Chapitre 2

Mina

Ma passion, c'est la natation et tous les mardis les garçons me rejoignent à dix-neuf heures précises devant la piscine. Enfin, tous les garçons sauf Maxence qui nous rejoins toujours un peu plus tard mais qu'on a perdu l'habitude d'attendre. Il nous rejoint généralement lorsque je suis déjà dans le bassin. J'ai souvent essayé de les inscrire avec moi. Je me rappelle de l'unique fois où j'ai réussi, ils étaient venus pour un cours d'essai et ils avaient mis une telle pagaille que je n'ai plus jamais réessayé. Qui l'aurait fait après s'être tapé une honte monumentale auprès d'une équipe qui me suivait depuis maintenant des années ? J'ai toujours trouvée que j'avais de la chance d'être la seule fille du groupe, ils m'apportent chacun quelque chose à leur façon et j'ai une relation différente avec chacun d'eux malgré le fait qu'ils me donnent souvent du fil à retordre. J'ai eu du mal à me faire ma place au début mais j'ai fini par m'y faire même s'il a parfois fallu me battre avec eux.

Mme Colins siffle et je fais un plongeon avant de faire une longueur en crawl le plus rapidement possible. D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours connu Mme Colins en tant que coach de natation. Elle connaît mes faiblesses autant que mes forces et ça me force à donner le meilleur de moi même à chaque longueur.

- 2min 17, tu m'as déjà habituée à mieux Mina !

Je ne dis rien, j'ai appris qu'avec cette coach, il ne faut surtout pas riposter. La seule fois où j'ai vu un de ses élèves riposter, il a dû faire dix longueurs aller-retour sans s'arrêter et il a sué pendant tout le reste du cours bien que je vous l'accorde c'est difficile de suer lorsque le température de l'eau est en-dessous de notre température corporelle. Pour autant, je ne l'ai jamais vu refaire cette erreur et je ne suis pas sûre qu'il soit resté son élève.

- Allez, on tente le 200 mètres maintenant !

Elle souffle dans le sifflet et c'est reparti mais pour deux allers retours cette fois. Mes bras sont coordonnés avec mes jambes, le poignet courbé de manière à prendre plus de vitesse, je me sens bien, à ma place. Une force venue de nulle part me remplit de l'intérieur et je suis surpris de sentir à quel point je me sente bien. C'est une sensation aphrodisiaque je dirais même qui m'enivre tellement que je mets du temps à comprendre ce qu'il se passe. Je m'en rend seulement compte en regardant le fond de la piscine. Je comprends alors que je nage à une vitesse hallucinante. Ca m'étonne même que ça puisse être possible.

Au bout de la dernière longueur, je me calme en allant moins vite, la fatigue prenant soudainement place dans mon corps affaibli. Je sors de l'eau en titubant, je finis par m'asseoir sur le rebord de la piscine et j'entends vaguement les garçons m'appeler inquiets. Je suis épuisée. Je regarde Mme Colins, elle affiche une expression statique. Elle regarde son chronomètre, cligne trois fois des yeux et fini par me regarder avant de murmurer que c'est impossible. Je sens une main se poser sur mon épaule et je sursaute car cela me reconnecte instantanément avec mon corps, comme si je n'y étais pas.

- C'est moi, tout va bien, murmure Jo d'une voix calme qui me rassure tout de suite.

Je me retourne pour voir que Rafael et Maxence sont justes derrière lui, pieds nus et tout aussi inquiets.

- 2min 18, se reprend Mme Colins, tu as fais 2min 18 au 200 mètres.

J'écarquille les yeux, deux minutes dix-huit, c'est proche du record du monde qui est à deux minutes six. Je regarde l'eau, je n'arrive pas à y croire. J'essaie de me calmer, je suis essoufflée et très fatiguée. Je tente de me lever mais j'ai du mal à tenir debout et mes jambes tremblent. Je m'accroche aux bras de Jo autant que mes bras me le permettent et je regarde mes jambes, les larmes aux yeux, je n'ai plus de force. Je déteste cette sensation, c'est comme être malade au lit et dépendre de quelqu'un pour presque tout, ce qui est actuellement mon cas. Jo et Rafael me raccompagnent jusqu'aux vestiaires pendant que Maxence va récupérer leurs chaussures, laissés dans la zone visiteurs. Ils m'assoient sur le rebord de la cabine, Rafael va récupérer mes affaires et Jo me caresse les mains, espérant que ça calme mes sanglots mais ça empire et je retire mes mains de celles de Jo pour cacher mon visage. C'est à ce moment que Rafael revient et ils sortent de la cabine pour me laisser seule. Ils savent que c'est la seule chose que je veux pour l'instant, je n'aime pas être vulnérable comme ça devant les autres, même devant eux et ça aussi ils le savent.

Je finis par me calmer et j'arrive à trouver le courage de me changer en restant assise. J'essaie de faire au mieux donc j'enlève difficilement mon maillot de bain en prenant bien cinq minutes. Je me sèche et enfile mes sous-vêtements aussi vite que je le peux. J'arrive à enfiler mon t-shirt car il est assez ample mais impossible d'enfiler mon slim qui me colle à la peau. Je n'ai plus suffisamment de forces. Je me retrouve donc obligée d'appeler les garçons à l'aide. 

Maxence est appuyé contre le mur en croisant les bras. Il a les sourcils froncés et a l'air contrarié. Il vient prendre mes affaires tandis que Rafael et Jo viennent m'aider à enfiler mon pantalon avec un à chaque jambe. Ils me portent et me le remontent du mieux qu'ils peuvent.

Je suis malgré tout incapable de tenir debout donc Jo me porte et les deux autres garçons nous suivent derrière. Je lutte pour ne pas m'endormir lorsqu'il me dépose dans la voiture du père de Jo. Il nous la prête lorsque l'on a besoin, le mardi et les soirs de sortie. En revanche, seulement Jo peut conduire la voiture, question de sécurité si l'un de nous bois. Il fait confiance à son fils et il n'a pas tord puisque Jo fait très attention lorsque l'on sort et ne boit que très peu voire pas du tout. L'habitacle de la voiture est chargé en électricité mais je n'y prête pas vraiment attention, je suis bien trop fatiguée.

- Vous ne trouvez pas ça bizarre ce qu'il se passe ? demande Maxence 

- Quoi donc ? dit Rafael, ne comprenant pas grand-chose

- Je ne sais pas. Hier, je me brûle alors que rien n'est vraiment brûlant et aujourd'hui, Mina fait un 200 mètres avec une force et une vitesse sortie de nulle part et elle finit par s'écrouler de fatigue.

- Mina, ça ne montre strictement rien, elle a simplement voulue montrer de quoi elle était capable mais elle a trop forcée et s'est épuisée, c'est une guerrière notre Mina ! explique Rafael. Et toi, c'était simplement l'un de tes délires, de toute façon, on ne peut pas trop te comprendre toi !

- Mais puisque je te dis que je ne délire pas ! C'était rouge putain !

Rafael lève les yeux au ciel, Maxence est énervé, sûrement contrarié d'être incompris et Jo ne dis rien, comme d'habitude, il est toujours très silencieux. Je ne pense pas que ce soit en rapport avec une quelconque timidité, il est souvent en pleine réflexion et toujours en retrait pour analyser une quelconque situation. C'est parfois utile lors d'une dispute et il arrive souvent à désamorcer des bombes. Je crois que c'est celui qui nous connaît tous jusqu'au plus profond de nous même.

Arrivés devant chez moi, Rafael explique brièvement à mes parents ce qu'il s'est passé et me dépose sur mon lit.

- Ce n'était pas normal, Rafael, je dis à moitié endormie.

- On verra ça demain, tu as besoin de repos maintenant, endors-toi.

Je me laisse tomber sur mon oreiller tandis qu'il m'enlève mes chaussures et me recouvre de ma couette. J'ai à peine le temps de souffler que mes paupières se ferment toutes seules et je tombe dans les bras de Morphée me rappelant une fois encore que j'ai vraiment de la chance de les avoir auprès de moi.

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