Émotions
Japon - Kyoto - 1865
On devrait manger ici...
-Qui a faim? Demanda Aoshi.
-Moi! Fit Yume en s'écrasant par terre. Je suis morte!
-Je mangerais bien aussi, répondit Okina.
Les trois ninjas sortirent les poissons qu'ils avaient pêchés au préalable. Ils revenaient d'une mission d'espionnage à quelques kilomètres de leur base.
-En tout cas, dit le vieil homme, la bouche pleine. Bien joué, Aoshi!
-Qu'est-ce que j'ai fait?
-Tu ne t'es pas fait prendre! Rit Yume.
En effet la mission avait été un succès. Toute l'information nécessaire avait été récoltée et aucun membre de l'Oniwabanshuu ne s'était fait voir par les ennemis. Restait seulement à revenir à leur point de départ.
Aoshi mangeait distraitement son poisson, tout en contemplant le cours d'eau dans lequel il a été pêché.
Plus particulièrement, l'eau de la rivière.
Bleu profonde, fluide, se mouvant dans une coulée infinie et sans aucun arrêt. Se confondant avec elle-même, impossible à frapper ni à suivre. Un mouvement continu, souple, mais d'une puissance inimaginable. Une force inouïe cachée sous des airs contrastants. Une direction unique, mais en même temps multiple.
Une vitesse qui ne pouvait pas être définie, mais semblait incroyablement rapide et laissait confus quiconque tentait de comprendre la complexité sublime et dévastatrice de cette merveille de la nature.
L'eau, réalisa soudainement Aoshi. C'est ça! Je pourrais m'inspirer de l'eau pour ma technique ultime!
Il eut aussitôt très hâte de retourner au château de Nijo pour essayer son idée. Le jeune garçon refusait d'en dire un traître mot à Yume et Okina, qui ne comprenaient pas l'excitation visible d'Aoshi, dont l'idée semblait plus près du rêve que de la réalité.
La tête de ce dernier bouillonnait d'idées. Le ninja imaginais des techniques, et inventait des noms pour celles-cis.
Mais aucun de ces essais ne lui plaisait à cent pour cent.
De retour au château du Shôgun, Aoshi, Yume et Okina allèrent retrouver leur chef afin de faire leur rapport, Aoshi trépignant toujours d'impatience.
-Alors? Demanda Ryu. Qu'avez-vous pu savoir?
-Trois patriotes prévoient faire une sortie, dit Yume. Ils iront dans une taverne près de leur base.
-Dans trois jours, précisa Okina. De 17h à 20h.
-Avez-vous leurs noms? Interrogea l'Okashira.
-Oui, répondit Aoshi. Il s'agit de Tatsuaki Misura, Sôjô Setake et Kenshin Himura.
-Très bien, murmura Ryu. J'enverrai quelques-uns d'entre vous afin de les éliminer.
-Chef, demanda Aoshi. Pourquoi est-il si important de les tuer?
Ryu baissa les yeux à la hauteur de l'enfant. Son regard était solennel, mais également inquiet, et même légèrement apeuré. Apeuré?
-La guerre est commencée, petit. Le gouvernement de Meiji veut reprendre le pouvoir. Nous devons l'en empêcher, et protéger Edo (Tokyo actuel).
-Pourquoi avez-vous peur, Okashira?
Yume écarquilla les yeux devant l'audace d'Aoshi.
Mais Ryu se contenta de soupirer.
-Tu sais que c'est normal d'avoir des émotions, petit.
-Mais vous êtes notre chef! S'insurgea Aoshi, tout en conservant un ton relativement calme. Si vous nous montrez que vous avez peur, comment voulez-vous que vos troupes aient confiance en la victoire? Un véritable guerrier ne se laisse jamais gagner par ses émotions! JAMAIS!
Yume et Okina retinrent leur souffle. Jamais personne n'avait osé faire subir un tel affront à l'Okashira.
Le jeune garçon partit la tête haute, à grand pas.
-Aoshi! Cria Yume.
-Laisse, ordonna Ryu, sombrement. Il... il a raison, en partie. C'est fou, ce qu'il a un esprit de leader, ce petit... Maintenant, partez, s'il vous plait.
Ahuris, les deux membres de l'Oniwabanshuu sortirent du bureau de l'Okashira.
Seul, Ryu réfléchissait. Son plus jeune guerrier venait de lui faire la morale. Normalement, un tel acte devrait être sévèrement puni, mais l'affront d'Aoshi lui avait fait réaliser plusieurs choses. Entre autre, il avait compris pourquoi le garçon refusait de montrer ses émotions.
Le chef savait qu'il devrait, dans quelques années ou moins, quitter son poste pour entrer dans le monde des morts. Mais la remarque du jeune ninja lui avait appris que mentalement, il était différent de ce qu'il pensait être.
Suis-je trop vieux? Se demanda Ryu, tristement et faiblement. Ais-je encore la mentalité d'un ninja?
Suis-je digne de rester Okashira?
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Allô! Bon, je dois l'avouer, j'ai bien aimé écrire la crise de nerfs d'Aoshi!
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