Nuit étoilée

✍︎Texte pour le concours de FeuilleSombre (j'ai fait exprès de ne pas la mentionner) à partir de l'image en média.

 Bonne lecture

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Nul n'est encore dehors, tout le village est endormi sauf moi. Rien de surprenant à 2 heures du matin à Lagrive sur Durette, un petit village perdu au milieu de la campagne. On n'entend plus que la Durette, la rivière du village, couler, une chouette hululer et des grenouilles coasser. Pas le moindre vrombissement de voiture, la nature a repris ses droits. Et moi, seule au milieu du champ, je vois ce que tous les habitants couchés dans leur lits après une longue journée sous le cagnard ratent : Un spectacle extraordinaire et inégalable. Le ciel est traversé par une pluie d'étoiles filantes. Une myriade de petits éclats de lumière traversent le ciel nocturne. Ils sont si délicats, si purs et si différents les uns des autres qu'ils m'apaisent et semblent éclairer mon cœur et réchauffer mon âme.

Ce soir, après avoir dîné, je m'étais rendue directement dans ma chambre sans trainer mais pas pour me coucher ou parce que j'étais fatiguée loin de là, j'étais au contraire excitée comme une puce ; j'allais retrouver Eléa. Et même si je la voyais tous les soirs depuis une quinzaine de jours, j'étais toujours emplie d'une joie puérile à l'idée de la revoir.

Je me suis préparée pour la retrouver avec une attention particulière, pour elle, bien que je doutais malheureusement de sa présence, mais je ne voulais pas douter car douter serait laisser place à mes démons et juste m'effondrer. J'avais donc pris une robe noire que j'apprécie beaucoup, assortie à mes bottes et un parapluie transparent, de la pluie étant prévue pour dans la soirée. Puis je suis discrètement sortie dehors par la fenêtre de ma chambre (au rez-de-chaussée, je vous rassure) et me suis dirigée vers un chemin en terre.

J'ai marché pendant quelques minutes, l'air était lourd mais je me sentais bien dans le silence, mon esprit pouvait divaguer librement et je me sentait heureuse, vivante. Perdue dans mes pensées, je n'avais pas vu le temps passer, aussi, je fus assez surprise quand je m'aperçus que j'étais déjà arrivée à notre lieu de rendez-vous. Dans notre champ, là où on a passé tant de soirées, allongées toutes deux dans l'herbe, parlant de nos vies où écoutant le silence, observant les étoiles, mon regard se perdant souvent vers Eléa.

Seulement, ce soir, elle n'est pas venue Je l'ai attendue, longtemps, assise dans l'herbe, les bras serrés autour de ma taille. Je ne suis qu'à moitié surprise, elle m'avait dit qu'elle rentrerait dans la semaine et elle semblait étrange quand elle est partie hier mais j'espérais quand même que je me trompais, qu'elle resterait plus longtemps.

Et ce soir, avec son départ, mon cœur s'est détruit, brisé en une multitude de particules qui se sont envolées aux quatre vents. J'avais l'impression que mon cœur ne pourrait plus jamais guérir. Elle ne m'avait pas prévenue, elle n'est pas venue, je me sentais abandonnée, seule.

J'ai l'habitude mais ça fait toujours aussi mal, combien d'amies m'avaient abandonnée quand elles ont su qui j'aimais ? À combien de mauvais regards, de commentaires acerbes avais-je eu le droit quand ils ont su que j'étais différente ? Combien de fois avais-je ravalé mes larmes et affiché un sourire pour faire comme si ça ne m'atteignait pas ? Mais ça m'atteignait toujours, et loin de m'y être habitué, ça fait plus mal à chaque fois. Je n'en avais pas parlé à Eléa, je ne voulais pas la perdre mais la finalité reste la même. J'étais seule avec mon esprit pour seule compagnie. À croire que je ne suis pas faite pour être avec des amies, passer de longues soirées ensemble à parler d'amour ou de ragots, sortir en ville, prendre un bubble tea. Ce n'est pas faute d'avoir essayé pourtant mais je me retrouve à chaque fois irrémédiablement seule. Je devrais abandonner, à quoi ça sert de forcer le destin ? Où ça me mène s'il vous plait ? Si vous saviez combien de fois j'ai maudit les Moires pour ce qu'elles me font subir. Plus d'une fois j'ai pensé être au plus bas, plus d'une fois il s'est avéré que je m'étais trompée, que je pouvais encore vivre pire.

Je n'avais pas le cœur à retourner dans la solitude de ma chambre, j'étais mieux dehors à entendre le vent faire frémir doucement les branches des arbres au loin, alors je me suis allongée, déposant le parapluie à mes côtés, rêvant de tout ce qu'on aurait pu faire toutes les deux, du bonheur qui m'échappe encore une fois, quelques larmes glissant le long de ma joue sans que je les essuie, n'ayant plus l'envie ni l'énergie pour.

Soudain, une lueur dorée traversant le ciel me surpris. Elle fut suivie par une autre, puis encore une et une fine pluie d'étoiles commença à tomber. J'ouvris mon parapluie bien que je sache que ça ne me protégerai pas de ces étoiles et me relevai. Je dois avouer que ce n'étais pas à ça que je m'attendais quand j'avais vu que de la pluie était prévue pour dans la soirée mais j'étais agréablement surprise.

Les yeux tournés vers le ciel, hypnotisée, mon cœur, brisé seulement quelques heures auparavant, se répare lentement. Chaque particule dorée qui tombe sur mon parapluie semble aller dans mon cœur en diffusant une douce chaleur. Elles réveillent en moi une joie enfantine et un sourire fleurit sur mes lèvres. Chacune d'entre elles me libère d'un souvenir de nous deux.

Notre rencontre par exemple, lors de la soirée du quatorze juillet ; on s'était retrouvée toutes les deux par hasard dans ce champ, seules, pour regarder le feu d'artifice. On avait commencé à parler de nos vies. Au début très timide, me donnant simplement des réponses monosyllabiques, elle s'était peu à peu laissée aller et se mit à me parler librement avec de grands gestes l'air simplement heureuse.

Je découvris donc que comme moi, elle était en vacances chez ses grands-parents, qu'elle venait de Montpellier, qu'elle avait un petit frère absolument insupportable et qu'elle était ravie qu'il ne soit pas venu avec elle, ce que je comprenais parfaitement. On était rentrées bien après la fin du spectacle sans avoir vu le temps passer et je m'étais fait sévèrement réprimandée par ma grand mère. On s'était retrouvée le soir suivant, puis celui d'après et ainsi pendant presque deux semaines. J'étais vraiment contente de rencontrer une fille de mon âge et aussi agréable dans ce coin perdu au fin fond de la cambrousse.

Mes souvenirs dévient ensuite vers le jour où je me suis rendue compte qu'elle comptait beaucoup plus pour moi que je ne le croyais, celui ou j'ai compris que ses yeux ne me verraient jamais différemment de Clarisse, son amie de vacances. Le pire, est que cette constatation est venue dans mon esprit pendant qu'elle me parlait de lui. J'aurai bien foutu une baffe à Cupidon s'il était devant moi, comme si je n'avais pas déjà assez souffert comme ça. Malheureusement, je n'avais qu'Eléa face à moi et je ne l'aurais jamais frappée surtout que ce n'était pas de sa faute.

Eléa et ses mimiques parfois un peu enfantines, Eléa et la lumière qui brille continullement dans ses yeux, Eléa et les paillettes que je pouvais voir dans son regard quand elle parlait de ses livres et de lui, Eléa et la fossette qui se creusait sur sa joue quand je parvenais à la faire rire, Eléa et ses joues toujours rouges, Eléa et ses longs cheveux blonds que j'admire et jalouse qu'elle entortille autour de son doigt quand elle est gênée ou stressée, Eléa et ses soupirs, l'air de dire "qu'est-ce que je vais pouvoir faire d'elle" à chaque fois que je sortais une idiotie, justement pour provoquer ce soupir, Eléa, une personne exceptionnelle, douce, gentille, généreuse drôle, libre, unique...

Et ce soir, je dois soudain réapprendre à vivre sans elle. Sans nos rendez-vous du soir, sans voir son visage s'éclairer à mon arrivée, sans pouvoir lui serrer la main pour qu'elle me la réchauffe, l'ayant toujours glaciale, sans pouvoir la rejoindre sous son plaid quand la nuit nous rafraichissait un peu trop, sans pouvoir débiter mille idioties à la seconde rien que pour la voir sourire un instant, sans elle.

Mais malgré la douleur sourde nichée dans mon cœur qui ne le quitterait sûrement pas avant un bout de temps, je sens que je serai capable de m'en sortir, de guérir, de l'oublier. Pas pour tout de suite bien sûr, ça se fera petit à petit mais ce sera possible. Car ces étoiles m'ont réchauffé le cœur et m'ont rassurée. À croire qu'elles sont tombées rien que pour moi, juste pour m'aider, moi, une poussière face à l'immensité du globe, une parmi les dix millions d'humains sur Terre, une simple adolescente en chagrin d'amour.

Demain, je me demanderai sûrement si j'ai rêvé, l'espoir sera retombé et je serais sûrement en train de me morfondre dans mon lit mais pas ce soir. Ce soir je me laisse porter, je rêve et profite de ce cadeau du ciel. Ce soir, je suis libre et heureuse, ce soir j'ai le droit d'oublier, de courir dans la forêt, de crier ma joie et mon malheur. Ce soir, j'ai le droit de dire à tous les animaux et végétaux que j'ai aimé Eléa Schwartz de tout mon cœur, qu'elle l'a brisé, sans même le savoir, qu'elle est formidable, drôle, intelligente, que je ne l'oublierai pas mais que je m'en remettrai. Que peut-être que je la reverrai l'année prochaine, que peut-être de nouveau je l'aimerai, que peut-être elle m'aimera, que peut-être tout aura changé, que peut-être on sera heureuses ensembles. Mais ce soir, il n'y a plus que moi et je laisse mon cœur se mettre en pause et arrêter de réfléchir à elle et au futur pour profiter de l'instant présent.

✮⭒✮

Lors d'une nuit d'été

Alors que j'étais désespérée,

Une pluie d'étoiles filantes

A traversé le ciel

Mon cœur a été soulagé

Par ce spectacle sans pareil.

Je n'étais plus seule,

L'Univers me soutenait

Il venait m'apaiser,

Avec mon cœur en deuil

Et des larmes en trop

Moi, une simple ado.

Il ne m'avait pas guérie évidemment

Mais je me surprenais à rêver

D'un jour, dans peu de temps

Où je serais libérée

De ces souvenirs avec elle

De ces soirées passées dans ce champs

De ce qu'elle a jeté à la poubelle

Alors que je l'aimais tant,

De cette rencontre inopinée,

De ses sourires sincères,

De ses soupirs désabusés,

De sa personnalité si solaire,

De ses longs cheveux soyeux,

De son parfum si entêtant

De ses grands yeux bleus

De son sourire éclatant

De tout ce qu'elle était

De tout ce que j'aimais

Pour garder au fond de mon cœur,

Un souvenir plein de mélancolie

De nos soirées pleines de bonheur

Et d'Eléa, la fille qui a animé mes nuits

Et que j'ai pleinement aimé

Le court temps d'un été.

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