5. As-tu faim ?

Si on devait affûter notre royaume d'un nouveau nom, cela aurait été le chaos. Sous toutes ses formes. Et depuis toujours.

Il régnait en maître. Depuis la mort d'Astéria. Peut-être avant, qu'en savions-nous ? les archives ne remontaient pas aussi loin. Ce dont on pouvait être sûr en revanche, c'était que depuis, le chaos n'avait fait que hanter nos vies, génération après génération. On ne pouvait pas vraiment blâmer le ciel pour un destin pareil, nous étions responsables de nos actes et nos conditions de vies ne découlaient que des conséquences de nos actions. Aussi infimes soient-elles.

La guerre entre les races duraient depuis toujours. La guerre de pouvoir. La guerre de territoire. La guerre. Il y avait toujours un bon prétexte pour s'entre tuer. Pour se méfier les uns des autres. Pour renier les différences. Pour vivre au détriment d'un autre.

Aujourd'hui, le nouveau massacre était au nom de la paix, si on en écoutait le peuple. Un sacrifice pour la survie de notre royaume. Parce que nous étions en société et que ceux qui risquaient de nuire à notre monde tel qu'il était se devaient de disparaître. Pitoyable...

Un massacre.

Ils pouvaient appeler ces actes de sacrifice, ce n'était en réalité qu'un meurtre. Un meurtre de masse. Des centaines de morts pour écraser la peur qui s'installait dans chacun.

Car la perte des pouvoirs chez les Obscuras ne faisait que se répéter. S'intensifier. Se répandre. Partout. Touchant tout un chacun. Comme une maladie contagieuse. Et ne comprenant pas les évènements, c'est ce que la majorité en avait conclu. Ce n'était qu'une maladie.

Alors si ce n'était que cela, une maladie contagieuse, contentons-nous d'éliminer le problème à la source ! Tuons tous ceux ayant été touchés, brûlons les corps et débarrassons-nous d'eux, ainsi nous pourrons reprendre nos vies sans plus de craintes, avec notre conscience et notre code morale intacte. J'en avais la nausée...

On se battait contre une royauté infâme, nos dirigeants planifiant notre éradication ; mais le peuple ne valait pas mieux. Et parfois, lorsque mon esprit s'assombrissait trop, je me demandais si tout cela en valait la peine : risquer nos vies, lutter pour un royaume qui ne tentait même pas d'aller mieux... Puis, j'agrippais de force la lumière, me rappelant que si la majorité commettait des actes atroces, d'autres luttaient pour le bien, et méritaient de vivre dans un monde qui ne rimait pas avec survivre. C'était pour ces personnes qu'il fallait continuer de se battre. Et parce que ceux ayant commis le pire pouvait se repentir.

N'avions-nous pas tous déjà commis des actes odieux ? Des actes qui nous hantaient, qu'on aurait voulu effacer ? Il était difficile de pouvoir clamer être tout blanc, et vu que rien n'était entièrement blanc, je me refusais à croire que tout puisse être noir.

Il y avait encore quelque chose à sauver dans ce royaume. En chacun de nous.

On ne voyait que le mal, parce que c'était la noirceur qui régnait en ces lieux, mais lorsque la lumière reprendra sa place, la flamme qui brûle en chacun de nous s'illuminera aussi, suivant le mouvement, chassant le néant. Les Obscuras avaient succédé aux Lumias, mais les Lumias reprendraient un jour leur place.

Nous avions appris par Evilash que la perte des pouvoirs n'était pas dû à une maladie. Ce qui, jusqu'ici, me semblait évident. Trop de chose dans ce royaume ne tournait pas rond pour que ce nouveau fait soit seulement le résultat d'un coup du sort. Et lorsqu'elle nous avait annoncé qu'il s'agissait d'un coup des Darknils, la surprise n'avait assommé personne. Qui d'autre ? Ils avaient décidé de frapper. D'attaquer. Leur plan se concrétisait. Si on ne se bougeait pas, on allait tous y passer.

Evilash nous avait informés de tout ce qu'elle savait. Les Darknils avaient un sujet d'expérience, autrefois un Obscuras, qui avait le pouvoir de priver tout porteur du moindre de ses dons. Pire, il pouvait s'approprier ceux individuels. J'ignorais comment Evilash parvenait toujours à avoir autant de coup d'avance, à gratter des informations aussi confidentielles auprès du camp adverse. Elle devait posséder des espions au quatre coin du royaume, rangés parmis l'ennemi. Tout cela m'intriguait. J'aurais aimé connaître plus en détails les stratégies de notre nouvelle alliée. Pouvoir saisir ses plans, y contribuer plus efficacement. Mais même en étant alliés, Evilash mettait une barrière entre elle et nous.

J'aurais voulu faire plus. Faire davantage qu'attendre. Attendre des ordres, obéir, avancer à l'aveuglette ; tout ça ne me ressemblait pas. J'avais l'impression de ne plus être libre, de dépendre des autres. Je détestais cette sensation.

Mais enfin, cette sensation d'inactivité allait s'estomper. Passer à l'action, faire quelque chose de concret m'avait manqué. Et je pouvais remercier Hell pour cela. Si j'avais d'abord remarqué les privilèges qu'offrait Evilash à Rox, la traitant différemment de nous tous, j'avais fini par m'apercevoir que Hell commençait à hériter lui aussi de certains avantages. Il n'était pas au même pied d'égalité que Rox, mais Evilash semblait s'intéresser à lui. Peu à peu elle lui donnait des tâches plus importantes, semblait tester sa fiabilité. Elle avait dû voir en lui un atout qui lui plaisait. Et on ne pouvait nier qu'Hell avait des capacités hors normes.

Lors de cette affaire de pouvoirs volés, alors qu'Evilash nous avait enseigné ce qu'elle savait à ce sujet, Hell avait déclaré en avoir déjà entendu parler à travers des échos d'une rumeur datant d'il y a plusieurs années. Il y a vingt an, tout au plus, dans son village natale, des bruits courraient à propos de vols de pouvoirs. Hell n'était pas né lorsque les rumeurs s'étaient répandu, mais cela avait tellement marqué leur  village que l'histoire s'était racontée au fil des années, sans pour autant qu'on la prenne réellement au sérieux. Les détails de l'histoire lui avait échappé, et il comptait bien retourner auprès des siens pour s'informer au sujet de cette histoire et apprendre tout ce qui avait à savoir. On n'était jamais assez informé sur l'ennemi. Il fallait que l'on sache contre qui nous nous battions, qu'on en connaisse tous les détails.

Evilash avait accepté l'idée de Hell, et sous la demande de celui-ci, arguant qu'il était préférable pour la discrétion de sa quête, que je vienne avec lui, j'avais été entraîné dans cette histoire. Et cela me convenait parfaitement. J'étais ravi de passer à l'action.

Et nous n'allions plus tarder à partir.

Nous étions encore entourés des autres rebelles. Il était tôt et nous avions tenu à manger calmement avant de partir. Mais le calme était un mot relatif par ici. Des petites disputes avaient éclaté, sans grand dommage, mais brisant l'atmosphère paisible de bon matin. Ekaterini avait étrangement décidé, ce matin, de manger avec nous. Je n'étais pas sûr que ce soit réellement une décision qu'elle avait prise à tête reposée. Elle semblait complètement à côté aujourd'hui. En mangeant, elle s'était moquée de la plupart d'entre nous, avant d'oublier même qui nous étions et ce que l'on faisait ici. J'ignorais si elle jouait à un jeu ou si quelque chose n'allait pas, mais elle était vraiment étrange.

Brusquement, elle avait semblé se rappeler de nous et de son antipathie à notre égard. Elle s'était alors repliée sur elle même et demeurait recroquevillée dans un coin de la pièce. Elle avait chantonné des chansons affreuses pendant une bonne partie de la mâtiné avant de se taire brusquement. J'ignorais si elle avait fini par s'endormir ou s'était simplement lassée.

— Vous n'auriez pas vu Rose et Martial ? demanda Bleizian, un Lycanthrope à la peau de bronze, en fronçant le nez.

— Ils doivent encore dormir, je ne les ai pas vus depuis hier, lui apprit Sanjana, qui était auprès d'Orso, mangeant mécaniquement son petit déjeuné.

— Ils n'étaient plus dans leur lit ce matin, lorsque je me suis levée, nous apprit alors Circé.

Dans la Scaremountain, il n'y avait pas vraiment de chambre, chacun dormait un peu où il voulait, muni de couvertures et d'oreillers. Pour éviter de tous s'éparpiller et d'encombrer de nouvelles pièces, on dormait généralement tous dans la même. L'intimité dans ces lieux étaient un luxe difficile à s'accaparer.

— Ils ont dû s'éclipser pour une partie de jambes en l'air ! pouffa Ekaterini qui visiblement ne dormait pas.

— C'est Martial ! Il a dû trouver une nouvelle connerie à faire et Rose l'a suivi dans ses méfaits, grommela Orso.

— J'espère pour lui que sa connerie sera au goût d'Evilash, sinon il risque de passer un sale quart d'heure, remarqua Bleizian.

— Pourquoi directement penser qu'ils puissent faire n'importe quoi ? soupira Sanjana, Rose est plus censée que Martial, elle sait le raisonner.

Un silence acceuillit ses propos. Tout le monde contemplait la Sirène qui continuait de manger son repas en tout insouciance.

— Quand Martial a une idée en tête, le raisonner n'est pas aisée. De plus, si Rose n'était pas en accord avec lui, elle ne l'aurait pas suivi, ce n'est pas son genre, l'éclaira Circé.

Sanjana haussa les épaules.

— Chouette ! Ayons foi en eux, ils ne font probablement rien d'insensé, mais comme l'a dit Ekaterini, ils sont peut-être partie faire une activité de haute voltige.

— D'ailleurs elle est passée où cette Ekaterini ? siffla Zahir, l'alpha des Lycanthropes.

Et il avait raison. L'Obscuras avait disparu de son coin. Sans même qu'aucun de nous ne la voit faire. Un haussement d'épaule collectif répondit à cette question. On ne tarda pas bien longtemps à comprendre la cause de la disparition de l'allié d'Evilash. Elle était tout simplement partie lui compter la disparition des deux rebelles. Evilash, n'appréciant pas particulièrement que l'on se balade comme bon nous semblait dans la montagne, avait dépêché ses alliés de les retrouver.

Hell et moi avions reculé notre départ, désireux d'avoir le fin mot de l'histoire.

Et malgré des recherches dans toute la montagne, les deux Obscuras demeurèrent introuvables. Ils n'étaient plus ici. Ils avaient réellement disparu. Ils étaient partis. La colère d'Evilash éclata. Elle ne fit que se décupler quand elle se rendit compte que les fioles de poisons, dont elle avait demandé la confection auprès de Circé au pouvoir individuel permettant d'en créer, avaient également disparu. Hell m'entraîna avec lui, jugeant qu'il était l'heure de partir en mission, évitant d'assister aux foudres de la grande menace du royaume qui avait des colères pouvant être terrifiantes.

Je nous rendis invisibles et nous nous munissâmes d'une monture. Hell nous conduisit vers son village natal. Je le sentais tendu.

— Quelque chose ne va pas ? demandai-je.

Hell hésita.

— J'appréhende les retrouvailles, finit-il par avouer. Cela fait un an que je n'ai plus revu mes parents.

— Vous vous êtes quittés en mauvais terme ?

— Non, absolument pas. Je me suis simplement jamais senti à l'aise là-bas, même si cela ne change rien à l'amour que je leur porte. Je me suis jamais senti moi-même auprès d'eux.

J'acquiesçai, bien qu'il ne puisse pas me voir. Hell était quelqu'un de très secret, il ne se sentait bien que sous un amat d'habits et parlait très peu de lui. Malgré sa tendance à ne pas parler de soi, nous nous étions rapprochés et il avait fini par se livrer.

— Mes parents n'ont jamais accepté que je ne sois pas la petite fille qu'ils avaient idéalisé, reprit-il, d'après eux, je m'étais mis à renier qui j'étais réellement lorsque j'ai fini par me comprendre moi-même et m'accepter. Ils n'ont également jamais accepté que je refuse le prénom qu'ils m'ont donné à la naissance pour le pseudonyme, selon eux, grotesque qu'est Hell.

Le Faucheur donna un coup franc sur les rênes et nous fit descendre vers la terre ferme. Je pus percevoir un petit village au milieu d'un boisement. Hell adoptait une attitude fermée et distante. L'heure des confidences était révolue.

Acceptant le silence qui s'était installé, je le suivis, toujours tous deux invisibles, vers le village. Nous avions laissé notre monture près d'un taillis, à l'abris des arbres, évitant de se balader avec un dragon qui pourrait attirer l'attention sur nous.

Le village de Hell était plutôt modeste. Il habitait dans la zone sud du bois d'éther. Dans cette zone, les habitations étaient généralement faites d'argile et de formes ovales, avec une architecture atypique permettant de mieux conserver la chaleur. Malheureusement, avec la famine, les batailles et les pillages, beaucoup d'habitations n'avaient désormais plus belles figures. Certaines personnes vivaient même désormais dans les décombres, comblant l'absence de toit en empilant des planches de bois. Hell traversa le village, semblant ne pas vouloir s'attarder sur la misère des lieux. Je nous rendis visible lorsqu'il atteignit une vieille porte de bois de cèdre. Il toqua.

On attendit quelques minutes avant d'entendre des pas traînant, puis un verrou. La porte s'entrebailla. Un homme au visage blanc comme neige tacheté de noir avec des yeux couleur miel nous étudia tour à tour. Yeux miel. Il faisait partie de la race des Fées.

L'attention de l'Obscuras s'arrêta sur Hell et il plissa les yeux comme pour discerner l'individu qui se cachait sous ces tas d'habits.

— Papa, tu sais très bien que c'est moi !

Un petit sourire éclaira le visage de l'Obscuras. Il ouvrit la porte en grand et nous fit signe d'entrer. Je compris alors pourquoi il m'avait semblé entendre des pas traînant au moment où la porte s'ouvrait. Le père d'Hell avait perdu l'une de ses jambes, à la place, une prothèse, faite simplement à l'aide d'un bout de bois, l'aidait à se déplacer. Ils ne devaient pas avoir les moyens de s'acheter de meilleurs soins.

— Héléna, pose tes affaires sur le porte-manteau, lui demanda son père, je vais aller chercher ta mère.

Il partit aussitôt à l'étage, passant par un vieil escalier grinçant démuni de rampe. Étonné, je vis Hell obéir et enlever ce qui camouflait son visage. Il croisa mon regarde surpris. 

— Si je reste vêtu de la sorte, ils refuseront de nous parler, m'expliqua-t-il.

Je n'avais encore jamais vu Hell sans son chapka, ses grosses lunettes et son foulard. Il paraissait gêné de se montrer de la sorte, alors, je détournai le regard. L'escalier se remis à grincer. Les parents de Hell revenaient.

La mère de Hell, une Obscuras plutôt petite, la peau brune et des feuilles d'érable en guise de cheveux, porta ses yeux bordeaux sur son fils. Une Sorcière.

— Héléna ! Tu es enfin venue saluer tes vieux parents ! s'extasia-t-elle en l'enlaçant.

Hell lui rendit l'étreinte, gêné.

— Mais où étais-tu passée ! le réprimanda-t-elle, ce ne sont pas des manières que de partir sans plus donner de nouvelles. J'espère que tu ne t'es pas laissée mourir de faim, n'ayant plus tes chers parents pour te faire la cuisine ! Bonté divine ! Tu as maigri ?!

— Non maman, je n'ai pas maigri, j'ai toujours été mince, tu devrais le savoir. Je suis venu accompagné, rappela-t-il en me désignant du menton alors que ses parents semblaient avoir totalement oublié ma présence.

La mère de Hell fit un oh de surprise et s'avança vers moi.

— Qui est-ce ? Ton petit copain ? Mais dit moi trésor, tu es bien mince ! Tu manges à ta faim ?

Hell était de plus en plus mal à l'aise, et pour ma part, je ne savais pas vraiment comment réagir.

— Non, ce n'est pas mon petit ami et oui, il mange à sa faim, répondit-il pour moi. Maman, papa, je...

— Venez vous asseoir à table, le coupa sa mère, j'ai de la soupe de potiron encore chaude dans la marmite. Vous n'allez pas rester le ventre vide ?

— Merci madame, c'est très gentil de votre part, mais nous avons déjà mangé, lui répondis-je.

La mère de Hell chassa ma remarque d'un geste de la main.

— C'est très impoli de refuser de la nourriture ! riposta-t-elle, venez manger ! Par les temps qui court, c'est un blasphème que de refuser un repas. On ne peut plus être sûr de pouvoir manger tous les jours à notre faim.

— Mam... voulut protester Hell.

— Tu t'es absentée pendant plus d'un an Héléna, alors fais-moi plaisir et ne rentre pas à la maison dans le seul but de me contrarier.

Elle nous guida dans une petite cuisine. La pièce était lugubre et une odeur de poussière, à peine masquée par les effluves de la soupe, volait dans l'air. La mère de Hell nous désigna deux chaises, le père s'installa juste en face de moi et la mère revint avec une marmitte et quatre bol. Elle les remplie à raz bord avant de nous les tendre, ainsi qu'une cuillère. Je n'avais pas très faim, mais pour éviter de la vexer, je me prêtai au repas.

Alors que la mère de Hell paraissait d'humeur loquace, son père, lui, était muré dans le silence, se contentant d'observer autour de lui. L'atmosphère entre les deux parents étaient totalement différentes.

— Dis-moi Héléna chérie, qu'as-tu fais pendant tout ce temps hors de la maison ? Et qui est ce Rôdeur avec toi ? Ma soupe est bonne ?

— Oui, la soupe est bonne maman, et c'est Hell et non Héléna. Je suis simplement parti faire ma vie...

— Tu pouvais très bien faire ta vie auprès de tes parents Héléna, ne dis pas de bêtises. Comment vous vous êtes rencontrés ? me demanda-t-elle avec un sourire malicieux.

J'avais la désagréable sensation qu'elle s'était mise en tête que Hell et moi étions ensemble, et ce, malgré les démentis de son fils. Hell s'était passé une main sur le visage, essayant de garder contenance. Je décidai d'aller droit au but, évitant de tourner encore longtemps en rond, dans des discussions devenant de plus en plus embarrassantes.

— Hell et moi enquêtions sur une histoire d'enfant qui aurait la capacité de prendre les pouvoirs de ceux autour de lui. D'après Hell, des rumeurs à ce sujet courraient dans le village.

Le sourcils du père de Hell se mit à trembloter, mais il resta silencieux. La mère, elle, me contempla, muette, puis un large sourire éclaira son visage.

— Pourquoi ne touches-tu pas à ta soupe, mon garçon ? Elle n'est pas à ton goût ? Je peux y ajouter du persil si tu le désires.

Je restai coi alors que la mère de famille partait chercher l'herbacée. Hell grimaça d'impatience avant de plaquer brusquement sa main sur la table.

— Maman ! s'écria-t-il, on ne veut pas de persil ! S'il-te-plaît, arrête de t'axer sur la nourriture, j'aimerais discuter.

La mère revint avec un air triste sur le visage. Elle s'assit sur sa chaise, tel un enfant pris en faute.

— Mais il faut manger Héléna ! Dans une époque comme la nôtre, où la famine nous guette, il faut manger tant qu'on le peut encore !

Elle carressa la joue de son fils.

— Tu es si maigre ma chérie ! Tu es en malnutrition, il faut que tu manges. Regardes-toi, tu n'as que la peau sur les os ! dit-elle en indiquant la mâchoire de Hell, où les os étaient en effet visibles, dû à son physique atypique.

La mère de Hell contempla sa soupe, et brusquement, fondit en larmes. Les yeux chromes de Hell se teintèrent de culpabilité. Le père de famille passa un bras autour des épaules de sa compagne.

— Elle est fatiguée, je vais la raccompagner dans sa chambre.

Il entraîna sa femme avec lui en direction des escaliers. Elle continuait de pleurer, protestant, voulant continuer de parler avec Hell, clamant qu'elle n'avait pas fini son repas, mais se laissa guider.

Un silence gêné s'installa. Hell s'excusa du regard et je lui souris, lui assurant que ce n'était rien. Des pas traînant nous indiquèrent que son père était de retour. Il se laissa lourdement tomber sur sa chaise, posa les coudes sur la table, et noua ses doigts entre eux.

— Excusez ma femme, elle a toujours peur de manquer de nourriture, manger en devient une obsession. Il faut dire qu'on a rarement pu manger correctement et à notre faim ces dernières années.

Son regard se porta sur Hell.

— Maintenant, si tu pouvais m'expliquer ce qui vous amène...

Hell serra les lèvres, toujours aussi mal à l'aise.

— Comme on l'a laissé entendre tout à l'heure, nous sommes venus pour les rumeurs concernants...

— La rumeur de l'enfant aux pouvoirs... Je pense l'avoir compris. Ce que j'aimerais savoir, c'est en quoi cela vous intéresse-t-il.

— Tu n'as pas entendu parler des pouvoirs qui disparaissent un peu partout dans le royaume ?

— Bien évidemment que si Héléna, mais enlève la cape imaginaire que tu t'es accrochée. Tu ne vas pas jouer au super héros et enquêter pour soit disant sauver le royaume. Je te pensais plus réfléchie que cela.

Hell haussa un sourcil.

— Je ne me prends pas pour le sauveur de l'humanité, j'essaye juste de comprendre ce qu'il se passe pour m'y préparer au mieux.

— Tu veux te préparer au mieux à ce qu'il se passe ? Trouve un endroit tranquille, reculé de tout, caches-toi y et attend que l'orage passe.

— Je n'ai pas envie de fuir, grommela Hell.

— Alors tu mourras, et je serai sans descendants.

Hell se pinça le nez, tentant de garder contenance.

— Passer sa vie à se cacher dans un maison reculée de tout, ce n'est pas vivre, je ne veux pas de cette vie. S'il-te-plaît, pour une fois, accepte mon choix de vie et soutiens-moi.

Son père se mit à soupirer.

— Tu vas mourir.

— Alors je mourrai.

— Tu ne penses pas à nous.

— Je pense à vous, mais pas à mon détriment.

— Nous envoyer de l'argent tous les mois, c'est ça que tu appelles penser à nous ? Je préfère être pauvre et te savoir en vie que le contraire.

— Alors aide-moi à le rester en me disant tout ce que tu sais.

Fils et père se toisèrent. Hell parut gagner le duel. Son père soupira, se colla au dos de sa chaise, passa une main sur son visage et nous regarda tour à tour.

— Je ne suis pas sûr que les rumeurs qui couraient dans le village puisse vous aider en quoi que ce soit. Mais si vous y tenez tant...

Il soupira, semblant lassé par la situation, peut-être même mal à l'aise.

— Il y a une vingtaine d'années, on racontait que dans notre village, certaines personnes perdaient leurs pouvoirs de manière inexpliquée. Manquant de réponses à un phénomène qui terrorisait tout le monde, des rumeurs commencèrent à envahir les lieux. Certains prétendaient que la perte était dû à Astéria, furax de voir comment notre monde évoluait toujours un peu plus vers sa destruction. D'autres prétendaient que c'était une nouvelle forme de la maladie des Obscuriums et que ceux étant touchés finiraient comme eux. Mais la rumeur la plus répandue et ayant le plus de sens concernait un petit garçon âgé de tout au plus trois ans.

Il prit une pause. Le recit le dérangeait.

— Ce petit garçon, reprit-il, était systématiquement la dernière personne que rencontrait l'Obscuras qui perdait ensuite ses pouvoirs. Peut-être ce garçon était maudit, peut-être faisait-il disparaître les pouvoirs malgré lui. A vrai dire, personne ne savait vraiment expliquer ce phénomène. Mais alors que les choses étaient déjà compliquées, elles devinrent encore plus étranges. Car au bout d'un moment, les yeux de l'enfant se mirent à changer. Dans son orbite s'était mis à nager des centaines d'iris de couleurs différentes. Comme s'il avait amassé toutes les races du royaume. Et plus ses yeux accumulaient les iris, plus l'enfant adoptait un comportement bizarre. Il était lui-même dépassé par la situation. Je pense qu'il devenait fou.

La rumeur concordait avec les informations d'Evilash. Se pourrait-il que l'enfant soit aujourd'hui, vingt-an après, derrière ce chaos ?

— Pour les villageois, le doute s'était éteint. L'enfant était derrière tout ça. Certains le qualifiaient de nouveau dieu, d'autres, d'être maudit et nuisible. Mais plus le temps passait, plus la population maudissait cet enfant qui semblait ne pas se rendre réellement compte de ce qu'il se produisait autour de lui. L'enfant finit toutefois par mourir. Si vous demandez aux habitants comment ce bambin est mort, ils vous répondront qu'il est tombé dans un puits. C'est faux. La peur a terrassé le village et les habitants l'ont balancé dans ce puits pour se débarrasser de lui. Ce puits est continuellement à sec. Il a dû se briser la nuque en tombant ou même tous les os. Son squelette y repose probablement encore aujourd'hui. Mais sa mort a ramené le calme dans le royaume. Et personne n'a plus perdu ses pouvoirs.

J'échangeai un regard surpris avec Hell. Si les pouvoirs disparaissaient aujourd'hui, l'enfant ne pouvait pas être mort !

— Tu es sûr qu'il est mort ? demanda Hell, les pouvoirs disparaissent encore aujourd'hui. Il a dû refaire surface. Peut-être que la rumeur comme quoi il est tombé dans ce puits est erronée.

Son père passa une main sur son visage. Je le trouvais mal.

— J'en suis sûr, j'y étais. J'ai participé à sa mort.

Son annonce eut l'effet d'un coup de massue.

— La perte de pouvoir d'aujourd'hui n'a rien à voir avec celle d'autre fois, conclut-il.

Cela n'avait aucun sens.

— Il faut qu'on se rende au puits, annonçai-je, voulant en avoir le cœur net.

Hell acquiesça.

— Je sais où il se trouve, m'apprit-il.

Le père de Hell nous dévisagea tour à tour avant de contempler les bols de soupe encore pleins.

— Finissez votre soupe avant, je n'aime pas le gâchis.

*

Hell me conduisit à l'endroit où se trouvait le puits. Le lieu était envahi de hautes herbes, la pierre du puits étaient recouvertes de mousses et le puits était négligemment scellé par une planche de bois. Personne n'avait dû utiliser le puits depuis des années.

J'aidai Hell à dégager l'entrée du puits. Il était profond, on n'y voyait pas la fin.

— Je vais me téléporter en bas, je te dirai ce que j'ai trouvé, décidai-je.

— Je te rejoins, me répondit le Faucheur.

Je lui lançai un regard interrogateur.

— J'utiliserai mes pouvoirs de la race du Spectre, m'éclaira-t-il.

J'acquiesçai. Sa sous-race m'était complètement sortie de l'esprit. Les Spectres avaient comme pouvoir de traverser la matière en devenant immatériel. Hell pouvait traverser les murs, mais aussi le sol, que ce soit de bas en haut ou de haut en bas.

En un clin d'œil, je me téléportai au fond du puits. Mes pieds rencontrèrent une substance étrange que je ne pus identifier. Hell me rejoignit avant de se rendre matériel et on fut vite à l'étroit. Il reprit sa forme immatériel pour me donner plus d'espace, mais traverser son corps au moindre mouvement me mettait mal à l'aise.

Il s'abaissa, essayant de voir sous nos pieds malgré l'obscurité ambiante. Le sol était mou, peut-être de la mousse qui s'était installée au fil des années ? Mes pieds ne rencontrèrent rien de solide qui puisse ressembler a un squelette d'enfants. Hell reprit sa forme matériel pour fouiller dans ses poches.

— Je dois avoir un briquet sur moi.

Cela ne m'étonnait même pas. Les cheveux de fils d'Hell poussaient à une vitesse ahurissante si bien qu'il devait fréquemment se les couper. Et Hell avait comme manie de tout brûler. Il était rarement a court de feu.

Il finit par trouver l'objet de sa recherche et l'activa, éclairant faiblement les lieux. Je fus saisi sur place. Il n'y avait pas de corps ici. Rien qui puisse laisser penser qu'un enfant ait pu perdre la vie dans ce puits. A la place, des centaines de rose ensanglantées tapissaient le fond du puits.

Hell enfouit sa main dans les roses de sang, visiblement, il avait déniché quelque chose. Il en ressorti deux diamants. Des diamants semblables à ceux qui camouflaient les yeux des Darknils.

Il n'y avait plus de doutes. Les Darknils étaient venus chercher l'enfant et c'étaient faits un malin plaisir à le faire savoir.

***

NDA : Me voilà avec le chapitre et un jour de retard (je viens de finir de l'écrire x) ) il risque d'avoir pas mal de fautes dans ce chapitre, je l'ai écris sur téléphone et je sais pas me relire sur tel 😭 en plus je fais également plein de fautes sur tel, j'ai fait au mieux mais désolée pour les petites fautes qui restent 👉🏽👈🏽

L'autre inconvénient d'écrire sur téléphone, c'est le correcteur d'orthographe qui change tous mes mots 🙄 surtout les prénoms
Hell devenait Hello par exemple ...
Ou Orso devenait Ordi...
Maintenant je vois Orso avec une face d'ordinateur 🥰

Bref... Fini le blablatage, passons aux questions x)

- Martial et Rose qui ont disparu , une idée de ce qu'ils font ?

- Le duo Hell et Kalidas, vous avez apprécié ? Comment trouvez-vous la famille de Hell ?

- L'histoire de l'enfant, vous la trouvez comment ?

Voilà voilà je vous dis à ce weekend pour le chapitre suivant !

Kissy kissy 💙

#Nakijo.

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