13 🌊

Les vagues s'écrasent à mes pieds. J'essaie de ne pas trop penser à cette touffe que j'ai retrouvée sous la douche. Ce n'est pas la première fois que ça m'arrive. Ça ne devrait pas tant m'effrayer. D'habitude, ça ne me dérange pas, de voir ce corps en décomposition.

Mais dans l'optique de revoir ce garçon, ça me dérange un peu.

J'ai du mal à me l'avouer.

Depuis qu'il est apparu sur cette plage et que je l'attends tous les soirs, il y a comme une envie au fond de moi, dérangeante, qui veut paraître plus vivant, peut-être plus consistant, moins repoussant, en tout cas.

Il apparaît une nouvelle fois, ce soir. Je souris malgré moi. Je serre mon carnet entre mes mains. J'ai écrit tout l'après midi. Ma plume a glissé sur le grain du papier avec une facilité déconcertante. Ça roulait, s'échappait de mon poignet pour venir se déposer entre les pages. J'ai vu l'encre former des mots, puis des phrases, des paroles que j'ai mis tant de temps à essayer de formuler. Aujourd'hui, c'était plus cru, plus dur, bien que plus fluide, paradoxalement.

Je me demande s'il me demandera de lire.

Aujourd'hui, il n'est pas venu les mains vides. Dans la nuit qui s'installe, je peux apercevoir une sorte de grosse couverture dans sa main droite. Dans la gauche, un sac qui se balance au fil de ses pas. Une fois arrivé à ma hauteur, avant même de me saluer, il étale la couverture sur le sable, se met dans la position du vent, afin que ça soit plus simple. Une fois cela fait, il pose son sac à un coin de la nappe improvisée, et m'indique de faire de même avec mon carnet du côté opposé, afin qu'elle ne s'envole pas. Je m'exécute, avec un million de questions en tête.

Mais j'aime le fait de ne pas comprendre, pour une fois. J'aime attendre pour interpréter ses mouvements. J'aime le mystère qu'il instaure à chacune de nos rencontres. J'aime ses traits aussi accessibles qu'éloignés. Ses expressions aussi claires qu'incompréhensibles.

Une minute, il est une âme qui ricoche à la mienne, et l'autre, il devient une énigme à résoudre.

Je contemple ses cheveux qui sont ballotés par le vent, ses vêtements toujours aussi amples qui volent en arrière, et révèlent une taille fine, et je me dis que l'air de la mer lui va bien. Ça se voit, qu'il est né ici. Que la mer est sa maison, son temple. Moi, je ne suis que de passage, je n'ai pas cette marque de marin, incrustée dans tout ce que j'entreprends.

"Assieds-toi." m'intime t-il.

Immédiatement, je me mets en tailleur, sur la couverture. Lui se place juste en face, et alors il ouvre son sac sur le côté. Il en sort plusieurs tupperwares, des assiettes en plastique, des couverts, ainsi qu'un bol entier sous cellophane de groseilles. Soudain, je me mets à paniquer. Je me dis qu'il ne peut pas me faire ça. Ne peut pas me forcer. Il n'a pas le droit. Mais il semble entendre mes inquiétudes, puisqu'il prend la parole pour la deuxième fois ce soir.

"Je n'ai pas mangé encore, je me suis dit qu'on pouvait faire un pique-nique, c'est sympa. Mais c'est avant tout pour moi, tu sais, tu n'es pas obligé de taper dedans. Après, si l'envie te vient, ne te dérange pas quand même... Mais en fait, j'ai pas juste amené un pique-nique."

Je souffle de soulagement, discrètement, alors qu'il se retourne de côté à nouveau pour atteindre son sac. Il plonge la main dedans et en ressort une bouteille qui me fait froncer les sourcils.

"Je l'ai piquée à Maman."

Sa façon enfantine de parler de sa mère me fait tiquer autant qu'elle m'attendrit, avant que je ne me concentre de nouveau sur la bouteille qu'il pose entre deux tupperwares ; un de melon, l'autre de tranches de saucisson.

"Je n'ai jamais vraiment bu." je murmure.

Il paraît soudain assez excité.

"Moi non plus." Puis il rit. "Je me suis toujours abstenu, avec mes potes, alors que eux finissaient morts comme des rats. Mais j'ai envie d'essayer, de voir ce que ça fait, au moins une fois dans ma vie..."

Bien que manger ou dormir soit un effort incommensurable pour moi, je ne crois pas que boire présente un problème. Alors je me laisse porter par ses désirs, et l'autorise à décapsuler la bouteille.

"J'espère que Maman ne se rendra pas compte qu'il lui en manque une."

Je ne réponds rien, toujours un peu perturbé par sa manière d'appeler sa mère pour un jeune homme de son âge. Mais je ne fais aucun commentaire. Habilement, il remplit deux verres en plastique déjà sortis, exposés devant nous sur la couverture. Sous le poids du liquide qui coule dedans, les verres s'enfoncent un peu plus.

Le sable est fin, ici.

Il en suffit de peu.

"C'est quoi ?" je demande.

Taehyung lit l'intitulé de la bouteille.

"Whisky." fait-il. "Quarante degrés, tu penses que c'est fort ?"

"J'en sais rien." j'avoue en riant.

"Rassure moi, t'es pas mineur, hein ?" lance-t-il soudain.

"Nan. J'ai dix-neuf. Et toi ?"

Il me semble qu'il a à peu près le même âge.

"Vingt-et-un."

J'acquiesce, songeur.

"Tu fais des études ?" je questionne, bien trop curieux.

"Hm. Licence d'histoire. Je rentre en dernière année en septembre. Et toi ?"

Je me mords la lèvre, embarrassé.

"Cette année, rien... J'ai- j'ai eu un évènement qui a... qui m'a tout fait arrêter..."

Dans la prononciation de ma phrase, mes yeux dévient sur mon carnet, dans un coin. Taehyung semble comprendre, puisqu'il attire mon attention à nouveau dans son regard.

"C'est plus facile à écrire qu'à dire, c'est ça...?"

J'acquiesce.

"Je peux lire ?" finit-il par demander, comme s'il savait que c'était ce que j'attendais. Ce rituel entre nous me permet de me livrer sans ne jamais le faire. C'est plus facile, quand une encre noire parle à ma place.

J'acquiesce, plus difficilement. Je dépose le carnet entre ses mains. Il l'ouvre à la page à laquelle il s'est arrêté hier. Pendant que son regard parcourt les lignes, je ferme les yeux, pour ne rien voir des expressions de son visage. Je me concentre seulement sur le bruit des vagues, calmes ce soir, qui s'abattent sur le sable et quelques rochers. J'écoute les mouettes, plus loin, plus proches de la ville, s'égosiller. Le vent sableux s'aventure sur ma peau. Et je rejoue dans mon esprit le mouvement de ma main qui trace ces mots, si intimes, dans mon carnet.

Un autre jour. Un autre lever de soleil. J'ai trop dormi, cette nuit, alors je n'ai pas pu y assister, comme les autres matins. Je ne t'ai pas vu te lever. J'ai alors réalisé que tu pouvais continuer d'avancer, même sans moi. Je ne sais pas si ça m'a fait mal ou si ça m'a rassuré. Je me suis aussi dit que, peut-être, il fallait que je me détache de toi pour avancer. J'aurais voulu que tu me vois, maintenant, sur cette plage, tous les jours. J'aurais aimé te faire voir les vagues, qu'elles s'écrasent à nos pieds. Je suis certain que tu aurais préféré faire les boutiques de souvenirs que de te laisser bercer par l'air marin. Mais je t'aurais quand même suivi. Parce que je t'aurais suivi partout.

Partout.

Partout, sauf peut-être dans la mort.

Je sens qu'il a fini. C'est une intuition. Alors je rouvre les paupières, ose m'aventurer sur son visage. Il referme le carnet, délicatement, comme si les mots là-dedans devaient être conservés, traités avec une douceur infinie. J'en suis bouleversé. Puis une seule syllabe tombe entre nous, plus grave que n'importe quel échange que nous avons eu jusqu'ici.

"Qui ?"

Je déglutis, serre mon verre entre mes mains, au point où le plastique se déforme, mais pas assez pour renverser l'alcool qu'il contient.

"Ma meilleure amie." je laisse échapper, d'une traite, comme un pansement qu'on retirerait le plus rapidement possible.

C'était bien son genre, à Arin. De retirer le pansement, de souffrir un bon coup, puis de repartir au quart de tour comme s'il ne s'était rien passé. Chaque fois qu'elle pleurait, chaque fois qu'elle avait du chagrin, ça ne durait jamais bien longtemps. Elle se laissait aller aux larmes, et la seconde d'après, elle atterrissait sur ses deux jambes, prête à affronter la vie de nouveau. C'est peut-être cette audace envers la vie, à la provoquer, la défier, qui lui a coûté aussi cher, après tout.

"Et c'est pour ça, le reste ?"

Sa voix n'est qu'un chuchotement, à présent. Je comprends qu'il parle de mon corps, frêle, de mes cernes, infinis, de mon regard, abyssal, de ma gorge, qui me bloque, et de mes prunelles, qui ne veulent jamais trouver le repos.

Alors encore une fois, j'acquiesce. Mais je supporte de moins en moins cette conversation. Ce qu'elle remue en moi est si important que j'ai l'impression d'être soulevé par un raz de marée. Je veux changer de sujet, et vite, alors je saisis mon verre entre mes doigts, et bois une longue gorgée. Je toussote, ne m'étant pas attendu à ce que ce soit aussi acidulé, aussi brûlant dans la gorge. Mais ça passe. Ça passe, et c'est déjà ça. Le châtain m'imite, avec plus de retenue, et sans s'étouffer pour sa part.

"C'est pas bon."

"Nan."

Puis on se met à rire, et à en reprendre une gorgée quand même. Juste histoire de voir. Juste histoire de se jeter dans le vide, pour un soir. Juste histoire de se laisser aller, le temps de quelques heures qui s'étireront peut-être jusqu'au matin.

Juste histoire de vivre.

Mon vis à vis ne s'embête pas à piocher dans les différents récipients. Du saucisson, de la pastèque, du melon, du fromage coupé en petits carrés, des petits fours... Mais pas une fois il ne touche aux groseilles. Je souris, bien plus aisément. Je me demande si c'est son attention qui me fait cet effet là ou la chaleur de plus en plus étrangère qui vient se loger au fond de mon cœur. Je me demande aussi si c'est l'effet de l'alcool ou de sa présence.

La substance doit délier la langue, puisque je lance :

"Et toi, pourquoi tu as abandonné tes amis ?"

Son élan est stoppé net alors qu'il allait s'emparer d'un morceau de melon.

"Ah, ça..." fait-il.

Un voile recouvre son regard. J'en frissonne. D'appréhension. De malaise. D'inquiétude, peut-être, un peu. Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, mais impossible de mettre le doigt dessus. Alors je m'entête à fouiller. Je veux des réponses. Et c'est ce qu'il me donne.

"Je ne voulais pas leur faire du mal." s'explique t-il. "C'est... compliqué. Tu ne comprendrais pas, personne ne comprendrait."

Son ton est plus bas, profond, dénué d'assurance.

"Je pourrais comprendre." je tente, doucement.

Il secoue la tête de droite à gauche, avant de prendre une gorgée.

"C'est faux. Les gens me disent ça mais c'est faux."

Il est plus froid, plus distant, soudain. Troublé, je décide de ne pas m'aventurer plus loin. À la place, je fixe ses orbes, qui peu à peu, dans le silence, se délestent de ce voile qui l'a recouvert quelques temps plus tôt. Mon sang se réchauffe. Je me sens bien, là, assis sur cette plage, en sa compagnie, avec le chant de la mer dans les oreilles. C'est une musique apaisante, qui a le don de me rendre encore plus laxiste.

Je me permets d'attraper quelques groseilles au fond de ma poigne, pour en mâcher quelques-unes. Le goût, immédiatement, attaque mon palais. C'est doux, sucré, tout juste assez pour me donner envie, mais assez fade tout de même pour que ça passe. Il y a quelque chose, avec ces fruits, qui retire une barrière invisible. Ça m'étonne de réaliser que de simples petites boules rouges passent aussi facilement, alors que la soupe, elle, par exemple, n'y arrive même pas parfois.

Le châtain ne me quitte pas des yeux.

"Tu devrais manger plus."

J'écarquille les yeux, étonné qu'il puisse me faire une remarque pareille. Je referme ma poigne sur les quelques groseilles restantes qui tâchent ma paume de rouge. La nuit est bien tombée à présent. Ne reste plus que le faible éclat du soleil qui vient tout juste de disparaître et la lune qui se présente comme remplaçante.

"Ce n'est pas si simple." je me renfrogne.

Je suis déstabilisé alors que je fixe les mouvements du châtain. Il décale son verre et le mien sur le côté. Dans une lenteur pesante, troublante, il déplace chacun des récipients à notre droite. Lorsqu'il a terminé, son corps se rapproche du mien. Il ose, il ose tant que je ne sais plus comment réagir. Il a ce même regard que la nuit dernière, lorsque nous nous étions retrouvés un peu trop proches, aux tables de la bibliothèque abandonnée. Je suis toujours assis en tailleur, alors que lui se met sur ses genoux pour s'avancer un peu plus.

Lorsque son visage n'est plus qu'à quelques centimètres du mien, je sens mon cœur battre à une vitesse affolante.

"Qui t'a dit que je parlais de nourriture.. ?" souffle t-il.

Ses mots sont si vaporeux qu'ils s'échappent dans le vent et s'offrent à la mer. Je suis certain qu'ils se mélangent à l'écume, et qu'une part d'eux viennent également s'incorporer à moi, s'accrocher à mon épiderme pour la faire frissonner.

Je ne suis pas sûr de bien comprendre ce qu'il me dit, et pourtant, je me laisse porter. Je n'écoute plus que mes désirs, mes envies, et c'est ainsi que je me retrouve à la laisser poser une main sur mon avant bras.

Mes yeux passent de ses propres prunelles à ses joues un peu rouges, puis s'écoulent dans ses mèches désordonnées. Je serre bien plus fort les groseilles, si bien que je sens du jus s'écouler entre mes doigts. Lui, ne s'éloigne pas. Une lueur, perturbée, traverse ses pupilles, qui se dilatent sous la nuit.

"Je ne sais pas si c'est l'alcool..." commence-t-il, tout près de mon visage. "Mais j'ai l'impression que je pourrais tout faire. Et là, j'ai vraiment envie de t'embrasser..." m'avoue t-il.

Ma respiration s'échancre. Quand ses orbes caressent mes lèvres du regard, je ne fais que l'observer, sans rien refuser. Dans mon torse, dans tous les recoins de mon corps, la chaleur se répand.

Je crois que j'en ai envie, aussi. Sinon, comment expliquer ces frissons qui me traversent jusqu'à me rendre fou ? Je me dis que c'est dingue, cette rencontre. Démesuré. Je ne le connais qu'à peine, lui n'a même pas la connaissance de mon prénom, et voilà qu'il s'apprête à déposer ses lèvres sur les miennes.

Son autre main se dépose sur ma joue. Je le laisse faire. Il s'avance encore, encore. Je le laisse faire. Son souffle se mélange déjà au mien. Je le laisse faire. Ses pupilles fixent mes lèvres. Je tremble. Juste avant qu'il ne m'atteigne, je laisse un seul mot m'échapper.

"J-jungkook..." je murmure.

Il fronce les sourcils.

"Jungkook, c'est mon prénom..."

Il sourit.

"C'est beau. Ça a la sonorité d'un coucher de soleil."

Je n'ai pas le temps de répliquer que sa bouche fond sur la mienne, et j'en tremble, surpris, réchauffé. Il ne faut que deux ou trois mouvements de sa part pour que je lâche les groseilles, les laisse tomber sur la couverture, et vienne accrocher mes doigts dans son dos. Ses lèvres appuient plus fort sur les miennes, le souffle me manque.

Soudain, je n'entends plus que les vagues dans notre dos, et sa respiration qui s'emballe à chaque fois qu'on s'éloigne pendant une nanoseconde. Celle d'après, il reprend possession de moi, et alors plus le temps avance, et plus je suis poussé en arrière.

Ses lèvres ont le goût du melon, et je me dis que c'est la première fois depuis longtemps que l'odeur ou la saveur d'un aliment ne me dégoûte pas.

Ça me fait tout bizarre, de sentir ce contact tout contre moi. Personne ne m'avait jamais embrassé, jusqu'ici. Ça me fait tout bizarre, de sentir ces mains contre mon bras et ma joue droite qui me désirent, alors même que je ne me vois plus que comme un tas d'os depuis tant de temps. Je me demande ce qui a pu lui donner envie de m'embrasser, là, en observant mon corps faible et la fatigue inscrite sur les traits de mon visage.

Ai-je vraiment encore quelque chose à offrir ?

Mes doigts serrent son sweat. Je le tâche peut-être du rouge des groseilles, mais sur le moment, je n'y pense pas une seule seconde. Ses lèvres sont à la fois délicates et entreprenantes. Je me laisse envahir, posséder, je le laisse s'immiscer contre ma peau. Je tremble encore un peu plus lorsque sa langue s'invite à la danse. Bientôt, je me retrouve dos contre la couverture, alors qu'il me repousse toujours plus loin. Mes cheveux fondent dans le sable, s'étalant en dehors de notre nappe improvisée. Je les sens s'engourdir de sable, mais ça ne m'importe peu. Je suis focalisé sur ma bouche qui veut tout de la sienne, qui s'engage comme elle ne l'a jamais fait.

J'ai l'esprit embrouillé, les membres tendus, le souffle court. Lorsqu'il se retire enfin, je contemple les contours de sa silhouette, et les traits de son visage, presque invisibles dans la pénombre. Je ne dois pas être tout à fait conscient de mes actes, puisque je le ramène à moi, et plonge sur ses lèvres une nouvelle fois. Je me retrouve à initier un nouvel échange, à apprécier sa respiration complètement mélangée à la mienne, et la chaleur qui émane de nos corps. Le vent frais nous passe dessus sans pour autant nous atteindre. Il nous effleure sans nous refroidir.

Rien ne pourrait me geler. Pas même l'eau de mes douches froides. Ou l'austérité de la maladie qui me colle à la peau.

On se détache de nouveau. Je me décompose sous ses doigts qui viennent placer une de mes mèches derrière mon oreille.

"J'ai l'impression de rêver." je confie, encore sous la brume.

J'aperçois l'ombre d'un sourire, mais il ne répond pas. Nous finissons par nous redresser. Je n'aurais jamais cru connaître une sensation si exquise. Pourtant, il faut bien une fin à tout. Il faut bien un coup de couteau à la vie, toujours. Parce que les mots qu'il prononce ensuite, sont aussi tranchants que l'éclat de la pleine lune. Aussi renversants que la houle.

"Je dois te dire une chose, Jungkook. Je dois te dire que je suis égoïste. Le plus égoïste qui soit."

"Comment ça ?"

La vapeur continue d'opérer dans mon cerveau, et mes lèvres brûlent encore de son contact. Je rêve de m'en emparer à nouveau, de replonger mes mains dans son dos et de ressentir de nouveau mon âme s'embraser.

"Je ne serai pas toujours là. Je sais que je devrais partir bientôt."

"Qu'est-ce que tu racontes ?" je m'emporte.

Il ramasse chaque élément du pique-nique, range le tout dans son sac. Il ne laisse que le bol de groseilles, me le tendant. Je l'accepte sans broncher, et le cale dans ma main, tandis que je récupère mon carnet au sol de l'autre. Il replie la couverture.

"Il est tard, je dois y aller."

Je m'empresse de saisir son poignet.

"Non. Tu n'as pas le droit de partir en me laissant sur ça. Je veux que tu m'expliques." je le supplie.

Mon corps supporte mal les remous. Tout comme mon cœur supporte mal les montagnes russes. En venir à là juste après avoir senti la sensation de sa langue contre la mienne m'irrite, me tranche à vif.

"Jungkook." souffle-t-il. Il a l'air soudain plus faible, plus abîmé. "Je suis un idiot. Un putain d'idiot." se lamente-t-il. Je ne le lâche pas, le force à me regarder droit dans les yeux. "Tu ne pourrais pas comprendre, pas comprendre..." s'essouffle-t-il.

"Je pourrais essayer." j'implore.

Mais aucune réponse ne me vient. Je ne peux que le contempler poser sa main tranquillement sur la mienne, pour la détacher de son bras. Dans un sourire, qui me paraît faux, déchirant, ridicule, sur lequel je veux immédiatement déposer mes lèvres, il lance :

"Demain..."

"... au même endroit." je termine, peiné, mais rassuré qu'il ne m'abandonne pas là, après m'avoir offert la plus précieuse des attentions qui m'ait jamais été donnée de vivre depuis que tu m'as laissé.

༄༄༄

Qu'avez vous pensé de ce chapitre, du premier baiser (kfbdidjdi) et de cette fin ?

Wow désolé je post à quasi minuit oups 😭

Merci à tout ceux qui me suivent encore jusqu'ici <3

À demain !

-Elise-

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