• CHAPITRE TRENTE-QUATRE •

Trois jours plus tard

Après avoir bravement affrontés le ciel gris parisien, nous voilà enfin sains et saufs sous le soleil californien. L'hôtel dans lequel nous nous trouvons - n'étant autre qu'un de ceux de la mère de Sam -, ne fait aucunement défaut à mes souvenirs.

Son entrée semblable au marbre pantélique recouvrant le Parthénon ne fait que davantage ressortir la splendeur des lieux, dont le sol vêtu du même matériau recouvre l'ensemble de l'entrée. De la même manière que les grecs aimaient glorifier leur grandeur de par leur architecture, la famille Miller semble ici imposer la sienne. Je me souviens toutefois parfaitement que Sam m'avait dit ne pas avoir réussi grâce à une quelconque aide financière. Nous nous ressemblons finalement bien plus que je ne voudrais l'admettre.

Le visage de mon compagnon semble s'illuminer de joie lorsque nous pénétrons dans la chambre qui nous a été attribuée. Toutefois, à bien le regarder, j'oserais même avancer qu'il s'apprête à encore sortir l'une de ses habituelles absurdités.

- Pour une fois que je n'aurais pas à impunément te renvoyer dans ta chambre, prononce-t-il finalement, son incontournable sourire au bord de ses lèvres pulpeuses.

Ce dernier ne s'est pas rasé depuis déjà quelques jours, lui donnant un air diablement sexy, à tel point que je mettrais ma main à couper que n'importe quelle fille tuerait pour passer plus qu'une nuit en sa compagnie. Sauf que ce soir, je suis l'unique heureuse élue à pouvoir m'octroyer cette chance.

- Ton sens de l'humour dégringole de jour en jour...

Il se jette alors sur moi afin de me plaquer sur l'immense lit que nous avons à notre disposition. Je suppose que cette chambre a dû lui coûter une petite fortune étant donné le balcon nous offrant une vue incontournable sur la ville. Ce dernier passe délicatement sa main sur l'ensemble de ma nuque, avant de continuellement descendre et remonter sur les quelques mèches de mes cheveux tombant jusque sur mon nombril.

- Merci, dit-il finalement, son regard vert transperçant le mien.

- Pour ?

- Pour m'avoir pardonné et accepté mon invitation pour ce court instant...

- Je te l'ai dit, du moment que tu m'invites dans un super restaurant, il n'y aura aucun problème entre nous !, réponds-je tout en lui montrant mes dents à tel point je ne peux m'empêcher de vouloir la taquiner comme il sait si bien le faire.

Il pose aussitôt son doigt sur ma bouche tout en tournant la tête de droite à gauche. Le souffle court, je tente de me défaire de la pression qu'il exerce sur mes lèvres. Celui-ci ne cède toutefois pas, au point de finir par plaquer l'ensemble de sa main pour m'empêcher de parler.

- Je n'ai pas terminé, ma belle.

- Si tu pouvais arrêter de me donner ce surnom quelque peu dévalorisant, bafouillé-je contre sa paume, sans pour autant être certaine qu'un quelconque son audible soit en mesure de parvenir jusqu'à ses oreilles.

Pour la première depuis notre arrivée, mon patron émet un léger rire. Un de ceux ahant le don d'instantanément embaumer la pièce. J'exagère à peine.

Oui, « à peine » Chloé, bien-sûr.

- C'est bête pour toi mais je ne comprends rien, ma belle, répond-t-il avec insolence, ne tentant même pas de cacher sa satisfaction. Merci d'avoir mis un pied en retard dans ce satané bureau.

À l'entente de ces mots, mon coeur manque un battement. Je dois dire que je m'attendais à tout sauf à voir son arrogance se transformer en un tant soit peu de romantisme. Plus rien ne s'affiche cependant sur son visage, comme si son air s'était fermé après avoir réalisé le premier pas qu'il venait de commettre, probablement involontairement.

Et moi, je reste là, pantoise, dans l'attente de paroles réciproques qui ne viendront probablement jamais. En tout cas, pas à cet instant précis. Je ne sais en vérité à quoi m'attendre. Je ne le savais pas non plus en prenant la décision de le suivre  jusqu'ici. Une chose est toutefois certaine : sa simple présence me réconforte dans l'idée d'avoir déjà bravé milles interdits que je m'étais pourtant promise de ne pas franchir. Je n'ai jamais réellement réfléchi aux sentiments qui m'envahissaient à son égard. Je me suis contentée de les ressentir.

Sam se relève brutalement, se dirigeant en direction de la salle de bain. Mon incapacité à bouger le moindre de mes membres m'exaspère, tout comme ma posture encore et toujours allongée sur ces fichus draps. Où est donc passée celle qui a toujours son grain de sel à ajouter ? C'est bien le moment de la réveiller, de lui mettre quelques claques merde !

- Ça te dit de visiter la prison d'Alcatraz aujourd'hui ?, me questionne-t-il de l'autre pièce, coupant court au semblant de malaise s'étant installé entre nous.

Si c'est un plan pour m'enfermer à la Shutter Island, non merci. Disons que ce serait une vengeance plus ou moins ingénieuse mais les endroits glauques ont le don de me foutre mes jetons. Je n'ai d'ailleurs jamais pu garder ne serait-ce qu'un oeil ouvert devant un film d'horreur. Les thrillers à la limite, pourquoi pas... Et encore, seulement si un acteur super sexy me tient en haleine ! Un remake de 50 nuances de Grey avec mon boss en tête d'affiche ne me poserait aucun soucis par exemple.

Bien quoi ? Anastasia ne finit-elle pas par se faire kidnapper ? Je suis assez ouverte d'esprit, finalement.

- Bien que ma culture ne soit pas aussi fermée que tu le penses, tu ne préférerais pas aller donner du pain aux oiseaux ? Je ne sais pas moi, quelque chose d'un peu plus... réjouissant ?

Sa petite tête sort soudainement du cadre de la porte, une brosse à dents fermement coincée dans sa bouche. Quoique fasse cet homme, il restera définitivement un Apollon à mes yeux. J'en fais peut-être des caisses mais qu'importe, j'ai encore le droit de penser ce que je veux. À moins que cela aussi il ne me l'enlève avant de me le proposer par contrat ?

- Je ne faisais que tâter le terrain Jones. Tu me crois vraiment aussi barbant ? Tu me vexes là, ronchonne-t-il à moitié.

Ou peut-être est-ce le son d'une personne normale, essayant de parler tout en se brossant les dents. À bien y réfléchir, je pencherais davantage pour la seconde option.

- Ça te dit un tour de karting ?, me propose-t-il finalement, ressortant de la pièce avec un air enfantin envahissant l'ensemble de ses traits.

- Un quoi ?, m'étranglé-je.

Alors là, s'il croit réussir à me convaincre de monter dans un de ces engins...

- Oh allez, ne fais pas ton bébé !, dit-il sans pouvoir tenir en place une seule seconde. C'est l'occasion d'entrer dans mon monde, non ? Prends ça comme une faveur...

- Tu ferras attention, j'ai la nette impression que tes chevilles sont sur le point d'exploser.

Il s'approche de moi, renouant le contact entre sa peau et la mienne, tout en mimant une moue boudeuse. Et c'est moi le bébé ?

Sa langue parcourt soudainement mon cou, finissant par la laisser descendre dangereusement à la naissance de ma poitrine. Alors que mon souffle s'accélère au moindre de ses mouvements, celui-ci se retire brutalement, me laissant de ce fait seule avec les millions d'images plus ou moins salaces défilant dans mon esprit.

- C'est frustrant, n'est-ce pas ?, marque-t-il davantage par la courte pause qui s'ensuit. Tout comme le fait que tu refuses de t'ouvrir un peu plus à moi.

Bien joué Miller, j'aurais dû m'en douter.

- Tu as gagné. Mais ça n'enlève rien au fait que tu restes et resteras toujours un enfoiré ! Si je dégurgite mon repas sur ton pantalon en toile, il ne faudra pas te plaindre, réponds-je finalement en soufflant un bon coup.

Après tout, il n'est peut-être pas aussi immature que moi. Peu importe, je vais finir par mettre les pieds dans une de ces voitures si basses et surtout si prêtes à s'enflammer après une traversée de piste suivie de je ne sais combien de tonneaux...

Respire Chloé.

Rien ne pourrait être pire que la relation plus que dangereuse que nous entretenons.

Que mon coeur cesse de battre à ses côtés ou qu'il me l'arrache, le résultat risque dans tous les cas de ne pas être beau à voir. Ne nous apprend-t-on pas, petit, à ne pas jouer avec le feu ? Personne ne l'a fait pour moi en tout cas. Disons que cela me donne une raison de plus d'accepter.

Enfin je crois.

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