11. Quand les poules auront des dents.
- Rien ne va ! hurla Arachné en enfonçant ses pattes d'araignée dans le mur face à elle.
Des débris de poussière tombèrent à ses pieds alors qu'elle s'attelait à déformer les lieux.
- Range tes pattes, m'exaspérai-je.
- Pourquoi tu n'es pas plus inquiète ?
Je haussai les épaules.
- Je le suis, mais tu l'exprime déjà bien assez pour deux, je n'ai pas besoin de m'y mettre.
J'étais la plus calme de nous deux et cela m'étonnait moi-même. Depuis quand devais-je jouer le rôle du plus raisonnable ? Arachné grinça des dents et écrasa les morceaux de mur se trouvant au sol d'un puissant coup de pied.
- Ton impassibilité m'énerve ! J'ai l'impression d'être la seule à prendre les choses au sérieux ! Puis, je ne supporte pas d'avoir eu à enfermer mon propre frère, tout ça parce que tu n'as pas su faire assez attention à ton image !
- Tu insinues que je suis fautive ? m'irritai-je. C'est lui qui a fait irruption dans ma chambre sans autorisation, il n'en avait pas le droit. Tu as du toupet de me reprocher l'enfermement de ton frangin alors que de mon côté, j'ai dû emprisonner une bonne partie de mes alliés.
L'Animalis se renfrogna. Elle fit les cent pas devant moi, me donnant le tournis.
- Tu ne peux pas t'assoir deux minutes ?
- Non, je réfléchis.
- Tu réfléchis ?
- Oui, tu devrais t'y mettre, ça te ferait du bien.
- Ferme-la le choléra !
Arachné finit par arrêter ses vas et vient. Elle agita nerveusement ses gigantesques pattes en portant son attention sur moi.
- Je savais que ton imposture ne tiendrait pas dans le temps petite peste, mais je peux te prédire avec certitude que maintenant, ce n'est plus qu'une question de jour. Tu as beau avoir réussi à copier le comportement de Zara, tu n'es pas Zara. Les membres du château commencent à se poser des questions, d'autant plus que la reine est moins présente qu'autrefois.
- Je le sais, tout cela.
- Depuis le premier jour, je réfléchis à un plan de secours dans l'éventualité où tout nous filerait entre les doigts. Il ne faudrait pas que notre manœuvre n'ait servit à rien. Et j'ai bien un moyen de recours en poche, mais j'aimerais vraiment éviter d'en arriver là. Il nous faut construire un plan pour la suite.
- Quel est ton moyen de recours ? demandai-je avec curiosité.
- Tu n'as pas besoin de le savoir.
- Je suis concernée, je te rappelle.
- Et ?
- Et j'ai le droit de savoir !
- Non.
Cette Obscuras était agaçante !
- Pourquoi ?
- Parce que c'est mon plan, je le partage si je le désire et je préfère garder les détails pour moi. Il ne me plait pas particulièrement, alors si nous avons la chance de pouvoir échapper à ce dernier recours, je serai ravie que personne n'ait eu connaissance de mon idée. Je n'en suis pas vraiment fière.
Elle m'intriguait de plus en plus, mais je connaissais son entêtement, je n'en tirerai rien de plus et c'était frustrant.
- D'accord, soupirai-je, et un plan pour nous défaire de cette situation délicate, tu en as un ?
- Dit donc petite peste, pourquoi c'est toujours à moi de me triturer les neurones ? Utilise ta sale caboche pour changer ou reconnais au moins que je suis le cerveau de ce duo, ne serait-ce que pour booster mon égo !
- Prend pas la grosse tête ! m'offusquai-je. Tu prévois les plans de ce type, c'est vrai, mais de mon côté, je ne fais pas la sieste !
Arachné roula des yeux.
- Un jour tu reconnaîtras mon intelligence à sa juste valeur.
- Quand les poules auront des dents.
- Les poules ont déjà eu des dents par le passé et elles ont une dent à la naissance, appelée dent de l'œuf, qui leur permet de casser la coquille. Ta phrase n'a aucun sens, andouille !
- C'est une expression Terrienne tête de pioche !
- Ton expression Terrienne est complétement stupide !
- On en parle de tes manies à jouer les encyclopédies vivantes ? T'as encore dévoré un livre ?
- Je m'instruis, il n'y a aucun mal à cela.
Je levai les yeux au ciel.
- Revenons à nos moutons, veux-tu ?
- T'as décidé de me sortir tous les animaux de la ferme ?
- Boucle-la le choléra !
Arachné poussa un grognement agacé. Elle s'assit par terre, face à moi. Nous étions dans la salle du trône et j'étais confortablement installée dans le fauteuil royal. Arachné me paraissait petite de là où je me trouvais.
- Tu veux un plan ? feula-t-elle. J'ai une étape cruciale dans ce plan. Travaille ton pouvoir !
Mon sang ne fit qu'un tour.
- Tu te fous de moi ? m'écriai-je.
Cela faisait plusieurs jours que je m'entraînais avec Arachné à utiliser mes pouvoirs de Phénix afin de découvrir mon plein potentiel. C'était une entreprise éreintante. Je fatiguais, mais je ne parvenais pas à grand-chose. Devenir aveugle m'avait permis de maîtriser les cendres à volonté, seulement j'étais capable de bien plus. Lors de la mort d'Alisa, j'avais fait surgir des ailes de feu avant de ravager les lieux tout autour de moi. D'après Arachné, les flammes ne venaient pas de ma symbiose avec Alisa, mais de mon phénix. Je pouvais me changer en phénix, faire apparaître ces ailes, mais je n'y parvenais pas. Malgré l'acharnement d'Arachné pour me pousser à bout. Je ne comprenais tout simplement pas le mécanisme. La première fois, la symbiose avec Alisa décuplait mes pouvoirs et le choc de sa mort avait été le déclencheur. Il était hors de question que je perde quelqu'un d'autre pour voir mon pouvoir fonctionner.
- Je suis sérieuse ! me répondit Arachné. A quoi cela te sert d'être la race la plus puissante si tu ne sais même pas te servir de tes pouvoirs ? Je me suis alliée avec la mauvaise Evilash moi.
- Je fais déjà tout mon possible pour atteindre mon plein potentiel, si je n'y parvins pas, c'est parce que je ne suis pas encore prête, grinçai-je.
Arachné se releva et s'approcha de moi d'un air déterminé. Elle me fit face et appuya son doigt contre mon cœur.
- Tu es prête, tu te crées un blocage, c'est tout.
- Un blocage ?
- Là, intima-t-elle en tapotant mon cœur.
Je chassai ses doigts d'un geste de la main.
- Je ne fais pas de blocage ! m'énervai-je.
- Bien sûr que si ! Tu fais un blocage émotionnel ! Tu as beau avoir fait des progrès sur l'acceptation de soi et de ton monde natal, au fond de toi, quelque chose reste coincé et t'empêche d'avancer pleinement. Tu te rends faible et fragile sans même t'en rendre compte.
- L'acceptation de soi et mon monde natal ? Mais qui te dis que j'ai un problème avec mes origines ? m'emportai-je. Arrête de te faire des films !
- Je ne suis pas aveugle, ma peste, et crois-le ou non, au fond, nous avons le même fonctionnement. Tu as du mal à t'accepter toi-même et même si tu progresses, tu ne peux te pardonner les actes du passé. Ton passif ne m'est pas secret. Samaël en a parlé. Je sais tout. Et je devine sans mal pourquoi tu rejettes autant ce monde.
- Ne joue pas les devins et cesse de faire celle qui peut percer mon fond. Je n'ai pas de blocage, j'ignorais simplement mon potentiel. Il faut le temps que je m'y habitue et que je comprenne comment m'en servir.
- Quelle têtue celle-là ! s'écria Arachné. Les pouvoirs de race sont les premiers à se manifester chez un Obscuras et cela se produit très tôt. On t'a inhibé une partie de tes pouvoirs à la naissance si j'ai bien compris, mais maintenant que l'inhibition s'est estompée, tu aurais dû faire jaillir ton potentiel d'un seul coup. Si tu peines toujours, c'est que ton blocage persiste.
- Mon cas est particulier, je viens de la Terre.
Un éclat d'impatience brûla dans ses prunelles.
- T'es tellement bornée qu'il est inutile d'essayer de te convaincre, alors je me contenterai de te poser une question. S'il ne s'agit pas d'un blocage, pourquoi Evilash a su utiliser son plein potentiel dès l'envolé de l'inhibition et pas toi ?
Je clignai vivement des yeux. Quoi ?
- Elle a su utiliser ses cendres dès sa venue ?
Arachné acquiesça.
- Votre arrivée dans ce monde est totalement différente. Même si tu as dû être prise au dépourvu, tu as atterri ici en douceur. Tu as été bien traitée et cela t'a permis de rester dans tes travers de « Je refuse tout de ce monde et je me refuse moi-même. » et de « Je ne suis qu'une Terrienne, je ferai comme si je n'avais aucun pouvoir. » Evilash n'a pas eu ce loisir. C'est Samaël qui est venu la retirer de son quotidien bien huilé pour l'amener de force dans notre monde et lui offrir les pires tortures qui soit. C'est accepter ce qu'elle est et utiliser son plein potentiel qui lui a permis de survivre et de s'enfuir hors des griffes de Sam.
Je restai silencieuse. Désormais, je ne savais plus quoi dire.
- Ton arrivée en douceur dans notre monde a creusé un fossé entre toi et Evilash. Cela a été votre première différence. Ce n'est pas réparable, tu vas devoir effacer ton blocage autrement.
- Cesse de jouer les psys.
Arachné soupira.
- Ok, madame la peste. Mais t'as intérêt à te bouger le cul et sortir tes ailes. Ce serait fort utile.
- Il nous faut un plan qui ne s'appuie pas essentiellement sur mes dons, arguai-je.
- J'ai pensé à un plan pour détruire les Darknils en s'attaquant à Minos, avoua Arachné, mais c'est beaucoup trop dangereux.
- Explique.
- J'avais pensé à la Bête d'Evilash. Minos est l'Obscuras le plus puissant de ce monde, mais la Bête est l'être mystique le plus fort de ce royaume. Entre eux, d'après toi, qui domine ? Parce que moi, je n'en sais rien.
- Tu veux te servir de Titan ?
- Non, j'y ai simplement songé. Je ne suis pas sûre que cela marcherait. Imagine que Minos ait le dessus sur cette créature légendaire, nous serions clairement foutus. On ne peut pas perdre un tel atout. Je ne sais pas comment marche le pouvoir de Minos dans les moindres détails. Il est capable d'aspirer la vie et les pouvoirs des êtres autour de lui, mais peut-il également le faire sur une bête aussi particulière ? Le pouvoir de ce dragon découle d'Astéria elle-même.
- Ce serait un pari risqué que de te tenter cette folie, admis-je.
- Minos est un gros problème, grommela mon alliée. Je sais comment l'affaiblir et je m'y attèle, mais j'ignore comment l'éradiquer. Il est trop puissant.
Je n'avais moi non plus aucune solution en poche. J'avais l'impression d'être face à une impasse. Arachné poussa un soupire en s'appuyant contre le mur derrière elle.
- Nous avons encore beaucoup de point à régler... se fatigua-t-elle.
Arachné était très impliquée dans ce qu'elle faisait, elle était toujours en mouvement, préparait des plans à gogo, gérait les affaires royales et dormait très peu. Lorsqu'elle avait du temps libre, au lieu de profiter pour se reposer, elle partait bouquiner et s'instruire. Je m'étais souvent demandé comment elle faisait pour ne pas s'écrouler de fatigue. Mais désormais, elle semblait arriver au bout de ses ressources. Des cernes se dessinaient sous ses yeux. Têtue comme elle était, elle refusait malgré tout de se poser ne serait-ce qu'une minute. Pour elle, dormir était une perte de temps.
- Il faut aussi songer à ce que l'on compte faire des prisonniers, reprit-elle. On ne peut pas les garder ici indéfiniment, mais on ne peut pas non plus nous mettre en danger en les relâchant.
- C'est amusant, depuis que ton frère fait parti des prisonniers, tu ne parles plus de les tuer, fis-je remarquer.
Arachné me fusilla du regard.
- Tu ne pourrais pas sortir une remarque utile pour une fois ?
- Tu réagis au quart de tour, j'adore, la provoquai-je.
Arachné poussa un cri étouffé. Cependant, elle avait raison... Qu'allait-on pouvoir faire des captifs ? Je n'aimais pas l'idée de savoir mes alliés dans des cellules. Désormais, ils savaient que ce n'était pas la reine qui les avait enfermés, mais moi. C'était encore pire. Depuis que j'étais allée les voir pour y déposer Martial, Rose et Titus, je n'avais pu m'empêcher d'y envoyer régulièrement mes cendres. Grâce à mes cendres, je pouvais à ma manière, percevoir les alentours. Même à distance. C'était bien pratique pour prendre connaissance de ce qu'il se passait dans le cachot alors qu'on me réclamait dans la salle de trône. Je comprenais désormais mieux comment Evilash avait pu si souvent donner le sentiment d'être partout.
Les captifs restaient nuit et jour dans ces cachots, se contentant d'un seul repas par jour. Malgré ce mode de vie peu enviable, ils allaient bien, et c'était l'essentiel. Par mes discrètes intrusions, j'avais pu assister à l'ennui de Martial qui parlait à tort et à travers et qui se plaignait de ne pas être dans la même cellule que Rose. J'avais pu voir les premiers captifs questionner les nouveaux sur ce qui s'était passé dans le royaume dernièrement. Ils avaient beaucoup d'interrogation à mon sujet et cela me mettait mal à l'aise.
Lors de mes visites fantômes, j'en avais profité pour observer Titus dans la plus grande discrétion. Arachné n'était plus un secret pour moi, depuis que je la côtoyais, je comprenais ses facettes. Grim, lui, n'était pas difficile à cerner. C'était un malade. Un violent. Un sanguinaire. Il ne réfléchissait pas correctement et il n'avait rien à en tirer. Titus était plus complexe. Il épaulait la reine Zara, mais ne semblait pas être parfaitement d'accord avec ses idéaux. Il prenait plaisir à jouer son rôle de second de la reine et était très soigné dans ses manœuvres, mais tenait à protéger Tenshi du camp adverse. Parfois, il me laissait penser qu'il était le parfait soldat de la reine, et d'autre jour, j'avais l'impression qu'il était loin du soldat modèle. Pourtant, il n'avait jamais fait preuve de la moindre déloyauté. Un jour il était la lune et le lendemain le soleil. C'était comme s'il s'évertuait à se coller des masques changeant sur le visage.
La seule certitude que j'avais à son sujet, c'est qu'il avait un faible pour Tenshi. Je n'avais jamais été sûre de la réciprocité de ces sentiments, mais depuis qu'il était captif, j'avais pu voir le Prophète s'adoucir en sa compagnie. Arachné ne semblait pas vouloir accepter l'éventualité que son frère soit amoureux, mais elle allait devoir s'y faire.
On toqua à la porte de la salle du trône. Je fus tirée hors de mes pensées. Arachné me lança un regard urgent et je compris aussitôt ce qui n'allait pas. J'étais assise sur le trône sous ma véritable enveloppe. Dans un claquement de doigts, je me changeai en cendres et m'envola en milliers de particules dans les cieux. A l'endroit où j'étais assise un peu plus tôt se dessinait l'illusion de la reine Zara. Arachné donna l'autorisation d'entrer et deux gardes ouvrirent la lourde porte. Grim entra.
- J'aimerais te parler, mère, tonna-t-il sans préambule.
L'appellation me fit tiquer. Grim était le seul à appeler la reine Zara « mère ». Je ne m'y faisais toujours pas. Les portes se fermèrent derrière lui et il avança jusqu'à mon illusion.
- Je t'écoute.
Grim n'était pas du genre à chercher ses mots. Il les laissa s'échapper sans filtre.
- Cela fait plusieurs jours que Titus a disparu et la situation est bizarre. Personne ne semble s'inquiéter à son sujet, pas même vous deux.
Il lança un regard à la reine avant de détourner les yeux vers sa sœur.
- Titus a été envoyé en mission. Les membres du palais son informé de son absence, dis-je à travers mon hologramme.
- C'est la version officielle, acquiesça Grim, mais je n'y crois pas. De mon point de vue, c'est une excuse bidon. Je veux savoir où est passé mon frère !
Mince... Comment était censée réagir la reine face à un ton aussi tranchant ?
- Grim, ne fait pas chier, intervint Arachné. Je suis au courant de la mission confidentielle de Titus. Ce n'est pas la première fois qu'il s'absente ainsi du château.
- Pourquoi tu es au courant et moi non ? D'habitude, Titus nous prévient toujours quand il doit partir, même si cela est censé être un secret.
- Il n'a pas dû en avoir le temps, cette mission s'est décidée en dernière minute, répliqua sa sœur.
- Vu l'agitation de Titus dernièrement, j'ai dû mal à croire à cette histoire. Il se passe un truc louche et je ne comprends pas que vous ne vous inquiétez pas plus que cela.
- On sait ce qu'il se passe, tête de truffe, s'exaspéra Arachné. Sa mission concerne Minos, tu sais très bien que dernièrement, les évènements s'accélèrent à son sujet. On n'a plus le temps de pinailler.
- Très bien, grommela Grim. Si c'est tant important, retrouvons Titus et allons l'aider.
- T'es demeuré ! On ne va pas s'incruster dans une mission dont on ne connait rien.
- Pourquoi pas ? ricana son frère. Tu ne veux pas tenter l'expérience ?
- Quand les poules auront des dents !
- Quoi ? s'étonna Grim, le visage empli d'incompréhension.
- C'est non, intervins-je. Personne n'ira s'incruster nulle part. maintenant, Grim, si tu es mécontent, tu n'auras qu'à en discuter avec Titus à son retour.
Grim eut le regard chargé d'éclair. Il fit brusquement demi-tour et claqua la porte derrière lui.
***
NDA ; Hey ! Me revoilà enfin... J'ai presque un mois de retard, désolée. Je m'éparpille tellement dans tout ce que je dois/veux faire que certaines choses sont mis en second plan... Dont l'écriture 🤣
J'espère que ce chapitre vous aura plu ! (Il a un titre à rallonge oups 😂)
- La relation Arachné et Eudora, un mot pour la qualifier ?
- Que pensez-vous d'Arachné ?
Je sais que j'ai du retard dans mes réponses aux commentaires mais je vais tâcher d'y remédier au mieux. Mais je lis tout !
Ah ! Et petite chose ! Je peux comprendre qu'on se demande quand arrivera la suite, surtout vu mon retard... Mais si vous venez me le demander, tâchez au moins de le faire telle une personne civilisée. Les "la suite !" , je n'y répondrai pas 🙄
Voilà voilà c'est tout 👉🏽👈🏽 je vous dis à la fois prochaine (dès que j'ai écris le chap suivant) !
Kissy kissy 💙
#Nakijo.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top