Nouvelle #3

Je suis là. Sur ce banc.

Le soleil discret du printemps souffle sa douce chaleur sur mon corps découvert. L'herbe fraîche sous mes pieds nus comme un ruisseau de verdure ne fait presque aucune différence avec l'eau finalement. Les fleurs naissantes, timides, encore cachées dans leur cocon de feuille sembleraient ne jamais vouloir sortir. Et la clôture rassurante encadre parfaitement ce petit coin de paradis. La lumière, les oiseaux. Tout est doux et tout nouveau. Les nuages de cotons se promènent sur la brise. Ils ont l'air beau, comme des objets neufs que personne n'aurait jamais touchés.

La chaleur de l'été. Là où tout peut commencer. Là où le silence se rompt pour laisser parler. L'herbe engloutit presque mes pieds, et les fleurs ouvertes semblent beaucoup plus grandes maintenant. La clôture est brûlante, brûlante de désire que quelqu'un la franchisse pour venir ici dans ce paradis. La chaleur, les odeurs. Tout est fier et encré dans l'espace et le temps à la fois. Les nuages se font rares, silencieux. La brise, elle, s'est évanouie.

La Terre tourne, vive, énergique. Elle tourne et emmène le temps. Ainsi, personne ne la rattrape, mais également : personne ne l'attend. Elle respire, elle brûle, elle emporte. La Terre vit. Toujours plus fort, toujours plus, encore. Elle resplendie.

La Terre, comme un cœur qui bat.

Et puis petit à petit, la voilà qui se calme, qui se pose, ou tout du moins cherche à le faire. La voilà qui ralentit, par fatigue ou bien par ennui, ça, il n'y a qu'elle qui le sait.

Le jardin, lui aussi s'est calmé. Le vent est apparu, plus digne et plus imposant malgré encore quelques faiblesses persistantes. Les nuages se sont salis, ils sont gris. Ils se poussent les uns les autres, se marchent dessus, se chamaillent. Et ce bruit. Le bruit de leurs batailles incessantes, à qui soufflera le plus fort. Tout s'abîme et tout est humide. Le froid, les feuilles. La clôture n'y échappe pas, sa peinture s'écaille et sont bois se fendille ici et là. Les fleurs sont noyées, emportées. Mais certaines courageuses résistent. L'herbe, elle, n'a pas tellement changée, juste un peu plus inondée par le temps, nous dirons.

Le jardin a perdu ses airs de paradis. Il est froid et ensevelis d'un sable de cristal et de diamant. Le vent est violent, il frappe et hurle. Il détruit. Les nuages n'ont plus leur sérénité d'avant. Ce silence, malgré tout. Tout se meurt, disparaît. La neige, la glace. La clôture a cessé de se battre, ce n'est désormais qu'une brindille que personne ne viendra faire tomber. Les fleurs ? Il n'y en a plus. Et l'herbe préfère se défiler sous son fin manteau de velours. Le soleil s'éteint, s'endort.

Et sur ce banc. J'étais là.

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