F...(2)

Après plusieurs changements, voilà la version finale :

J'ai toujours rêvé d'être actrice. Dès mes cinq ans, je criais haut et fort que c'était ma destinée, alors que les autres petites filles chantonnaient qu'elles seraient princesses.

Les jeux d'imitation et les singeries ont remplis mon enfance enjouée. J'étais une fillette éveillée, malicieuse, et parfois désobéissante, mais jamais rien de bien grave.

Dans mon adolescence, je prenais soin de mon corps, après avoir cultivé mon esprit, et cultivais le style gothique durant cinq ans, style qui énervait ma mère.

Au fond, c'était une autre façon d'oublier pour un instant que j'étais moi, et tout ce que cela impliquait.

Parfois, j'en avais juste marre d'être sage. D'être cultivée. D'être timide. D'être gentille.

J'avais envie de tout flanquer par terre, de hurler à pleins poumons, de frapper, de crier, de ne jamais me calmer.

C'est comme ça que je me suis retrouvée pour la première fois dans une troupe de théâtre.

La professeure nous a appris les trucs de bases comme la respiration par le ventre, comment se placer sur scène... Puis nous avons commencé les textes.

J'ai été Desdémone, Bérénice, Juliette, et une foule d'autres personnages, parfois drôles, parfois touchants, souvent insignifiants, qui me faisaient partir ailleurs.

J'ai oublié qui j'étais, et j'ai appris à être quelqu'un d'autre.

En sortant de là, je n'enlevais pas mon masque et gardais ma couverture confortable de comédienne. Je jouais avec ma famille, mes amies, mes professeurs...

Je changeais de personnages aussi rapidement que de chemise. Je n'étais jamais moi-même. Je m'étais perdue au milieu de tout ce fouillis. Cette foule de personnes, de caractères et de personnalités me convenaient parfaitement.

Je n'étais plus personne.

Alors je me suis mise à chercher un travail, et j'ai été prise dans un film à succès, où je faisais la grosse infirmière débile qui disait simplement "Oh ! Du sang !".

J'avais déjà passé la case " figurante " en ayant fait du théâtre. C'était un soulagement.

J'ai fait mon rôle à merveille, tombant facilement dans les pommes grâce aux gros coussins entourant mon corps.

Personne ne s'est rappelé de moi, mais moi, je me rappelerais toute ma vie de mon rôle.

J'ai enchainé toute ma vie des personnages insignifiants, sans jamais percer. Je n'avais aucune relation dans le monde du cinéma, et mon maigre revenu peinait à me suffire.

Mais j'étais heureuse. N'était-ce pas le principal ?

Tout marchait à la perfection pur moi. Je rêvais un rêve éveillée, oubliant parfois de dormir pour pouvoir me remémorer les textes de mon adolescence.

Je criais comme Harpagon dans L'Avare "je me meurs, je suis mort, je suis enterré" jusqu'à ce que mes voisins décident de me faire taire avec des coups de poings dans le plafond.

Je hurlais "Oh Roméo ! Roméo ! Pourquoi es-tu Roméo ?" jusqu'à perdre mon souffle.

Je chuchotais "Mes péchés sont l'amour que je vous porte" d'une petite voix avant de mourir quelques lignes plus loin.

Je murmurais "Le temps n'est plus, Phénice, où je pouvais trembler. 
Titus m'aime, il peut tout, il n'a plus qu'à parler." en tremblant d'amour.

Je vivais la nuit. Je n'étais plus que l'ombre de moi-même, si j'existais vraiment quelque part.

Je mentais. Je me mentais.

C'est ainsi que quelqu'un finit par me surnommer la

Fabuliste.

Merci à Xanti_ pour sa participation !

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