• CHAPITRE DIX-NEUF •
Que l'on me vienne en aide !
Je peine à ouvrir les yeux à tel point ma tête me fait un mal de chien. La lumière du soleil transperce violemment les rideaux, si bien que j'ai l'impression d'être agressée par dame nature dès les premières lueurs de l'aube. Ma main tâte la commode se trouvant à mes côtés. Cela fait maintenant cinq bonnes minutes que je cherche ce fichu médicament. Je me souviens pourtant parfaitement en avoir mis une boite juste là, au cas où un événement comme celui-ci puisse arriver. Après tout, tout ceci n'est peut-être que le fruit de mon imagination. Ma tendance à être désorganisée semble avoir pris le dessus sur les gestes qui peuvent sauver une vie lors des lendemains difficiles. Je reste toutefois persuadée du contraire.
Je poursuis alors ma recherche de l'autre côté du lit, le regard encore plongé sous la lumière orangée de mes paupières.
- Et merde, prononcé-je aussitôt que main se cogne violemment contre le coin de la table de nuit.
Un rire puissant résonne tout-à-coup à mes côtés. Je me fige l'espace d'un instant, tentant de rassembler mes souvenirs de la veille mais en vain.
- Bien dormi ?, me questionne alors une voix masculine.
À ce moment précis, j'ouvre les yeux dans un effort surhumain et aperçois Sam, assis à mes côtés sur le lit. Mais... On est tout sauf chez moi ici ! Ne me dites pas que je suis déshabillée, par pitié. Je soulève la couverture avec une lenteur phénoménale, la panique me submergeant subitement lorsque j'entrevoir la peau de mes jambes. Quand bien même un t-shirt recouvre la haut de mon corps, je demeure actuellement en petit culotte dans le lit de mon patron.
- Ne me dis pas que..., commencé-je totalement ahurie.
- Tu ne te rappelles vraiment de rien ?, continue-t-il en riant.
Je hoche la tête de droite à gauche. Je me souviens évidemment du défilé ainsi que sa tournure mais quant au reste... C'est le vide intersidéral là-haut ! Je mérite d'être secouée dans tous les sens pour ce manque de sérieux.
Son rire ne cesse d'aller crescendo au fur et à mesure que celui-ci détaille l'expression horrifiée de mon visage. S'il s'est passé le moindre événement suspect entre lui et moi, j'aurais alors non seulement perdu le stupide pari que je m'étais faite à moi-même de l'impressionner mais aussi sa considération quant à la véritable place que je mérite au sein de l'entreprise. Dans un élan de panique, j'envoie mon bras valser contre son épaule afin de stopper le bruit incessant en provenance de sa bouche.
Non mais ça ne va pas Chloé, tu viens de frapper ton boss !
- Il ne s'est rien passé si c'est ce qui t'effraie autant. Je n'aurais jamais osé profiter de la situation, me répond-t-il.
- Alors pourquoi ne pas m'avoir ramené chez moi ?, continué-je du tac au tac.
Il m'observe longuement, s'appuyant de sa main droite sur le matelas. Le voir ici à mon réveil, vêtu d'un simple jogging ainsi que d'un pull, éveille tous mes sens. Je le détaille de haut en bas lorsqu'il détourne son regard tout en soupirant longuement. Un sourire se dessine subitement sur son visage lorsqu'il recentre toute son attention sur ma personne.
- Ton cas était plus grave que je ne le pensais si tu ne te souviens même pas de la scène que tu m'as faite.
À l'entente de ces paroles, mes joues s'enflamment à une vitesse fulgurante. Je ne sais de quelle manière j'ai bien pu clôturer cette nuit aux allures mouvementées mais cela ne me dit rien de bon. Et si je lui avais sauté dessus ? Pire encore, si je lui avais sorti une déclaration enflammée, emportée par un flot tumultueux de mauvaises idées dictées par un trop-plein d'alcool. Dans tous les cas, j'ai bien dû ouvrir ma grande bouche pour me retrouver ici. Je ne suis qu'une pauvre idiote ! Où est donc passé mon self-contrôle ?
Contre toute attente, il se relève et quitte la pièce, me laissant seule avec mes idées macabres. Tout ce que à quoi je pense en ce moment même est de m'enterrer vivante sous une couche de couvertures afin de ne plus jamais en sortir. Quitte à mourir sous le poids de la honte, autant le faire avec confort.
- Je suppose que je n'ai plus qu'à partir..., murmuré-je à moi-même en prenant soin de m'enrouler les jambes dans la couette afin de pouvoir me relever en conservant un minimum de dignité.
Sam revient un ordinateur portable dans une main, tandis qu'il tient un café dans l'autre. Il me détaille de la tête aux pieds, un air amusé ridiculement posé là, sur son visage toujours aussi soigné. Je commence sérieusement à me demander si nous vivons tous les deux sur la même planète. Comment peut-on toujours être aussi présentable ? Cette pensée a le don de m'agacer. Je n'ai même pas eu le temps de réaliser qui j'étais, que lui semble avoir déjà pris cinquante douches et s'être parfumé une dizaine de fois après une séance de sport matinale.
Je m'avance alors vers le fauteuil jonché de mes vêtements de la veille afin de filer en deux temps trois mouvements de ce temple où l'apparence physique est prééminente. Je ne devrais pas être exaspérée face à cela. Après tout, il est vrai que nous avons choisi de travailler dans un milieu la plupart du temps superficiel mais cette colère est plus forte que moi. Je peux voir à travers ces gestes, un des aspects de la personnalité de mon père et la médisance s'empare de moi à cette pensée. Je ravale mes paroles ou je serai, cette fois-ci, définitivement mise à la porte.
- Où s'enfuit la petite sirène ?
Je me retourne brusquement et lui jette un regard empli d'un profond mépris. Non mais je rêve où il se moque carrément de moi là ? Je pourrais également lui dire ses quatre vérités ! Rira bien qui rira le dernier.
Je vais évidemment m'affaler dans le canapé et mettre un film ! Quoi d'autre ?, réponds-je plus agacée qu'autre chose par l'absurdité de sa question.
- Tu me prends au mot là..., réplique-t-il immédiatement en s'approchant.
Je lève les yeux au ciel tout en agitant mes bras pour lui dire de s'éloigner. Soudainement, la couverture qui me cachait jusque-là se retrouve affalée sur le sol de la chambre. Merde... J'avais complètement omis ce détail.
Surpris, celui-ci ne peut s'empêcher de se pincer les lèvres afin de ne pas bruyamment se moquer du ridicule de la situation. Je m'empare alors de mes vêtements et quitte la pièce comme une furie.
- Où penses-tu aller comme ça ?, crie-t-il à travers l'appartement. Sache que tu me dois une réelle faveur pour ne pas t'avoir virée.
Je m'arrête brusquement afin d'écouter dans quel pétrin je me suis encore fourrée. Que l'on appelle cela une faveur ou du chantage, si l'occasion se présente de lui montrer qui je suis alors je saisirai cette opportunité.
- Si Mademoiselle est si désireuse de faire ses preuves alors Mademoiselle sera servie. Reste ici une semaine à réaliser le travail que je fais quotidiennement. Si tu as les épaules pour cela, je m'avouerai alors vaincu et nous arrêterons de nous chamailler comme deux enfants.
Submergé par l'emprise qu'il détient sur moi à cet instant, ce dernier s'arrête un moment avant de clôturer le piège qu'il me tend.
- Dans le cas contraire... disons que chacun restera à la place qu'il mérite.
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