Chapitre 4 (suite)

Bonjour à tous, grand merci à ceux qui suivent. J'ai eu la chance dernièrement d'être nominé dans les Coupes de cœur du concours des enchanteurs, merci à eux. Ce sera une petite partie aujourd'hui pour vous laisser vous reposer.


Le corps gracile de l'elfe fut projeté sur le sol, sans procès, la lourde porte rouillée se referma brusquement. Le divan verdâtre sur lequel Lucina dédaigna s'asseoir était empli d'humidité, si bien que sa tenue en pâtit sévèrement, sentir de l'eau sur son postérieur n'arrangea pas son humeur. Bella se tenait dans un coin à l'ombre de la chandelle qui profilait sur les murs du donjon des ombres hallucinantes à faire se dresser les cheveux sur la tête. Une cage dotée d'un confort restreint, rappelant l'opulence d'avant la Grande Guerre, désormais pourrissante dans la majestueuse tour des Aigles qui servait de prison royale.

-Tu peux me laisser avec la créature, Cassandra. Fais savoir à l'elfe que nous lui assurons la protection. Prépare moi un bain à la violette, je te prie, ordonna-t-elle à la servante qui avait bien besoin d'une douche, ses cheveux châtains paraissant des lianes, à la suite de ce si long périple. Je te félicite de l'avoir amenée si promptement, enchaîna-t-elle en braquant son regard sur ce sac de toile mouvant, tu auras le droit de me frotter le dos, et qui sait peut-être mangeras-tu avec moi.

Elle acquiesça, sans ne rien laisser paraître, s'inclinant respectueusement. Sa maîtresse lui envoya une bourse sonnante et trébuchante qu'elle attrapa vivement, car Cassandra était ce genre laquais qu'on ne payait pas uniquement pour laver le linge sale. Cette jeune femme était entrée à son service un an plus tôt, et après multiples séjours dans cette prison, elle avait enfin appris à s'abaisser comme il se le doit face aux gens de son rang. Jamais Lucina n'avait encore eu une personne si effrontée qui accomplissait si bien ses devoirs. Bien sur, elle s'en méfiait comme de la peste, la surveillant attentivement. Pour le moment, elle n'avait ni trahi, ni insulté, ni failli à sa tâche, ce qui expliquait qu'elle soit encore en vie.

-Où suis-je ? Gémit une voix juvénilement autoritaire, les grincements du battant de fer la masquant. Qui que vous soyez, je vous somme de me relâcher, mon père me récupérera...

Un éclat de rire narquois retentit en écho à l'intérieur de ces appartements moisis, où les sons se heurtaient à des murs infranchissables. La silhouette emprisonnée cessa de remuer.

-Tu me sommes, tu te crois en position de t'imposer ? Se moqua l'héritière nocturne. Je vais t'enseigner les bonnes manières. Son talon heurta le sac, un gémissement jaillit. Si tu crois que les tiens peuvent te sauver, il n'y a pas que tes côtes qui vont se briser.

Elle fit signe à la Sandara de l'attacher sur le lit avec les cordes prévues à cet effet. L'enfant obtempéra sans broncher. L'elfe ne se débattit pas, sans doute consciente que la résistance ne mènerait à rien. L'assassin enserra ses poignets pâles sur les piliers sculptés d'ébène, tâchés de sang, bâillonnant ses pleurs. La préparation dura quelques minutes, Lucina passait de temps à autre, frappant à tous les endroits découverts de ce corps incapable de se défendre, tout en déversant le contenu de sa gourde dans son gosier asséché en recrachant ensuite sur sa victime. Elle vérifia les nœuds, tout était parfaitement exécuté.

-Bien, nous allons pouvoir commencer, dit-elle en sortant un poignard de son corset. Garde ce silence, personne ne t'entendra, n'importune pas mon ouïe de ta voix. Je vais te poser des questions, tu répondras par oui ou par non. Est-ce clair ?

-Qui êtes vous ? Prononça sur un ton aussi insolent qu'auparavant cette voix cassée par la frayeur.

La maîtresse des lieux planta l'arme au hasard dans le sac qui l'étouffait, juste assez pour déchirer sa peau en surface. Elle enleva son étau découvrant une apparence d'une beauté qui interrompit ses mouvements. Elle n'avait pas jusqu'à lors ressenti un tel sentiment, une telle attraction envers la moindre personne à part son image. Ce sentiment la troubla si fort qu'elle gifla cette tête aux traits si fins qu'on les aurait crus peints, ce visage pittoresque, secouant une chevelure d'une blancheur immaculée et bouclant le long de ses seins aux proportions parfaites.

-Mon visage te suffira pour l'instant, reprit-elle ses esprits en caressant ses pommettes altières. C'est moi qui pose les questions.

-Ma dame, vous ressemblez tant à Démeter que je vous prie de me délivrer, l'interrompit l'elfe qu'elle laissa parler, hypnotisée par ses yeux qui rappelaient les automnes de son enfance. Elle qui enlevée par Kaalhin a réussi à l'aimer et à demander ensuite à notre mère la Nature de lui pardonner, soyez indulgente.

-J'ignore qui sont tes dieux, rétorqua-t-elle d'un soufflet. Monstre impie, sache qu'ils ne te seront d'aucun secours. Tu es là où ils ne pénétreront jamais. Tu es Camallia Orchenxiar, infante du Joyau Vert ?

-Oui, grinça-t-elle entre sa dentition de la blancheur des deux lunes.

Lucina ne supportait pas cette vision digne des chefs-d'œuvre qui tapissaient les murs de ses songes. Cette innocence, cette franche fleur à l'aube de sa vie réveillait en son âme des sensations que la simple référence faisait frémir. Subjuguée par un tel charme sans artifice, dans ce décor sans lumière du jour et sans faste et sans futiles accessoires, le bourreau se détourna de peur de la contempler en oubliant de la faner. Bella s'en était aperçue, elle brandit un fouet, l'abattit sur le ventre de cette sirène diabolique. Le cri de douleur qui fusa à ce moment précis accentua encore son désir, une mélodie qui enserrait ses pensées.

-As-tu connaissance des quatre éléments ? Murmura-t-elle pour ne rien laisser paraître.

Le silence qui suivit la question fut bien vite brisé par la lanière de cuir qui traverse l'air et s'abat sur la peau délicate, y gravant son empreinte sanguinolente.

-Oui, affirma la voix mélodieuse en soufflant bruyamment.

-Sais-tu où l'on a caché le sceptre d'Ignir ?

Cinq coups de cravache, un arpège de notes sublimes se répercuta dans cette cage où le griffon s'apprêtait à dévorer sa proie.

-Je ne dirai rien... Je ne sais pas même en quoi cela a de l'importance... Je me moque éperdument...

-Suffis, hurla l'humaine en se penchant sur elle en extase. Tu mens, tu vas souffrir. Bella, fouette la jusqu'à ce qu'elle s'évanouisse, nous reviendrons demain au crépuscule...


Elle s'échappa promptement, brutalement, laissant les cris s'éteindre derrière elle. En regagnant ses appartements, elle s'effondra sur le sol, sa gourde vide l'avait abandonnée. Son frère paniqué et son Visage Trouble la ramenèrent à sa chambre, aux sons de la berceuse de sa tante, elle s'écroula dans le sommeil qu'elle contrôlait encore.



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