L'amour crèvera au coin d'une rue...

Leur chambre était lourde de la sensualité de la nuit d'amour qu'ils avaient partagée. Le soleil se tapissait doucement auprès de leurs corps enveloppés de sueur. Ils semblaient ne former qu'un aux côtés de Morphée.

— Calypso ?

Le jeune homme au teint pâle adressa un regard délicat à la jeune femme couchée à ses côtés. La belle était réveillée depuis peu, ce qui charma davantage le brun. Il adorait voir ses yeux océan chasser le sommeil, se souvenant peu à peu de leurs ébats.

— On ne pourra pas toujours faire semblant...

— Il n'y a rien à dire, la coupa-t-il.

Les doigts du jeune homme retraçaient les baisers marqués sur la peau dorée de la française. Il connaissait les risques. Il avait même essayé de les contrer par des règles. Règles qu'aucun d'entre eux n'avait su respecter.

La culpabilité le rongeait, surtout quand ses iris vairons croisaient le tatouage qu'Alizée s'était fait ; pour lui. Il n'avait pas cillé face à ces quelques mots sur la courbe de son sein. Il aurait dû lui dire que c'était stupide, qu'elle le regretterait. La vérité, c'était que son cœur avait gonflé de bonheur en sachant que la jeune brune ne comptait pas l'oublier. Rien que par insolence, ils comptaient se chercher, se trouver, sans questionner le futur ni ressasser le passé. Alors à chaque retrouvaille, il craquait. Emportant sa partenaire vers une évasion des plus sensuelle.

— Tu ne crois pas qu'il serait mieux si...

— Je ne t'ai jamais rien promis bella.

Calypso était égoïste. Il l'avait toujours été. Alizée n'en tombait un peu plus qu'amoureuse. Ça lui faisait peur parfois, de savoir qu'il avait beau être cruel, elle serait toujours là, parce qu'au fond lui aussi l'aimait. Derrière la poussière de ses démons, entre quelques-unes de ses failles, l'italien cachait l'amour ardent qui les consumait toujours à deux.

Pourtant, il avait beau l'aimer de toutes ses forces, il n'avait jamais réussi à le faire suffisamment. Calypso continuait à la faire passer au second plan, quand Alizée l'élevait sur un piédestal. Ils avaient beau se répéter à chaque baiser que ça serait la dernière nuit, la dernière danse, tout se répétait. À croire que c'était devenue une habitude de fouler les draps, une drogue, un antidote dont ils ne pouvaient plus se passer.

Les démons de Calypso se calmaient à chacun de ses coups de reins, son passé se faisait moins douloureux quand elle gémissait son prénom. D'ailleurs, Alizée s'accrochait souvent au moindre de leurs cris, comme si le plaisir qui les liait pourrait rendre leur histoire plus supportable.

Au quotidien, en société, ils ne seraient jamais sur la même longueur d'onde. Ils n'en auraient jamais eu le cran. Alors ils trouvaient une harmonie en se faisant l'amour, ils étaient en accord lorsque leurs corps se trouvaient, se provoquaient, s'embrasaient.

– Si je pouvais j'invoquerais Éros, murmurai la brunette serrant le drap qui recouvrait son corps menu.

Elle embrassa le torse-nu de son partenaire, dans l'unique but de profiter des derniers instants de leur soirée.

– Tu penses qu'il serait apte à me faire décliner ?

À l'évocation de ce mythe, Calypso retrouva la pointe d'espièglerie dans son regard bicolore.

– Tu n'es pas invincible. Puis tu es déjà entre deux bords non ? Orion et moi ?

Calypso se recula à l'évocation d'Orion. Pourquoi tout devait revenir à cet autre garçon ? Pourquoi ne voyait-elle pas qu'il n'y avait jamais eu qu'elle ? Il aurait aimé le lui dire, pourtant, il n'en fit rien. Pour eux, c'était trop tard.

– Tu es importante pour moi.

– Mais pas assez pour que tu oses.

Alizé lisait en lui comme dans un livre ouvert. En effet, son importance n'était pas suffisante pour qu'il remette sa vie en jeu uniquement pour cette paire d'yeux rieurs. Ce n'était pas assez pour qu'il ouvre les portes de son monde et lui trouve une place. Il était terrifié du désordre qu'elle pourrait y mettre, et des traces qu'elle laisserait – malgré elle- sur lui.

– J'aime Orion.

Quitte à la blessée, Calypso déclarait son amour pour un autre. La rejeter était si simple, quand l'aimer ne l'était plus. Il savait qu'il n'était pas celui qui pourrait la rendre heureuse. Il en était persuadé, il ne pourrait rien lui apporter. Leurs vies étaient bien trop différentes. De façon égoïste, il désirait garder le plus longtemps Alizé à une place qu'elle ne voulait pas. Cette dernière, était prête à tout, même à accepter une place de simple amie ou plus selon les saisons du corps juste pour satisfaire celui qui lui avait tant appris.

– Redis-le avec plus de conviction.

Calypso ne mentait pas. Il aimait Orion. Depuis toujours. Seulement, parfois, son autre côté se réveillait. Du moins uniquement lorsque cette française aux cheveux ébène se trouvait dans les parages. Alizée avait encore un fin espoir que Calypso se rende compte qu'Orion ne lui apporterait jamais ce qu'il cherchait. Elle, elle en était capable. Du moins, elle était prête à l'être.

– Orion est mon époux. Faut t'y faire bella.

Le cœur d'Alizée se serra. Si seulement elle l'avait trouvé plus tôt, si seulement elle pouvait l'avoir autant.

– On dirait bien que je suis autant maudite que Psyché...

– Tu es... Du moins, elle était prête à l'être.

– Ton corps a besoin de moi, pas ton cœur. Mais je suppose que je m'en contenterais encore un peu.

Il ne voulait plus avoir cette discussion. Cela ne mènerait à rien. Pour faire taire ses vérités qui ne devenaient que fardeaux pour sa chère amie, il posa avec violence ses lèvres sur les siennes. Comme il s'y attendait, elle le provoquait certainement par colère ou par fierté. Alizé aspira et mordit la lèvre inférieure de son amant, lui provoquant un râle.

– Moi aussi je t'aime Alizé.

La jeune femme sentit son cœur battre la mesure au son de ses mots qui n'avaient pas la même résonance chez son interlocuteur. Pour elle, ce n'était pas de l'amour, seulement une dépendance. Sans envie de l'affronter une seconde fois, et désirant oublier que bientôt ce corps qu'elle aimait tant, irait chérir celui d'un autre, elle planta ses ongles manucurés dans la chair de Calypso et marqua le cou de ce dernier en un baiser.

Il aurait dû s'inquiéter de la possessivité de son amie, mais il n'en fut rien. Au contraire, il adorait ça. Et même s'il n'en avait jamais vraiment parlé, il était persuadé qu'Orion savait déjà tout.

Il avait beau se sentir mal d'attribuer des rôles sans demander leurs consentements, il ne pouvait pas s'en passer.

Orion était l'officiel. Alizée l'officieuse.

Les deux se jalousaient, et désiraient inverser les rôles, sans savoir qu'aucun ne pourrait avoir Calypso entièrement.

L'un possédait le cœur, l'autre, le corps.
L'un possédait le cœur, l'autre, le corps.

En un souffle, une nouvelle étreinte débutait et les accompagnerait jusqu'au lever du soleil. Où leurs désirs les plus intimes et leur précédente jouissance s'en iraient, emportant avec eux les promesses de la nuitée aux allures si éternelles, bien que seulement éphémère...

– Je suis la seule à aimer vraiment ici Calypso.

Les yeux rivés dans ceux de son premier amour, Alizée laissa son corps sous les ordres et mains expertes de ce garçon dont elle était certaine qu'à part penser aimer, n'en savait rien.

Sans jamais le dire, elle avait toujours su qu'il n'était que prisonnier de deux désirs non-consommables. Calypso était perdu entre deux vies sans savoir aimer comme il le méritait. Il se négligeait et penser ne pas mériter une once de bonheur, alors qu'il était à lui seul, une source de lumière dans l'univers des rêves d'Alizée...

Ce n'était pas sa faute. On ne le lui disait que rarement, et il n'y croyait jamais.

Alizée, aurait pu le lui apprendre, mais elle préférait attendre qu'il se retrouve entre deux rues, et qu'au coin d'une d'elles, il cesse de penser que l'amour était déjà mort.
Elle attendait qu'il s'aime en premier. Ainsi, elle aurait pu se laisser tenter dans les onces de leur union.

Orion, lui, le savait. Il l'avait accepté. Il ne prenait que ce que Calypso lui donner sans chercher à creuser dans les rouages des dessins évoquant son passé trouble. Quand Calypso le niait toujours, il ne cherchait pas à le leur apprendre, seulement à les prendre.

— Peu importe qui tu choisiras, je sais qu'à une époque ton cœur battait au rythme du mien.

Alizée connaissait Calypso comme si elle avait été la muse qui avait guidé l'aiguille transformant ses maux en encre. Comme si elle n'avait jamais cessé de croire qu'un jour, il s'aimerait enfin, et que dans cet élan, il se rendrait compte qu'elle lui avait offert une seconde chance.

— À présent, mon cœur battra toujours au rythme de ton souffle et de nos souvenirs. Chéris-le, comme j'aurais tant voulu que tu nous aimes.

Calypso connaissait le sens de ses mots depuis toujours. Toutes les nuits, il revivait leur dernière soirée en tant que première. Puis dès lors qu'il entendait les mots qui sonnaient la fin du souvenir, il désirait à jamais hurler.

Juste pour qu'elle puisse entendre son écho, jusqu'à travers l'alignement des planètes, où trônaient encore leurs promesses étourdies.

— Ne te sens pas coupable d'aimer à nouveau. Surtout, s'il s'agit de garder Orion...

Comment lorsque Alizée signait son arrêt de mort, elle avait pu choisir pour lui ? Toutefois, Calypso n'en voulait qu'à lui-même. À présent, il savait que sa bisexualité ne pourrait devenir qu'homosexualité.

Il n'avait pas pu choisir entre Orion et elle, alors la vie l'avait fait liant Alizée dans cette tourmente.

Calypso s'interdisait que leur cœur batte pour une autre femme si ce n'était pas pour cette brune au sourire enflammé. Même lorsque Orion se rendrait compte qu'il n'avait jamais été que l'officieux, Calypso préférait survivre seul. Condamné à faire battre le cœur d'Alizée - la seule femme qu'il avait réussi à aimer - à travers lui, coincé à jamais dans sa poitrine.

— On ne fait plus qu'un bella... C'est la seule chose qui m'empêche de te rejoindre.

Se tuer, commettrait sa mort une seconde fois. Il ne pouvait se résoudre à être égoïste au-delà du seuil de la mort. Pour une fois, Calypso penserait à Alizée avant sa propre mort.

— Dire que tu m'as offert ton cœur en pensant que je ne t'aimais qu'à moitié. Si seulement tu avais su qu'il n'avait jamais cessé de jouer la même mesure que le tien. Si tu avais su que je t'aimais bien plus que je n'ai eu le cran de t'avouer à l'époque. Si tu avais su que tu n'avais jamais égalé aucun homme dans ma vie. Tu n'avais jamais été l'officieuse Alizée... Et tu ne le sauras que lorsque ton cœur, le nôtre, lâchera.

Là où l'amour n'avait pas éclos au sein d'une facette de la vie, elle le serait au moins entre les limbes d'une mort où tout leur serait enfin permis. En attendant, foulant chaque coin de rue, Calypso songerait au fait qu'Alizée avait raison.L'amour crève souvent simplement au coin d'une rue. Entre deux allées, deux choix, deux vies.

— La mort nous laissera sa chance. Je m'en assurerais Bella.

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