La lune brillait au-dessus de la mer qui s'écrasait en lourdes vagues violentes sur le sable gris. Une mouette criaillait dans le lointain, comme un présage incongru.

Puis son cri s'intensifia. Et soudain, il se tut.

Une longue silhouette traversa alors la plage en pataugeant jusqu'aux chevilles. L'ombre traînait avec elle le volatile au cou brisé, dont les pattes traçaient un sillon plus clair dans l'eau sombre, bien vite avalé par la mer, allégorie étrange de notre vie terrestre éphémère engloutie par l'océan de la mort.

L'ombre se hissa dans la barque qui mouillait là et balança sans le moindre scrupule ce qui avait été un fier oiseau marin dans un coin de l'embarcation. Elle prit les rames. L'esquif se tailla un chemin parmi les lames haineuses, vers l'horizon.

Sortie de L'OMBRE.

*

La lune brillait au-dessus des toits, gibbeuse et ardente, trop pâle disque presque rond dans la nuit immense. L'ombre rentrait chez elle, traversant la ville endormie par les ruelles les plus étroites, les plus sombres, les moins famées. Les embruns s'infiltraient partout, pénétrant dans le col de sa veste, ébouriffant les plumes de la dépouille de la mouette, agitant les draps que quelqu'un avait oublié dehors ce soir.

La petite cité portuaire était calme, presque trop, comme le silence lourd qui avait régné quand la mouette s'était tue. Un chat de gouttière feulait dans une venelle voisine, mais c'était tout : rien ni personne pour troubler la quiétude nocturne.

L'ombre poussa la porte d'une baraque à moitié en ruine. La poignée lui resta dans les mains. Elle poussa le battant de l'épaule, soulevant un nuage de poussière accumulée. La lampe à pétrole éclaira d'une lumière à peine plus chaude que celle de la lune une pièce presque vide, comme abandonnée depuis des années.

L'ombre fit courir la lumière tremblotante dans toute la maison, mais tout était désolé,  vide, inerte. Elle traversa la ville, mais même le chat n'était plus là, et en quelque lieu où elle entrait tout n'était que poussière et silence.

Sortie de L'OMBRE.

*

La lune brillait au-dessus de la mer et projetait sa lueur malsaine sur ce monde solitaire. Une ombre se tenait là, les pieds dans le sable, les yeux dans le vague, la carcasse d'un oiseau à la main.

L'ombre s'en était allée de chez elle, et entretemps le monde avait eu le temps de mourir.

Sortie de L'OMBRE.

***

Nouvelle écrite dans le cadre du premier concours "Mettez votre plume à l'épreuve" de Lanying480

(d'ailleurs, désolée pour la mise en page, mais Wattpad ne veut pas aligner les trois "Sortie de L'OMBRE" à droite, c'pas d'ma faute ^^')