[O.S. Maxen : Demons]
Une goutte tomba. Puis une autre. Et bientôt, ce furent ses milliers de sœurs qui martelèrent à leur tour le sol bitumé de la ville. Ce soir, Bucarest n'était pas accueillante envers les étrangers.
Maxen resserra les pans de son manteau autour de lui, cherchant à conserver un peu de sa chaleur face a l'embrassade humide de la pluie. Elle ne faisait que lui rappelait sa solitude, les responsabilités placées sur ses épaules. Cela faisait longtemps qu'il avait accepter de rejoindre l'ACE, à tel point qu'il peinait parfois à se souvenir des raisons. Certains jours, c'était pour la justice. Ceux d'après, c'était pour la liberté. Mais si il attendait le lendemain, alors c'était pour le bonheur. Le sorcier soupira. Ce qu'il ne s'avouait pas, c'était qu'il l'avait depuis longtemps oublié, la raison. Désormais, c'était l'habitude qui le poussait à agir. Et le remord, cet ami fidèle.
Une musique retentit, le tirant de ses ruminations. Maxen tressaillit, surpris par ce son étrange. Une voix de femme, curieusement distordue, résonnait non loin de lui, bien qu'un peu étouffée. Cherchant de regard l'origine de ce bruit soudain, l'illusionniste se rendit compte qu'il provenait de sa poche de manteau. Après quelques instants de fouille, Maxen sortit, non sans honte, l'étrange objet rectangulaire que lui avait fourni son contact, Milady Coulter.
Une image figée de son visage s'étalait sur la vitre de verre, son sourire indifférent aux gouttes rigolant le long de l'objet. Deux étranges formes, l'une verte et l'autre rouges, barraient la partie inférieure de l'outil. Se souvenant soudainement des instructions de son contact, Maxen appuya avec difficulté sur la partie couleur pelouse avant de faire un mouvement horizontal, gêné par le verre rendu glissant par la pluie. Aussitôt la musique cessa, laissant place à une version déformée de la voix de son interlocutrice.
- Ah bah, ce n'est pas trop tôt ! Encore un peu et j'envoyais un drone à votre recherche !
Le sorcier sentit ses oreilles s'échauffer et fut reconnaissant de l'absence de retransmission d'image. L'illusionniste ne savait pas ce qu'était un drone, mais au ton de sa voix, il ne voulait pas vraiment le découvrir. Il n'était pas habitué à cette dimension, trop moderne à son goût. Néanmoins, Maxen approcha l'objet de son visage comme il lui avait été conseillé et s'efforça de répondre à haute et intelligible voix :
- Ce n'est pas la peine, je suis bien arrivé au point de rendez-vous. Si vod informations sont exactes, je ne devrais pas tarder à apercevoir Sorin.
Sorin, un charmant prénom pour désigner celui qui allait rencontrer la grande lumière blanche plus tôt que prévu. Si la spécialité de Maxen résidait dans l'art de l'espionnage, cela ne l'empêchait pas de devoir se débarrasser de gêneurs lors de certaines missions. Car sa maîtrise des illusions lui permettait d'être au bon moment au bon endroit, elle était tout aussi efficace pour cacher la lame reposant dans sa paume. Mais cela ne faisait qu'ajouter du poids au remord lestant son cœur.
- Évidemment que mes informations sont exactes, lui répondit Milady Coulter avec l'écho d'un sourire indulgent dans sa voix. Ce virus sur son téléphone, c'est mon petit bijou, ma magie spéciale si tu préfères.
L'allusion à la magie fit tressaillir Maxen, soudainement plus nerveux. L'avait-elle percé ? Sa couverture d'homme aux tendances technophobes à la recherche de son beau-frère disparu aurait du tenir même face à la recherche la plus approfondie. Et si elle avait vraiment réussi à le démasquer, jamais un Terrien n'aurait pu savoir qu'il était un sorcier. Après tout, les habitants de cette planète ne connaissaient pas l'Aeternam et encore moins la guerre qui l'agitait. L'accès à l'Animus était à peine entrouvert, suffisant pour permettre la vie mais pas assez pour alimenter des sorts vraiment puissants. Si habituellement Maxen pouvait faire naître des illusions dans l'esprit d'une trentaine de personnes en simultané, ici il s'estimait heureux lorsqu'il arrivait à tromper plus de deux personnes. C'était ces caractéristiques qui faisaient de cette dimension une si bonne planque.
Sentant l'appréhension de son interlocuteur, la jeune femme tenta de comprendre où est-ce qu'elle avait fait une bévue.
- C'était une expression, une façon de parler. Il ne faut pas tout prendre au pied de la lettre, conclut-elle avec un petit rire nerveux.
Maxen ferma les yeux. Bien sûr. Il devait arrêter de toujours penser le pire. Le sorcier prit une profonde respiration et se coula dans son rôle. Lorsqu'il reprit la parole, sa voix charriait toute l'inquiétude d'un homme en quête de son beau-frère disparu et craignant pour sa vie.
- Évidemment. Je suis désolé, je suis un peu anxieux à l'idée de revoir Sorin, j'espère de tout coeur qu'il va bien.
Le détail qu'il passait sous silence c'était que Sorin, lui, serait loin d'être heureux de le voir. Déjà parce qu'il s'appelait en réalité Liviu et ensuite parce qu'il était un vârcolaci, un Inferi proche du vampire. Chose que l'humaine aurait difficilement accepté si il lui avait décrit toute la situation.
Milady lui aurait sans aucun doute proposé un aller simple vers l'asile le plus proche. Ses yeux verts rieurs le fixaient depuis l'étrange objet lumineux, inconscient de ce qui se tramait. La jeune femme, détective de son état, pensait aider pour le mieux deux membres d'une famille à se réconcilier. Maxen était désolé de devoir jouer avec son innocence mais, au moins, rien ne lui arriverait. Contrairement à ses espions ces derniers temps.
Chassant ses idées en s'ébrouant, il se concentra de nouveau sur leur échange.
- Vous allez pouvoir très vite vous réconcilier, il n'est qu'à une vingtaine de mètres de vous, lui répondit-elle avec une sympathie sincère dans la voix. Si j'en crois Google Maps, il s'agit d'un restaurant-hôtel nommé Elilaberarea. Vous avez juste à suivre la rue où vous êtes, vous prenez la première à droite sur encore quelques mètres et vous y êtes.
Le sorcier offrit son visage à la pluie, espérant qu'elle arriverait à le laver de ses remords. Car ce qu'il avait à faire nécessitait un esprit clair et une volonté d'acier. Néanmoins, il prit le temps de remercier la détective.
- Merci beaucoup pour tout ce que vous avez fait. Si nous arrivons à nous réconcilier, ce sera grâce à vous. Merci, infiniment.
Chacun de ses mots, de ses mensonges qui s'échappaient de ses lèvres lui tordaient le cœur. Le ravissement teinté de gêne de sa voix ne fit qu'empirer les choses.
- Ne me remerciez pas avant d'avoir réussi à résoudre votre querelle avec votre beau-frère. Allez-y, dépêchez-vous, sinon vous risquez de le manquer.
Le sorcier ne lui dit pas adieu, bien que l'envie l'en démangeait. Après ce soir, il ne reviendrait plus jamais sur le sol de cette planète mais elle n'avait pas besoin de le savoir.
- Merci de nouveau. La moitié a déjà été versée comme acompte, je vous enverrais le reste sans tarder.
Avec une coquette somme comme bonus et une lettre de remerciement manuscrite. Maxen espéra que cela allègerait sa conscience. Brusquement, il eut une bouffée de haine envers Liviu pour l'avoir placé dans cette situation. Si seulement le vârcolaci avait su se taire... Mais le passé était fait, personne ne pouvait plus le changer. Le sorcier écourta les aux revoirs et, comme indiqué, appuya sur la forme rouge affichée. Une fois fait, l'image de Milady Coulter disparut et l'objet redevint noir. Il le reposa au fond de sa poche de manteau et repartit en direction de l'Elilaberarea.
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Lorsque Maxen arriva enfin au restaurant-hôtel, il était trempé de ses cheveux cacao à ses chaussures sombres. La devanture devait être d'un magnifique vert émeraude habituellement mais la pluie l'avait ternie, faisant ressortir les vitres illuminées qui dévoilaient l'intérieur de l'établissement. Avisant la double porte vitrée, il s'arrêta un instant devant, prit une grande respiration et rentra.
Le bruit de la clochette attira un instant les regards mais les clients retournèrent bien vite à leurs activités. Maxen ne semblait pas assez extraordinaire pour capter l'attention, un talent estimé par tout espion. De plus, la salle principale était saturées par leurs corps détrempés et un de plus ou de moins n'y changeait pas grand chose.
Seul, il s'approcha donc du comptoir. Placé au centre de la pièce lumineuse, c'était un mastodonte fait de bois vernis, aux veines sombres et la place massive. Si cet endroit était un film, alors le sorcier avait sous les yeux le protagoniste et les autres meubles n'en étaient que les personnages secondaires. Les flaques formées par son passage se mêlaient à d'autres, malgré les efforts héroïques d'un serveur agitant avec vigueur une serpillière sur le sol dallé. Le gérant, qui avait tourné sa tête vers lui dès le premier son émis par la clochette, lui servit un sourire affable.
- Que puis-je faire pour vous, monsieur ?
- Je cherche quelqu'un. Peut-être l'avez vous vu, il s'appelle Sorin.
Sa demande éveilla la méfiance du propriétaire.
- En voilà une étrange requête, se contenta t-il de répondre.
Maxen jura intérieurement, regrettant de ne pas être aussi douée que Valentia pour lire dans les esprits. Mais étant avant tout un illusionniste et son accès à l'Animus étant ténu, il se rabattit sur des méthodes plus conventionnelles.
- C'est mon beau-frère et avec ma sœur, on lui a organisé une fête surprise pour son anniversaire. Ce n'est pas tous les jours que l'on a trente ans ! acheva le sorcier avec un sourire réjouis peint sur ses lèvres.
Son apparente félicité sembla rassurer le gérant.
- Trente ans ? Il fait plus jeune, lui répondit-il en lui souriant de retour sans se rendre compte de ce qu'il venait d'avouer.
Piégé.
- Dans sa famille, ils font tous plus jeunes. Si vous voyez son père, on le prendrait pour un étudiant ! ajouta Maxen sur le ton de la boutade afin de camoufler la vérité de ses mots. Est-ce qu'il est déjà parti ou ai-je de la chance ?
- Rassurez-vous, il n'est pas encore descendu. Sorin est monté une heure auparavant et il y a une poignée de minutes, sa nièce a grimpé les escaliers à son tour. Elle, c'est l'inverse ! On dirait qu'elle a son âge, s'esclaffa le viel homme.
Ses mots glacèrent le sang de Maxen. Comment ça une nièce ? Qui d'autre était dans la partie ? Ou alors, était-ce une victime du vârcolaci ? Ce fut automatiquement qu'il demanda :
- Vous pourriez me dire son nom ? Si c'est Auxanne, elle va voir de quel bois je me chauffe si elle trahit la surprise ! Vous savez ce que c'est, elle est toujours pleine de volonté, s'astreint-il de répondre en disant le premier prénom lui passant à l'esprit au lieu de s'élancer à son tour vers l'étage comme lui criait son instinct.
Le gérant s'amusa de sa réaction et ce fut toujours avec bonhomie qu'il lui répondit :
- Non, elle ne m'a pas donné son nom. Par contre, je peux vous la décrire. C'est un joli brin de fille, un peu plus petite que vous et avec des cheveux blonds argentés jusqu'au milieu du dos.
Le sorcier ne voyait absolument pas qui cela pouvait être. Il s'obligea toutefois à grimacer.
- C'est bien Auxanne. Je vais essayer de l'attraper avant qu'elle ne révèle tout, la polissonne. Merci beaucoup, termina t-il alors qu'il était déjà à mi-chemin des escaliers.
Maxen avait déjà grimpé la moitié des marches quand le vieil homme lui souhaita bonne chance. Le sorcier n'en avait que faire, le sang tambourinant à ses oreilles, les jambes propulsées par l'adrénaline. Par tous les Dieux, faites qu'il n'arrive pas trop tard. Le premier étage était verrouillé, réservé au personnel, et jaillit au second étage. La moquette de couleur vive ainsi les battants en bois disposés à intervalle régulier lui indiquèrent qu'il était arrivé. Il passa devant les portes fermées des chambres d'hôtel, guettant un entrebâillement ou des bruits suspects. Mais rien. Frustré par ses sens mortels, Maxen fit appel à ses dons de sorcier pour tenter de repérer un esprit.
- Spiritus, murmura t-il pour lancer le sort.
Sa marque de sorcier lui picota faiblement l'omoplate, prouvant qu'il venait d'utiliser de l'Animus. Cependant, Maxen ne sentait toujours pas l'esprit qu'il voulait. À mesure que les portes vermoulues filaient, l'illusionniste pouvait saisir des impressions s'échappant des clients. Des images de leur vie quotidienne, de ce à quoi ils pensaient, de leurs projets, tout arrivait en même temps et de façon désordonnée. Il serra les dents et se concentra, faisant le tri parmi les pensées.
Un vieillard cacochyme en train de faire son lit, non.
Deux enfants avec leur père prévoyant d'acheter des confiseries, toujours pas.
Un étudiant Erasmus triant ses photos de voyages, pas plus.
Une jeune femme ayant des envies meurtrières.
Il s'arrêta net en sentant cet esprit. Les pensées étaient sombres, alimentées par une envie de vengeance tenace. Mais il n'était pas assez doué en télépathie pour creuser plus profondément, le sorcier s'élança donc vers la porte et l'ouvrit d'un geste brusque. Maxen se rua dans la chambre, ses sens aux abois. Mais les ténèbres feutrées cachaient bien leurs secrets. Cependant, si et là, gisaient des éclats de verre et des débris de bois, témoins silencieux d'une lutte effrénée. Seule la fenêtre entrouverte créait une pâle tache de lumière sur le sol. Le fracas incessant de la pluie ne parvenait pas à masquer le bruit de la cavalcade sur les toits de Liviu et de la mystérieuse inconnue. L'illusionniste, essoufflé, regretta sa condition de mortel. Cependant, il était impératif que l'Empire Pandémoniaque n'apprenne pas les secrets enfermés dans le cerveau du vârcolaci. Serrant les dents, il enjamba à son tour la fenêtre.
Maxen fut instantanément trempé, le froid pénétrant ses maigres habits qui avaient miraculeusement réussi à rester secs jusqu'à là. Il s'obligea à se mettre en mouvement, ne voulant pas prendre encore plus de retard. Sa vision, obstruée par les trombes d'eau, apercevait deux formes floues courir devant lui. Le sorcier s'élança à son tour à leur poursuite, glissant sur les tuiles d'ardoise. Autour de lui défilait le paysage d'une Bucarest brouillée par la pluie, à peine agitée par le son de klaxons égarés. Nul n'apercevait les trois silhouettes sombres courant sur les toits. Plusieurs fois, l'illusionniste manqua de se rompre le cou pourtant, il n'arrivait pas à rattraper son retard. Aveuglé, il avisa cependant une corniche lui permettant de raccourcir le chemin. Maxen s'avança vers le bord, hésita une fraction de seconde puis adressa une courte prière aux Dieux avant de prendre son élan.
Durant un court instant, il vola. Aucune pensée n'encombrait son esprit, seule subsistait l'ivresse de l'adrénaline, pimentée d'effroi. Sous lui, le sol. Au dessus de lui, la liberté. Puis vint le temps de l'atterrissage.
Le sorcier attrapa le bord d'une gouttière de ses mains et heurta violemment le mur opposé. D'un grognement, il accusa le choc qui se répercuta dans tout son corps et manqua de lui faire lâcher le rebord salvateur. Maintenu par ses prises précaires, ses jambes pendaient dangereusement dans le vide. Maxen décida de ne pas penser à ce qu'il lui arriverait si jamais il chutait. Il ne chuterait pas se promit-il intérieurement en serrant les dents d'obstination. L'illusionniste tenta de se hisser sur les toits à la force de ses bras mais son lourd manteau de cuir trempé le lestait. Ayant parfaitement conscience de chaque seconde perdue, il lâcha un bras.
Et vacilla. Il retint son souffle, animé par le vain espoir que cela allait l'aider à se stabiliser. Tout son corps uniquement retenu par un bras, il attendit que ses tremblements cessent.Dès que Maxen eut l'impression d'être presque stabilisé, il retira précautionneusement une manche de manteau. Une fois fait, le sorcier se hissa d'un bras, crissant des dents pour oublier la souffrance qui courait le long de son bras et de son corps. Penser à la douleur, c'était lui donnait de l'importance. Après avoir réussi à transférer son poids, il put ôter sa deuxième manche et son manteau chuta sans bruit sur le bitume neuf mètres en dessous de lui. Il déglutit. Puis chassa la crainte de tomber de son esprit et tenta de hausser le haut de son corps. Et il y parvint. Lorsque son torse cogna les ardoises du toit, Maxen exhala tout l'air contenu dans ses poumons et s'effondra. Pendant un court instant, il se consacra à récupérer son souffle. Puis, niant ses bras tremblants et ses jambes vacillantes, le sorcier se releva et fouilla du regard les toits, cherchant deux silhouettes sombres à travers les trombes d'eau.
L'illusionniste avait rattrapé son retard, il n'était plus qu'à une poignée de mètres d'eux. Maintenant, il lui fallait courir. Maxen n'était pas sûr d'avoir assez de force pour soutenir ses jambes mais ce n'était pas la peine. Sa volonté suffirait. Alors il s'élança de nouveau, indifférent à tout excepté son but.
Désormais, le sorcier pouvait distinguer les traits des deux combattants. Les cheveux écarlates de Liviu tranchait sur le paysage assombri par la pluie tandis que la femme qui venait de lui entailler la joue avait une longue chevelure pâle plaquée par l'humidité. Mais les deux avaient en commun un regard gris, couleur acier, et une obstination farouche ancrée dans le regard. Leurs couteaux virevoltaient dans la nuit, leurs possesseurs esquissant les pas d'une danse mortelle. Cependant, le maître espion en lui pouvait clairement voir qu'en dépit de la fougue de la plus jeune, c'était le vârcolaci qui menait le combat. Le toit ruisselant était le seul obstacle à sa victoire, l'empêchant d'user pleinement de sa vitesse d'Immortel. Maxen n'était plus qu'à trois mètres d'eux lorsque, lassé par la rixe, Liviu se décida à utiliser ses pouvoirs.
Le vârcolaci repoussa les attaques de la jeune femme d'une main et leva l'autre pour s'exclamer de sa voix rauque :
- Tăiş din oţel !
Maxen hurla un avertissement à l'étrangère mais il était trop tard. Une brève lumière avait éclairé la bague de Liviu, indiquant qu'il venait d'utiliser son catalyseur de mage. Aussitôt l'acier des poignards de l'inconnue se retourna contre elle, explosant en milliers de fragments acérés soumis au contrôle du vârcolaci. Ce dernier esquissa un petit rictus satisfait et murmura simplement :
- Pedeapsă cu moartea.
Maxen tenta d'insuffler une illusion dans son esprit mais en pure perte. La jeune femme était trop proche pour pouvoir le tromper et le sorcier ne put que contempler, impuissant, la nuée argentée trancher la chair de l'inconnue en une infinité de morceaux. Sauf que les fragments métalliques ne l'atteignirent pas, ils la traversèrent. Ébahi, l'illusionniste du se retenir de se pincer pour vérifier si il ne dormait pas. Mais non, c'était bien réel. La jeune femme s'était dématérialisée, adoptant une forme de ténèbres presque tangible. Comprenant que le combat n'était finalement pas encore achevé, le vârcolaci crispa sa mâchoire et raffermi sa prise sur ses armes. Mais Maxen choisit ce moment pour intervenir, profitant du manque d'attention des deux combattants pour se glisser derrière Liviu. Il consomma une infime partie d'Animus pour lui faire paraître les ténèbres plus obscures afin de camoufler son déplacement, si bien que le vârcolaci ne se rendit compte de sa présence que lorsque sa lame embrassa sa gorge.
- Alors, surpris ? déclara froidement le maître sorcier.
Le vârcolaci, à son crédit, ne sursauta pas.
- Pas vraiment, les troubles-fête se déplacent toujours en bande.
L'inconnue perdit sa forme d'obscurité mouvante et s'incarna. Entre-temps, elle avait décroché une longue arbalète de son dos, la tenant d'une main mais sans carreau engagé.
- Ne m'associe pas à lui, moi, je veux juste te tuer, répliqua t-elle sèchement.
Le sorcier sentit la tête de Liviu se soulever alors que ce dernier levait les yeux au ciel. Il raffermit sa prise sur la poignée glissante de sa lame, rappelant à son adversaire que sa vie ne tenait qu'à un geste. La jeune femme, quant à elle, fit un pas vers eux, un air méfiant crispant son visage.
- Il est à moi. Je l'ai traqué à travers quatre pays, je ne vais pas laisser le premier venu me gâcher ma vengeance, lui annonça t-elle en désignant Liviu. C'est le seul moyen de m'assurer qu'il ne versera plus le sang d'innocent.
Quatre pays ? L'inconnue se disait prioritaire pour si peu ? Cependant l'illusionniste fut intrigué par la fêlure dans sa voix en évoquant ses raisons. Elles étaient personnelles, peut-être trop. Le vârcolaci aurait-il tué un membre de sa famille ?
- Pour l'avoir poursuivi à travers plusieurs dimensions, excusez-moi de ne pas être d'accord, l'avertit néanmoins Maxen.
La jeune femme le fixa de ses yeux gris pénétrant, interloquée. Ses cheveux plaqués contre son crâne par la pluie la faisait paraître plus petite, lui donnant une apparence évoquant plus une jeune innocente qu'un assassin sans cœur. Mais
- Parce qu'il n'y a pas qu'une seule dimension, en plus ?
Le sorcier se raidit, surpris par son aveu inconscient. C'était une habitante de cette dimension pauvre en Animus mais tout de même capable de se dématérialiser de façon spontanée, capacité ô combien dure à acquérir et encore plus à posséder. Et, à en croire son visage n'affichant qu'une expression à peine étonnée, cela ne lui était pas inhabituel. Maxen ressentit son sang charrier de la glace alors qu'il prenait peu à peu conscience des conséquences de sa déclaration. Ses pouvoirs devaient être monstrueux dans une dimension avec un meilleur accès à l'Animus. Tomber ainsi sur une Immortelle, avec un grand potentiel de capacités spontanées et ne connaissant rien à l'Aeternam... Le vârcolaci comprit le cheminement de ses pensées.
- Et bien, on dirait que tu m'as trouvé une remplaçante. En voilà une pensée qui me rassurera pendant ma torture, souffla cyniquement Liviu.
Maxen se ressaisit, brutalement rappelé à ses obligations. Sa mâchoire se durcit.
- Sois en sûr, elle ne suffira pas à adoucir ta douleur. Tu es la cause de trop de morts pour cela.
Des souvenirs, trop douloureux pour être évoqués à haute voix, flottèrent entre eux.
- Non pas que je veuille interrompre votre petit intermède, mais en fait si. Je n'ai pas donné mon accord pour que vous partiez avec ma cible à ce que je sache, ni pour être la remplaçante de qui que ce soit, les coupa la jeune femme. Donc voilà ce qui va se passer.
Elle nous dévisagea en levant le sourcil droit, nous défiant de l'interrompre.
- Un, je vais planter un carreau entre ses deux yeux. Deux, je partirais afin de rentrer chez moi, loin de cette satanée pluie. Trois, vous ferez ce que vous voudrez avec le cadavre, après tout, ce n'est pas mes affaires.
Le vârcolaci s'étouffa de rire.
- Tu vas en avoir du travail avec celle-là ! Remarque, je suis pour son plan si tu t'éclipses aussi, ajouta t-il avec un rictus goguenard.
Alors que le sorcier se préparait à répliquer, un doute envahi son esprit. Liviu était beaucoup trop détendu pour quelqu'un étant sur le point de rencontrer la Grande Faucheuse, particulièrement si cette rencontre était précédée d'une souffrance inimaginable. Méfiant, il commença à inspecter les alentours, à la recherche du signe avant-coureur d'un combat. Mais l'averse l'empêchait de bien y voir et, ayant empirée, étouffait aussi les bruits lointains de plus de trois mètres. Le sentant sur ses gardes, l'inconnue observa à son tour les environs, sa posture soudainement plus vive. Leur cible sentit l'humeur de ses opposants s'altérer et son comportement changea en conséquence.
- Écoute Maxen, on n'est pas obligé d'en finir comme ça. Au fond, t'es juste un type un peu trop moral qui a choisi le mauvais camp. Tu peux encore partir avec ta copine et on s'arrêtera là. Ne meurs pas inutilement, lâcha le vârcolaci beaucoup trop sérieux.
Pressentant qu'une menace allait lui fondre dessus d'ici très peu de temps, Maxen ne céda pas à la tentation de le dévisager. Néanmoins, il appuya plus fort sa lame contre la gorge de Liviu alors qu'il commençait à le déplacer pour en faire un bouclier humain, tout en lui assénant une réplique abrupte.
- Je le dirai aux familles des douze infiltrés que tu as trahis. Tu étais trop haut placé dans la hiérarchie pour que je te laisse t'échapper et tu le sais aussi bien que moi. Quant à mes choix, je les réévaluerais lorsque je serai dans la même situation que toi : une lame contre la gorge et des heures de souffrance comme unique avenir.
Entre-temps, il avait réussi à les placer tous deux plus en hauteur sur le toit d'ardoise. La jeune femme, comprenant instinctivement son ébauche de plan, se plaqua derrière son dos, son arbalète en tension. L'illusionniste expira avec précaution. L'adrénaline réchauffa superficiellement ses membres transis par le froid. Leurs respirations semblaient résonner autour d'eux, se mêlant, s'amplifiant et s'accordant jusqu'à ce qu'il ne puisse plus les distinguer les unes des autres. Le sorcier se calma, jugulant sa tension pour atteindre cet état de concentration acérée. Rien ne lui échappait, il sentait aussi bien le tissu mouillé se tendre contre sa peau à chaque inspiration que le léger tremblement de ses jambes éreintées. Conscient du risque prit, Maxen utilisa une maigre portion de l'Animus qui lui restait pour tenter de sentir les esprits de leurs agresseurs et activa le sort en murmurant le mot associé. Mais rien ne venait troubler son esprit, ni la volonté brute de la jeune femme derrière lui, ni les pensées tranquilles de Liviu et encore moins de réflexions parasites provenant de leurs adversaires. Cependant, le vârcolaci brisa ce silence.
- Avant que tout soit fini, dis moi... dis moi pourquoi tu es venu personnellement. Et ne me dis pas que le meneur d'Alenta n'avait plus d'assassins en réserve, je ne te croirais pas, lui demanda Liviu comme un condamné à mort sa dernière cigarette.
- Pour que tu te moques de moi ? Non merci, répliqua sèchement le sorcier en continuant de guetter le moindre changement.
- S'il te plaît.
L'inconnue eut la délicatesse de ne pas intervenir dans leur échange. La supplique du vârcolaci s'évanouit doucement dans l'air. Seul le bruissement de la pluie brisait le silence de la ville endormie.
- Car, même si tu nous a trahis, tu restes un des miens. Et jamais je ne laisserai un autre que moi vous abattre, lui dévoila la voix rauque de Maxen, à contrecœur.
Sa réponse flotta entre eux, chargée des remords et des non-dits de l'illusionniste. La charge de maître-espion pesait lourd sur ses épaules mais il s'y cramponnait avec tous les vestiges de son honneur, aussi stupide que cela soit. Le rire léger de Liviu fendilla l'atmosphère lourde comme pour laisser entrevoir un autre lieu, plus paisible, plus heureux aussi.
- J'avais raison, dit le vârcolaci avec une tendresse manifeste dans la voix. Tu es trop honorable pour cette époque.
Alors que le sorcier ouvrait la bouche pour protester avec vigueur, Liviu acheva sa tirade.
- Désolé.
Et il se jeta sur la lame, plaquant les bras de Maxen contre son corps pour l'empêcher de retirer son arme. L'inconnue, surprise, se retourna juste à temps pour apercevoir le sang gicler de la gorge du vârcolaci et ce dernier s'effondrer sur l'illusionniste. Et ce fut le moment où les djinns embusqués les attaquèrent.
C'était une race de démons liée aux éléments extrêmement puissante. Leur peau tannée par le soleil dénotait dans cette atmosphère pluvieuse, tout comme leurs longues cornes torsadées dans ce milieu urbain. À leur visages fermé et leur accoutrement guerrier, le sorcier comprit pourquoi il n'avait pas senti leurs pensées avant, les djinns avaient sans aucun doute suivit un entraînement de vide mental, parfait pour contrer les pouvoirs psychiques. Ils étaient trois, trois de trop au goût de Maxen. Malgré la pluie, il aperçut les ailes dans le dos de deux d'entre eux. Des sylphes. L'illusionniste jura. Il n'y avait rien de pire que de devoir affronter des êtres volants lorsque l'on était cloué au sol. Il se dégagea du corps de Liviu et dégaina de sa main droite le katar encore miraculeusement accroché à sa cuisse malgré sa chute. C'était un poignard doté d'une lame triangulaire et qui se maniait grâce à une poignée fixée perpendiculairement à la garde, permettant de transpercer l'adversaire avec facilité.
- Une préférence ? Je ne voudrais pas vous voler votre cible une deuxième fois, le questionna la jeune femme sarcastique.
Son trait d'esprit lui arracha un maigre sourire.
- Visez celui que vous voulez, ils sont tout à vous, arriva t-il néanmoins à répondre.
- Quelle chance ! s'écria t-elle, moqueuse, avant de lever son arbalète et de décocher un carreau vers le sylphe le plus proche d'eux.
Le trait transperça son aile et le cloua aux tuiles d'ardoise du toit. Le djinn grogna puis tira dessus pour la dégager. Mais trop tard, l'inconnue en avait déjà décoché un deuxième dans son autre aile. Maxen fronça les sourcils. Pour que cela ait lieu si rapidement, elle devait utiliser une double arbalète. Mais les deux autres djinns se rapprochèrent de lui et il eut d'autres problèmes plus immédiat. Par réflexe, le sorcier leva son poignard pour protéger sa tête alors que le djinn sans ailes portait un coup puissant vers sa gorge avec son cimeterre. Maudissant sa faiblesse, Maxen riposta d'un coup de katar vers ses côtes. Tenta de riposter. Car le deuxième sylphe venait d'intervenir, arrachant le poignard de l'illusionniste avant de lui asséner un puissant coup de pied dans l'abdomen. Le souffle coupé par l'impact, le sorcier fut propulsé contre le dos de l'arbalétrière. Déséquilibrée, elle grogna en accusant le choc.
- Déjà que ces bestioles ne veulent pas mourir même avec un carreau dans le front, vous n'allez pas vous y mettre aussi ! s'écria l'inconnue en rechargeant son arme.
Maxen, évitant de justesse un autre coup de pied, arriva avec difficulté à crachoter une réponse :
- Vise... le cœur.
Puis il attrapa le bras de son sylphe et tira dessus, le déstabilisant. Profitant du minuscule avantage qu'il venait d'acquérir, son katar fusa vers la gorge laissée à découvert. Maxen sentit sa lame se ficher dans la chair et, poussé par son instinct de survie, mit toutes ses dernières forces dans un ultime coup. Faisant un quart de tour sur lui-même pour y ajouter de la puissance, le sorcier trancha la tête du sylphe. Mais sa réjouissance fut de courte durée, le dernier djinn l'assomma avec la garde de son propre poignard dans son dos tandis que simultanément l'inconnue hurlait un "enfin" retentissant. Terrassé par la douleur, Maxen sentit ses genoux s'effondrer sous lui. Il eut vaguement conscience du déplacement du démon derrière lui et le sentit lui tirer les cheveux pour exposer son visage à la lumière. Aveuglé par la pluie, le sorcier ne distingua que quelques uns des traits de son agresseur. Une fois assuré de son identité, le djinn l'attrapa par le col de sa chemise et commença à le trainer vers le bord du toit. Le djinn s'apprêtait à l'emporter lorsqu'il tressauta subitement.
- Le deuxième ne ratera pas votre cœur, déclara avec une voix assurée l'inconnue. Éloignez-vous de l'homme.
Le démon pesta face à cette opposition inattendue puis fit apparaître une minuscule flammèche au creux de ses mains pour se purger du problème. La jeune femme considéra que c'était une tentative d'agression et un trait sombre fusa de son arbalète en réponse. Le carreau percuta le djinn en pleine poitrine. Le démon hoqueta de douleur, recula d'un pas sous le choc et bascula dans le vide. Libéré de cette menace, Maxen put enfin laisser errer son esprit. La pluie ne lui semblait plus si forte, elle lui évoquait plus une bruine. Chacune des gouttes était une caresse rafraîchissante sur sa chair malmenée. Son corps lui faisait mal, pourtant il s'en sentait curieusement détaché. Son esprit reconnaissait les sensations mais avec un délai, comme si elles étaient l'écho de la réalité. Néanmoins Maxen perçut une présence à ses côtés et graduellement, récupéra ses sens. Il sentit les pâles cheveux de l'inconnue effleurer son visage puis vit son visage, flou. Ses doigts glacés l'obligèrent à écarquiller les yeux alors qu'elle inspectait ses pupilles.
- C'est bon, vous n'avez pas de traumatisme crânien, dit-elle avec un soulagement manifeste dans la voix.
Le sorcier esquissa un faible sourire. Son crâne était le moindre de ses maux actuellement. Il avait failli à sa mission et venait de manquer de se faire enlever par l'Empire Pandémoniaque. Néanmoins, il s'obligea à articuler un remerciement.
- Merci de m'avoir défendu.
Sa vision revenant peu à peu, il vit la réplique de son sourire se former sur le visage de la jeune femme.
- Mais de rien, c'est normal.
Sa réponse le fit tiquer et le poussa à lui poser une question.
- Justement... pourquoi m'avoir sauvé la vie ? Votre cible gisait, morte, à quelques mètres de vous et les djinns ne vous menaciez plus. Vous n'aviez aucune raison de me défendre, au contraire.
Le silence les enveloppa tous les deux tandis qu'elle détourna le regard pour contempler la ville entre contrebas, embarrassée. Maxen en profita pour se redresser, avec précaution. Il s'assit à ses côtés, observant à son tour Bucarest de nuit.
- Sur le moment, cela m'a parut... naturel. Je ne trouvais pas juste que vous mourriez pour avoir voulu assumer vos responsabilités jusqu'à la fin.
- Mais j'allais tout de même le tuer.
La jeune femme haussa les épaules, fuyant toujours ses yeux.
- J'ai dit que cela m'avait paru naturel, pas que c'était logique. Cependant, si il le fallait, je le referais sans hésitation.
Sa déclaration brisa le cœur de Maxen. Elle aussi était trop vertueuse pour cette époque, pour ce qu'il avait à accomplir. Sa morale était différente, si lui se cramponnait à l'honneur, elle, défendait la justice. Au bord d'un toit, les cheveux trempés et ses vêtements plaqués contre sa fine silhouette, elle n'en paraissait que plus fragile. La jeune femme évoquait une poupée de porcelaine avec son teint encore plus pâle que sa chevelure. Cette impression était réfutée par son regard d'acier, révélant l'obstination farouche qui l'animait. Maxen était fasciné par ce paradoxe qui respirait à côté de lui. Une Immortelle perdue dans un monde de mortel, dansant entre morale personnelle et crimes éhontés. Pas une fois sa main n'avait faibli lorsqu'elle avait tiré. Il se fit une promesse. Peut-être allait-il l'entraîner dans son monde, mais il ferait en sorte qu'elle n'ait jamais à renoncer à ses convictions, contrairement à lui. Car c'était cela qui les différenciait. Cela faisait longtemps que Maxen avait oublié pour quoi il se battait et qu'il ne retenait la folie que grâce à sa morale. Mais elle, même si elle n'en avait pas conscience, était guidée par son sens de la justice. Et il ferait tout pour lui épargner les désillusions qu'il avait vécu, la protéger de devenir désabusée. Cela ne rendit pas son hypocrisie plus facile à articuler.
- Quel qu'en soit la raison, je suis heureux de votre choix. Je suis votre débiteur, et un Immortel ne laisse jamais une dette impayée, arriva t-il à déclarer presque naturellement.
Le sorcier lui prit la main avec délicatesse puis toucha la partie interne de son poignet.
- Admonuit me, chuchota t-il en faisant apparaître sa marque de mage personnelle sur le bras de l'inconnue. Si jamais tu as le moindre problème, il te suffira d'effleurer ton poignet en prononçant mon nom. J'accouerais aussi vite que possible.
Il émit un petit rire jaune. D'un doigt, il traça paresseusement sa marque, la voyant déjà s'affadir sur la peau de la jeune femme.
- Je sais que cela ne te semble pas être grand chose mais crois-moi, je peux faire la différence. Si tu es en danger, quel qu'il soit et même si il te semble insurmontable, surtout n'hésite pas.
- Mais je ne connais pas ton nom, objecta t-elle.
Un pâle sourire fleurit sur ses lèvres.
- Maxen. Mon nom complet est Maxenuirin Ellal Calas de Rodkael.
Il ne lui demanda pas le sien, ne voulant pas lui arracher cette liberté. Sa méconnaissance de l'Aeternam, où les mots sont synonymes de pouvoir, ne lui fit pas apprécier le trésor de son véritable nom. Elle le découvrirait bien assez tôt. La jeune femme sembla peser le pour et le contre de sa proposition, un air méfiant sur le visage. Puis, lentement, le doute s'effaça pour laisser la place à une timide confiance. Oh, folle, douce enfant. Comment pouvait-on afficher un tel cynisme et accorder sa confiance si facilement ? Cela ne faisait qu'ajouter à sa complexité. Maxen n'en voulait que plus la chérir, la préserver de la violence de l'Aeternam. Mais il ne pouvait pas. Le sorcier ferma les yeux. Il pouvait presque sentir les chaînes de ses devoirs l'en retenir. Alors il fit la seule chose qu'il pouvait. Passant son bras sur ses épaules, l'illusionniste la serra contre lui, ne sachant si il cherchait à la consoler des épreuves à venir ou oublier le remord, son fidèle ami. La jeune femme se raidit d'abord puis accepta son étreinte et ils contemplèrent ainsi les lumières de la ville, tête contre tête. Ses respirations se firent plus profondes, leur enlacement chassant le froid s'attardant dans leur chair. Maxen sentit la tête de l'inconnue s'affaisser sur son épaule puis la tension quitter son corps.
Une fois que le sorcier se fut assuré qu'elle dormait, il l'adossa délicatement à un rebord du toit. Elle remua ses paupières tandis qu'il l'a déplaçait et demanda de sa voix ensommeillée :
- N'oublie pas mon arbalète.
Sa demande l'amusa et il obtempéra, plaçant sa fidèle arme juste à portée de main. Il voulut y ajouter ses carreaux mais il se rendit compte qu'il était incapable d'en trouver un seul, même sur les cadavres des djinns. Le sorcier fronça les sourcils. Ce détail lui avait échappé lors du combat. Cependant, le corps étendu de Liviu le ramena à des préoccupations plus immédiates.
Il s'en approcha et lui lia les mains et les bras. Ce que l'endormie à quelques pas de lui ne savait pas, c'était que la blessure du vârcolaci n'était pas mortelle. Le sorcier n'en avait pas été sûr mais un rapide examen avait confirmé son intuition. Le cou de Liviu avait déjà commencé à cicatriser, bien que plus lentement du à la faible connexion de cette dimension avec l'Animus. Les djinns, eux, ne se réveilleraient pas car ils avaient été correctement exécutés. Seules trois façons empêchaient un Immortel de régénérer, la décapitation, la combustion et percer son cœur. Après, la régénération dépendait de la puissance du blessé, de son accès à l'Animus et de l'Animus en général. Ayant achevé de ligoter le vârcolaci, Maxen adressa un dernier regard à la jeune femme endormie, espérant, bien qu'il ne sache pas exactement quoi. Puis il se cacha de nouveau derrière son masque de maître-espion, d'apparence incassable. Il était pour lui d'accomplir sa tâche. Liviu avait révélé des secrets de l'ACE à l'Empire Pandémoniaque et le sorcier n'avait qu'une seule façon de s'assurer de l'ampleur de la fuite. Dommage qu'il haïsse ça.
Mais ses sentiments n'avaient jamais compté, seul le devoir primait.
Comme il en avait toujours été.
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Hey !
Alors content ? Ce (petit) OS fait la bagatelle de 6500 mots donc au moins vous en avez eu pour votre argent (inexistant x) ) :p
Vu que j'aime bien faire tout d'un coup, il s'agit en plus d'un OS (de chien, désolée pour la blague >w<) d'une réponse au tag de la merveilleuse MiladyCoulter. J'en profite pour vous enjoindre de jeter un oeil sur ses fictions, elle le mérite grandement ^^ (bon, après vous le récupérez, parce que c'est plus pratique d'en avoir deux pour voir x) #blaguegore (j'enchaîne les blagues pourries aujourd'hui ._.)
Le défi était de placer un personnage avec son nom dans une historiette distincte de l'histoire principale mais dans le même univers. J'ai donc sauté sur l'occasion ^.^. Donc, comme ça le sort des condamnés sera fixé, Chocapic_Girl, Jennifael100000, LimwynAralith je vous tag :3. Pourquoi ? Parce que j'adore lire vos commentaires, vous êtes adorables (#marshmallow et #dragon x) ) et que je suis méchante. Votre défi, si vous l'acceptez (je suis sympa, je laisse le choix xD), est d'écrire une scène fantastique avec pour thème le mot.... bocal (oui, premier mot dans un dico et non, cette fois ce n'était pas perpendiculaire x) #privatejoke x) ). Je suis impatiente de lire vos créations :D
Comme vous l'avez sans doute compris, il se déroule avant les évènements narrés dans Umbra et relate la première rencontre entre Maxen et la Ténébreuse. Cependant, il développe un peu plus Maxen (parce que niveau psychologie, c'était pas fou fou x) ) mais ce chap' n'aura pas d'influence sur le reste de l'histoire (bah oui, on suit les aventures de la Ténébreuse et donc ce que vit la Ténébreuse, pas les autres x) ). De plus, j'ai tenu à l'écrire à la troisième personne et du pdv de Maxen, ce que je trouve plus logique que la première personne pour ce perso ('me demandait pas pourquoi, je vais avoir du mal à plus m'expliquer x) ). Tout n'est pas expliqué, j'ai volontairement laissé des zones d'ombre car sinon ça vous aurait spoil la suite de l'histoire donc c'est normal, ne vous inquiétez pas ^^. J'espère néanmoins que cet OS ne vous aura pas déçu, même si il y a moins d'humour que d'habitude (Maxen a une personnalité plus "sombre" (oui c'est ironique x) ) que la Ténébreuse ) et que vous avez trouvé les péripéties intéressantes. N'hésitez pas à me communiquer vos retours, j'avoue ne pas être habituée à l'exercice des OS ^^''
Bref, en espérant que la lecture fut agréable et vous satisfera d'ici deux semaines (c'est dans trooooooooooop longtemps :'( )
Chocolat ♥
Kelewana
P.S. : Le nom du chapitre est en référence à la chanson d'Imagine Dragons, je trouve que les paroles collent pas mal avec la personnalité/histoire de Maxen ^^
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