M. Chapitre 78

Chapitre 78
- Matthew -

I saw you lookin' from across the way
And now I really wanna know your name
- South of the border by Ed Sheeran

😻Je la sens se raidir. Est ce que ma phrase était bizarre ? Je réfléchis en silence alors qu'elle bouge pour se défaire de mon étreinte. Je fais toujours des gourdes, je suis une catastrophe.

Je voudrais lui embrasser le cou mais j'ai peur d'aggraver les choses. Ou sinon je pourrais lui dire que je n'ai en aucune manière envie de coucher avec elle. Mais le sens derrière cela me dérange, elle m'attire, c'est sur mais c'est trop tôt pour envisager quoique ce soit.

Je la retourne d'un geste. Ses yeux fixent mon torse. Je l'embrasse alors que mon cerveau boue. Je ne vais pas tenir longtemps vivant dans les bras de cette meuf. A chaque fois que je la vois, ma tête est en ébullition, pire que l'eau des pâtes.

-On ira au parc, ok ?

Ses yeux remontent d'un coup. Elle m'analyse. Est ce que je mens ? Ses sourcils se froncent et sa tête se penche en avant malgré elle. Puis elle sourit. Ok, accepté.

-Tu pourrais faire plus original, chérie.

Ha bah non... Va falloir que je me creuse la tête et moi et les rendez-vous ça fait deux. Je n'ai jamais été doué, la preuve en est la dernière fois.

Elle s'échappe avec un sourire de chipie et je la vois disparaître. Je réfléchis à sa phrase. « Chérie » ? What does it mean ? Is it darling ? I think so but I'm not sure...
She drives me crazy arghhh.

-Je sens que Juthew ne va pas durer longtemps, laisse échapper Ethan alors que je m'affale sur le banc.

Je ne relève pas sa remarque et fixe un groupe de personnes plus loin. Elles discutent en essayant de boire, le plus discrètement possible ce qui s'apparente à être de la bière. Si le lycée les chope, ils peuvent dire au revoir à tout avenir. J'imagine que s'ils sont ici c'est qu'ils ont des parents riches qui ne tolèrent aucun écart de conduite. S'ils s'avaient...

S'ils savaient que leurs enfants se droguent dès qu'ils le peuvent car ça calme les angoisses.
S'ils savaient que leurs filles se font défoncer à l'arrière d'une voiture sur le parking du lycée.
S'ils savaient que l'avenir qu'ils voient comme être le bon peut s'évaporer à chaque instant à cause de leurs conneries.

Seul point positif : ma mère s'en fou. Je suis rentré dans ce lycée par obtention d'une bourse (et heureusement !). J'avais un dossier parfait en sortant du secondaire, le meilleur. Tellement d'espoir en moi que j'ai tout fait partir en un claquement de doigt.

-Tu devrais être moins maladroit.

-Ok docteur love.

-Je suis sérieux. Les filles elles n'aiment pas les mecs brusques.

-Parce que tu penses que je la force ?

Ma phrase semi-amusée, semi-intéressante, sonne définitivement mal à mes oreilles. Qu'est ce que j'en ai à foutre de son avis sur mon ... couple. Ça fait bizarre de le dire.

Je pense à Justine. A sa façon de me regarder, d'une manière qui pourrait me faire faire n'importe quoi. A sa façon d'agripper mon bras comme pour montrer aux autres que je lui appartiens. Je me fais complètement dominer par elle. Je ne peux pas résister à son sourire charmeur ou à son contact électrique.

Je ne sais pas ce qu'elle pense de moi. Je me méfie. Parfois j'ai de gros doutes qu'elle sorte avec moi pour les bonnes raisons (entre autre, l'amour). Ce n'est pas quelque chose de naturel chez moi la confiance. Évidement, je garde mes doutes pour moi ; elle serait terriblement déçue si elle savait.

-Laisse lui de l'air, t'es toujours en train de la surveiller, bro. C'est pas ta gosse.

-Elle m'a dit de trouver un lieu original pour ce soir...

-Tu veux la baiser ?

-Non. Je veux juste la voir.

-Respiration !, répète-t-il. Laisse la respirer.

-Bah quoi ? C'est pas ça le principe d'avoir une copine ? Tu t'occupes d'elle, elle est contente, elle sort avec toi.

Je souffle, mais ça sonne étrangement théâtral.

-Ça va jamais, si tu les vois trop, ça les emmerde, pas assez ça nique tout aussi.

-Je pense que tu devrais laisser tomber ce soir. Laisse lui le temps de s'habituer et d'intégrer les choses. Ça fait même pas un jour que vous êtes ensemble et vous traînez déjà tout le temps ensemble.

Tous les couples que je vois s'adorent les premiers jours et les passent lover dans les bras l'un de l'autre. Mais bon, je ne m'y connais pas beaucoup dans tout ça. Ma mère n'a pas de copain, ses seules relations sont sexuelles, pas sur que ça aide dans mon cas. Je n'ai ni frère, ni famille à qui demander. J'aurai bien demandé à Lisa mais je n'ai pas envie de gâcher les derniers jours avec elle.

Je suis son conseil et l'évite donc toute la journée. Je lui ai envoyé un message annulant notre rendez vous vers midi. Elle ne l'a pas mal pris. Ça me rassure déjà, ça marche peut être le truc d'Ethan. Elle m'a juste répondu « ok ». Rachel continue de venir nous voir (plus Ethan que moi à vraie dire) sans m'engueuler d'avoir brisé le cœur de sa copine. Après tout, tu ne te dis pas amoureux d'une personne en un jour et demi.

Sauf coup de foudre... Mais je n'y crois pas. Et dans tous les cas je trouve ça flippant. Juger quelqu'un par son apparence physique... Ce n'est pas ma tasse de thé. Immédiatement l'image de Kate me vient à l'esprit. Cette jeune fille heureuse qui faisait les 100 coups avec moi. Puis cette âme égarée qui essaye tant bien que mal de revenir sur le chemin.

Parfois, je la vois en rêve, j'ai l'impression de lui parler comme avant : de lui raconter mes problèmes alors qu'elle en avait mille autre à régler. J'ai souvent cette impression de manque. Ma colère est complètement retombée. J'étais en colère contre elle, de ne rien m'avoir dit, contre moi, de ne rien avoir vu, contre cet enfoiré. A la lecture de la lettre, mon sang n'a fait qu'un tour.

Un bout de papier ne m'avait jamais fait aussi mal. Il était humide, et fripé. Je le froissa à mon tour. J'avais passé la nuit sur cette falaise où quelques jours plus tôt elle s'était donné la mort.

Quand j'y réfléchis je me dis qu'il y a tellement de signe que je n'ai pas su voir. Pourtant sous mon nez.

Je soupire et observe le ciel. Un avion passe et je m'imagine à l'intérieur avec Justine. Abandonnant tout pour recommencer de zero. Mais je ne suis pas prêt à abandonner Kate. Même s'il n'est plus là, j'ai l'intime conviction qu'elle a encore besoin de moi.

C'est stupide... Comment un mort pourrait vouloir quoique ce soit ? Je me demande si elle m'en veut. On avait tous les deux changé en une façon étrange. Tous les deux devenus de pauvre marionnette que la société agitée. Peut être que c'est juste l'inverse.
J'ai besoin de toi Kate, reviens.

😻Je rentre chez moi après cet entraînement intensif de basket. Je suis mort. HS. En panne. Veuillez prendre l'autre guichet svp.

Je prends une cigarette que je fume lentement pour savourer toutes les heures de vie que je perds. Un autre sujet sensible pour moi. Je m'étais promis d'arrêter mais suite à la mort de Kate, je ne me sentais pas de traverser ça. Je parie que Justine va m'obliger à stopper, elle déteste ça. Et finalement c'est ce qu'il me faut, une personne qui me dise que je déconne.

Je prends mon téléphone en continuant de me remplir les poumons de cette fumée noire. Plusieurs messages sur un groupe de potes. Pas intéressant. Des messages de ma mère qui joue la maman protectrice qu'elle n'a jamais su être. Pas intéressant. Un message de Lisa. Intéressant. Elle veut qu'on se voit. Je m'empresse d'accepter et fais demi-tour pour la retrouver.

Je la vois affalé sur une table en terrasse d'un restaurant où nous mangeons ensemble en discutant pendant une bonne heure.

Vers une heure du matin, on se couche tous les deux dans ma chambre, épuisés de s'être autant parlés. Il y en a des potins à raconter !

😻J'entends mon réveil sonner, je m'empresse de l'éteindre. Qu'une journée chiante à mourir recommence. On se croirait dans un jour sans fin. J'espère que demain un élément plus gai apparaîtra comme par magie. Mais je sais que ce ne sera pas le cas car Lisa s'en ira.

Je m'habille, mange un rapide petit déjeuner. Ma mère est là avec cet homme étrange qui a l'air tellement gentil que ça en devient suspect. Les copains de ma mère n'ont jamais été sympa. Toujours à me frapper pour un oui ou un non. La seule excuse « tu as laissé la boîte de céréale ouverte » était valide pour m'assommer et me rendre borgne pendant 2 semaines. Je n'ai pas le temps de les saluer que je suis déjà dans la rue. Je m'achète un sandwich, fume une cigarette et arrive au lycée. Bref, la routine, la routine.

Je respire en franchissant les portes et en la voyant. Je fais tout mon possible pour ne pas aller la voir. Même si j'aurais préféré discuter avec elle qu'avec ces idiots du basket. Ils sont toujours en train de discuter des cheerleaders où des entraînements passés et sincèrement je n'ai pas envie d'entendre quoique ce soit la dessus.

-T'en as pensé quoi d'hier capitaine ?

-Faut faire attention en défense, on n'est pas très bon. Va falloir retravailler ça. Mais on fait des progrès, je réponds le plus simplement du monde en allant en classe.

Pas un mot à la française. Direct en cours. Hop, esquive. Tel James Bond évitant les coups de feu. Je la vois de loin froncer les sourcils en parlant à Rachel. Si c'est à cause de moi, le plan d'Ethan est à chier parce que vu la tête qu'elle fait, elle n'est pas en train de dire à quel point je suis un copain génial.

A la sortie des cours, je marche rapidement vers chez moi quand une main vient fermement accrocher mon poignet et me retourner. Je sais déjà qui c'est.

-Tu fous quoi Anderson ? C'est une relation à distance qu'on entretient ?

Ses yeux sont noyés par la colère. C'est quoi encore ce conseil de daube Ethan ? Il va me le payer. En attendant, je fourre toujours les pieds dans le plat. Je ne peux ni faire confiance à mes potes ni à mon instinct, on est bien barré avec cette relation.

-Tu m'ignores ?

Alors non, mais ouais un peu. Fin, c'est pas vraiment ma faute. C'était pas mon idée à l'origine. Mais c'est moi qui ait fait l'action, donc si, c'est de ma faute. Pas entièrement, quoi.

-Répond idiot !, crie-t-elle ce qui me fait sursauter.

-Ethan m'a dit de m'éloigner de toi. Il m'a dit qu'on était trop proche et que je t'étouffais trop.

Elle hausse un sourcil, pas convaincu.

-Je voulais juste ne pas être trop envahissant.

Mes mots sonnent déplorables. J'ai l'impression d'être un toutou en train de s'excuser près de son maître enragé.

-T'es vraiment con. T'as cru que si on sort ensemble c'est juste pour aller tondre les moutons le vendredi des années bissextiles ?

Sa colère a disparu. C'est déjà un grand pas.

-Je suis désolé.

-Il va falloir arrêter de l'être et ne plus jouer aux cons Anderson.

C'est la première fois que je tiens autant à une personne, ça me fait peur alors je fous tout en l'air. J'ai un caractère autodestructeur (j'ai peut être trouvé mon futur métier finalement... Au lieu de me détruire je pourrais détruire des voitures). Les mots restent bloqués au fond de ma gorge.

-Tu m'en veux ?

-Je te pardonnerais bien si tu m'achètais une glace.

Je souris et lui prends la main pour l'emmener au bord de plage où on pourra prendre des glaces.

-T'écoutes plus jamais cet abruti. Ils ont une vision très étranges de l'amour Ethan et Rachel. C'est leur problème.

De l'amour ? Ouh la. Je ne suis pas amoureux moi. Si ? Non. Non c'est oui ou non c'est non ? Ici, c'est non point non. Oohhh je vais finir mort avant mes 30 ans avec toutes ces angoisses. C'est quoi ça ? Pourquoi ça ne se passe pas comme dans les films où on a l'impression qu'ils se connaissent depuis toujours ? Sans moment de gêne ni maladresse.

Elle sourit en voyant le magasin dans lequel je l'ai emmené. C'est le préféré de tous. Il a tellement de parfum qu'on mettrait une heure à tous les énumérer.

Je la regarde faire son choix alors que je reste en suspend. La queue devant elle n'est pas très longue, parfois elle continue jusqu'au chemin de randonnées. Elle observe minutieusement chaque goût pour être sure de faire le meilleur assortiment. Sourire plaquée au visage, elle commande une glace en cornet 2 boules.

Je m'approche du comptoir pour payer alors qu'elle part avec sa glace. Je regarde mon portefeuille en priant. J'ai juste ce qu'il faut pour lui payer. Bientôt je serais fauché... Il faut absolument que je me trouve un boulot.

Je sors une cigarette mais directement des yeux me fusillent. Je la range dans son paquet en levant les yeux au ciel. Elle continue de manger sa glace soigneusement. Voyant que je l'observe elle me tend son cornet en haussant un sourcil. Je donne un petit coup de langue sur le rebord.

-Alors ?

-T'as bon goût, tu peux rester ma copine.

Elle a un frisson. C'est vrai que je n'avais jamais admis notre couple à voix haute. Ça me fait bizarre. Je n'ai jamais été content d'être en couple mais là, c'est différent.

Je mets mes mains dans mes poches en continuant de marcher le long de la mer. Certaines personnes se baignent malgré les températures très froides. Des courageux.

Au bout d'un moment, elle jette sa serviette dans une poubelle et se tourne vers moi.

-J'ai quelque chose sur la bouche.

Je hoche négativement la tête mais continue d'observer ses lèvres. Mon ventre se serre. Elles sont magnifiques. Je m'approche tel un loup enragé pour les lui dévorer. Elle a un petit sursaut puis répond à mon baiser.

Un coup de klaxon de vélo nous interrompt. On s'éloigne l'un de l'autre et nous reprenons notre marche main dans la main.

Tracing our fingers from right to left
We're too drunk to even walk
-Stay awake by Dean Lewis

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