Avery 27 ans, Kyle 26 ans

AVERY

De : [email protected]

À : [email protected]

Objet : Informations rôle + planning complet

Cooper,

Je joins à cet e-mail toutes les informations importantes pour ton prochain rôle : le planning complet, le nom du casting, ton agenda pour les prochaines semaines, et tous tes rendez-vous importants concernant le film. Le tournage commence dans un mois. En attendant, reste en forme, continue le sport ; tu ne voudrais pas que des bourrelets viennent gâcher ce corps parfait dont toutes les filles raffolent. Apprends bien tes répliques, tu joues gros, alors ne me déçois pas. Tu trouveras aussi ton planning de sport avec Tony. Je t'appellerai dans les jours à venir pour m'assurer que tu suis tout à la lettre.

Reste parfaite.

Lance Wood,
Agent de star pour AC-agency

Je lève les yeux au ciel pour la énième fois en relisant l'e-mail de mon agent si attentionné. Notez l'ironie. Parfois, j'en oublie qu'il travaille pour moi et non l'inverse. Mais que voulez-vous, j'ai accepté d'être le joujou d'Hollywood depuis que j'ai décidé de lancer ma carrière. Ce n'est définitivement pas le rêve éveillé que j'avais imaginé. J'ai passé ma vie à voir mes parents se faire aduler, aimer leur travail, et s'occuper de leurs deux enfants afin qu'ils ne manquent jamais de rien. C'est ce que je voulais aussi. Ce que je pensais être ma destinée. Mais voilà huit ans que ma carrière a décollé, et je ne me suis jamais sentie aussi vide.

Un agent qui me considère comme sa poupée. Des amis plus faux que leur corps bourré de silicone. Une vie sentimentale qui n'existe que devant les caméras.

Alors oui, j'ai de l'argent. Oui, je suis reconnue et admirée. Mais est-ce que ça valait la peine de perdre tout ce qui faisait de moi cette fille forte et entière ? De le perdre, lui ?

Parfois, je repense à ce qu'aurait pu être ma vie si j'avais fait des choix différents. Si je m'étais battue pour m'en sortir. Pour garder dans ma vie celui qui a toujours vu la vraie moi. Si j'avais été plus forte que mes démons... Mais y penser ne changera rien. Alors, j'ai décidé de laisser ma vie être dirigée par des gens qui ne se soucient pas de moi. Je suis passée de film en film, de soirées mondaines aux tapis rouges par milliers. Accepter de me montrer au bras d'hommes dont je ne retenais même pas le nom. Je ne vivais plus ma vie. C'est elle qui vivait pour moi.

— Nous sommes arrivés, mademoiselle Cooper, m'indique mon chauffeur.

Je sors de mes pensées tout en lançant un regard par la fenêtre teintée. Après des mois sans une minute pour moi, j'ai enfin le temps de souffler. Et quoi de mieux que d'être aux côtés de ceux qui me connaissent le mieux et qui me font du bien d'un simple regard ?

Je remercie Adam avant de me diriger vers la porte d'entrée de l'immense bâtisse qui m'a servi de foyer durant vingt longues années.

Six mois que je n'ai pas revu mes parents. Six mois que je n'ai pas senti l'odeur réconfortante de ma maison.

Bien que je n'y habite plus, la maison de mes parents me reste accessible, sans que des alarmes ne se déclenchent à chaque passage.

— Je sais, Lexie. Tout a été arrangé. Liam et moi serons là dans deux jours. L'adresse est dans l'e-mail récapitulatif. Ont-ils besoin de chauffeurs pour rejoindre l'hôtel ?

La voix de ma mère résonne depuis le salon. Je m'approche doucement, intriguée par cette conversation dont je saisis à peine le sens. Où vont papa et elle dans deux jours ? Moi qui pensais passer les prochaines semaines en leur compagnie...

— Très bien, je m'en occupe dans la journée. Je...

Elle s'interrompt en croisant mon regard.

— Lex, je te rappelle.

Elle laisse tomber son téléphone et accourt vers moi.

— Avery Alexandra Cooper ! Ces six mois sans te voir ont été les plus longs de ma vie. Ne me refais plus jamais ça ! s'exclame-t-elle en me serrant fort.

Je ris devant son air dramatique, mais lui rends son étreinte avec la même intensité. Rien ne vaut de serrer ma mère contre moi.

— Crois-moi, maman, je suis heureuse d'être enfin à la maison.

— Pas si facile, la vie de star, hein.

— Je ne sais pas comment tu as géré une carrière aussi remplie tout en élevant deux enfants.

Elle hausse les épaules en souriant malicieusement.

— Le talent, ma fille.

Je ris de bon cœur en l'attirant à nouveau contre moi.

Amber June Adams-Cooper, mon modèle.

***

— Alors, dis-moi ce qui trotte dans ta jolie petite tête, me demande ma mère en m'apportant une tasse de café.

Je lui lance un regard interrogateur, toujours aussi surprise de constater qu'elle n'a pas besoin que je prononce le moindre mot pour comprendre ce qui se passe dans ce tourbillon infernal qu'est mon esprit.

— Tu n'es peut-être pas la chair de ma chair, Avery Cooper, mais nul doute que je te connais comme si je t'avais fait.

Le fait que je ne sois pas la fille biologique de mes parents ne m'a jamais posé de réels problèmes. Enfin... sauf quand on me répète que je ne serai jamais à la hauteur de ceux qui m'ont élevée. Mais c'est une autre histoire. Je n'ai jamais connu d'autres parents qu'Amber et Liam Cooper. Ils sont ma famille, ceux qui m'ont offert un foyer et une vie.

Je voulais devenir actrice pour suivre leurs traces, prouver au monde que j'étais la vraie fille de Liam et Amber, que j'avais hérité de leur talent et de leur charisme. J'ai cru que mon bonheur dépendrait de cela. J'ai voulu m'en persuader, mais aujourd'hui, je remets tout en question.

Je n'ai jamais atteint ce bonheur que je pensais obtenir grâce à la célébrité. Au contraire, je crois n'avoir jamais été aussi malheureuse. Mais comment expliquer cela à la femme qui a tout réussi et qui est si fière de voir que l'on se ressemble enfin.

— As-tu déjà eu des doutes sur ta carrière, maman ? Comme une sensation que ce métier n'est pas fait pour toi ?

Je vois, à la lueur dans son regard, que ma question la surprend. Néanmoins, elle se reprend rapidement et attrape ma main dans la sienne.

— Tu sais, ma puce, ce métier a toujours été une évidence pour moi. Ta tante et moi avions cette fibre artistique que personne d'autre dans notre famille ne possédait. Nous avions de grands rêves, nous voulions parcourir le monde. Quand elle m'a été arrachée, je me suis demandée si poursuivre mes rêves sans elle avait encore un sens. Puis j'ai décidé de quitter mon pays et de conquérir l'Amérique pour lui rendre hommage. Une fois ici, j'ai été confrontée à une dure réalité. J'ai remis ma carrière en question à de multiples reprises. Me demandant si j'étais vraiment à la hauteur. Si j'arriverais un jour à inscrire mon nom dans la légende. Si jouer la comédie me rendrait réellement heureuse toute ma vie. Et tu sais quoi ? J'ai réalisé que non.

Je fronce les sourcils, ne comprenant pas où elle veut en venir. Ma mère adore son métier. Elle fait partie des actrices dont on n'oublie pas le nom. Elle est la personne la plus joviale que je connaisse. Dire que cela ne la rend pas heureuse n'a aucun sens.

— Mais maman, tu es Amber Adams. Tu as obtenu un nombre incalculable de prix. Tu aimes ton travail. Comment peux-tu prétendre le contraire ?

— Ce n'est absolument pas ce que je prétends. Oui, j'adore mon travail. La comédie restera toujours une partie intégrante de moi. Ce que je veux dire, c'est que mon métier à lui seul ne suffira jamais à mon bonheur. Et ça, je l'ai compris lorsque j'ai rencontré ton père, puis quand je l'ai perdu et que je l'ai retrouvé. Je l'ai compris quand j'ai parcouru le monde pour faire le deuil de ma sœur. Je l'ai appris lorsqu'on m'a annoncé qu'une petite fille cherchait des parents. Puisqu'un petit garçon allait compléter cette famille atypique. Mon travail me fait du bien. Mais mon réel bonheur, c'est d'avoir les gens que j'aime autour de moi. C'est de pouvoir m'endormir aux côtés de mon mari chaque soir. C'est de voir le sourire de mes enfants, d'entendre leur voix, de les savoir en bonne santé.

Elle m'attire contre elle, caressant délicatement mes cheveux.

— Tu as vingt-sept ans, mon cœur, et toute ta vie tourne autour de ta carrière. Tu n'as pas beaucoup d'amis, pas de vie amoureuse. Tu travailles énormément, et je serai toujours fière de tes accomplissements. Mais peut-être que ton vrai bonheur ne se trouve pas derrière une caméra. Peut-être qu'il est temps de prendre une pause, de te retrouver, de savoir ce qui est bon pour toi.

Une pause ? Je n'ai pas pris de pause depuis que la seule chose qui avait du sens dans ma vie s'est envolée. J'avais besoin de ne plus y penser, et travailler m'a toujours aidée. Mais peut-être que je me voilais la face. Peut-être que je voulais fuir la réalité pour ne pas avouer à quel point la fille bousillée en moi a tout fait foirer.

— Je ne sais pas si j'en suis capable, avoué-je d'une voix faible.

— Et moi, je sais que tu en es tout à fait capable. Et puisque tu as un mois devant toi, permets-moi de remédier à tout ça. Tu vas te joindre à ton père et moi pour les prochaines semaines.

Sa conversation avec tante Lexie me revient soudainement en tête. Je l'ai entendue parler d'un hôtel ou quelque chose comme ça.

— Où allez-vous ?

— Au A. Rose Hôtel.

Le A. Rose Hôtel, celui que mes parents ont acheté quelques années après ma naissance. Situé entre Los Angeles et San Francisco, au bord de la mer, il possède de nombreuses plages privées. Un établissement très prisé où les réservations ne cessent d'affluer. L'endroit est sublime et reposant, ce qui contribue à son succès. Mais la notoriété de mes parents n'y est pas étrangère non plus. Il a été renommé en hommage à ma défunte tante Avery Rose Adams, celle dont j'ai hérité le nom, mais pas les qualités.

J'y ai passé quelques vacances, mais cela fait un bail que je n'y ai pas mis les pieds. Je me demande pourquoi mes parents ont décidé d'y aller maintenant.

— Un événement particulier ?

— Pour être honnête, oui. Kaylee Parker et Hayden Jones vont se marier là-bas dans deux semaines.

Je m'attendais à beaucoup de choses, mais entendre le nom de ces deux-là n'en faisait pas partie. Je savais qu'ils s'étaient fiancés il y a plus d'un an, mais je ne savais pas que le mariage était si proche et qu'il aurait lieu à l'hôtel de mes parents.

J'ai rencontré Hayden Jones lors de sa première année universitaire. Il s'est lié d'amitié avec mon ancien meilleur ami, et le courant n'est jamais passé entre nous. Quant à sa fiancée, Kaylee, c'était tout le contraire. Hayden a commencé à sortir avec elle lors de leur troisième année universitaire et nous l'a présentée à Thanksgiving. Ils sont carrément le jour et la nuit. Hayden est toujours souriant, de bonne humeur, passant son temps à faire des blagues (nulles, évidemment), tandis que Kaylee est plus renfermée et méfiante. J'ai appris qu'elle avait vécu des expériences difficiles durant son adolescence, ce qui expliquait son comportement. Mais, d'une manière ou d'une autre, cette fille en colère contre le monde est tombée follement amoureuse de cet idiot d'Hayden Jones.

— Pas sûr qu'il veuille de moi là-bas, surtout après ce qui s'est passé il y a trois ans.

— Je sais que la situation n'est pas idéale, mais peut-être qu'il est temps d'arrêter de fuir et de faire face à la réalité.

— Maman, il a été clair : il ne veut plus jamais me voir.

Nous ne parlons bien sûr plus d'Hayden. Elle et moi le savons, ce sujet a d'ailleurs été banni de nos conversations ces trois dernières années.

— De l'eau a coulé sous les ponts. Il ne pourra pas t'en vouloir éternellement. Et puis, cet hôtel est aussi le tien. Tu as autant le droit d'y séjourner qu'eux.

Ma mère est têtue, rien de ce que je pourrai dire ne la fera changer d'avis. Pourtant, je sais de source sûre que ma présence là-bas n'apportera rien de bon.

Bien au contraire.

— Je me disais bien que j'avais reconnu ma voix préférée ! s'exclame une voix masculine dans mon dos.

Un immense sourire éclaire mon visage lorsque je le reconnais. Je saute du canapé pour rejoindre les bras de l'homme de ma vie.

— Dans mes bras, princesse !

— Papa, tu m'as tellement manqué ! m'écrié-je en l'étreignant.

J'ai travaillé d'arrache-pied pour me convaincre que seul le boulot pouvait combler ce vide en moi. Pourtant, à chaque fois que j'entre dans cette maison ; à chaque fois que le doux parfum de mes parents s'infiltre dans mes narines ; à chaque fois que mon corps entre en contact avec le leur, je réalise qu'aucun film ne sera à la hauteur du bonheur que m'apporte ma famille.

***

— Eh, les Cooper ! Par ici ! entends-je plus loin.

Mes parents et moi tournons la tête à l'unisson pour croiser le regard de Lexie Jennings : la meilleure amie de ma mère et l'une de mes personnes préférées au monde.

— Hey Lex, tu as fait bonne route ? demande ma mère en la serrant dans ses bras.

— Mon chauffeur personnel a fait du bon boulot, plaisante-t-elle en lançant un regard complice à Dean, son mari.

Lexie et Dean Jennings, des seconds parents pour moi, un des couples que j'admire le plus, ma famille. J'ai grandi à leurs côtés et je les ai toujours considérés comme des oncles et des tantes. Ironique quand je repense que je n'ai jamais considéré leur fils comme un cousin.

Ne pas penser à ça...

— C'est toujours un honneur d'être à votre service, madame Jennings, se marre Dean en embrassant sa joue.

Nous rions à notre tour tandis que je m'approche de Lexie pour la serrer contre moi.

— Six mois sans venir voir ta marraine préférée. La prochaine fois, je lance un mandat de recherche pour te ramener à moi, se plaint Lexie sans pour autant me lâcher.

Je souris face à tant de drames. Elle n'est pas la meilleure amie de ma mère pour rien, ça, c'est sûr.

— Les futurs mariés ne sont pas encore là ? demande mon père.

— C'est nous qu'on demande ? s'exclame une autre voix tout de suite après.

Une fois encore, aucun doute sur l'identité de cette dernière. En un coup d'œil, je le reconnais : une carrure imposante, un sourire Colgate, une nonchalance sans nom : Hayden Alexander Jones. À ses côtés se trouve une rouquine un peu moins enjouée, mais tout de même souriante. Lorsqu'Hayden est dans les parages, le monde de Kaylee s'illumine, aucun doute là-dessus.

— Les voilà ! s'extasie ma mère. Nos tourtereaux préférés !!

— Amber ! Merci encore d'avoir proposé votre hôtel pour notre mariage. Nous vous en sommes très reconnaissants, déclare Kaylee avec gratitude.

Bien qu'Hayden soit devenu un ami proche de la famille, Kaylee a du mal à s'adapter. Elle s'est trop longtemps renfermée. Je pense qu'elle a encore du mal à accorder sa confiance, ce que je comprends. C'est vraiment la personne la plus forte que je connaisse. Je l'admire secrètement.

— Tu n'as pas à nous remercier. Hayden fait partie de la famille, et par conséquent, toi aussi. Merci de nous faire confiance et de nous convier à ce moment si précieux.

Hayden lui adresse son sourire le plus éclatant, mais il se fane lorsque son regard se tourne vers moi. L'atmosphère change et ses prunelles furieuses me dévisagent. Hayden ne m'a jamais aimée. Pour lui, je n'ai toujours été que la pimbêche qui faisait souffrir son meilleur ami. Il n'a jamais cherché à me comprendre, ni à comprendre notre relation, alors j'ai fini par ressentir de l'animosité envers lui.

— Avery, je ne m'attendais pas à te voir, peste-t-il à voix basse.

Je jette un coup d'œil à nos parents qui ont détourné leur attention.

— Cet hôtel m'appartient aussi, Hayden. Tu ne pourras rien faire pour me dégager, répliqué-je sur le même ton.

Rien n'y fait, lorsque cet homme est dans les parages, je suis incapable de rester gentille.

Un sourire mauvais étire ses lèvres alors qu'il s'approche doucement pour me murmurer :

— Il est heureux sans toi, princesse Cooper. Ne viens pas tout gâcher.

Je m'apprête à répliquer, mais ma phrase se meurt lorsqu'une nouvelle voix retentit. Une voix que je connais. Une voix qui me murmurait des mots doux, il y a encore quelques années. Une voix qui me rassurait lorsque ça n'allait pas. Qui me taquinait pour me faire rire aux éclats. Une voix qui m'a brisé le cœur, trois ans plus tôt.

— Désolé, j'avais oublié quelque chose dans la voiture, s'exclame Kyle en arrivant à notre hauteur, sourire aux lèvres.

Mais ce dernier s'évapore au moment où nos prunelles se rencontrent. Son corps se fige, ses yeux s'élargissent.

Trois ans.

🎞️🏄🌊🏒🩺

Les retrouvailles pour Kyle&Avery après 3 ans sans se voir.

Comment va se passer la cohabitation ?

Prêts pour le mariage qu'on attendais tous ??