Chapitre 5
Le jeune homme s'arrêta au bout de quelques minutes. Il était arrivé devant un étang, dans lequel se terminait une grande cascade dont l'eau claire résonnait contre les rochers dans un bruit cristallin. L'endroit semblait être un véritable havre de paix, comme un sanctuaire que l'homme n'aurait jamais souillé de sa présence. L'adolescent, impressionné par l'atmosphère magique de l'endroit, n'osait plus faire un pas.
- Pourquoi m'avoir suivie ?
Il leva instinctivement les yeux à l'entente de la voix. Effectivement, celle qui avait parlé se trouvait de l'autre côté de l'étendue d'eau, entourée de petits louveteaux qui l'observaient avec un air curieux. Un autre animal, sans doute une louve, se tenait assise non loin d'eux, légèrement camouflée par l'ombre des arbres.
- Parce que je ne voulais pas partir avec ces idiots.
Son interlocutrice eut un léger rire.
- Tu as bien raison. Sourit-elle.
Elle s'avança vers l'étang et toucha l'eau du bout des doigts. Aussitôt, cette dernière gela, créant une sorte de pont de glace posé à sa surface. Puis la jeune fille se détourna en disant : - Tu peux y aller, c'est solide.
Et elle retourna vers les louveteaux, s'agenouillant près d'eux pour leur offrir les caresses qu'ils réclamaient. L'adolescent s'approcha de la surface gelée et posa prudemment un pied dessus. Étonnamment, le pont n'était pas si froid ni glissant que cela, mais il décida de faire attention tout de même. Il commença à marcher doucement, utilisant ses bras pour éviter de perdre l'équilibre, n'ayant absolument pas envie de prendre un bain glacé maintenant. Les yeux fixés sur ses pieds, il sentait le regard de l'adolescente sur lui, tout comme il sentait le coup fourré arriver. Mais il n'en fut rien, et il réussit à atteindre l'autre rive sans encombre.
- J'aurais bien voulu te faire tomber à un moment, mais j'ai pensé que tu n'aurais sûrement pas apprécié, donc je ne l'ai pas fait. Dit la jeune fille, un sourire aux lèvres.
L'adolescent ne savait pas vraiment quoi répondre.
- Euh... eh bien merci. Bafouilla-t-il.
Soudain, un louveteau s'éloigna des autres et commença à courir en rond autour de lui.
- Il veut jouer, on dirait.
Elle se leva et attrapa l'animal dans sa course.
- Laisse-le tranquille, d'accord ? Lui dit-elle.
Puis elle reposa la boule de poils ambulante par terre, tandis que la louve sortait du couvert des arbres et s'approchait des deux adolescents. Une fois arrivée à leur hauteur, elle s'assit et regarda la jeune fille dans les yeux, semblant lui poser une question muette. Cette dernière ferma les paupières avant de les rouvrir quelques secondes plus tard en soupirant.
- Il y en a qui sont quand même restés dans la forêt, malgré mon avertissement...
- D'ailleurs, en parlant de ça... comment fais-tu ? Demanda l'adolescent, curieux. Je veux dire, tu as des super-pouvoirs, c'est ça ?
La concernée s'immobilisa et l'observa avec une expression étrange. « Ah bah bravo, la boulette, encore... » pensa-t-il. Mais, contrairement à ce à quoi il s'attendait, la jeune fille éclata de rire. Un rire franc, clair... et surtout joyeux. Elle semblait elle-même surprise de l'entendre.
- Cela fait bien longtemps que je n'avais pas rigolé ainsi... des supers-pouvoirs... pff-ha-ha... non, désolée, je ne suis pas une super-héroïne, loin de là.
- Mais tu possèdes tout de même des pouvoirs ! Tu as créé le pont de glace tout à l'heure... comment est-ce possible ?
- En effet, tu as raison. Mais je n'ai pas le temps de t'expliquer tout cela.
- Et pourquoi pas ? Après que tu aies botté les fesses de ces idiots, tu...
Un mystérieux sourire apparut sur les lèvres de la jeune fille.
- Qui te dit que tu seras toujours là après ?
- Mais...
- Chut, tu verras bien.
Et sur ces mots, elle partit et disparut rapidement entre les arbres. L'adolescent laissa échapper un juron et se mordit la lèvre aussitôt, avant de s'élancer à sa suite. La louve et ses petits les suivaient également. La jeune fille s'arrêta au bout d'un certain temps, faisant signe à l'adolescent d'en faire de même. Elle s'avança encore de quelques pas, puis se baissa afin de se cacher derrière un buisson. Les loups avaient disparu, avalés par l'obscurité. Le jeune garçon s'approcha à son tour, et jeta un coup d'oeil au-dessus du végétal pour s'immobiliser aussitôt. Deux personnes se trouvaient au centre de la clairière, l'une agenouillée près de l'autre, qui se tenait assise.
- Ce sont tes parents, n'est-ce pas ? Chuchota la jeune fille.
- Co-comment...
- Ne pose pas de questions inutiles. Réponds-moi, plutôt. Vas-tu les rejoindre, oui ou non ?
- Quelle question, ce sont mes parents quand même ! Répondit l'adolescent sur le même ton.
- Bien, dans ce cas, c'est ici que nos chemins se séparent. Va les rejoindre, partez de cette forêt et ne revenez pas. Ne parle de moi à personne, et n'essaye surtout pas de revenir me voir. C'est compris ?
- Mais...
- Ce n'est pas une réponse valable, ça.
- Pourquoi m'interdire de revenir ?
- Parce que c'est comme ça, et pas autrement. Je n'ai pas d'explication ni de justification à te donner. Maintenant, pars.
- Attends ! Comment t'appelles-tu ?
- Cela n'a aucune importance.
- Pour moi si. S'il-te-plaît...
La jeune fille soupira.
- ... Léa, Finit-elle par dire.
L'adolescent sourit, puis se pencha vers elle et lui chuchota quelques mots. Puis il sortit de sa cachette et courut voir ses parents. Ces derniers semblaient vraiment soulagés et heureux de le voir. Camouflée dans l'ombre, Léa observa leurs retrouvailles avec mélancolie, l'esprit ailleurs. Elle tourna ensuite les talons et s'enfonça dans la forêt, retournant dans ce qui était à présent sa maison. Mais dans son esprit résonnaient encore les dernières paroles de l'adolescent :
« Moi c'est Kairos. Et, peu importe ce que tu en dises, je te promets de revenir. »
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