2. Le danseur (1/2)

Bravo à Egwene16, AngeliqueFournier0 et KaRine054 d'avoir trouvé la référence vampirique glissée dans le chapitre 1 ! Il s'agissait bien de David Talbot, personnage appartenant à l'univers de l'écrivaine Anne Rice. Première à avoir répondu, c'est donc Egwene16 qui remporte un OS de son choix. (N'hésite pas à me faire part de ta demande, en commentaire ou en MP.)

Et sans plus attendre, le chapitre 2, qui présente le personnage de Gulf ainsi que son univers.

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De nos jours, île de Koh Kret, Thaïlande.

Son cœur battait furieusement dans sa poitrine. Des lambeaux de sa peau brûlaient encore, léchés par des flammes impalpables. Suni venait de se libérer d'un cauchemar terrifiant comme on échappe de peu à la main glacée de la mort.

Il ouvrit la petite fenêtre au-dessus de son lit pour glaner de la fraîcheur et admirer le paisible paysage de l'aube, laissant ses poumons s'emplir de l'air pur de la campagne. Il ne se lasserait jamais de cette vue privilégiée sur le Chao Phraya ; les bateaux typiques à longue queue quittaient peu à peu leur immobilité nocturne et les fenêtres des maisonnettes s'éclairaient une à une, signe que le village s'éveillait en douceur. La lune, brillant encore dans un ciel à la blancheur naissante, se reflétait sur l'onde du fleuve. Cet entre-deux crépusculaire était d'une beauté saisissante, presque surnaturelle.

Son rythme cardiaque commençait enfin à se stabiliser.

Giselle*, sa petite chatte blanche, sauta sur ses genoux pour mendier des caresses. Il la gratouilla quelques minutes avant de retrouver sa grand-mère, occupée à disposer ses poteries artisanales sur le palier de leur maison sur pilotis. Ses lourds cheveux blancs étaient relevés en un chignon épais. Une robe fleurie habillait sa silhouette ronde et un chapeau de paille couvrait sa tête.

Il la salua avec nonchalance, échouant à retenir un bâillement.

— Bonjour, Khun Yâa.*

— Tu as encore fait un cauchemar, c'est ça ? présuma-t-elle d'une voix rauque, saturée par des années de tabagisme.

Suni soupira d'agacement. Sa grand-mère paternelle devinait tout, c'en était effrayant. À son âge, il escomptait naturellement lui cacher quelques aspects de sa vie – autant dire la plupart – mais il fallait user des plus ingénieux stratagèmes pour se soustraire à la sagacité de son aînée, dont la suspicion à son égard était une seconde nature.

— Je ne voulais pas traîner au lit, mentit-il en haussant les épaules.

Amnuay arqua un sourcil.

— Mais bien sûr ! Tu me ferais croire que tu es devenu soudain matinal ! Mamie Amnuay n'est pas si bête, mon petit, le rabroua-t-elle en tirant d'un index fripé la peau sous son œil.

Suni dut se résigner, vaincu par la clairvoyance de son aïeule.

— Alors, c'était quoi, cette fois ? reprit Amnuay, en infatigable inquisitrice.

— Du feu.

— Eh bien, c'est nouveau. En général, tu as peur de te retrouver tout nu sur scène. Tes rêves deviennent bien plus dangereux, dis-moi, se moqua-telle.

— Khun Yâa ! s'outra Suni à la mention de ce rêve ridicule qui revenait avec une humiliante régularité.

En réalité, les cauchemars enflammés n'étaient pas inédits. Pour une obscure raison, il préférait garder ses terreurs nocturnes sous silence.

Mieux valait oublier ces monstres incandescents, hauts comme des murailles, ces hurlements stridents ; moribondes incantations. Cette sensation intolérable de se consumer. Songer à cette indescriptible torture faisait frissonner ses os. Il se concentra sur une image familière aux vertus apaisantes : Amnuay s'appliquait à installer sa petite boutique avec des gestes minutieux, tout en fumant sa pipe ; les touristes allaient bientôt affluer par le premier ferry de la journée. Suni se laissa bercer par ce rituel précis et délicat.

— C'est ton école de danse qui te tracasse ? reprit-elle. Tu passes un test important aujourd'hui, après tout.

— Peut-être, oui... admit Suni.

Même s'il pressentait que son rêve n'avait rien à voir. Les flammes s'emparaient de ses nuits depuis sa plus tendre enfance, sans qu'il ne parvienne jamais à identifier la source de ce brûlant tourment.

— Je n'aime pas beaucoup cette école, tu sais, pleine de petits bourgeois. Tu pourrais faire de la danse traditionnelle, au lieu de jouer au petit rat de l'Opéra. On n'a pas besoin de se conformer aux modes occidentales, maugréa Amnuay.

— Je ne vais pas renoncer à ma passion par peur de froisser nos ancêtres.

— Bah ! Qu'est-ce que je peux y faire ? Mais je n'aime pas ces gens, marmonna-t-elle. Ils se croient supérieurs à nous autres. Reste sur tes gardes, c'est compris ?

Sa grand-mère l'avait épuisé pour la journée avec ses sermons. Il ne lui restait plus qu'à retourner se coucher : encore quelques heures avant de se risquer dans le virage décisif de sa jeune carrière.

Il traversa la maison pour gagner la chambre de Lamaï, sa meilleure amie et colocataire.

Suni l'entendait pianoter frénétiquement sur son ordinateur.

— Lamaï ? Est-ce que ça va ? demanda-t-il en poussant la porte.

À peine vêtue d'une culotte et d'un débardeur, la jeune femme semblait absorbée par son écran. Ses longs cheveux noirs s'écoulaient en cascade désordonnée dans le creux de son dos. Elle retira son casque et, arrachée à sa transe 2.0, lança un regard surpris à son ami.

— Quoi ? grommela-t-elle.

— Pourquoi tu es levée si tôt ? Tu es tombée du lit ?

— Je te retourne la question, Su.

— Cauchemar. Et toi, c'est quoi ton excuse ?

— J'arrive pas à dormir. J'ai joué à League of Legends toute la nuit. Défoncer des connards de masculinistes en ligne, ça soulage, t'imagines pas.

Suni pouffa de rire. Lamaï n'avait décidément rien d'une jeune fille conventionnelle. Elle était belle et féminine, mais possédait aussi un langage de charretier. Férue de jeux vidéo et de code informatique, elle en avait même fait son métier. Une femme étonnante, dont Suni ne pouvait se passer. Depuis l'enfance, c'est Lamaï qui le protégeait quand il se faisait malmener ; on lui reprochait sa timidité, sa réserve. On le condamnait pour son visage trop délicat. Elle avait toujours été sa seule véritable amie. Sœur d'adoption, jumelle de cœur. Entre orphelins, ils se comprenaient.

— Tu veux dormir avec moi ? Il te reste quelques heures, non ? Tu dois être en forme pour ton test.

Suni accepta. Dans la chambre, une vraie pagaille l'accueillit. Des vêtements, des bibelots, un cendrier et de la paperasse gisaient au sol. Lamaï s'allongea sous les couvertures et lui ouvrit les bras, l'invitant à la rejoindre. Suni ne se fit pas prier pour se nicher dans cette étreinte réconfortante.

Le jeune homme était soucieux. Dans quelques heures, il tenterait de se hisser au sein du corps de ballet, composé de plusieurs échelons. Actuellement quadrille, il visait la place de coryphée. Les premiers ne dansaient jamais qu'en groupe, tandis que les seconds gagnaient un privilège considérable : le rôle tant convoité de soliste. C'était son objectif, après un an de stage au sein du prestigieux conservatoire de danse. Dans sa tête, la musique du Fantôme de l'opéra se lança. L'envoûtante mélodie prit aussitôt possession de son être. Il parvint à se rendormir, l'esprit peuplé de pas de danse.

Cette fois, aucune flamme menaçante ne vint troubler son sommeil.

***

Le danseur emprunta le ferry à l'embarcadère de son île jusqu'à la capitale. Une fois sur la terre ferme, les nuisances de la ville agressèrent ses sens. Il vissa son casque sur ses oreilles pour se préserver de l'effervescence urbaine. Cela ne suffit pas à lui apporter la paix : des affiches du Premier ministre à l'expression belliqueuse bariolaient les murs. Celui-ci était en campagne et misait lourdement sur la sécurité. « Nos rues ne sont plus sûres » éructait-il en toute occasion, visant en particulier la population vampire qu'il accusait de tous les maux.

Le danseur n'avait jamais vu l'une de ces créatures. Sa connaissance se limitait à leur réputation propagée par les médias et les politiciens. Sa grand-mère les haïssait de toute son âme, et ce n'était pas la seule. Il n'était pas conseillé de frayer avec ces êtres capables de vous arracher la gorge d'un coup de dent acéré.

Un certain nombre d'entre eux s'étaient fondus dans la société, parvenant à dissimuler leur véritable nature et respectant peu ou prou la loi, mais ils restaient méprisés, stigmatisés. Rejetés, ils ralliaient alors des gangs qui terrorisaient la population. Ces derniers temps, un rien pouvait embraser la mèche de la discorde. L'animosité enflait toujours plus entre les deux espèces. Le politicien, en parfait gourou et démagogue, soulevait des foules hystériques, prenant un malin plaisir à ajouter de l'huile sur le feu. Humains et vampires ne cessaient de s'affronter. La guerre civile guettait ; tapie dans l'ombre des ruelles, embusquée dans le secret de la nuit, prête à bondir. 

L'immense édifice du conservatoire se dressa enfin, tel un monument éclatant de majesté ; un temple dédié à l'art de la musique et de la danse, mais aussi des coups bas... Suni serra nerveusement la bandoulière de son sac. Il n'avait pas le droit à l'échec. Cette journée était cruciale !

Il ne tarda pas à rejoindre les vestiaires pour se mettre en tenue, saluant brièvement ses camarades mais se gardant de toute effusion de sympathie. Ici, on ne se liait pas d'amitié. La danse classique était une discipline exigeante, capable de pousser les élèves aux pires extrémités.

Il enfila son justaucorps noir, ses collants et ses pointes, puis s'examina dans le miroir. Une silhouette fine et gracieuse se révéla, ainsi qu'un visage doux aux traits délicats, encadré de cheveux sombres et ondulés. Sa peau dorée et ses yeux en amande, d'une chatoyante teinte chocolat, lui conféraient un charme élégant, mystérieux. Quant à ses pommettes hautes, elles avaient gardé la rondeur de l'enfance. Une bouche bien pleine, couleur cerise, achevait d'attirer les regards sur sa beauté discrètement androgyne. Un corps taillé pour la danse, sculpté par des heures de travail acharné ; un visage aux attraits empoisonnés. Suni n'avait qu'un but, devenir un instrument parfait au service d'un art parfait, mais il détestait les regards que ses traits uniques attiraient.

S'élever dans la lumière, tout en restant dans l'ombre, tel était son paradoxal désir.

Bientôt, ce fut l'heure. Il traversa les couloirs pour se rendre en salle de théâtre. Dans les coulisses, de nombreux danseurs attendaient déjà leur tour en s'échauffant. Il entrevit une jeune fille sur l'estrade, entrée en stage l'année précédente. Tout comme lui, elle convoitait l'échelon coryphée. Une poignée d'élus atteindrait ce niveau. Les autres pourraient toujours retenter leur chance l'année suivante, ou bien tout bonnement changer de vocation. 

Alors qu'il observait la scène depuis les coulisses, le ventre rongé d'appréhension, un danseur s'approcha de lui.

— Le directeur ne va en faire qu'une bouchée... se désola faussement son camarade. Regarde-la, à trembler sur ses jambes comme une petite biche craintive.

Suni reconnut Mean, un coryphée arrogant.

— Tu connais le directeur ? questionna-t-il avec curiosité.

L'homme incarnait pour lui un insondable mystère. Il n'apparaissait jamais dans les couloirs de l'école, certainement trop occupé par ses propres affaires. Pour une raison inconnue, son identité n'était pas rendue publique. Mean ne prit pas la peine de répondre ; sa bouche demeurait close mais son œil frisait de malice.

Le jeune quadrille étudia la prestation maladroite de la jeune fille. Son regard se posa ensuite sur le jury plongé dans l'ombre, parmi lequel se trouvait le directeur. Il devina sa silhouette masculine et autoritaire fixer la danseuse mal assurée sur scène.

— Tu vas bientôt faire sa connaissance. C'est rare qu'il porte de l'intérêt aux quadrilles, mais maintenant tu deviens grand, n'est-ce pas... ? railla Mean.

— En quoi pourrais-je l'intéresser ?

— Tiens, un être pur. C'est plutôt rare, de nos jours, s'amusa le coryphée d'un ton sarcastique. Tu es doué. Il se pourrait que tu lui tapes dans l'œil, tu sais. Le directeur a beaucoup d'influence. Ceux qui se font bien voir obtiennent souvent ses faveurs.

Suni l'écoutait d'une oreille distraite. Tout ce qui lui importait, c'était la danse. Il était prêt à beaucoup de sacrifices pour atteindre ce rêve. La jeune fille quitta la scène en sanglotant. Quelques danseurs terminaient de ranger leurs affaires. Dans un coin, certains essuyaient les larmes de leur prestation ratée.

Enfin, ce fut son tour.

Le cœur battant, Suni fit son entrée sur scène. Il s'obligea à ignorer le jury pour ne pas se laisser déstabiliser. La musique du Fantôme de l'opéra s'éleva et son corps se mit en mouvement de lui-même. Suni ne se pensait pas doué pour grand chose... Mais s'il y avait un domaine dans lequel il excellait et se sentait enfin lui-même, c'était assurément la danse. Danser, pour lui, équivalait à flotter.

Il se sentait pousser des ailes !

L'épreuve se dépouillait peu à peu de son labeur, le trac s'effaçait devant une souveraine allégresse ; danser devenait aussi naturel que respirer. Le danseur volait sur scène, le temps et le monde s'oublièrent ; il avait quitté la terre, sa laideur prosaïque et son cortège de faux-semblant. Ne restait plus en cet instant que son corps souple fendant l'air avec une grâce saisissante, tel un oiseau libre et heureux.

La musique s'arrêta soudain et Suni jura qu'il ne s'était écoulé qu'une toute petite seconde. Il aurait pu danser toute sa vie.

— Bien, monsieur Khanawut, merci pour cette prestation. Vous aurez les résultats d'ici une semaine, retentit la voix froide de sa professeure.

Il leva les yeux, contraint de se reconnecter à son environnement. Son rythme cardiaque s'accéléra. Dans la pénombre, la silhouette imposante du directeur irradiait d'autorité. 

— Attendez.

La voix grave résonna dans le théâtre, sonnant comme l'orgue d'une cathédrale.

— Je veux rester un moment seul avec Suni. Sortez tous.

— Bien, monsieur.

Personne ne protesta. Le jury se leva et quitta la salle de théâtre. Une certaine inquiétude se répandit dans la poitrine du danseur. Il aperçut, du coin de l'œil, sa professeure lui lancer un regard compatissant.

Le directeur se leva et rejoignit Suni sur scène. Celui-ci put le détailler sous la pleine lumière des projecteurs. Il portait un costume classique et élégant. Mais son visage respirait le vice.

— Tu sais qui je suis, petit ?

L'homme se mit à tourner autour de lui, tel un lion jaugeant sa proie.

— Je sais... que vous êtes le directeur, balbutia Suni.

— Rien de plus ?

— Je m'intéresse plus à la danse qu'aux bruits de couloir.

— Vraiment ? Intéressant...

Le directeur lia son regard au sien. Suni tressaillit. L'individu rayonnait d'une aura de puissance. Comme une vibration dans l'air, une onde imperceptible mais influente.

— Alors... ça signifie que tu ferais tout pour la danse, n'est-ce pas ? continua-t-il en saisissant du bout des doigts le menton du jeune danseur.

Ce dernier déglutit, paralysé. Il ne s'était même pas aperçu que l'homme avait envahi son espace vital.

Tout...? répéta-t-il bêtement.

Son cerveau semblait lui aussi s'être envolé durant son numéro, dilué par le trac et maintenant cette rencontre inattendue, oppressante.

— Tu es un très bon danseur, tu le sais ? Tu possèdes quelque chose de spécial. Mais ici, c'est moi qui décide de tout. Alors si tu veux espérer passer coryphée, puis sujet, premier danseur et enfin, peut-être, étoile... C'est à moi qu'il faut s'en remettre. Tu comprends ?

Le cœur de Suni battait à tout rompre. Il concevait mieux les inquiétudes de sa grand-mère. Les gens de cette caste se pensaient en droit de tout exiger, au-dessus de toute morale. Et cet homme ne dérogeait pas à la règle. Il retira enfin sa main de son visage, réinstaurant entre eux une distance raisonnable.

— Samedi soir, je donne une petite réception chez moi. Le fleuron des danseurs de l'école est convié. Ta présence amènerait un peu de fraîcheur à ces snobs et ennuyeuses festivités. Nous pourrions en profiter pour discuter de ton avenir au sein du conservatoire, qu'en penses-tu ?

Suni s'horrifiait à l'idée de rallier le cortège des vils flatteurs qui gravitaient autour de l'homme d'influence. Et ses intentions ne paraissaient pas d'une pureté immaculée, de toute évidence.

« Ceux qui se font bien voir obtiennent souvent ses faveurs. »

Le commentaire de Mean s'imposa à lui, tel un écho persuasif tissant un voile sur ses appréhensions. De sa réponse dépendait l'issue du concours, pressentait-il. Son sort pouvait bien se jouer ici et maintenant.

— Peut-être.

Sa voix avait jailli de sa poitrine avant même qu'il ne puisse en réaliser la portée. Il voulait danser plus que tout au monde, et on lui offrait la chance de se distinguer de la mêlée, pour la première fois.

— Être bon dans son domaine ne suffit pas à tutoyer les étoiles, le sais-tu ? ajouta le démiurge, doucereux.

— Je n'ai d'autre but que danser, avertit Suni d'une voix qu'il aurait souhaité moins tremblante.

Si prouver sa détermination exigeait de prendre part à ce petit théâtre des apparences... Peut-être pourrait-il faire l'effort de mettre son inconfort de côté, pour une fois. Tolérer l'écœurant badinage mondain propre à l'institution, faire bonne impression, gagner un bon point et se retirer sans un bruit. Efficace et discret, comme un espion dans la nuit, chaussé de ballerines.

— Mais bien sûr, pour qui me prends-tu ? s'exclama l'inquiétant personnage en feignant l'offense. Je veux seulement apprendre à mieux te connaître, pour savoir si tu conviens au prestige de cette école. Je ne sélectionne que les meilleurs d'entre vous pour ces soirées d'exception. Tu comprends ?

Il eût certainement été plus sage de refuser sans détour cette invitation, lui intimait une voix intérieure. Mais la sagesse avait-elle sa place lorsqu'on brûlait de gravir les échelons ?

— Je crois, oui. Laissez-moi y réfléchir, concéda-t-il.

— Réfléchis bien, insista le directeur en lui tendant une carte de visite.

— Je vais le faire, promit Suni.

Non sans hésitation, il se saisit du carton blanc serti d'une écriture dorée.

— Laisse-moi me présenter, puisque tu ne sais rien de moi. Je m'appelle Kao Ahunai.

Enjôleur, il emprisonna la paume du danseur dans la sienne. Dans l'éclat captivant de ses yeux fauves dansait une lueur, celle de la convoitise.

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* Référence au ballet romantique éponyme, en deux actes, composé par Adolphe Adam sur un livret de Jules-Henri Vernoy de Saint-Georges et de Théophile Gautier

* Grand-mère paternelle en Thaï

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