13°

La lumière douce de l'aube effleurait mes cils, glissant sur mes paupières pour me tirer lentement d'un sommeil profond. C'était la nuit la plus reposante que j'aie connue depuis des années, une parenthèse de paix et de réconfort.

Allongée seule dans le lit de Monsieur M, entourée de ses oreillers, je sentais son parfum enveloppant tout mon être, une sensation à la fois rassurante et délicieusement troublante. Est-ce toujours ainsi que l'on se sentait en se réveillant dans la chambre de quelqu'un qui nous est cher ? L'amour et les liens familiaux m'étaient étrangers. Monsieur M et moi ne partagions ni l'un ni l'autre, rendant encore plus mystérieux son intérêt pour moi. Pourquoi cette attention, au lieu de m'effrayer, m'intriguait-elle autant ?

Mais où était-il ?

La chambre était vide, tout comme le Palace, déserté, plus silencieux que les quartiers les plus calmes de la ville. Seul Hoseok attendait, assis sur un canapé rouge, jouant aux cartes et buvant un rhum ambré. Monsieur M, lui, ne buvait jamais d'alcool en notre présence, par respect pour ses employés qui travaillaient dur pendant qu'il aurait pu se laisser aller à une coupe de prosecco.

"Tu n'étais pas dans ta chambre ce matin," remarqua Hoseok, les yeux rivés sur ses cartes. "J'ai cru que tu t'étais enfin fait la malle, mais il faut croire que tu es vraiment stupide."

Il serra la mâchoire, trahissant sa peur. Travailler pour Monsieur M n'était pas sans risques, et Hoseok ne me donnait pas un simple conseil, mais un avertissement clair : je m'engageais sur un chemin dangereux.

"J'étais là," répondis-je pour clore la conversation.

"Dans la chambre du patron ?" demanda-t-il en cessant toute activité, attendant ma réponse.

Mon regard fut suffisant pour qu'il soupire et range ses cartes. Hoseok, malgré ses pensées incessantes, ne disait jamais grand-chose. Nous avions tacitement convenu de ne jamais commenter les actions de l'autre. Même lorsque ses escapades le mettaient en danger, il gardait toujours une retenue prudente, comme si les réponses devaient venir de moi.

"On y va ?" demandai-je en le regardant se lever, son pistolet glissé dans l'arrière de sa ceinture.

"Allons-y."

Une heure plus tard, nous étions devant le Rex. Cette boîte de nuit, hors des zones de contrôle, était sans conteste le lieu idéal pour se procurer une dose et croiser les plus grands mafieux de Séoul. Hoseok m'exposa son plan, succinct, comme s'il savait que Monsieur M lui avait confié la mission de me tenir éloignée du cœur de l'action, me réservant les tâches les moins risquées.

"Et s'il refuse de travailler pour nous ?" Ma question suspendit un instant le temps. "On aura besoin d'un passeur..."

Hoseok, d'un geste froid, sortit son arme, fixant tour à tour le portier et la fenêtre la plus haute du bâtiment.

"Si Kang n'accepte pas, on le descend. Le boss sera fier de moi si j'élimine ce trouble-fête."

Pour Hoseok, la fierté et la fidélité envers Monsieur M étaient primordiales. Ses mots portaient une vérité brutale, un reflet de la loyauté indéfectible qu'il nourrissait pour cet homme impitoyable.

"C'est pour ça que tu as parlé de Taeyong et de notre petite discussion dans la neige, pour qu'il soit fier de toi ?"

Hoseok se tourna lentement vers moi, cherchant à comprendre pourquoi je remettais ça sur le tapis. Ma colère contre lui bouillonnait, mêlée à la bêtise de l'avoir cru. Il plissa les yeux, prit une seconde pour réfléchir, puis pénétra dans la boîte de nuit silencieuse sans un mot de plus.

L'intérieur désert de la boîte de nuit révélait un décor méconnaissable, privé de son habituelle frénésie. Les lumières tamisées projetaient des ombres fantomatiques sur les murs, créant une ambiance étrangement apaisante. Le bar, autrefois cœur vibrant d'activités, semblait figé dans le temps. Les tabourets vides se dressaient en rangées parfaites, attendant silencieusement le retour des buveurs, des fêtards, et de leurs histoires. La zone VIP, à l'étage, autrefois animée de murmures et de rires étouffés, reposait dans un silence solennel. Les sièges en velours et les tables brillantes semblaient attendre patiemment le retour de leurs habitués. Au milieu de cette tranquillité, l'âme de la boîte semblait somnoler, en attente du crépuscule où elle renaîtrait sous les feux de la nuit.

"Mister Jung !" Une voix enjouée brisa le silence. "Dites-moi que je rêve !" Kang Daniel fit son apparition, les bras grands ouverts comme pour saisir le plafond. "Ça fait une éternité qu'on ne t'a pas vu ici, mon vieux copain !"

Son entrée théâtrale fit écho dans la salle vide, ajoutant une tension palpable à la rencontre. Kang Daniel, avec son sourire enjôleur et ses manières désinvoltes, incarnait le danger et la séduction de cet univers clandestin. Tandis que les ombres se mouvaient autour de nous, je réalisai que la véritable danse venait de commencer, une valse incertaine entre loyauté et trahison, sous les lumières vacillantes du Rex.

Hoseok réfréna l'envie de le frapper, avançant vers celui qui tenait peut-être l'avenir du Palace entre ses mains.

"Arrête ton cirque et dis-nous si tu suis le patron ou pas. Ne fais pas semblant d'ignorer la situation, je sais qu'il t'a déjà graissé la patte." cracha-t-il, les yeux remplis de colère.

Le patron du Rex, déçu de ne pas recevoir une accolade de son ancien compagnon de débauche, laissa retomber ses bras. Il saisit un tabouret, s'y installa et alluma une cigarette, tapotant les cendres dans un verre vide. La situation semblait jouer contre nous. Je remarquai ses gardes du corps, prêts à intervenir, postés près de la piste du DJ et sur les balcons surplombant la salle.

"En effet," commença-t-il lentement. "Mais permets-moi d'exprimer ma joie de te revoir dans ta maison d'antan, mon ami. Quant à votre passeur, j'ai encore des réserves sur la durée de mon engagement avec ton 'Boss'."

La mention de Kang Daniel fit tourner mon regard vers Hoseok, dont les yeux ne quittaient pas l'homme assis. En y réfléchissant bien, je réalisai que je ne savais rien de la vie de Hoseok avant notre rencontre au Palace. Est-ce que Monsieur M était au courant ? Une chose était sûre, Hoseok l'aurait descendu depuis longtemps s'il n'y avait pas eu ces hommes en embuscade autour de nous.

"Tu doutes de la qualité du Palace ? Nous sommes le principal point de revente du quartier Nord et du centre. Les gens viennent chez nous parce qu'ils savent que notre came est de première qualité. Notre chiffre d'affaires dépasse largement celui du Rex depuis cinq ans."

"Dépassait," corrigea Kang avec un sourire narquois. "L'âge d'or de votre petit marché est révolu. N'est-ce pas chez vous qu'un idiot a vidé son chargeur au plafond ? Les clients n'aiment pas les armes, paraît-il. Votre passeur a pris la fuite, détournant la plupart de vos arrivages vers l'Est. Et tout le monde sait que votre boîte croule sous les dettes. Ce n'est qu'une question de temps avant que vos habitués ne vous quittent pour notre 'mauvaise came'." Son ton agaçant continuait d'enfoncer le clou. "Le Rex demande déjà beaucoup de temps et d'organisation. Vouloir gérer deux points de passage est ambitieux. Je n'ai aucune intention d'investir dans un bourbier prêt à s'effondrer."

Hoseok sortit son arme et la pointa sur Kang, défiant son arrogance.

"C'est oui ou c'est non."

À cet instant, la salle s'anima. Les gardes du corps et les mafieux se mirent en action. Les snipers postés en hauteur ajustèrent leurs fusils, les hommes de Kang se placèrent devant lui, prêts à nous descendre. D'un geste de la main, Kang les calma, sûr que Hoseok ne risquerait pas de mettre en péril leur position.

"Allons, allons. Pas de carnage pour une question d'argent. J'ai beaucoup de respect pour ton chef, Hoseok. Il est jeune, mais il a gravi les échelons rapidement. Son nom est loin d'être insignifiant et son éducation... disons intéressante. J'apprécie qu'il fasse appel à moi. Avec la drogue que nous vous fournirons, le Palace pourra reprendre son trafic, et tout ira bien dans quelques jours. N'est-ce pas ?"

Son regard de fouine, sa dégaine de brigand vêtu de Prada et de Gucci, tout en lui respirait l'arrogance.

"Pourquoi investir dans un concurrent ?"

"Hoseok, il a accepté, merde... Ferme-la et partons," murmurai-je en lui donnant un coup de coude, sentant la situation s'envenimer.

Cet abruti risquait de tout gâcher.

Kang trouva cela amusant, esquissant un rictus.

"J'ai tout à y gagner. Vos revenus deviennent partiellement les miens, j'étends mon business et je transforme un concurrent en allié. Tu l'as dit toi-même, vous êtes les premiers sur le nord et le centre de Séoul. En devenant votre passeur, j'ajoute le sud et contrôle quasiment toute la ville. En réalité, je rafle toute la mise et vous perdez comme des losers." conclut-il avec un sourire carnassier.

"Quel fils de pute," murmura Hoseok en se retournant pour partir.

Ironiquement, on pourrait dire que la mission avait été un succès, mais l'aura sombre de Hoseok me dissuada de toute ironie.

Dans la voiture, un silence pesant régnait. Le mutisme d'Hoseok sur sa confrontation avec Kang me rendait nerveuse. Avait-il vraiment travaillé pour lui avant de rejoindre le Palace ? Pourquoi était-il parti ? Il devait y avoir une raison, et je n'accepterai pas une excuse banale.

"N'essaie même pas de me poser une question," siffla-t-il en voyant mon trouble. "Ce que Kang a dit sur mon passé, c'est juste pour nous mettre la pression et prendre l'avantage, rien de plus."

"Le Patron est-il au courant ?"

La question resta en suspens, ajoutant une couche de mystère à l'énigme qu'était Hoseok.

Hoseok freina brusquement, la voiture s'arrêtant dans un crissement strident. Il se pencha vers moi, son arme pointée sur mon visage, menaçante.

"Si jamais il l'apprend, je te jure que je t'écorche vif, Parker. Compris ? C'est entre toi et moi."

L'homme au regard noir n'avait jamais été adepte de la gentillesse. Grandissant dans la misère, il n'avait jamais toléré que quiconque le rende plus vulnérable. J'aurais dû prévoir qu'il réagirait ainsi. Rien ne le mettait plus en colère que quelqu'un qui se mêle de ses affaires.

"Est-ce que c'est ce que j'aurais dû faire, te menacer ce jour-là pour que tu ne parles pas de mes recherches à Monsieur M !" La colère bouillonnait en moi, consciente que ce moment viendrait. "Tu oses me menacer, mais c'est toi le premier à lécher les bottes et à balancer tes propres collègues, juste pour être le bon toutou fidèle."

Hoseok voyait rouge. C'était la première fois qu'il avait autant envie de frapper une femme. Peut-être était-ce aussi la faute de cet enfoiré de Kang, qui avait remué la merde. Il savait que ses mots seraient mal interprétés et qu'ils causeraient des ennuis. Ce fils de pute méritait de se faire couper la langue.

"Qui est le chien de qui, hein !" s'énerva-t-il, enfonçant son arme dans mon ventre. "Qui habite chez Monsieur M ? Qui se laisse caresser dans le sens du poil pour fermer les yeux sur ses actes ? Hein, Parker ? Dis-moi ! Qui aboie quand il a mal et laisse son maître défigurer le méchant voisin ? Qui ne se fait pas punir quand il foire ses missions ? Rappelle-moi qui a été adoptée au Palace parce que le refuge où elle était ne voulait plus d'elle..."

Le silence retomba dans la voiture. Je n'osais plus rien dire, et Hoseok avait obtenu la réponse qu'il voulait.

C'était moi.

J'étais le chien.

Le bon toutou. Le gentil petit chiot qui accepte sa récompense après avoir bien agi. Hoseok redémarra la voiture, jetant son pistolet à l'arrière et insultant le conducteur qui klaxonnait depuis dix minutes.

"Vous revoilà."

La voix calme et grave de Monsieur M nous accueillit dans la boîte de nuit comme un père retrouvant ses enfants après l'école. Hoseok lui lança un regard sombre, perdant toute crédibilité quand son patron lui demanda ce qui s'était passé. Il confirma la présence de Kang parmi le groupe et la réussite de leur contrat avec le Rex. Puis, il attrapa une bouteille de Jack et quitta la salle par la porte de derrière, une clope à la bouche.

"Parker ?"

J'essayai de m'éclipser aussi, mais Monsieur M ne me laissa pas ce plaisir. Il avait déjà réduit à néant la distance qui nous séparait, se tenant juste derrière moi. Le comparer à un orque traquant sa proie, s'amusant à la voir trembler, était assez représentatif de l'habituelle présence imposante de Monsieur M.

"Tout s'est très bien passé. Kang a accepté d'être le nouveau passeur. Et vous, votre blessure ?"

Le souffle régulier de mon patron faisait voler les quelques cheveux qui s'échappaient de mon chouchou. Il était si près que j'aurais pu le poignarder juste en me retournant.

"Il faut que je change mes bandages," dit-il en glissant son visage dans ma nuque. "J'aurai besoin d'un coup de main pour le faire."

Monsieur M ne m'ordonnait jamais rien directement en ce qui le concernait. Ses demandes étaient toujours évasives, à demi-mots. Je devais prendre la décision de m'imposer à lui. Evidemment, refuser n'était pas une option, et nous étions trop intelligents pour l'oublier. Il fallait peser le pour et le contre avant de prendre une décision aux conséquences inévitables.

"Venez avec moi," dis-je en l'entraînant dans son bureau, pour qu'il puisse enlever sa chemise à l'abri des regards.

Assis sur le bois dur de son bureau en chêne noir, il défaisait les boutons un par un tandis que je récupérais la boîte de premiers secours. En passant à côté de la boîte en métal, je repensai aux photos trouvées et au passé mystérieux de Monsieur M.

"Enlevez-la complètement. J'ai besoin d'entourer votre bassin de bandage." Il avait laissé ses bras dans les manches, ouvrant simplement le devant de son habit. "Tenez."

Je lui mis un rouleau de bandage neuf dans la main et une soucoupe métallique dans l'autre. Mon patron écarta les bras et les jambes pour que je m'approche de son ventre et retire l'ancien bandage. De près, ses tatouages, couvrant ses bras et le haut de son torse, semblaient raconter une histoire complexe et énigmatique.

Le regard perçant de l'homme assis en face de moi ne me quittait pas. Il observait attentivement chacun de mes gestes, veillant à ce que je ne lui fasse pas mal et que je soigne sa blessure du mieux possible. Concentrer était un défi quand on se sent épié. Je déballai les compresses, essuyant le sang qui avait coulé pendant la nuit, et les jetai dans la soucoupe en métal.

"J'ai toujours été étonné par ta rapidité à apprendre," dit-il en remarquant que je reproduisais les mêmes gestes que Hoseok plus tôt. "C'est très bien."

"Ne me félicitez pas comme un chien qui aurait appris à faire le beau." Ma voix tranchait aussi vite qu'il avait fini sa phrase.

Les mots de Hoseok tournaient encore dans ma tête, m'empoisonnant l'esprit.

Une fois la plaie propre et désinfectée, j'enroulai le bandage autour de son ventre et de son épaule comme Hoseok me l'avait montré. Monsieur M émettait de petits claquements de langue, mais il m'était impossible de savoir si c'était dû à la douleur ou à mes doigts frôlant sa peau.

Après cela, il fit le tour de son bureau, fouillant dans un tiroir avant d'en sortir un téléphone neuf.

"Tiens."

"Vraiment ?" Je l'attrapai à deux mains, reconnaissante. "Je sais que le dernier a fini au fond d'un ruisseau lors de la mission au port, mais je ne pensais pas en avoir un autre aussi vite. Hoseok a attendu plusieurs mois avant d'en avoir un nouveau."

"Hoseok ne couche pas avec son patron," coupa Monsieur M, violemment.

Ses mots me frappèrent comme un coup de poing. Il retournait contre moi ce que je lui avais dit plus tôt. C'était aussi déplacé que cruel. Je ressentais presque la tristesse qu'il avait éprouvée quand j'avais rejeté sa gentillesse, et il me le rendait tout aussi froidement. Et, effectivement, Hoseok ne couchait pas avec son patron.

"Effectivement," fut tout ce que je réussis à dire, tandis qu'il me chassait de son bureau d'un geste de la main, signifiant que ma journée était terminée et que j'étais libre de faire ce que je voulais.

Je sortis du bureau, le téléphone encore chaud entre mes doigts. L'air de la nuit m'enveloppa, mais la froideur des mots de Monsieur M continuait de brûler. Je savais que, d'une manière ou d'une autre, cette conversation n'était pas terminée. Mais pour l'instant, j'avais besoin de temps pour digérer tout ce qui venait de se passer.

"C'est toi ?"

Je relevais la tête de mes pieds, le nez rougis par le froid de l'hiver qui s'infiltrait dans le gros pull que j'avais enfilé avant de sortir pour réfléchir. Un homme blond, un peu plus jeune que Monsieur M s'était arrêté à ma hauteur et me regardait d'un œil curieux. Il venait d'enlever son écharpe pour me la tendre d'un air très aimable.

"Tu ne devrais pas rester dehors de ce temps-là."

"Monsieur Bang ?"

C'est bien l'ancien ami de mon patron qui me tend gentiment son écharpe et l'enroule autour de mon cou. C'est celui qui devait reprendre la gestion du Palace. C'est aussi lui qui à insulter Monsieur M. Il n'a pas l'air beaucoup plus âgé que moi, peut-être d'un ou deux ans mon aîné. Le sourire chaleureux et l'ambiance détendue qui émane de lui m'empêchent de le trouver louche. Dans d'autre circonstances j'aurai immédiatement prévenu mes supérieurs mais pour rien au monde je retournerais à l'intérieur du Palace.

"Est ce qu'on peut parler ? Toi et moi juste cinq minutes ?" Il s'abaisse pour me parler tellement c'est longues jambes et son corps musclé surplombe mon être. "C'est à propos de Yoongi, ça ne prendra pas longtemps."

J'accepte de suite. Non pas parce que j'ai peur de lui ou qu'il change d'avis, mais plutôt pour le contenu de notre conversation. De ce qu'il va dire et de ce que je vais apprendre. 

Yoongi... C'est toujours un mystère d'essayer de te comprendre alors peut-être qu'en passant par un de tes proches j'aurai enfin les réponses à mes questions.

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