38. Folie incendiaire.
- Je répète que c'est une mauvaise idée, gronda Orso, tandis que Martial et Nérée sortaient les dragons.
La jeune reine soupira en se tournant lentement vers son sujet.
- Je suis de son avis, intervint Circé.
- Et moi, je ne changerai pas d'avis, se buta la reine.
- Parce que tu lui fais confiance ? s'exaspéra Orso. Cette Terrienne te demande de faire un tour au village de la Fontaine d'Argent et tu acceptes sans te poser de questions ? C'est complétement irréfléchi. Tu ne t'es pas demandé comment elle connaissait le nom de ce village et pourquoi elle faisait cette demande pile après l'attaque d'Evilash ?
- Il a raison Aleth, renchérit Circé. Eudora ne fait que te mener par le bout du nez.
- Assez tous les deux ! Vous êtes là pour me donner votre avis, pas pour contester mes décisions, s'énerva la reine.
- En fait, la petite Terrienne te fait chanter, c'est pour ça que tu acceptes, s'agaça Orso. Tu la laisses te manipuler à sa guise.
Décidant qu'ils avaient suffisamment discuté, je sortis du lieu où je les épiais. M'approchant d'Orso, je ricanai.
- L'ourson fait grise mine ? me moquai-je tandis que ce dernier me foudroyait du regard.
Le jeune homme à la puissante carrure m'attrapa le bras, me ramenant brusquement vers lui. Son visage n'était plus qu'à quelques centimètres du mien.
- Je ne sais pas ce que tu as derrière la tête, mais je ne te laisserai pas nous faire tourner en bourrique encore longtemps, me souffla-t-il sous le ton de la menace.
Je haussai un sourcil, avant de lui rire au nez.
- Fait donc, gros nounours, fait donc, m'amusai-je avant de me tourner vers la reine aux cheveux rouge sang.
- On part bientôt ? Ce n'est pas que je m'impatiente... mais je m'impatiente, lui lançai-je, craignant que les deux Animalis parviennent à la faire changer d'avis.
La reine acquiesça et s'éloigna des deux membres de la Garde à ma grande satisfaction. Martial et Nérée avaient sorti six dragons. Deux personnes par dragon. Seul l'un d'entre nous aller pouvoir voyager seul. La reine et l'intégralité de la Garde Royale venaient m'accompagner par précaution. Evidemment, je n'avais pas avoué que c'était Evilash qui m'avait demandé de me rendre là-bas, mais la reine semblait craindre le fait de laisser une Terrienne se balader au milieu d'Obscuras. Circé avait proposé de modifier mon physique, mais j'avais refusé. J'en avais marre de me cacher. Si je devais continuer à vivre dans ce royaume, autant que tous le sachent.
Kalidas ne faisait pas partie du voyage. Bien qu'il aurait préféré, j'avais refusé. Avec ses jambes défectueuses, il faisait mieux de rester au château. La reine avait ordonné à ses gardes de le surveiller.
- Je prends un dragon à moi seul ! s'écria Nérée en sautant sur le dos d'un dragon plutôt atypique.
Au lieu d'écailles, ce dernier possédait une courte fourrure brune. Orso leva les yeux au ciel et rejoignit Naïa qui se dirigeait vers un dragon aux écailles bleu clair.
- Je prends le dragon blanc ! s'écria à son tour Alisa en s'accaparant le dragon où Shaytan s'apprêtait à monter.
L'Ogre fit timidement demi-tour.
- Mais où tu vas ? C'est deux par dragon, rigola la jeune fille à la chevelure étoilée, tandis que Shaytan montait finalement à son côté.
Pour ma part, il était hors de question que je fasse le trajet avec Circé. Plus loin elle se trouvait et mieux je me portais. Mais Rox avait déjà Ronan comme partenaire et il ne restait plus que Martial et la reine. Poussant un soupir d'agacement, je me dirigeai vers le Guerrier.
- Je crois qu'on va devoir partager un dragon, lui lançai-je d'un ton sec.
- Que c'est romantique, s'amusa-t-il.
Je serrai les poings, retenant mes pulsions qui me soufflaient déjà de lui remettre les idées en place. Cette balade à dos de dragon risquait d'être longue à ses côtés... Martial monta sur un dragon gris pâle et me tendit la main pour m'aider à monter. Je l'ignorai, montant par mes propres moyens. Montant tant bien que mal, avec un manque de grâce flagrant, je finis par parvenir à mes fins. Martial ne put s'empêcher de rire devant ce spectacle. Je le foudroyais du regard et me mis à l'avant.
- C'est moi devant ! protesta le Guerrier. Tu ne sais même pas comment t'y prendre pour te faire obéir, fit-il remarquer. On va faire un accident de dragon avec toi aux commandes.
Je levai les yeux au ciel.
- Cramponne-toi bien alors, ricanai-je.
Aleth lança le départ et prit la tête de la troupe. Les autres dragons ne tardèrent pas à s'envoler à sa suite. Je m'emparai des cornes pour faire voler le dragon à leur suite, mais il ne décolla pas du sol. Tapant du pied sur ses écailles et tirant une nouvelle fois ses cornes, le dragon se buta à rester au sol. Martial éclata de rire.
- Finalement, je crois qu'on ne risque pas de faire d'accident, se moqua-t-il tandis que je poussai un grondement agacé.
Le dragon d'Orso et de Naïa non plus n'avait pas décollé. Mais pas parce qu'Orso n'y parvenait pas, mais parce qu'il était censé fermer la marche et garder un œil sur moi. Je le savais, Je n'étais pas dupe.
- Prend les commandes, Martial, s'agaça Orso.
Je secouai la tête.
- Dans tes rêves, répliquai-je, ne voulant pas céder ma place.
Je tirai une nouvelle fois sur les cornes du dragon, ce dernier poussa un cri d'agacement, mais ne s'envola pas pour autant. Je vis les dragons dans le ciel se stopper. Visiblement, les membres de la Garde avaient remarqué notre absence et nous attendaient. Ce constat me fit grincer des dents. Pourquoi n'arrivai-je pas à le faire décoller ?
- Il ne faut pas que tu lui tires les cornes, m'expliqua Martial, saisir les cornes du dragon sert plus à l'orienter lorsqu'il est dans les airs. En plus, tu manques de délicatesse.
- Et comment je le fais aller dans les airs ? m'énervai-je, n'étant pas patiente.
- Suffit de lui donner un léger coup de pied derrière sa dernière côte. Il est dressé, il saura que tu désires t'envoler.
Je soufflai bruyamment avant d'appliquer les conseils de Martial. Le dragon s'envola brusquement dans les airs, manquant me déséquilibrer par son geste brusque. Orso soupira et fit voler son dragon à notre suite.
- Ce n'est pas trop tôt, commenta Nérée quand on les eut rejoints.
Je le foudroyai du regard, mais le jeune homme ne me lança même pas un coup d'œil avant de voler en zigzag, s'amusant visiblement à slalomer pour son bon plaisir.
- Nérée, on fait la course ? lui demanda Alisa.
Shaytan, à l'arrière de la jeune fille aux yeux gris, cria avant de protester vivement, se cramponnant au dragon.
- On n'est pas là pour jouer Alisa, lui fit remarquer Ronan, tu restes dans les rangs.
Alisa prit une mine déçue.
- La prochaine fois alors... se résigna-t-elle tandis que Shaytan poussait un soupir de soulagement.
Quel trouillard...
D'après la reine, lorsque je lui avais parlé du village de la Fontaine d'Argent, il n'était pas très loin. A quinze minutes à vol de dragon. Heureusement. Car j'avais l'impression que ce dragon ne voulait en faire qu'à sa tête. Je devais sans cesse le ramener à la suite des autres dragons car cette tête de mule déviait de sa trajectoire et tout ça faisait bien rire Martial, qui en avait presque le hoquet.
- On est presque arrivé, nous apprit la reine, on va s'arrêter avant le village afin de passer plus inaperçu.
La Garde acquiesça. Où était l'intérêt ? Je n'avais pas envie de marcher... Mais visiblement, je n'allais pas avoir le choix.
- On va se poser derrière la montagne, décida la reine.
En plus, il allait falloir contourner une montagne... Ses quinze minutes de route allaient se changer en une heure... N'appréciant pas l'idée de devoir perdre mon temps, je fis accélérer le dragon en direction du village.
- Eudora, qu'est-ce que tu fais ? s'écria Martial.
- Je prends un raccourci.
Sur ce, je tirai avec force sur les cornes du dragon pour le faire descendre. Le dragon, n'appréciant visiblement pas ma délicatesse, poussa un cri et fonça en pique vers le sol.
- Eudora ! Arrête ! cria Martial en essayant de me pousser loin de la tête du dragon pour prendre les commandes.
Son geste nous fit perdre l'équilibre et je me rattrapai à l'aile du dragon, tandis que Martial glissa jusqu'à la queue pointue de la bête, se voyant suspendu dans les airs. Ma prise autour des ailes du dragon n'était pas judicieuse, mais c'était la seule prise à ma portée. Malheureusement, le dragon ne pouvait plus voler correctement.
L'animal chancela et fonça maladroitement vers des arbres épineux, droit dans leurs branches. L'impact me fit perdre ma prise et je fus violemment éjectée de ma monture, tombant dans de la terre poudreuse. Je vis Martial atterrir non loin de moi, tombant à genoux, une main au sol pour garder l'équilibre. Il avait un atterrissage bien plus maîtrisé que le mien.
Le dragon se releva, la patte avant couverte de sang et après un grondement mécontent, s'enfuit dans le ciel.
- Ah... un dragon en moins dans vos pâtures, commentai-je.
Martial me foudroya du regard.
- Tu es complétement folle !
- Merci.
Les autres dragons se posèrent autour de nous et Orso se précipita hors de sa monture, me foudroyant du regard. Il avait l'air en rage. Et ça ne me faisait ni chaud ni froid.
- On ne peut vraiment pas te faire confiance, s'agaça Circé.
Je ricanai et regardai autour de moi. L'entrée du village était juste devant nous.
- Je nous ai juste fait gagner du temps, vous devriez me remercier, répondis-je en entrant dans le village, sans même leur lancer un regard.
- Eudora, attends ! s'écria Alisa, cache au moins ton visage.
Je l'ignorai et continuai ma route. Arrivant dans le village, tous se tournèrent en ma direction, me regardant avec des yeux ronds. Certains partirent en courant. Cette réaction me fit intérieurement rire. Ils avaient peur des Terriens ? Pourtant, contrairement à eux, nous ne pouvions pas créer des tempêtes d'électricité pendant notre sommeil.
Arrivant dans la place, je me dirigeai vers une grande fontaine argentée où un liquide rouge remplaçait l'eau translucide que j'avais l'habitude de voir dans les fontaines de la Terre. Je vis des silhouettes me suivre et compris que la Garde Royale me rejoignait. Ne les voulant pas dans les pattes, je me mis à courir. Si Evilash voulait que je découvre quelque chose dans ce village, il était évident que la Garde Royale voulait me cacher cette vérité. Et avec eux à mes côtés, je risquai de ne rien découvrir.
M'élançant dans la foule, je courus le plus vite possible afin qu'ils perdent ma trace. Ne me privant pas pour bousculer quelques personnes au passage. Je finis par rejoindre une ruelle sombre, me cachant derrière ce qui semblait être un puits inutilisé.
Je vis un Obscuras courir dans ce qui ressemblait à un bar. Il se dirigea vers un homme plutôt bedonnant.
- La Garde et la reine Aleth sont ici, souffla-t-il.
Je fronçai les sourcils. Qu'y avait-il d'étonnant là-dedans ?
- La Garde Royale Clandestine ? s'étonna le gros monsieur.
- Oui, dans sa globalité, affirma l'autre.
- Vas en informer la reine, ordonna l'homme qui possédait un airbag en guise de bedaine.
J'ouvris grand les yeux. La reine ? Mais... Aleth n'était-elle pas la reine ? Et qu'est-ce qu'ils entendaient par Garde Royale Clandestine ?
Je reculai dans le fond de la ruelle, perturbée. J'avais l'impression d'être plongée dans un épais brouillard.
Je m'arrêtai brusquement de reculer lorsque je vis des affiches, placardées sur les murs.
Des affiches dévoilant des hors-la-loi. Des affiches offrant une récompense pour ceux qui les arrêteraient et les livreraient à la reine. Et tous les membres de la Garde, ainsi que la reine Aleth, en faisait partie.
Tous.
Et pour des sommes exorbitantes.
Rox. Ronan. Nérée. Martial. Shaytan. Orso. Naïa. Circé. Aleth. Alisa.
Ils étaient tous recherchés.
Et non seulement, ils étaient recherchés, mais en plus, ils étaient désignés comme les plus recherchés du royaume. Mais pourquoi ? Qui étaient-ils ?
"Pense à vérifier si la Garde est bien ce qu'elle paraît être avant de te fier à leur propos." m'avait dit Evilash lors de notre première rencontre. Elle le savait. C'était ça qu'elle avait voulu que je découvre. Cette vérité. Et pourtant, j'avais le pressentiment que ce n'était pas fini. J'étais convaincue qu'elle voulait me faire découvrir encore autre chose. Que ce n'était que le début.
Serrant les poings pour retenir toutes les émotions qui me fouettaient par vague, je sortis de ma cachette, arrachant les affiches au passage.
Ils se payaient de ma tête depuis le début.
Je sentis une vague de colère m'envahir le corps.
Je marchai dans les rues sans me soucier que l'on puisse me voir. Les poings serrés de rage. Je n'avais plus à écouter une Garde qui n'en était pas vraiment une. A rester avec de tels personnes. Ils pouvaient me dire tout ce qu'ils voulaient, vouloir me forcer à retourner dans leur château. Je n'en avais plus rien à faire. Tout ce que je voulais, c'était la vérité. Et ils allaient payer.
- Eudora ! me lança une voix familière avant de me rejoindre.
Rox. Je fis un mouvement de recul qui surpris la rouquine. Elle était accompagnée de Martial et Nérée.
- Je ne sais pas ce que tu es venu faire ici, mais il faut qu'on y aille, m'apprit Nérée d'un air pressé.
Je haussai les épaules.
- La Garde Royale Clandestine peut partir si elle le souhaite, moi, je reste ici, répliquai-je.
Les trois adolescents me regardèrent avec stupéfaction. Je lâchai les feuilles que j'avais déchiré entre les mains de Rox. La rouquine écarquilla les yeux.
Mais personne n'eut le temps d'émettre la moindre réponse qu'un homme se mit à crier, plaquant ses mains sur sa tête. Tous se tournèrent vers lui. Un autre villageois se mit à crier, adoptant la même attitude. Puis un autre. Et encore un autre. Des dizaines d'individus se mirent à hurler, les mains plaquées sur le crâne.
- Qu'est-ce que c'est que ça ? s'étonna Nérée.
Les cris se propagèrent comme une épidémie. Puis, un cri perçant, à vriller les tympans, retenti. Un cri terrifiant. Vibrant. Puissant. Un cri qui n'avait rien à voir avec les autres.
- Alisa, souffla Rox, soudainement prise de panique.
Les cris se turent brusquement. Tous les villageois qui s'étaient mis à crier venaient de se figer, le regard perdu. Puis, dans une synchronisation parfaite, ils allumèrent des bougies et mirent le feu aux maisons. Créant des incendies dans tout le village. Les yeux inexpressifs, ils se jetèrent dans les flammes.
Les habitants se mirent à crier de panique devant ce spectacle. Ils se mirent à paniquer, se bousculant les uns les autres pour trouver un lieu où se réfugier. Mais certains se stoppèrent dans leur lancée, devenant subitement stoïques, et d'une démarche presque mécanique, ils se jetèrent dans les flammes. Laissant leur chair brûler à vif dans l'incendie.
- Par les Dieux ! s'affola Martial, qu'est-ce que...
Il se tue brusquement, focalisant son regard droit devant lui. Tous les villageois avaient cessé de courir et crier, rivant leur regard dans la même direction. Une silhouette humaine se dessinait dans la fumée des incendies. Elle avançait lentement, d'un air sûr, d'un air presque terrifiant. Les villageois se trouvant non loin d'elle devinrent subitement stoïques et l'un d'eux sortit un couteau et le planta dans le cœur de son voisin. Ce dernier s'écroula au sol. Le villageois se trancha ensuite la gorge.
Un rire s'échappa de la silhouette, tandis qu'elle continuait d'avancer sous les cris apeurés des habitants. Bientôt, la fumée ne camoufla plus son visage, nous laissant découvrir une jeune fille au regard farouche. Elle était entièrement blanche. La peau extrêmement pâle comme la neige, de longs cheveux d'un blanc de nacre, des iris d'un blanc neigeux...
- Mais qui c'est celle-là ? paniqua Martial.
- Il faut qu'on se tire d'ici, maintenant, s'étrangla Nérée.
Et cette fois-ci, j'étais entièrement d'accord avec lui. Rox s'empara de mon poignet et on suivit la foule qui tentait de fuir à l'opposé de la menace.
- Voyons Eudora, tu ne vas quand même pas déjà me fausser compagnie, retentit la voix de la fille aux cheveux blancs.
Je me stoppai net. Qui était cette fille ? Comment me connaissait-elle ? Je me tournai lentement vers l'étrange jeune fille. Celle-ci m'envoya un sourire éclatant, visiblement ravie d'avoir capté mon attention. Rox, Martial et Nérée s'étaient arrêtés à mon côté, s'échangeant des regards perdus. J'étais autant perdue qu'eux.
Mais il était hors de question que je prenne la fuite devant cette fille. Pas si c'est moi qu'elle voulait. Hors de question de jouer les lâches. Je m'avançai de quelques pas. Je voulais savoir ce qu'elle me voulait.
- Eudora, qu'est-ce que tu fais ? me souffla Nérée.
Une vague de cendres s'écrasa subitement sur le village. Je me sentis propulser dans les airs, au milieu de centaine de millier de débris de maisons réduites en ruine et en cendres en une fraction de seconde. Je tombai lourdement au sol, un bruit de bourdonnement m'emplissant la tête. Haletante, je tentai de me relever, ignorant la douleur que m'avait causé l'impact. Tout autour de moi, des corps cendrés, presque carbonisés, décoraient le village qui n'avait désormais plus rien d'un village.
Je me redressai affolée. J'étais en vie. J'étais en vie parce que j'étais insensible aux cendres. Mais Rox ? Elle était à mes côtés lors de l'impact, avec Martial et Nérée. Où était-elle ? Elle ne pouvait pas être morte. Non.
- Rox ? me mis-je à hurler, retenant une vague de panique. Rox !
Je vis une silhouette s'avancer et je me tournai d'un geste vif en sa direction. La fille tout en blanc. Elle lança un regard amusé avant de recueillir un flocon de cendre entre ses mains. Les cendres ne lui procurèrent aucun effet. Aucune douleur. J'écarquillai les yeux de surprise. Elle était insensible aux cendres ? Comment était-ce possible ? J'étais pourtant convaincue que cette fille n'était pas Evilash. Elle n'en avait pas la carrure. Ni la même l'aura. La fille se mit à rire.
- Tu te croyais unique peut-être ? me lança-t-elle d'un air moqueur. Tu n'es pas la seule à être insensible aux cendres, cesses de te sentir spéciale.
Un éclair d'électricité fendit subitement l'air, frappant la fille de neige de plein fouet. Ronan émergea de derrière des débris suivis du reste de la Garde. Seul Rox, Martial et Nérée manquaient à l'appel.
Mais l'impact qu'avait envoyé Ronan n'eut aucun effet. L'électricité vint frapper la jeune fille sans rien provoquer, ni même la faire broncher. Naïa envoya à son tour un jet de glace frapper la jeune fille, mais son essai fut conclu par un échec. La jeune fille ne semblait pas être seulement insensible aux cendres, mais à tous les pouvoirs.
Des tornades de cendres s'élevèrent subitement dans les airs. Un sourire satisfait apparut sur le visage de la jeune fille et elle recula, s'éloignant de nous. Elle ne semblait pas craindre Evilash. Pire encore, elle semblait même contente de la voir réapparaître. Était-elle une alliée de l'insaisissable menace ?
Quand la nouvelle menace disparue de mon champ de vision, Circé courut me rejoindre.
- Eudora, il faut s'enfuir d'ici au plus vite, me souffla-t-elle, voulant m'entraîner à sa suite.
- Pas sans Rox, grinçai-je, regardant autour de moi, à la recherche du moindre signe de vie.
- Rox ? l'appela Ronan, qui semblait lui aussi, mort d'inquiétude.
- On est ici ! cria subitement une voix familière en provenance d'un tas de cendres.
- Martial ? s'étonna Naïa en courant vers le tas de cendres.
- On est en dessous, Nérée nous protège avec son bouclier, mais on ne peut pas sortir à cause des cendres qui recouvre le bouclier, expliqua le Guerrier.
Soulagée, je m'élançai vers le tas de cendres et me mis à balayer les cendres à l'aide de mes bras afin de sortir Rox de là. Une fois fait, Nérée retira le bouclier et Ronan s'empressa d'aider Rox à se relever.
Mais les tornades de cendres s'étaient rapprochées, nous encerclant. Nous étions pris au piège, sans pouvoir partir.
Les tornades avalaient tout sur leur passage ; maisons, cadavres cendrés, débris, végétations... Il n'était plus qu'une question de temps avant que les cendres ne nous avalent à notre tour. Mais les tornades, ne suffisant visiblement pas, Evilash envoyait des boules de cendres nous frapper, comme des missiles. Nérée fit apparaître son bouclier, tandis que Naïa essayait de ralentir l'avancer des cendres avec sa glace. Alisa avait tenté de faire une barrière de feu, mais ses flammes, trop similaires aux cendres, étaient inefficaces.
- Qu'est-ce qu'on fait ? paniqua Shaytan.
- On la tue, lâcha Martial d'un ton glacial, les yeux subitement emplis de haine.
- Si tu sais comment t'y prendre, je serais ravie d'en être informé, se moqua sèchement Naïa.
Mais à mes yeux, les sentiments de Martial étaient amplement justifiés. Evilash avait tué sa petite amie. N'importe qui à sa place aurait eu des envies de meurtre. Moi la première.
- Je propose qu'on se serve d'Eudora, lâcha subitement Orso. Visiblement, c'est elle qui l'intéresse. Si on la menace, il y a une chance pour qu'Evilash nous laisse partir, annonça l'Animalis en m'envoyant un regard sombre. Après tout, si on est là, c'est entièrement de sa faute.
- Mais ça ne va pas la tête ! s'écria Alisa.
- Il en est hors de question, renchérit Rox en se plaçant entre moi et Orso.
- De toute façon, Evilash le tuera avant même qu'il ne me touche, me moquai-je. Si votre grande menace était aussi facilement manipulable, ça se saurait.
Au même moment, un jet de cendres s'abattit sur nous, faisant exploser la terre et nous faisant voler au sol.
Un autre jet de cendres fendit l'air, prêt à s'écraser sur Rox. J'eus tout juste le temps de me relever et faire barrage pour le contrer. Un autre jet vola vers la rouquine, je m'empressai de le parer, le souffle coupé. La force du jet me propulsa en arrière.
Je me relevai précipitamment en voyant un autre jet se ruer vers la renarde. Evilash semblait vouloir s'en prendre à Rox. Mais pourquoi ? Je sentis la peur s'infiltrer dans chaque organe de mon corps. Cette fois-ci, j'étais trop loin pour contrer le jet de cendres. Je courus, la peur au ventre, sachant d'avance que je n'y arriverais pas à temps. Le jet frappa.
Je sentis la peur me tétaniser. Mon cœur s'accéléra dans ma poitrine. Mes mains se mirent à trembler.
Mais Nérée se jeta entre Rox et les cendres, utilisant son bouclier juste avant de se prendre le jet. Je sentis le soulagement bombarder mon cœur. Mais la peur était toujours présente. Nous étions loin d'être sortis d'affaire. Et encore moins Rox. Je ne savais pas pourquoi, mais Evilash s'était mise en tête de la tuer.
Je me plaçai aux côtés de la rouquine, prête à parer le prochain coup. Nérée à mon côté. Naïa fit apparaître un mur de glace autour de nous. Mais Evilash n'eut aucun mal à faire fondre le mur à l'aide de ses cendres ardentes.
Un nuage de cendres nous enveloppa subitement. Ronan se mit à crier lorsque des cendres virent lui caresser la peau. Le bouclier de Nérée n'était pas assez puissant face à autant de cendres venant de nulle part. Aleth cria à son tour lorsque les cendres lui brûlèrent la peau. Puis fut le tour de Martial. Ils allaient tous passer dans les cendres un à un. Tous mourir. Sauf moi. Et je ne pouvais rien y faire.
Rox se mit à crier lorsque les cendres lui brûlèrent la peau.
Et ce fut la goutte d'eau qui fit déborder le vase.
Je sentis la haine affluer dans mes veines. Le désespoir l'accompagnait, le suivant de près. Les tourments, la stupeur, la douleur, la colère, la rage, la fureur, une ribambelle de sentiments vinrent inonder mon être. Mais la haine avait la place de reine. Et je me sentis brutalement tomber violemment à genoux. Je me mis à pousser un cri de rage, laissant mes jambes se dérober sous moi. Et je criai de fureur et de haine tandis que je faisais voler mon poing contre le sol, faisant éclater toutes les émotions que je contenais.
La terre se mit à trembler.
Et le temps se figea.
Mon cœur rata un battement tandis que l'adrénaline me parcourant dans les veines comme de dangereuses flammes me prodiguait toute l'énergie pour crier. Je criai.
Et les cendres s'étaient figées dans l'air.
Et le temps semblait s'être arrêté.
Pourtant, tout se passa à une rapidité effarante.
Les cendres furent propulsées loin de nous et disparurent comme par magie.
Emportant ses congénères avec elles.
Il n'y avait plus de tornades. Plus de jet de cendres. Plus de flocons cendrés. Même la terre et les débris cendrés avaient repris leur couleur d'origine. Il n'y avait plus la moindre de cendres dans les alentours. Plus rien que des débris d'un village saccagé. Plus rien que des corps inertes jonchant les rues.
Et la dernière tâche de cendre dans le ciel disparut, laissant un corps apparaître et chuter dans les débris. Evilash.
Mais avant que je puisse me diriger vers elle, elle se rematérialisa en cendres et disparue.
Et nous étions tous sain et sauf. Enfin, toute la Garde... si je pouvais encore les qualifier de Garde Royale.
Mais avant que je ne puisse me réjouir d'être en vie. Avant que je ne puisse me poser des questions sur ce que je venais de faire. Des bruits de cavalcades retentirent.
Des centaines et des centaines de chevaux ailés firent irruption dans le village saccagé, ayant au dos des Obscuras en armures, armes aux mains. Bientôt, nous nous fîmes encercler.
- Vous êtes en état d'arrestation, retentie une voix grave. Mettez-vous au sol et ne faites plus un geste. La reine décidera de la sanction qui vous sera donner en fonction de vos crimes.
***
NDA : Hey hey me revoilà avec la première partie du finale du Tome 1 !
Je le poste aujourd'hui, mais c'est en partie parce que je ne suis pas sûre de pouvoir poster ce week-end, je serais pas beaucoup chez moi... 🤔 Si je n'arrive pas à poster ce week-end, je posterai le chapitre suivant mercredi prochain.
Passons aux questions :
- La Garde qui n'est en fin de compte pas la Garde, et qui est recherchée pour crimes encore inconnus, vous vous y attendiez ? Vous les voyez d'une nouvelle façon désormais ? XD Quel est votre ressenti envers eux ?
- Ange qui fait sa grande entrée, vous l'avez vécu comment ? Le fait qu'elle aussi est insensible aux cendres, un mot là-dessus ?
- Eudora qui réussi à neutraliser les pouvoirs d'Evilash et qui fait tout disparaître, quelle a été votre réaction ? Une explication à donner face à ce qu'elle vient de faire ?
Et pour finir ; - Cette fin, vous la sentez comment ? XD Ça sent bon pour la Garde d'Aleth ou pas du tout ?
Brefouille, à la prochaine pour le chapitre suivant 😏 kissy kissy ❤️
#Nakijo.
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