Royaume de Talor, Rubilys, enceinte du palais royal (sans jeu de mot pour le ventre de la reine)

Noémie Dalvir s'avança dans l'immense allée qui menait au palais royal. Elle ressera son écharpe autour de son cou en frissonnant. Les hivers étaient censés être plutôt doux à la capitale, mais cette année, il ne fallait pas compter sur la clémence du temps! Qu'est-ce que ça devait être à la couronne de glace... Du bout de ses doigts, elle fit crépiter des étincelles violettes pour se réchauffer.

Noémie se faisait un peu de soucis pour Chiara, sa fille qui était toujours dans les pays du Nord. Elle savait bien qu'à seize ans, la jeune fille n'était pas comme toutes les autres. Elle avait perdu son innocence d'enfant depuis bien longtemps, et c'était le cas pour tous les élèves de l'école des murmures. Si le métier d'espion apporte une résistance physique et mentale incroyable, une vie bien remplie et la satisfaction d'accomplir des grandes choses pour le bien du monde, il enlève aussi une grande part de vie supposée normale.

Mais le mêtier était de famille. Noémie avait rencontré Bart son mari à l'université. Ses parents étaient comme elle espions et ceux de Bart aussi. C'est pour cela que Noémie connaissait bien les risques du métier. Elle-même avait réellement perdu son innocence brutalement à dix-neuf, lorsqu'elle avait du coucher avec un homme pour lui soutirer des informations avant de le tuer dans son sommeil. Charmant non?

Elle n'avait jamais rien dit à ses enfants et c'était mieux pour tout le monde. Elle se doutait aussi que son premier fils, Derek avait souvent dû user de pratiques semblables. Ce genre de comportement était nécessaire mais pas pour autant sain. C'était comme ça pour tout. Rien n'est noir, rien n'est blanc. Tout est nuances de gris.

Le palais doré était illuminé dans le ciel ombragé. Il était magnifique comme à son habitude. Noémie ouvrit la bouche et poussa un "oooh!" de ravissement. Un nuage de buée se forma devant elle et s'évaporra dans le ciel gris.

Deux hommes en livrée d'or et de rubis gardaient l'entrée principale. Noémie s'y présenta et ils la laissèrent entrer après avoir vérifié son identité.

Lorsqu'elle entra dans la salle prévue, elle salua du regard le public qui s'y trouvait déjà et se laissa tomber sur une chaise. Aujourd'hui avait lieu une énième réunion avec les familles et les proches des disparus. Si les services secrets avaient des bonnes nouvelles, alors ils les communiquaient. Quoiqu'il en soit, les renseignements ne tombaient pas souvent et ces réunions servaient plus de point d'appui pour les familles. Des moments précieux pour ne pas perdre pied.

- Bonjour Hugo, s'exclama la maman de Chiara à un homme d'une trentaine d'année. C'était le frère de Paris, la chirurgienne.

- Bonjour Noémie! Bart ne vient pas aujourd'hui?

- Non, il est en déplacement mais il espère autant que moi d'avoir des bonnes nouvelles du côté de Tess et des autres.

- Salut Noémie, salut Hugo!

Cette fois-ci, il s'agissait de Rob, le petit ami de Jadina. Le problème était que Jadina était une jeune femme très convoitée, et lors de la première réunion, trois prétendants avaient frappé aux portes du palais dans l'espoir d'obtenir des nouvelles de l'élue de leur cœur.

- Salut!! répondirent en même temps Noémie et Hugo.

Ils n'eurent pas le temps d'échanger des news car la porte de salle s'ouvrit pour laisser passer la reine, magnifique comme à son habitude. Ses cheveux blonds lui arrivaient dans le bas du dos mais elle les avait relevé en chignon aujourd'hui. Même dans sa robe toute simple bleue marine, la reine était sublime.

Elle les salua en souriant:

- Je vous en pris, prenez place. Après tout ce que nous avons traversé ensemble, je me doute que vous commencez à être des habitués du palais.

Il y eut quelques rires discrets dans l'assemblée, mais même si tout le monde s'efforçait d'être courageux, ils étaient tous très anxieux.

- Avez-vous des nouvelles de votre côté? continua la reine.

Ils secouèrent tous négativement la tête. La reine ramena une mèche derrière son oreille, secoua le pli de sa robe et commença. Noémie savait que ses gestes étaient une manière de cacher son trouble. C'était compréhensible quand sa fille de six ans était portée disparue...

- Bien, je ne peut pas vous révéler grand chose. Il semblerait simplement que les prisonniers aient été repérés de manière plus précise qu'auparavant. C'est pourquoi les services secrets densifient leurs recherches de plus en plus pour pouvoir accéder à des informations. Il n'y a aucune mauvaise nouvelle à vous communiquer, mais plutôt une avancée positive. Je sais que vous êtes tous anxieux et... (elle marqua une pause) et je le suis autant que vous. C'est pourquoi nous ferons le maximum pour nous assurer que nous les retrouverons.

Une très vieille femme dans l'assemblée hôcha la tête et laissa s'échapper une larme.

La reine reprit la parole:

- Ethel ici présente (une femme aux cheveux auburn et lunettes sourit, visiblement gênée) a lancé sous le parrainage du palais une collecte de dons et d'informations auprès de toutes les contrées. Sañar et Madalga nous ont directement annoncé leur appui, et les autres ont aussi répondu favorablement. Tout Dencachar doit être au courant pour maximiser les chances d'avoir des informations.

Tout le monde hôcha la tête, Noémie la première.

- Robin, Cierra, Jadina, Christian, Paris, Dravil, Mathias, Tess et Merryl' sont notre priorité et tout le royaume s'active pour les retrouver.

Elle leva son poing fermé.

- A eux tous.

C'était une pratique répandue dans Dencachar pour honorer la mémoire ou les actes de quelqu'un.

Tout le monde fit de même.

- A eux!

Suite à ce geste, Amalia Prada, la femme de Christian ne put retenir ses larmes. Elle s'effondra en sanglots sur sa chaise.

Pour l'avoir vue pas mal de fois ces derniers temps, Noémie savait qu'elle était assez fragile. C'était de tout le groupe celle qui avait le plus de mal pour intérioriser sa douleur.

Noémie se retourna et tendit un mouchoir à la pauvre femme en détresse.

- Amalia, ne t'inquiètes pas.

Celle-ci s'empara du mouchoir mais sanglota de plus belle. C'était une femme d'une quarantaine d'années mais elle n'avait pas de compagnon d'âme. Cela arrivait parfois, et ce n'était pas définitif. Elle n'avait juste pas encore trouvé le bon. Quoiqu'il en soit, sans son mari elle se sentait très seule.

- Allez, tout va bien, tu es très forte pour supporter cela. Je sais combien c'est dur. Ma fille me manque à chaque instant et ne pas avoir de nouvelles d'elle me désespère, tu peux me croire.

Amalia releva la tête et écquarquilla les yeux.

- Tu veux venir prendre un thé chaud à la maison?

La pauvre avait bien besoin de ça. Mais en voyant le regard envieux de son voisin, Noémie sut qu'elle n'était pas la seule.

- Je convie tous ceux qui le veulent à la maison pour un thé alors!

Ils répondirent presque tous favorablement sauf la reine qui ne pouvait pas quitter le palais comme ça à cause de sa grossesse.

Ce fut un moyen pour tout le monde de confier ses joies, ses tourments et ses peines. Plus tard dans la soirée, Noémie confia à son mari:

- Promet-moi que jamais un des garçons n'épousera une minette comme Amalia Prada. Elle a un bon fond mais elle un peu trop sensible. C'est une vraie fontaine celle-là!

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Île de Cerylis, Manoir non identifié

Tess était en sueur. En redescendant les escaliers sombres et poussiéreux elle s'appuya contre le mur et poussa un gémissement. Elle n'avait jamais autant donné en magie. À présent, la maîtresse de ce manoir les faisait travailler régulièrement, forçant leurs pouvoirs à se déployer avec un sérum.

Si quiconque tentait de riposter, il était immédiatement envoyé en salle de torture.

A côté d'elle, Merryl' était toute blême et avait des nausées. Leur ravisseuse les poussait au travail forcé. Aujourd'hui, Tess avait brisé trois miroirs d'un coup en une seule éjection de magie. Trois miroirs qui étaient supposés inclassables... Cette fin d'après-midi avait été la goutte d'eau de trop.

Ils étaient en train de perdre toute humanité en eux....

Leur supérieure faisait d'eux des machines de guerre....

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Au dessus de Toundraville, Île Cerilys, Planète Dencachar

Une voix-off surgit au dessus de leurs têtes, faisant sursauter César et Louisa qui dormaient.

"C'est le commandant de bord qui vous parle. L'atterrissage du vaisseau est iminent. Veuillez rester assis jusqu'à l'arrivée. ".

Chiara surgit de l'encadrement de la porte. Elle était essoufflée et ses cheveux étaient en bataille. Mais ce n'était pas ça qui retint l'attention de César et Louisa.

Dans ses bras, Chiara portait trois sacs, tous les trois équipés de sangles.

- Vous êtes prêts?

- Pourquoi?

- Enfilez-ça, vite!

Elle détacha l'un des sacs qu'elle s'accrocha dans le dos. Deux lanières pendaient, de chaque côté.

Elle prit alors son sac à dos de mission et en sortit trois oreillettes.

- J'avais pensé à emporter ça, de la base à Diamentor.

Sans dire un mot, les deux autres les enfilèrent. Chiara sortit ensuite des casques anti-bruits qu'elle leur tandit.

- Pourquoi est-ce qu'on va avoir besoin de ça?

- Mettez- les, c'est tout, pendant que vous dormiez, j'ai eu une idée.

Ils enfilèrent aussi les casques, puis sanglèrent les sacs dans leur dos.

- Bien, j'ai posé une caméra au dessus du GPS qui s'affiche dans toutes les cabines. On va ressortir par là où je suis entrée.

Tous leurs bagages rangés, ils quittèrent le placard qui leur avait servir de cabine de séjour. Un étage plus haut, ils arrivèrent devant un large hublot.

- Je vais sauter la première, Louisa tu suis et César tu fermes la marche.

Les deux hoquetèrent, bouche-bés. Elle ouvrit la fenêtre.

- Vous voyiez notre atterrissage comment?! hurla-t-elle pour couvrir le bruit de l'air qui s'engouffrait. Quand vous me verrez déplier mon parachute, faîtes en de même.

- Quoi?!

- Dès que j'ai sauté Louisa, c'est ton tour, ne traîne surtout pas!

- Mais où as-tu trouvé ces parachutes, hurla celle-ci.

- Dans les cabines de secours!

- Aphro est dans mon sac. César, où est Hermione?

- Dans mon sac aussi!

Chiara recula et prit son élan. Elle courut et s'engouffra à travers la fenêtre. César et Louisa entendirent tous les deux sa voix, dans leurs oreillettes.

- On se retrouve en bas!!

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Royaume de Talor, Rubilys, locaux de l'université des espions

Loïse Traylar se trouvait devant l'écran d'un ordinateur, une casque sur les épaules. Elle semblait très concentrée sur l'écran et les informations qu'on lui transmettait. Soudain, la jeune fille s'écarta de l'écran en poussant un rugissement de joie.

Simon, l'entraîneur et Thibault accoururent en courant.

- C'est bon ils se sont posés!!!!

Les deux hommes ouvrirent la bouche.

- Quoi..?!

- Ils viennent d'arriver. Chiara se trouve sur Cerilys!