Avery 20 ans, Kyle 19 ans

KYLE

— Hey, italien ou japo...

Je m'arrête brusquement en voyant mon meilleur ami penché sur mon bureau.

— Tu m'expliques tout ça ? demande Hayden en désignant les nombreux articles de journaux éparpillés sur mon mur.

La gêne m'envahit, et je détourne les yeux. D'habitude, on ne se réunit jamais chez moi. Mon appartement est petit, donc il est plus logique qu'on aille chez Hayden ou à la coloc de l'équipe. C'est pourquoi, lorsqu'Hayden est passé à l'improviste pour passer la soirée avec moi, dissimuler mes petits secrets honteux ne m'a pas traversé l'esprit.

Je n'ai parlé à personne de mes obsessions. J'ai toujours prétendu que ma relation ambiguë avec Avery ne me posait aucun problème. C'est déjà assez compliqué d'expliquer mes sentiments ; je ne voulais pas inquiéter les autres.

Cela fait un an et demi que je suis à l'université. Un an et demi que je ne vois presque plus la femme que j'aime. Un an et demi que sa carrière a décollé et qu'elle brille de plus en plus. Un an et demi qu'elle assiste à des événements de célébrités, toujours accompagnée d'un autre homme. Elle me répète que ça ne signifie rien, que c'est juste du marketing, des coups de publicité imposés par son agent, qu'il n'y a qu'un seul homme qui compte. Et comme un idiot, j'accepte sans broncher. Parce que je l'aime et que je ne peux pas envisager que ce ne soit pas réciproque.

J'ai toujours eu une confiance aveugle en Avery et je ne veux pas que ça change. Si elle me dit qu'il ne se passe rien avec ces gars, je dois la croire.

Malgré cela, je ne peux m'empêcher de lire chaque article la concernant. Je les ai tous rassemblés sur un mur de ma chambre, comme un putain de taré obsessionnel, et je passe mes soirées à les lire encore et encore, à scruter chaque geste de ces hommes envers Avery. Je sais que ce n'est pas normal, mais je ne peux pas faire autrement.

— Ce n'est rien...

Mon meilleur ami fronce les sourcils, puis attrape un article au hasard.

— « Le dernier film d'Avery Cooper a fait un carton. La première a eu lieu le douze janvier dernier. La jeune femme était accompagnée de Leander Johnson, son co-star. Cooper était resplendissante dans sa robe signée Dolce Gabbana. Les deux stars ont été aperçues plutôt proches. Il faut dire que Johnson avait les mains assez baladeuses durant cette soirée, ce qui n'avait pas l'air de déranger sa partenaire. Les deux acteurs n'ont rien confirmé, mais il se pourrait que la fiction soit devenue réalité. »

Mon cœur s'emballe en entendant ces mots que j'ai relus tant de fois. Hayden n'a cité qu'un article, mais tous les autres racontent quelque chose de similaire. Avery Cooper, la nouvelle étoile montante qui fait battre tant de cœurs.

— C'est donc elle, la superbe Avery. Une célébrité de plus qui se tape tous les mecs qu'elle croise.

— Ferme-la, Hayden. Ne redis plus jamais une chose pareille, aboyé-je en le fusillant du regard.

Il recule, surpris. C'est la première fois qu'il me voit si énervé. Il a visé juste, et ça me blesse. Au fond, je sais qu'il a raison, qu'il est simplement en colère contre Avery, mais je ne peux pas tolérer qu'on s'en prenne à elle. Peu importe ses actions.

— Putain, Kyle, tu continues à la défendre. Comment peux-tu prêter serment d'abstinence, repousser toutes les filles qui t'approchent alors qu'Avery baise tout Hollywood ?!!

— Elle ne baise personne, putain. Elle me l'a juré.

— Et tu la crois sur parole ? Je suis désolé de te l'apprendre, mais les nanas n'avouent jamais quand elles se tapent d'autres mecs. Je parle d'expérience.

Ma colère monte en flèche, et l'envie de cogner un de mes seuls véritables amis me démange. Je déteste la personne que je deviens quand il s'agit de défendre Avery. Pourquoi je n'arrive pas à me contrôler ? Pourquoi je ne peux pas me faire passer en premier ? Pourquoi je laisse ses actions me détruire à petits feux ?

Je ferme les yeux et fais quelques exercices de respiration pour me calmer. Je ne peux pas me permettre d'entrer en conflit avec celui qui m'épaule depuis plus d'un an. Je rejoins le mur le plus proche et m'écroule au sol. Hayden me rejoint rapidement et passe un bras autour de mes épaules, en signe de réconfort.

— Je suis désolé, je ne voulais pas te faire du mal...

— Non, tu n'as pas à t'excuser, je l'interromps. Tu veux simplement mon bonheur, j'en suis conscient.

— Pourquoi tu la laisses te traiter de la sorte, Kyle ?

Je ravale mes larmes tout en triturant mes doigts.

— Je l'aime, Hayden. Elle s'est infiltrée dans mon cœur alors que je n'étais qu'un gamin qui comprenait à peine ce que ça signifiait. Elle a toujours été à mes côtés. Elle m'a défendu quand j'avais des ennuis, elle a séché mes larmes, apaisé mon cœur lorsque c'était nécessaire. Je ne peux pas perdre confiance en elle à cause de foutus articles qui ne sont écrits que pour foutre la merde.

— Pourtant, tu les épluches un par un et les conserves. Peut-être qu'au fond de toi, tu crains qu'il y ait une part de vérité.

Je garde le silence en continuant de fixer le sol. La vérité, c'est que je suis complètement paumé. Une part de moi a confiance en Avery. Elle est ma meilleure amie, ma moitié, la seule personne qui ne m'ait jamais tourné le dos. Elle est celle qui me comprend en un seul regard, celle qui me fait sourire sans même essayer. Je suis persuadé qu'il nous sera impossible de créer un lien aussi fort avec une autre personne.

Néanmoins, ça ne m'empêche pas d'avoir la trouille. La trouille que ce nouveau monde qui s'offre à elle lui fasse réaliser qu'il y a de meilleurs choix. Des hommes plus forts, plus intéressants, plus beaux que moi. Comment rivaliser avec ces célèbres canons qui ont tout pour eux ?

Hayden attrape mon visage entre ses doigts et me force à le regarder dans les yeux. Un échange silencieux s'installe et mon meilleur ami comprend très vite ce qui pose problème.

— Non, Kyle, aucun de ces mecs ne t'arrive à la cheville. Putain, je n'arrive même pas à croire que ça puisse traverser ton esprit. Tu es la meilleure personne que je connaisse. Tu es beau, intelligent, gentil, dévoué. Crois-moi, les mecs comme toi se font rares de nos jours. Si Avery n'est pas foutue de voir ça, c'est son problème. Mais toi, tu ne dois jamais en douter.

Je ne lâche pas mon meilleur ami du regard. Je lui fais comprendre, sans prononcer le moindre mot, que je suis reconnaissant de son amitié. De cette façon qu'il a de me tirer vers le haut et de dire les mots qu'il faut à chaque fois. Je finis par l'attirer à moi dans une forte étreinte.

— Tu as raison, je dois lui en parler. Je dois la confronter et lui faire comprendre qu'elle ne peut pas continuer à me blesser de la sorte.

Un sourire de fierté orne le visage de mon meilleur ami, réchauffant mon cœur par la même occasion.

— Je suis là, Kyle. Quoi qu'il arrive, je serai toujours à tes côtés.

***

— Lance-lui, lance-lui ! Putain, mais quel idiot ! Qui a recruté ce crétin, même pas foutu de savoir quand un joueur est démarqué, hurle Hayden contre l'un des joueurs.

Je ne peux réprimer un sourire en le voyant si impliqué. Hayden est un excellent joueur de hockey. Il a d'ailleurs récemment été promu capitaine de l'équipe. C'était la meilleure décision que le coach Collins pouvait prendre. Mon meilleur ami est une légende, et je suis chaque jour surpris qu'il ne veuille pas lancer sa carrière professionnelle.

— Sérieux, si c'est ça la NHL de nos jours, je suis bien content de ne pas y entrer.

— Tu sais, tu ferais peut-être une différence si tu changeais d'avis.

— Hmm, bien tenté, mais la réponse est toujours non. J'adore le hockey, mais ma passion se trouve dans la justice. C'est dans ce domaine que je compte faire une différence.

Je ne tente pas de le contredire, car je comprends son point de vue. Hayden n'a pas eu un début de vie facile, et ce qu'il m'a raconté de son passé m'a complètement chamboulé. C'est ce qui fera de lui le meilleur des avocats. Quand tu as une raison de te battre, rien ne t'arrêtera pour faire régner la justice.

Nous avons passé la soirée à regarder un match de hockey. Nous partageons notre temps entre soirées au bar et soirées tranquilles à la maison. Et évidemment, c'est la deuxième option que je préfère. Casanier de nature, je n'en ai jamais eu honte, même quand mes potes passent leur temps à me traiter de grand-père.

Clay devait nous rejoindre, mais il avait un rencard avec un type de l'équipe de basketball, un certain Nolan Grey. Ça fait quelques semaines qu'ils se voient, et je n'ai jamais vu mon ami aussi heureux. Rien de très sérieux pour l'instant, mais c'est sur la bonne voie. Je suis sincèrement heureux pour lui. Il n'a pas eu la vie facile ces dernières années, et si ce mec peut lui apporter bonheur et stabilité, il ne m'en faut pas plus pour lui faire une place dans mon cœur.

— Je pensais à un truc, je...

Mais Hayden n'a pas le temps de finir sa phrase, car la sonnerie de ma porte d'entrée retentit.

Qui ça peut être à une heure pareille ?

Je fais signe à mon ami de rester où il est et m'empresse d'aller ouvrir la porte.

— Ce n'est pas vrai, m'exclamé-je en voyant mon invité.

— Surprise ! s'écrie Avery en me sautant au cou.

Je reste figé, trop surpris de la voir chez moi sans prévenir. Mon cerveau finit par reconnaître son parfum familier et la chaleur de son étreinte. Rapidement, je l'attire à moi un peu plus fort en enfouissant mon visage dans son cou.

Avery est là. Elle est là, et comme à chaque fois qu'elle m'approche, j'oublie tout. Toutes mes larmes, toutes mes soirées à calmer mes angoisses qu'elle a causées.

Avery est là.

— Kyle, qui est-ce...

Hayden apparaît à mes côtés, et son corps se tend immédiatement en reconnaissant la fille dans mes bras. Je sais ce qu'il pense, et par un simple regard, je lui demande de me pardonner.

— Je suis Avery, tu dois être Hayden ? sourit la fille de mes rêves en tendant sa main à mon meilleur ami.

Hayden la regarde de haut en bas, un air de dégoût sur le visage. Il ne compte pas faire semblant, ça, c'est sûr.

— La fameuse Avery. J'ai beaucoup entendu parler de toi.

— Que du bien, j'espère ?

— Je ne vois pas comment c'est possible.

Avery fronce les sourcils, perdant son sourire éclatant. Foutu Hayden.

— Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ? réplique-t-elle en croisant les bras.

— Ça veut dire que Kyle est mon meilleur ami et que je t'ai à l'œil.

Un duel de regards s'installe entre eux. L'un cherchant à me protéger, l'autre pas intimidée pour un sou, prête à faire valoir qu'elle était là avant. Quant à moi, je me sens obligé d'intervenir avant que ça ne dégénère.

— Allez, vous deux, ne commencez pas. Avery, donne-moi ton sac. Tu dois être affamée. Tu veux que je te prépare quelque chose à manger ? lui proposé-je.

Elle lâche enfin Hayden du regard pour reposer ses douces prunelles sur moi.

— Avec plaisir. Je t'attends à la cuisine.

Elle s'en va après avoir lancé un regard meurtrier à mon ami, tandis qu'il réplique avec la même intensité.

Dans un monde idéal, les deux personnes que j'aime le plus s'entendraient à merveille. Mais apparemment, c'est trop demander.

— J'ai besoin que tu ranges tous les magazines, elle ne doit pas tomber dessus.

— Kyle...

Je sais ce qu'il pense. Je sais que je lui ai promis de me défendre et de dire ses quatre vérités à Avery, mais c'était avant de la revoir. Avant que mon cœur ne recommence à battre plus fort, avant que l'excitation ne ressurgisse. C'était quand son visage était trop loin pour me rendre faible.

— Je t'en prie, Hayden.

Il me fixe un instant, tentant de me faire changer d'avis, de me raisonner. Mais il finit par baisser les armes quand il comprend que ce ne sera pas pour ce soir.

Ce soir, je vais continuer d'être faible.

🎞️🏄🌊🏒🩺

Hayden mode papa protecteur activé !

Comme vous l'avez vu dans Fucking Roomie, Hayden est loin de porter Avery dans son cœur et ça n'est pas près de changer.

Quant à Kyle, il n'a pas encore la force et le courage d'exprimer clairement ce qu'il ressent.

Dans le prochain chapitre, ça se passe du côté d'Avery et vous verrez ce que Kyle ignore et ce n'est pas jolie jolie 🫣

A demain !!