Le refus

- Qu'est ce qu'elle a fait ? dit la Chose en faisant les cent pas. 

- Ça parait évident, non ? Je lui ai dit ce que je ressentais vraiment pour elle. Je me disais que peut être qu'elle aurait un déclic et que tout reviendrait comme avant. 

- Quel âge avais-tu à cette époque ? 

- 18 ans, on allait quitter le lycée, je me disais que c'était ma dernière chance avant qu'elle ne parte loin de moi. 

La Chose acquiesça et vint se placer une nouvelle fois dans l'angle mort de Jasper. 

- Est ce que ça a eu les effets que tu escompter ? 

- C'est quoi le but de me poser toutes ses questions alors que vous savez très bien les réponses... marmonna Jasper. 

La Chose fit comme si elle ne l'avait pas entendu. La lumière s'éteignit, laissant la pièce dans une noirceur totale. Les minutes s'écoulèrent, mettant la patience du vieil homme à rude épreuve. Il regretta instantanément ses paroles, de peur de se faire agresser au moindre moment. Soudain, la lumière revint. La pièce se mit de nouveau en mouvement pour laisser place à un pont, de nuit. Les réverbères venait se refléter dans les flaques de pluie au sol tandis que quelques voitures passaient, projetant de l'eau sur le trottoir. L'odeur du béton mouillé et de l'essence prit place autour du retraité. Il vit soudain le jeune Jasper sur le pont. Celui ci avait attendu ce moment toute la semaine, mais pas très positivement, il avait peur de ce qu'allait être la réaction de Becky. 

Lorsque celle ci arriva, son cœur s'emballa de nouveau, il devait à tout prix refreinait ses angoisses. Jasper ruina son t-shirt avec sa transpiration en à peine cinq minutes. Becky approcha enfin de là où il était. Lorsqu'elle se trouva face à lui, le jeune homme prit une grande inspiration :

- Merci d'être venue, dit-il d'une traite. 

- C'est normal, ça avait l'air important, tu as des ennuies ? s'enquit Becky, le visage inquiet. 

- Non, non tout va bien. Il fallait que je te parle depuis longtemps. 

Les traits fin de Becky se détendirent lorsque son ami lui dit cela, il allait bien, c'était le principal. 

- Oui ? Qu'est ce que c'est ? demanda-t-elle, désormais curieuse. 

Jasper prit une grande inspiration, son regard passant de la bouche de la jeune fille, à ses grands yeux bleus et aux cheveux blonds cendrés qui encadraient son visage. 

- Je t'aime Becky, depuis des années. Sans toi je sais même pas si je serais encore vivant, tu m'as sauvé, soutenu, je te dois tout. 

Le sourire de Becky s'effaça, laissant place à un visage perplexe, mais pas à un visage dégouté ou en colère comme le redouté Jasper. 

- Oh, je ne m'attendais pas à ça... Mais ça me fait plaisir Jasper, vraiment. 

Becky mentait, bien évidemment. Car au fond d'elle, quelque chose lui disait qu'il ne fallait pas contrarier Jasper, qu'elle risquait de lui faire du mal, beaucoup trop de mal pour quelqu'un d'aussi faible mentalement parlant. Elle chassa l'air de perplexité sur son visage pour laisser place à un sourire. Sans laisser à Jasper le temps de répondre, elle le prit dans ses bras, serrant très fort. Elle ne voulait pas qu'il voit les larmes qui coulaient silencieusement sur sa peau. 

Après deux bonnes minutes, elle se détacha enfin de lui, lui sourit et prétexta que ses parents l'attendaient chez elle pour le dîner. Sans laisser le temps à Jasper de répondre, elle prit son sac et courra, projetant de l'eau tout autour d'elle tandis qu'elle courait sur le pont détrempé. 

Jasper resta là, incrédule, interloqué. Il n'aurait jamais pensé qu'elle aurait cette réaction. Un sourire prit place sur son visage. Il se contempla dans la masse d'eau à ses pieds, la première chose qu'il vit fut la protubérance au niveau de son pantalon provoqué par l'étreinte de Becky. Le jeune homme prit son sac à son tour et rentra chez lui, heureux, comme il ne l'avait jamais été. Conquérir Becky était probablement la seule chose positive socialement parlant qu'il avait accompli dans sa vie. Il vivait un rêve éveillé.

Le retraité regardait la scène avec un dégoût palpable. Il n'avait jamais été aussi contrarié depuis qu'il était assis sur cette chaise. 

- C'est ça barre toi sale pute ! cracha t-il, les larmes aux yeux. 

- Pourquoi es tu aussi en colère ? murmura la Chose. 

- Parce que... Parce que cette salope n'est jamais revenue ! Elle s'est barré à l'autre bout du pays tout l'été et n'est jamais revenue, JAMAIS. Pas un coup de fil, pas une lettre, RIEN, cria Jasper. 

- Qu'est ce que tu as fait pendant ces 16 années ?

- J'ai fais des études dans une université de merde qui m'intéressait même pas. Puis j'ai bossé, bossé et encore bossé. J'enchainais les boulots, mais rien me convenait, j'étais comme un électron libre.  

- Je vois, et qu'est ce qui t'intéressait réellement ? 

- La criminologie, ça m'a toujours passionné.

- Ça t'as bien servi plus tard, n'est ce pas ? 

Jasper ne répondit pas. 


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