Je relevai la tête : la cohue s'était éclaircie. Avec soulagement, je repérai Kensei qui était très en forme : encouragé de toutes parts, il défiait à mains nues les ennemis les plus tenaces, notamment ceux munis de bâtons ou de barres.

Un étudiant aux cheveux tressés plaqués sur le crâne bondit et lui décocha un coup au front. Je tressaillis : c'était Chikuma, le leader de la 1-C. Quelques semaines plus tôt, il m'avait empêchée de monter les escaliers du bâtiment principal. Sa pomme d'Adam s'était agitée comme si elle avait cherché à sortir de sa gorge.

Kensei ne broncha pas. Un sourire carnassier scotché aux lèvres, il considéra le première année un peu téméraire d'un œil brillant. L'instant d'après, il noya Chikuma sous une succession d'assauts et de parades difficiles à suivre. La cadet fut bientôt hors d'haleine : son aîné, qui avançait et reculait sans cesse, ne lui laissait aucune ouverture.

Brusquement, Kensei lança sa jambe à pleine puissance dans son visage acnéique. Chikuma bascula en arrière, les mains sur sa figure ensanglantée. Il atterrit sur le dos mais se releva, encore étourdi, pour tenter une attaque. Kensei s'écarta au dernier moment, l'attrapa par le côté et lui ficha son coude l'estomac. Il enchaîna par un balayage au niveau de son ventre, de sorte que Chikuma retomba par terre, étendu latéralement, sans même l'avoir plus touché.

Le combat durait depuis déjà quelques minutes et l'air sentait la sueur, le sang et la poussière. Minoru avait raison, la bagarre ne durerait plus très longtemps. Les trois quarts des belligérants avaient le nez enfoui dans le sol crasseux. Tout ce qui comptait à présent était de mettre les leaders à terre. À ce stade de l'affrontement, les plus faibles avaient été anéantis. Pour autant, il était impossible de savoir quel camp l'emportait sur l'autre.

Les cinquièmes années frappaient fort et se focalisaient sur les voyous du lycée Kawasaki ; ce devait-là être la stratégie établie par Takeo et Eisei lorsque ce dernier l'avait rallié sur le terrain. Le premier s'attribuait la faction de Juro, le second se réservait les caïds du lycée Kawasaki et accessoirement, quelques premières années de Nintaï.

Pendant que je triturais les bouts de portable dans ma poche, des sueurs froides glissaient le long de ma colonne. Je vis une sorte de colosse suspendre un jeune par le col, essuyer dessus son nez en patate qui saignait et projeter l'adversaire plus loin comme s'il avait été une ortie. C'était Buntaro, le président du club de boxe. Un nintaïen de la faction de Takeo fondit sur lui par derrière et rossa son dos avec un bâton en bois qui se brisa. Buntaro hurla, le saisit par la gorge et fracassa son visage. Il fit gicler du sang de la bouche de l'étudiant et l'envoya valser. Personne n'osa plus s'attaquer à lui.

A une vingtaine de mètres, des gaillards valdinguèrent de ci de là sous les impitoyables coups de Daiki. Soudain, il se retrouva face à Buntaro. Ni une ni deux, ils coururent l'un contre l'autre. La collision les plongea tous deux à terre.

Après quelques droites, ils se relevèrent et redoublèrent d'injures. Buntaro était ce qu'on appelait un « gros morceau » et il était évident que Daiki, blessé, ne viendrait pas seul à bout de son adversaire. Il commençait à ployer, lorsque Yuito vint à sa rescousse pour l'aider à coucher Buntaro.

Avec l'autre témoin, effaré, je suivis cette offensive de colosses. Les trois titans du terrain combattirent dans un ballet où la moindre atteinte menaça de faire perdre des dents. Yuito para un coup de poing de Buntaro et le transforma en une redoutable clé de bras. Daiki exploita cette faille pour lui infliger une série de gifles, avant de laisser la voie libre à Yuito qui avait pris du recul : il se jeta sur le quatrième année pour essayer de le renverser. « La Banane » fit simultanément pleuvoir sur ses côtes une avalanche de coups mais Buntaro ne faiblit pas. Il se dégagea de l'emprise de Yuito qui l'avait empoigné par la nuque et répondit par des directs de même intensité. Les voyous autour d'eux s'écartèrent pour ne pas être blessés.

Finalement, Daiki éleva sa jambe de façon circulaire pour, de son tibia, venir frapper Buntaro latéralement à la cuisse. Le point en question devait être celui où les nerfs se croisaient. La béquille fit tomber Buntaro à genoux, une posture suffisamment désavantageuse pour que Daiki et Yuito l'écrasent.

Le gros des troupes ayant failli, les chocs s'intensifièrent entre les derniers protagonistes.

Minoru était couvert de sang mais il sautait partout tel Bambi, en faisant voltiger ses poings et ses Dr. Martens dans tous les sens. Dans un élan de folie, Kensuke s'y risqua. Mais de toute évidence, il n'était pas de taille à se mesurer à Minoru. Celui-ci lui ficha un spectaculaire coup de boule. Avant que Kensuke ait pu se ressaisir, Minoru l'agrippa par le col de la veste et lui envoya un uppercut dans la mâchoire. Kensuke effectua un vol plané et son crâne heurta le sol de plein fouet.

Mika, quant à lui, avait retrouvé ses esprits. Je fus abasourdie qu'il ait récupéré du coup de batte porté à sa tête. Confronté à Izuru, je sentis qu'il voulait lui faire payer « l'affaire des chips ». L'Hypocondriaque enchaîna les percussions selon sa technique, sans que le deuxième année ait le temps de calculer leur trajectoire ou de faire jouer ses réflexes. Izuru reçu ainsi un coup dans l'œil. Il se releva avec difficulté dans la poussière. Malgré son handicap, il parvint à emboutir sa botte dans la jambe de Mika. Manquant de perdre l'équilibre, celui-ci le repoussa en le cognant rudement au front. Izuru perdit connaissance. L'Hypocondriaque n'insista pas et essuya un filet de sang qui coulait de sa lèvre... Sans avoir vu venir le poing à deux mains qu'Ichiro lui infligea dans la nuque.

Le quatrième année à la tignasse platine cracha de son bec de lièvre mal opéré sur Mika, qui tomba à quelques centimètres d'Izuru.

Je tressaillis et reportai une nouvelle fois mon attention sur Minoru qui s'en prenait désormais à Chikuma. Ce dernier s'était relevé de l'attaque de Kensei. J'avais hâte que Minoru se charge rapidement de lui. Ce fut sans compter que l'Opossum transgénique s'amusa à se laisser courser par Chikuma. Réalisant que son adversaire s'essoufflait, Minoru s'arrêta et lorsque Chikuma vint à sa portée, il abima son poing contre son crâne, avant d'abattre une ruade dans son dos. Le première année s'affala sur le menton mais se rétablit vite sur ses pieds. Face à son étrange sourire maculé de sang, Minoru tira la langue de dégoût. Le costaud aux cheveux tressés se redressa tout à fait, puisant dans ses dernières ressources pour tenter d'affliger un coup à Minoru. Celui-ci esquiva et faucha d'un trait les jambes de son ennemi qui, épuisé, mangea pour de bon le sable du terrain.

Les derniers corps qui s'entremêlèrent encore étaient imbibés d'une culture d'une extrême violence... Ce qui dut expliquer les coups de poing américains apparus sur le terrain et dont Okito, le demi-frère de Yuito, fit les frais. Les cheveux hirsutes et collés par la sueur, il se démena contre des étudiants enragés de Kawasaki. Épaulé par un Mukai extenué, Okito ne parvint pas à prendre le dessus.

Étrangement, plutôt que de protéger Mukai, leur leader officiel, un groupe de premières années veilla sur Toshi. Le petit-frère de Eisei, occupé à éponger une vilaine blessure à son bras, se laissa couvrir.

Deux voyous firent chuter à terre Okito, tandis qu'un troisième le saisit par sa banane pour enfoncer une droite dans sa joue creuse. En un instant, Mukai et Okito se trouvèrent en très mauvaise posture, lorsque surgit Yuito. Sa grande charpente recouverte de sang et de poussière se chargea des assaillants. Libéré, Okito, s'inclina devant son demi-frère en signe de respect. En réponse, la Banane eut un bref hochement de tête.

Ce sauvetage imprévu ne pouvait qu'annoncer un début de réconciliation. Yuito était résilient. Il affrontait les épreuves de la vie une par une. Cette fois, sa décision avait été la bienfaisance.

Je réalisai que j'avais encore perdu Kensei. À sa place, j'identifiai Ryôta, dont la figure était congestionnée. Une chaussure solitaire sortie de nulle part vola dans sa direction, frôla sa tête et percuta celle d'Ichiro. Surpris, Le quatrième année ne put bloquer le coup dans les yeux que lui flanqua Naoki, le leader de la 2-A. Guère ébranlé, Ichiro esquissa une feinte au niveau de la cuisse de Naoki, que celui-ci para. Le quatrième année lui rendit alors le double du coup qu'il lui avait infligé. Le corps de Naoki se gondola et s'écroula.

Au milieu de la lutte cacophonique, il y eut un retentissant « Tu vas dérouiller, enfoiré ! » de la part d'Ichiro à l'intention de Ryôta. Il devait penser que ce dernier était l'auteur du lancer de chaussure. Un espace se créa devant lui. Le quatrième année aux joues mafflues fonça sur l' Idol pour le frapper avec de l'élan. De justesse, Ryôta l'évita grâce à une roulade.

Leurs gabarits n'étaient pas les mêmes et l'Idol, épuisé, perdit du terrain. Il leva la jambe en voulant donner un coup de pied à Ichiro mais celui-ci la saisit. Il souleva Ryôta et l'éjecta à quelques mètres. Le troisième année cracha une glaire de sang, avant que sa tête ne retombe complètement. Ichiro poussa un hurlement de victoire et partit s'occuper d'un survivant : Kensei, qui venait d'apparaître dans son champ de vision.

Une nouvelle vague nauséeuse me submergea. Au loin, les premières sirènes de police résonnèrent.

Affaibli, Yuito fut mis au sol par un mauvais coup de Juro. Aussitôt, Takeo le prit pour cible.

De leur côté, les « Men in Grey » partirent à la recherche de Nino près de qui traînait encore Reizo. Tennoji prit appui sur le dos de Jotaro et balança au quatrième année un coup circulaire à la poitrine. Tennoji se baissa tandis que Jotaro se retournait : il cogna Reizo en pleine figure. La parfaite synchronisation des « Men in Grey » paya : au bout de quelques enchaînements, Reizo fut à court de souffle. Une fois qu'il fut mis hors de combat, Tennoji et Jotaro s'empressèrent de rejoindre Nino qui baignait dans son sang.

Merci de votre lecture ! ~

La semaine prochaine, vous verrez la conclusion de la bagarre ! 💣

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Il y a maintenant un recueil sur mon profil : "Octopus - Fiches des personnages".
Vous retrouverez dans ce guide leurs descriptions (physique/personnalité).

J'espère que vous l'apprécierez !

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