faire. Cela faisait trop d'un coup à supporter. Paris Kamshatar, l'ancienne détenue s'avança. Elle se posa près de l'homme étendu, qu'elle connaissait bien maintenant et le fixa dans les yeux.
- Es-tu sûr de ce que tu prétends?
- Autrefois dans ma jeunesse, je me suis fait appeler Chris. J'ai un jour rencontré la plus belle jeune fille de tous les temps, qui elle, avait prétendu se nommer Josie. Il s'agissait en réalité de l'héritière royale, et bien qu'elle ne soit plus maintenant qu'un souvenir, j'étais fou amoureux d'elle. Juste avant qu'elle ne donne la vie à cet enfant clandestin, elle m'a envoyé une lettre en m'annonçant qu'elle attendait un fils, de moi. Je n'ai jamais été un père pour cet enfant, mais je peux aujourd'hui contribuer à sauver sa vie. Laissez-moi, je vous prie.
Paris le fixait, les yeux brillants. A ses côtés Chiara était dans le même état. La chirurgienne ouvrit la bouche.
- On l'opère.
Ce n'était qu'un ordre, lancé par une frêle jeune femme qui malgré son grand état de fatigue avait pris la tête des opérations. Il n'y eut pas de contestation.
À côté d'elle, Tess pleurait à chaudes larmes devant la gravité de la situation. Elle ne connaissait pas César mais elle connaissait Christian. Sa grande sœur lui prit la main pour la réconforter avant de détourner toute son attention vers César. Les yeux verts de celui-ci étaient à demi-fermés. Les quelques personnes autour d'eux s'éloignèrent pour les laisser tous les deux.
Il entrouvrit la bouche.
- T'es belle Chiara, chuchota-t-il.
- Chuut, répondit celle-ci en sanglotant, je t'aime.
- Redis le moi encore une fois.
- JE T'AIME!
Elle avait presque crié.
- Et je veux que tu restes près de moi pour que je puisse encore te le dire.
- Si je reste, tu me le répèteras inlassablement?
- Sans fin, lui répondit la jeune fille.
César la fixa un dernier instant de ses yeux verts puis déclara en les refermant.
- Alors je ne te quitterai pas.
L'équipe de médecin arriva à nouveau, Mahaut les suivant de près. Paris posa une main délicate sur le front du jeune homme.
- Je ne t'opère pas mon grand, sinon ton cœur risquerait de ressembler à du clafoutis mais je dirige l'équipe.
Même si ses paupières étaient fermées, un sourire éclaira ses traits.
L'un des médecins se tourna vers Chiara et Mahaut.
- Je vous prierai de vous écarter et de ne pas revenir pendant l'opération, il faut que...
Mais Chiara tenait la main de César et n'avait fermement pas envie de la lâcher.
- Mais... bredouilla-t-il.
- J'y tiens.
Paris adressa un regard entendu à la jeune fille. Mahaut s'éclipsa après avoir déposé un bisou sur la tempe de sa cousine.
- Tu es forte Chiara, et je suis en pensée avec toi.
Puis elle ajouta tout bas à son oreille:
- N'oublie pas de le mater pendant l'opération!
Elle savait que Mahaut avait dit cela dans le but de la détendre. Elle lui adressa un sourire confus.
- Merci Mahauch.
Les médecins commencèrent leur travail, après avoir endormi César et son père. Pendant toute la durée de l'opération, Chiara resta là et dessina des cercles du bout de ses doigts sur le dos de la main de son petit-ami.
Mon ange dort, pensa-t-elle, et moi j'attends la guérison.
Après de longues minutes qui parurent interminables à Chiara, Paris prit la parole.
- Ne t'en fais pas Chiara, déclara-t-elle doucement, ce jeune homme va guérir. Nous avons simplement endormi son cœur avec un sortilège puissant destiné tout spécialement au sang royal. Le corps de César n'a pas l'habitude et le contre-coup le garde inconscient pendant quelques temps, mais il sera bientôt des nôtres. Christian aussi est inconscient, mais son geste à sauvé son fils.
La jeune fille sentit des larmes perler aux coins de ses yeux.
-Merci.
Autour d'elle, tout le monde réparait les dégâts. Certains s'occupaient de transporter les corps morts ou inconscients, d'autres soignaient les blessés. La ravisseuse fut ligotée de toutes parts par une troupe de soldats et menée jusqu'à un des avions. Elle vit aussi Simon qui s'occupait de créer une fosse pour y enterrer les cadavres des soldats ennemis. Elle, restait là, a lui tenir la main sans trop prendre conscience du temps qui se déroulait. Sa main restait plantée dans celle de César, toujours légèrement chaude.
Plus loin, elle entendit la voix de Bart, son père:
- Qui est ce jeune homme?
Ce fut Mahaut qui lui répondit précipitamment:
- Ne t'inquiète pas, il est très sain!
Un éclat de rire un peu nerveux secoua la jeune fille. Il était temps d'y aller. Elle aida les autres à charger le brancard de César dans les avions de chasse. Tout le monde y était déjà installé, sauf une équipe de soldats qui s'occupait de sécuriser le périmètre et s'occupait de fouilles. Il ne manquait qu'elle. Elle posa un premier pied sur l'échelle puis grimpa. Elle allait fermer la porte coulissante lorsqu'un bruit en bas lui fit porter attention à la clairière.
Il y eu gros bruissement au milieu des fourrés. L'un des nuages s'écarta puis la pleine lune éclaira de sa vive lumière l'origine de ce tapage.
Il s'agissait d'une ribambelle de lapins blancs qui détalaient tous les uns derrière les autres. Tess, qui était à côté de sa sœur les reconnu aussitôt. Il s'agissait des animaux surenchéris que possédait leur ravisseuse! Apparemment, ils avaient décidés de se faire la malle...
Le premier de la file avait les yeux dorés et gardait sur le visage une expression déterminée. C'était l'alpha de Merryl' et il cherchait à rejoindre sa maîtresse coûte que coûte. Les autres conservaient tous l'air un peu benêt de ceux qui ne savent pas où ils vont mais sont très contents de s'y rendre quand même. Ils étaient très réjouis et détalaient en de grandes enjambées.
- J'ai le même air couillon sur la face quand je te cours après, grande sœur? demanda Tess d'un air dépité.
- Oh non ma belle, lui répondit celle-ci. Tu es bien pire!
Face à la grimace de sa sœur, un sourire fendit les traits de son visage. Elles refermèrent la porte de l'avion. En voyant les lapins, Chiara avait saisit une chose. Il y avait une partie de leur équipe dont ils n'avaient pas eu d'informations, et ils leur fallait les retrouver, si possible avant les lapins.
Elle envoya un oméga à Louisa.
La réponse ne se fit pas attendre, et aussitôt, une forme argentée se distingua dans les airs et s'avança vers elle. Il s'agissait d'un faucon... l'alpha de la jeune danseuse. Celui-ci s'inclina et la voix de sa sœur d'âme retentit.
- Je suis soulagée de la tournure des évenements et si fière de vous! Pour ma part, j'ai récupéré la princesse et Dravil. Une embuscade nous a cueuilli au pied de la colline. Nous nous sommes battus et nous sommes maintenant rentrés. La petite va bien mais le vieil homme est blessé. Je lui ait fait les soins de première urgence en attendant l'arrivée des médecins. Alys Martini, la petite sœur de César est aussi avec moi et s'entend à merveille avec Merryl'. Elle a sauté toute seule en parachute de l'avion en provenance de Diamentor puis à regagné l'auberge. Je suis sidérée, votre équipe ne compte pas des débutants.
La voix de Louisa stoppa puis reprit:
- Je devrai rectifier, "notre" équipe. Je sais que ma dette est payée mais je reste avec vous.
- Je ne te remercierai jamais assez Louisa, pour toute ton aide, répondit Chiara, toujours par l'intermédiaire du même mode de communiquation. Ne bougez-pas nous venons vous chercher!
Effectivement, l'escadron des avions de chasse décolla. Celui de l'infirmerie avait déjà pris la tête, pour tenter d'atteindre les hôpitaux taloriens le plus vite possible.
Chiara se trouvait avec sa famille, Erwan, Simon, Jadina, Loïse et César, malgré le fait qu'il soit toujours inconscient.
Quand elle pensait à la mission réussie et les retrouvailles avec sa sœur, son cœur se remplissait de joie. Dès qu'elle pensait à la mort de Diego, il se serrait dans sa poitrine et lorsqu'elle songeai à César, à sa condition et à la tournure qu'allait prendre sa vie, Chiara était prise de vertiges.
- Quelle étrange nuit, pensa-t-elle.
L'avion commença à ralentir. Ils se posaient sur la zone.
- Qui veut descendre? demanda Bart.
Chiara avait besoin de l'air frais de la nuit pour pouvoir respirer et prendre du recul sur ses émotions.
- Moi, annonça-t-elle.
- Alors, je t'accompagne!
Ils étaient deux à avoir parlé: Erwan et son frère Thibault.
- Et bien venez tous les deux avec moi.
Elle commença à sortir des parachutes de la soute du petit avion.
- Oh non, déclara Erwan avec un de ses sourires coquins et charmeurs dont lui seul avait le secret. J'ai bien mieux à te proposer.
Il siffla entre ses doigts.
- Roméo!
L'immense aigle d'Erwan volait derrière les avions. Il s'approcha de la portière et s'arrêta juste devant.
- Emportez un harnais de sécurité, il paraît que le vieil homme est blessé.
Chiara s'aggripa aux plumes de l'animal et passa une jambe au dessus de son immense cou. Son frère était derrière elle et Erwan, qui n'avait peur de rien était entre les pattes de l'animal.
Ils se préparèrent à s'envoler, mais une voix les interrompit.
- Chiara?
Elle se tourna vers son père.
- Oui?
- Sois prudente!
Un sourire éclaira ses traits. Qu'elle était contente de les retrouver!
- Bien sûr Papa...
Par la porte ouverte de l'avion, ils s'envolèrent dans la nuit. Le vent fouettait les cheveux de la jeune fille qui s'en fichait éperdument.
L'alpha amorça une descente en piqué. En bas, dans la rue déserte, trois silhouettes les attendaient. Elles portaient la quatrième qui semblait en assez mauvais état.
Avant même que son aigle ait touché le sol, Erwan sauta et courut vers les trois jeunes filles. Il prit dans ses bras la petite Alys, fit la bise à Louisa qu'il ne connaissait pas encore et salua Merryl'.
- Bonsoir altesse royale.
- Merci monsieur, mais vous pouvez m'appeler Merryl'.
- Seulement si tu m'appelle Erwan alors Merryl'.
Il lui tendit sa main et elle lui tappa dedans. Erwan avait toujours eu un don pour savoir comment s'y prendre avec les enfants.
Chiara et son frère s'emparèrent du corps de Dravil. Il ne pesait pas plus lourd que le poids d'un enfant. Ils lui passèrent le harnais de sécurité et l'attachèrent solidement au cou de la bête.
Merryl', ébahie, contemplait l'animal qui se tenait devant elle.
- On va monter sur un aigle royal?
- Aigle royal pour princesse royale, lui répondis Erwan avec un clin d'œil.
- Et ensuite, nous accosterons dans un avion de chasse, déclara Chiara à l'intention de la petite.
Elle ouvrit des yeux encore plus grands. Alys lui prit la main et fit celle qui était déjà bien expérimentée.
- Tu va voir, c'est très simple, déclara-t-elle en haussant les sourcils.
Les quelques plus grands ne purent réprimer un sourire.
- Alys tu viens avec moi, déclara Chiara. Merryl avec Erwan et Louisa avec Thibault. Nous allons vous tenir fermement. Dravil ne craint rien, il est attaché.
Ils grimpèrent tous sur l'animal. La petite blonde se blottit entre les bras de Chiara qui l'enserra bien fort.
Une pensée étrange l'envahie.
- Je me trouve entourée des deux sœurs de César, pensa-t-elle, mais aucune ne se doute de la vérité.
Elle n'eut pas le temps de ruminer. Erwan donna le signal du départ et Roméo s'éleva dans les airs. Louisa et Merryl' poussèrent un cri. Alys avait l'air d'aller, mais ce n'était pas étonnant si d'après Louisa elle avait sauté toute seule en parachute.
Ils remontèrent tous assez rapidement. L'avion de chasse effectuait des petits cercles dans le ciel en les attendant. Par la fenêtre ouverte, ils évacuèrent Merryl' puis Alys et Louisa et ils montèrent à leur tour. La porte refermée, ils s'assirent et s'attachèrent fermement.
Le pilote repris les commandes. Il s'agissait de Simon. À côté de lui, la belle Jadina le contemplait avec admiration. Chiara savait qu'il était temps d'annoncer aux deux petites la vérité sur l'identité de César.
Elle se frotta la gorge et se lança. Durant tout le long de son récit, les deux fillettes écoutèrent attentivement. La jeune fille prenait soin de bien choisir ses mots, pour ne pas leur faire subir un trop grand choc et limiter les dégâts. Les yeux d'Alys se remplirent de larmes lorsqu'elle comprit de quoi il s'agissait. Elle commença à se débattre et à crier. Ce fut Louisa qui était à ses côtés qui la calma et tenta de l'apaiser. Finalement, la petite se détacha et courut rejoindre le chevet de son frère pour lui murmurer des paroles attendrissantes à l'oreille et lui caresser les cheveux.
Merryl' elle, était devenue toute pâle. Elle garda le silence pendant dix bonnes minutes puis lança:
- On dirait bien que maman à fait des bêtises plus jeune.
On la réconforta elle aussi du mieux que l'on pouvait. Apprendre que l'on avait un grand-frère et que l'on avait cottoyé le père de ce grand-frère pendant des jours pouvait être assez remuant.
Après cet épisode, personne ne parla. Chacun essayait du mieux qu'il pouvait de récupérer de la bataille en somnolant ou en se reposant.
Vers la fin, alors qu'ils finissaient la traversée de l'océan Deltakar, Chiara se pencha vers sa cousine qui avait la tête perchée sur son épaule et le regard dans le vague.
-Tu sais Mahaut, je viens de vivre tellement d'émotions que je suis anesthesiée maintenant, rétorqua-t-elle. Tu pourrais m'annoncer que tu sors avec un dromadaire cracheur de bulle, ça ne me ferait rien.
- Sympa pour Erwan, répondit-celle-ci.
Chiara se dressa sur ses pieds.
- Quoi?! Tu sors avec Erwan?
- Je croyais que tu étais anesthesiée...
Elle jeta un regard affolé à l'intéressé qui confirma les dires de sa nouvelle petite-amie avec un haussement de sourcils coquin.
L'avion amorça sa descente en piqué. Ils se posèrent dans le parc du château. L'aube était là et le soleil se levait. Ils sortirent tout à tour.
Alors qu'elle posait un pied sur l'herbe douce, légèrement gelée, Chiara sentit une vague de frissons lui parcourir les épaules.
Certaines vérités avaient été dévoilées et d'autres restaient à venir.
Loin de la rassurer, ces révélations allaient être pour tous une nouvelle source d'angoisse et de déstabilisation.
Elle n'avait aucune idée de la tournure qu'allait prendre les événements.
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