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Je suis certain qu'en un coup d'oeil, les gens pensent pouvoir me lire. Comprendre le malheur qui s'émane de ma peau fine et des poches abominables sous mes yeux.
En voyant mon corps, ils doivent bien se questionner, puis conclure.
Que je ne me nourris pas. Plus assez.
En voyant mon corps, ils doivent penser que ça m'est venu d'un coup. Que du jour au lendemain, à cause d'une raison quelconque, j'ai arrêté de vivre. Arrêté d'apporter du carburant à mon organisme.
En voyant mon corps, ils doivent conclure que je déteste la nourriture.
C'est faux.
S'ils pouvaient savoir comme c'est faux.
Je leur dirais même que je l'aime sûrement bien plus qu'ils ne pourront jamais l'aimer.
Mais c'est une relation compliquée. Peut-être toxique. Une relation d'attache autant que de détachement. Une relation qui invite à plonger autant qu'à sortir la tête de l'eau pour s'étouffer à l'air libre, se dessécher sur le bas côté.
C'est étrange, comme il est si facile de basculer d'un extrême à un autre.
On visualise souvent l'enfer comme étant sous le paradis, dans les bas-fonds. Pourtant, moi, je pense qu'il devrait y avoir deux enfers. Un en dessous, et un au dessus du paradis, qui représentent deux extrêmes opposés.
Et le paradis, ce serait l'équilibre, au milieu.
C'est pour cela que souvent, les personnes qui souffrent dans un extrême, dans mon cas le fait de ne plus réussir à me nourrir, sont le résultat du fait d'avoir vécu l'enfer inverse. Celui du dessus.
Une personne qui a tenté de se donner la mort pourra subir ensuite une ardeur de vivre telle qu'elle entraîne une peur de la mort absurde, démesurée, sur-angoissante.
Une personne qui a décidé de se restreindre au niveau alimentaire va, ou a bien souvent souffert d'une addiction extrême aux grosses quantités.
Tout comme le bonheur n'existerait pas sans le malheur.
Et comme l'eau n'existerait pas sans le feu.
Enfin bref, tout ça pour dire que lorsque j'ai réalisé que je ne retrouverais plus jamais le sourire d'Arin, calquée sur son visage, devant ma porte, à attendre que je me prépare pour sortir dehors avec elle, alors je me suis senti si désemparé, si vide, que je me suis retrouvé à vouloir combler ce vide, de n'importe quel façon qui soit.
Le plus facile, et bien... c'était ce qui était toujours accessible.
Dans les placards. Dans la cuisine. Dans le garage. Dans les rues. Partout. Il y a de la nourriture partout. C'est si évident de l'attraper, de la voler, de la camoufler dans une poche pour en avoir les bienfaits ensuite en cachette.
Comme une drogue.
Et puis le corps change.
C'est idiot, mais depuis tout petit, tout ce qui m'entoure m'a toujours chuchoté, dans le coin de mon oreille ; personne n'aime les gens avec un corps pareil. Les médias, mon entourage, les discussions, les remarques, tout me faisait croire que je n'avais pas le droit de laisser mon corps se déformer par la peine.
Alors pourquoi, moi qui ait ensuite pourchassé cette obligation qu'on me vendait, pourquoi suis-je finalement arrivé à mes objectifs, et me trouve plus laid encore, avec cette peau sur les os, ce regard terne et ce ventre qui ne veut pas me laisser tranquille de douleur ?
Je crois qu'à un moment, j'ai arrêté de suivre cette stupide peur de me nourrir dans l'idée de maigrir. Mais les habitudes sont restées. Et cette sensation de me laisser mourir aussi. Et je me suis rendu compte que cette sensation me permettait de tout autant combler la déchirure de mon âme que son extrême opposé. Étrange de se dire qu'une sensation pareille puisse être aussi addictive.
Je chéris cette mort lente autant qu'elle me déprime.
Elle me permet de ne plus me sentir, de laisser le temps flotter comme s'il n'existait pas. Il n'y a plus aucun repas pour cadrer mes journées et leur donner une dimension temporelle. Alors je stagne et je vogue, dans un état de semi-conscience permanent.
C'est si agréable, de toucher le fond, de se laisser voguer sans que personne ne vienne me déranger, sans que je n'ai à bouger le petit doigt pour agir.
Est-ce faible, d'être ainsi ?
Je devrais me reprendre.
Je le devrais.
༄༄༄
Petit chapitre qui aide à mieux se projeter dans la tête de Jungkook. C'est un état d'esprit que je veux vraiment réussir à retranscrire, alors c'est important de m'y attarder. Pour vous, sa psychologie fait-elle sens ?
Qu'en avez vous pensé ?
Et courage à toutes les personnes qui peuvent vivre quelque chose de similaire <3
Je vous post le prochain chapitre (bcp + long) après demain (je pense que demain ça va être dur parce que je ne suis pas là de toute la journée 😭) Voilàaa
(Y a des scènes Taekook dedans que j'ai hâte de vous faire découvrir 😔)
À bientôt <333
-Elise-
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