Chapitre 7
Cinq ans plus tôt...
Mais ce n'était pas encore le pire de l'année de ma sixième (c'était même le meilleur pour l'histoire des mardis et vendredis). En début d'année, Lestrade m'avait proposé de faire une visite à la classe pour présenter mon problème. Cette proposition, je la voyais comme un dernier adieu mais elle m'avait tellement rassurée ! Il suffisait de ça en effet pour que personne ne me pose de question. Parce que qui comprenait ce que j'avais ne faisait aucune question et ça m'allait si bien.
Mais j'étais dans la classe sportive avec ce qu'on a appelé pendant quatre ans, le groupe des nageurs (ou nageurs). Et ces nageurs avaient une journée d'introduction ou quelque chose comme ça, qui tombait pile le jour de l'intervention. Coup du sort ? Malchance ? Je n'en ai aucune idée. Mais ils n'étaient pas là. Je me souviens encore de la séance. Ma gêne quand on parlait de moi, mais une certaine fierté d'être au centre de l'attention. Je me méprise moi-même là-dessus. Mais je vous le dit comme c'était.
Et donc, je n'avais plus aucune inquiétude sur le fait que ma classe ne me ferait pas de questions ce qui était mon objectif. À vrai dire, la classe n'a pas fait de questions, mais le groupe de nageurs a fait pire.
Ça a commencé quand même par ça :
— Tu peux enlever tes lunettes ? Pourquoi t'as des gros yeux ?
Et puis, de temps en temps, une bousculade dans le rang, une petite insulte assez discrète. Et ce que je remercie mes parents de m'avoir eu après mon frère ! Sans lui, je serais sûrement tombée bien plus bas. Pas parce qu'il m'a protégé, pas parce qu'il a réglé leur compte à ces nageurs. Non. Juste parce qu'il passait son temps libre à nous embêter, moi et ma petite sœur et que j'avais appris à passer bien au-dessus.
Qu'on ne se trompe pas : j'aime mon frère aussi parce qu'il est drôle ou toutes les qualités qu'on pourra lui donner. Mais il faut reconnaître que je l'aime aussi pour m'avoir rendue solide face à tout ça. Ainsi donc, ces quelques insultes, ces quelques bousculades, ne me firent rien du tout. Au début.
Parce que comme tout le monde, j'avais ma sensibilité. Et quoi qu'elle fut moindre peut-être que celle d'autres, elle a finit par me rattraper. Ils n'étaient que quatre pourtant. Mais j'en ai vite eu marre. C'est désagréable au début, ça en devient blessant en continuant. J'ai eu la bonne idée d'en parler à ma mère et ceci n'est pas du tout ironique. Elle m'a dit d'aller voir la CPE de mon collège et de lui expliquer. Au début je ne voulais pas. J'étais timide et je me disais que ce n'était pas si grave. Mais quand j'y repense, ça a peut-être plus touché ma mère que moi.
J'ai fini par y aller. Je ne savais pas vraiment quoi dire... Je ne me rendais même pas compte de ce que c'était que le harcèlement. Alors, j'ai juste répondu à ses questions. Et évidemment, elle m'a demandé des noms. Elle m'a même proposé de sortir l'album photo. Ce n'était pas la peine, je les connaissais tous. Mais je ne voulais pas lui dire. J'avais peur des « représailles ». J'ai finalement lâché le morceau et je suis rentrée chez moi. Je me souviens que le lendemain, j'avais un cours d'anglais et que, dans le rang, j'avais très peur de les voir arriver.
L'un d'eux m'a jeté un regard haineux, les autres m'ont ignorée. Aucun d'eux ne s'est excusé bien qu'on leur ai demandé. Je n'ai rien réclamé et ça a été terminé. Trois ans plus tard, j'étais toujours dans la classe de deux d'entre eux et sans les considérer comme mes amis, je leur parlais sans problème. Ils ont peut-être oublié ce qu'il s'était passé et ça ne m'étonnerait même pas les connaissant. Mais ça m'a largement suffi. Je n'avais pas besoin de plus.
En cinquième seulement, nous avons eu une sensibilisation au harcèlement. C'est beaucoup trop tard. C'est mal fait. C'est... presque inutile. On nous fait voir des courts-métrages de cas bien trop graves qui font considérer à ceux qui sont harcelés que ce n'est rien ce qu'ils subissent. Ils sont diffusés trop tard parce que le harcèlement peut commencer des l'école primaire.
Alors oui, j'ai été harcelée. Oui, en soi, il existe pire. Mais mon mal-être me suffisait sans que je ne doive me dire en plus qu'il existait pire. Alors dès qu'une action répétée par un élève ou un groupe d'élèves vous fait du mal par des insultes, ne serait-ce qu'un surnom ou même la violence, vous pouvez vous considéré comme harcelé. Et surtout, parlez-en ! Moi, ça m'a servi. Après ça, je n'ai plus jamais eu de problèmes. Je ne dis pas que c'est pareil pour tout le monde. Mais c'est ce qu'il s'est passé pour moi. Quelqu'un de confiance peut vous aider.
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