Défi à thème | En fleur

Thème : Les bonnes choses de la vie

          L'océan léchait ses pieds, il s'affalait sur elle et semblait presque ronronner pour l'inciter à s'immerger dans ses entrailles. Nermine frissonna en sentant sa caresse glaciale, mais avança légèrement jusqu'à ce que ses genoux disparaissent sous les légers remous. Les vagues s'échouaient sur un rythme régulier qui l'hypnotisait et lui susurrait à l'oreille d'avancer, encore et encore, de l'embrasser, toujours et toujours. Ne jamais la quitter.

          Elle lui obéissait progressivement, lui offrait son corps, une parcelle de peau à la fois, lui offrait son cœur, battement par battement, et lui offrait son âme, baiser après baiser. Elle se laissait submerger sans ciller, elle s'habituait lentement à cette présence contre elle, une présence qui l'enlaçait et la chérissait, qui l'attirait en son sein.

          Nermine se dédiait de tout son être à l'ondée d'une fraicheur presque hivernale. Elle se vouait à elle sans faillir, se consacrait à son étreinte qui lui envoyait des éclairs de glace dans les veines à chaque fois qu'elle avançait du plus petit centimètre.

          Bientôt, son ventre fut agrippé dans des bras chaleureux mais frigorifiés. Elle se laissa aller, cessa de lutter dans une attitude altière, dressée au milieu de l'eau, drapée dans sa nudité partielle, accueillant les rayons du soleil pour parer ses cheveux noirs de reflets ambrés. Elle se coula dans le corps liquide qui l'étreignait, lui rendit sa douce caresse et s'immergea jusqu'aux épaules.

          Une grimace altéra ses traits le temps d'un battement de cil, et, l'instant d'après, sa bouche se parait à nouveau d'un petit sourire. En réalité, ce sourire n'était qu'une ombre qui se déployait à peine, mais il était si vibrant d'un sentiment de pur apaisement qu'il illuminait son visage tout entier, au point d'en éclipser le soleil couchant. Au point de la réchauffer de l'intérieur, alors qu'elle avait l'impression d'être embrassée par un être gelé.

          Mais ce câlin d'une douceur inouïe lui était agréable, car il la faisait se sentir vivante. Froidement vivante. Intensément vivante. Elle sentait tout son corps fourmiller tandis qu'il s'éveillait peu à peu après une longue sieste en plein soleil, elle sentait la moindre de ses terminaisons nerveuses frémir de plaisir en étant stimulée. Ses muscles étaient parcourus de petits spasmes qui les ramenaient à la vie, et elle se déploya dans l'océan, se fondit dans son corps mouvant.

          Allongée sur le dos, elle ne fit bientôt plus qu'un avec les flots qui la portaient, la supportaient et l'entouraient étroitement. Elle sentit ses membres se couler et fondre, et bientôt, elle fut une composante de l'atmosphère estivale.

          L'air était chargé d'un doux parfum de glycine, relevé d'une note de noix de coco en provenance des ajoncs qui bordaient les côtes et les paraient de délicates touches dorées. Le parfum de l'été s'engouffrait dans ses poumons, agrémenté de l'odeur onctueuse de la crème solaire, et de la fragrance moelleuse de la pêche qu'elle venait de manger et maculait encore ses lèvres. Elle respirait l'été tandis que l'eau autour d'elle semblait avoir regagné une température acceptable.

          Elle flottait sur le dos, à peine consciente qu'elle était encore dans l'eau, car elle ne sentait plus sa morsure vivifiante. Au contraire, elle avait la sensation exquise de s'élever dans l'atmosphère pour aller flirter avec le soleil, qui se penchait alors vers l'océan pour lui déposer un doux baiser constellé de paillettes dorées sur le front. Elle se sentait planer dans une chaleur bienfaisante, elle ondoyait dans l'air empli des rires des enfants, traversé par les éclats de lumière qui provenaient des sourires attendris des parents. Elle voguait sereinement, quelques mètres au-dessus de l'eau, tout était à la fois calme et joyeux autour d'elle, si bien que toutes ces émotions caressaient son corps, emportées dans une brise légère et ensorcelante.

          Les rayons du soleil rougeoyant effleuraient sa peau dorée, faisaient courir sur elle une vague de bien-être formidable qui ne tarda pas à enlacer son cœur. Elle était si apaisée, au sein de cet air d'été, qu'elle aurait pu s'endormir là, dans les bras de l'eau. Elle aurait pu se lover entre les courants qui lui chatouillaient doucement les jambes, s'enrouler dedans comme un chiot affectueux et se laisser aller au sommeil. Si apaisée qu'elle s'abandonnait.

          Elle s'abandonnait à ses sensations, à la glycine qui chargeait l'air de bonheur, aux cris des mouettes qui volaient, elles aussi, et sillonnaient le ciel d'un bleu si profond qu'il lui semblait vivant, comme s'il se mouvait et était capable de l'atteindre et de l'étreindre. L'ambiance estivale tourbillonnait autour d'elle et l'emportait aux confins d'un sentiment de sérénité si pure que tout sentiment négatif se dissolvait instantanément.

          Elle planait.

          Des remous plus importants que le léger bercement de l'océan la firent se redresser, et elle aperçut Hazel, à quelques brasses de là, qui nageait pour la rattraper. Le soleil fit flamboyer ses cheveux blonds, il se glissa même dans ses yeux noirs pour les orner de diamants rouges, et un sourire immense illuminait son visage.

          Elle sentit son jumeau se presser sur sa bouche, sans même se poser de question. D'un habile mouvement de jambes, elle s'allongea sur le ventre et fondit sur lui, dans ses bras, contre sa chaleur. Et, alors qu'elle se sentait totalement apaisée l'instant d'avant, un onguent de bonheur fut appliqué sur son cœur, dont les battements s'accélérèrent en un salut chaleureux.

— Tu dormais ? la taquina-t-il d'une voix brûlante qui roula sur sa peau.

          Le soleil s'engouffra une nouvelle fois dans ses yeux, alors qu'il allait disparaitre à l'horizon, et une lueur rouge enflamma sa peau. Une statue de rubis se dressait dans l'océan, un Poséïdon sublime qui la tenait, elle, au creux de ses bras. Il la regardait avec tant d'amour qu'elle en fut renversée, elle se sentait comme étoile qui aurait eu droit de rencontrer le soleil en personne.

          Sans prévenir, l'été coula dans ses veines, et elle se sentit à sa place, comme si l'océan et Hazel étaient tout ce qu'il lui fallait pour vivre. Comme s'ils lui étaient essentiels, aussi, mais qu'elle avait fini par les trouver. Et qu'elle pouvait maintenant s'abandonner à eux.

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