Les marins aimaient la nuit raconter aux jeunes mousses la légende du holy spirit. C'était un vieux bateau, on avait oublié depuis combien de temps il naviguait. Le navire avait été maudit. Chaque équipage, si ce n'est chaque marin, invoquait une raison différente pour cette malédiction : trésor maudit, cannibalisme durant une longue traversée où les réserves manquaient, prêtre jeté par-dessus bord, mutinerie sanglante. Toujours est-il que ce bateau voguait depuis des siècles avec à son bord les mêmes âmes. On ne pouvait les apercevoir que de nuit, des spectres repoussants aux regards fous, aux doigts crochus, à la silhouette décharnés.

Voir le bateau était un mauvais présage. Quand on le croisait en mer cela signifiait qu'une tempête viendrait droit sur nous. Car après tout ce maudit navire n'était-il pas suivi par une tempête à chaque instant ? Si vous le croisiez au port, car il venait à s'arrimer parfois, tous les 7 ans, ou tous les 99 ans dans le même port, c'était présage de mort pour les navires à quai à ce moment-là, les prochains marins à monter dedans ne reverraient plus jamais les leurs.

Mais pire encore était de voir l'équipage.

Cela n'arrivait que de nuit. Ou que par pleine lune selon d'autres histoires. Mais tous étaient d'accord sur un point : après tant d'années de navigation, tant d'année de malédiction, personne ne pouvait vaincre ces marins-là. Et ils étaient fous ces hommes. Ils pensaient, à raison peut-être que pour se libérer ils devaient tuer un autre marin qui prendrait leur place. En tout cas si vous aperceviez l'équipage s'en était fini de vous. Leur vaisseau attaquera le vôtre. Dans leur folie les spectres tueront jusqu'au dernier chaque marin qu'ils trouveraient et le vaisseau repartirait avec de nouveaux membres ne laissant derrière lui qu'un bateau désert se laissant porter au grès du vent et des familles épleurées à jamais sans réponses.