17

Avery 21 ans, Kyle 20 ans

AVERY

— Ok, on va faire une pause ! s'exclame Gary, le producteur.

Je me permets enfin de souffler en m'empressant de quitter le plateau. Voilà une heure qu'on essaye de réussir cette scène tant bien que mal, mais ça ne suffit jamais. J'aime mon métier, mais contrairement à ce que tout le monde pense, il n'est pas de tout repos, surtout quand le producteur est de mauvaise humeur.

Une fois dans ma loge, je me débarrasse de ma veste en cuir inconfortable et m'affale sur le sofa, éreintée. Je rêve d'un bain chaud, d'un hamburger et d'une nuit complète de sommeil.

— Parfait, tu es là ! s'exclame une voix, me faisant sursauter.

Je calme ma respiration en reconnaissant Lance, mon agent. Il a ce don d'apparaître sans prévenir, me rapprochant à chaque fois de la crise cardiaque.

Je me lève pour lui faire face, me demandant ce qu'il veut cette fois. Lance est un excellent agent, il connaît son métier et trouve toujours des projets enrichissants pour ma carrière. Mais en tant que personne, je ne lui ferais pas trop d'éloges. Il a des méthodes particulières, un caractère difficile et des gestes parfois déplacés, ce qui me met souvent mal à l'aise. Mais c'est le métier et je dois m'y habituer.

— Quoi de neuf ? lui demandé-je tandis qu'il relève le nez de sa tablette.

— Bonne nouvelle, tu es invitée à la première de Wonderland. C'est un événement en comité restreint qui fera la une des journaux. J'ai utilisé mes relations pour t'obtenir un accès exceptionnel.

Quand je disais qu'il connaît bien son métier... Lance est dans le milieu depuis plus d'une décennie et s'est rapidement fait une place à Hollywood. Un ami de mon père nous l'a recommandé. Ma mère voulait que je choisisse quelqu'un de l'agence d'Hannah, son agent depuis ses débuts. Mais Lance a été convaincant. Parfois, je regrette de ne pas avoir réfléchi davantage à ce choix.

— Cool ! Ça a lieu quand ?

— Mercredi prochain. J'ai déjà réservé le styliste, les maquilleurs et les coiffeurs. Tu trouveras tout sur le calendrier partagé. Tu auras également à ton bras William Sanford, un mannequin très en vogue en ce moment. Vous allez faire fureur ensemble.

Je perds rapidement mon sourire en imaginant un énième homme à mon bras. Je savais qu'Hollywood venait avec des compromis, mais celui-là m'est difficile à accepter. J'en ai marre de déambuler sur les tapis rouges avec un inconnu. Aucun de ces hommes ne peut remplacer celui qui devrait être à mes côtés. J'ai souvent mentionné Kyle à Lance, mais j'obtiens toujours la même réponse : il n'est personne et ralentirait ma carrière. J'ai envie de lui hurler qu'il a tort, que Kyle est la meilleure chose qui me soit arrivée, qu'il ne fera jamais tache à mes côtés. Mais c'est peine perdue, Lance n'écoute rien.

— Lance... j'aimerais vraiment...

— Si tu mentionnes encore ce foutu étudiant, je vais vraiment me fâcher. Si tu veux l'aimer en privé, soit, je ne peux pas tout contrôler. Mais ton image m'appartient, ma belle. N'oublie pas que je suis dans le milieu depuis très longtemps et que je sais ce qu'il y a de mieux pour ta carrière. Et ce Kai n'en fait pas partie.

— C'est Kyle, grommelé-je dans ma barbe.

— Tu as dit ?

— Rien...

Je souffle en ravalant les larmes qui me guettent. Je déteste faire subir ça à Kyle. Je sais qu'il est inquiet, qu'il panique à chaque fois qu'il voit un nouveau magazine people. Je le comprends, à sa place, je mettrais le monde à feu si je voyais une fille un peu trop proche de lui. Mais Kyle reste cet être calme et tempéré. Il me fait confiance, et je ne parviens jamais à m'en montrer digne.

J'aimerais lui parler de Lance, de toute cette pression que je subis quotidiennement. Mais comme quand nous étions au lycée, j'en suis incapable. Je ne veux pas que mes problèmes lui causent du tort. Je ne veux pas qu'il me voie comme une petite fille incapable. Je ne veux jamais que Kyle puisse avoir une mauvaise opinion de moi.

Pourtant, si tu continues à le faire souffrir de la sorte, tu risques de le perdre, me souffle ma satanée conscience.

Et elle n'a pas tort. Si je continue sur cette voie, il m'échappera et je perdrais la seule chose qui me maintient en vie. Je ne sais pas qui serait Avery Cooper sans Kyle Jennings et je ne veux jamais le découvrir.

Je me déteste d'être aussi égoïste. Je sais pertinemment que si je le laissais partir pour de bon, il serait enfin heureux. Et cette option n'est pas envisageable. Je n'y survivrai pas.

Je me dirige vers le frigo pour sortir le beignet au chocolat que j'ai acheté ce matin. J'en meurs d'envie et je me suis dit que ça me ferait du bien après cette longue journée.

— C'est quoi ça ? Jette-moi cette chose bourrée de calories tout de suite, intervient Lance en attrapant mon beignet.

Il s'empresse de le jeter dans la poubelle la plus proche avant de me fusiller du regard.

— Putain, mais pourquoi tu as fait ça ? m'écrié-je.

— On a dit quoi à propos de ton alimentation, jeune fille ? Pas de glucides, pas de gluten, tu as un régime strict que j'ai fait rédiger. Tu dois le suivre sans écart, compris ?

La colère boue en moi. J'en peux plus de ses ordres, de son contrôle constant. J'aimerais lui hurler d'aller se faire foutre, mais il est trop fort pour ça. Il connaît mes faiblesses et sait toujours quoi dire pour que je suive ses directives à la lettre. C'est comme si mon cerveau n'existe plus.

— Une fois ne va pas me tuer.

— Ça commence par une fois, et ça finit avec dix kilos en plus. Veux-tu vraiment que tes poignets d'amour reviennent ? Tu veux faire tache sur les tapis rouges avec des bourrelets.

— T'es ridicule, il y a de plus en plus d'actrices avec des formes qui sont très jolies, répliqué-je en croisant mes bras.

— Et ce sont les premières à se faire incendier. Je me fous de ces actrices, tout ce qui m'importe, c'est toi et ton image, Avery. Tu veux lui ressembler, n'est-ce pas ? me dit-il en me montrant une photo de ma mère dans sa jeunesse.

Elle porte une robe bleue bien moulante qui laisse apparaître son corps de rêve. Évidemment que je veux lui ressembler, c'est mon souhait le plus cher. Cette femme est mon exemple.

— Tu crois qu'Amber Adams se gavait de chocolat pour avoir un résultat pareil ? Je ne crois pas non, alors tu vas oublier ça, aller à la salle de sport ce soir et maintenir ce corps de rêve dont les médias sont fous.

Il s'approche de moi et me colle contre le mur le plus proche. Il empoigne mes fesses d'une main et laisse balader l'autre sur le haut de mon corps. Il parcourt chacune de mes courbes du regard, ses yeux brûlants, tandis que son souffle chaud caresse mon visage à cause de sa soudaine proximité. Je tremble comme une feuille, détestant son contact.

— Regarde-moi ce corps parfait, Avery. Il fait bander tous les mecs, moi le premier, et ça ne doit jamais changer. Et quand tu auras oublié ce Kyle de pacotille, tu laisseras enfin des vrais mecs le voir de plus près.

Il continue de me tripoter alors que la bile me monte à la gorge. Je donnerai n'importe quoi pour avoir la force de le repousser, d'être la fille téméraire que tout le monde imagine. Mais je suis faible, je l'ai toujours été. Ça n'a pas de raison de changer, n'est-ce pas ?

Lance vient promener ses lèvres sur l'épiderme de mon cou en me donnant de petits baisers. Ses mains passent sous mon tee-shirt pour empoigner ma poitrine.

— Si tu savais ce que j'aimerais faire à ce corps, Cooper. Dis-le mot et je te ferai oublier ce mec en un clin d'œil.

Les larmes coulent, je hurle de l'intérieur, mais aucun mot ne sort. Je sais qu'il n'ira pas plus loin. Il a déjà tenté, mais s'est arrêté aussitôt. Des attouchements de la sorte ne reviendront jamais à un viol pour un type comme lui. Il me l'a fait comprendre. Il est écœurant.

— Je t'en prie, Lance, laisse-moi partir.

Son regard rencontre le mien tandis qu'un sourire vient orner ses lèvres.

— Tu es difficile, Cooper et c'est ce qui m'attire le plus chez toi. En plus de ce cul, évidemment. Alors, pour mon bien et celui de tes fans, continue de l'entretenir. Tu ne veux pas devenir une moins que rien, n'est-ce pas ? Tu ne veux pas te faire oublier aussi vite que ta mère biologique l'a fait avec toi, n'est-ce pas ? Tu ne voudrais pas que papa et maman Cooper soient déçus de leur petit trésor ?

Les larmes coulent de plus en plus. Il sait où appuyer pour me faire réagir. Il est intelligent et il en joue.

— Alors continue de suivre mes ordres et on aura aucun problème.

Il plaque sa bouche contre la mienne, m'obligeant à l'ouvrir pour entremêler nos langues. Mon estomac se serre, mon corps tremble. Il balade une dernière fois ses mains contre moi tout en pressant furieusement sa bouche à la mienne.

— À demain ma jolie.

Il s'en va sans un regard. Comme à chaque fois qu'il agit ainsi, je fonce aux toilettes pour y vomir tout le dégoût qu'il m'a procuré avant de m'effondrer au sol et laisser échapper toutes mes larmes.

Je déteste Lance, je déteste Hollywood, je déteste ce monde que j'avais tant idéalisé.

Alors, comme à chaque fois que je me sens mal, la petite fille en moi refait surface, celle qui a besoin de son protecteur, de sa bouée. Machinalement, je sors mon téléphone et appuie sur le nom de la seule personne qui me maintient à flot. Malheureusement, c'est son répondeur qui m'accueille. C'est compréhensible, il est tard et la vie étudiante n'est pas de tout repos.

— Kyle, c'est moi, Avery, commencé-je en tentant de garder une voix calme. Je... j'ai eu une longue journée, et j'avais juste besoin d'entendre ta voix.

Les larmes me brûlent les yeux, ma gorge se serre en repensant à tout ce que je subis au quotidien et dont il ignore tout.

— Je... je suis désolée, je ne sais pas pourquoi je suis dans cet état. Ce n'est pas facile tous les jours, je crois que la fatigue devient plus intense. J'aimerais tellement te serrer dans mes bras en ce moment, tu ne peux pas imaginer à quel point. Enfin bref, j'espère que tu vas bien. Appelle-moi dès que tu peux. Je t'aime fort.

***

La sonnerie de mon appartement retentit et me fait sursauter. Je suis réveillée depuis un moment, mais je n'ai pas beaucoup dormi, pour être honnête. Comme chaque jour, j'étais perdue dans mes pensées.

La surprise est totale lorsque je découvre un visage familier devant moi.

— Kyle ? Tu es venu ? m'exclamé-je, sous le choc.

— Tu as appelé.

Et soudain, toute la pression s'évapore, mon cœur s'emballe et mon corps retrouve celui qu'il connaît si bien.

Je suis à nouveau chez moi.

🎞️🏄🌊🏒🩺

Ce chapitre, bien que court, était difficile à écrire sans avoir la rage ! Je déteste Lance avec une passion ! Évidemment je ne cautionne en aucun cas les propos qu'il a tenu

Mais c'était nécessaire pour montrer qu'Hollywood à ses côtés sombres et que des connard pareils existent réellement et profitent des faiblesses de certaines personnes.

Avery est manipulé et commence à tomber dans un cercle vicieux qui détruit peu à peu sa relation avec Kyle.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top