chapitre 22
Rain In The Heart - Michele Morrone
Debout sur le pas de la porte et tenant ma petite boîte à bout de bras, j'attends son autorisation pour entrer.
Elle m'examine intensément, sans prononcer un mot, comme si elle me découvrait pour la première fois.
Seule ma voix grave et éraillée chante dans sa maison. Mon dernier album qu'elle semble beaucoup aimer.
Alors j'affiche un léger sourire, l'imaginant se laisser aller sur "Rain In The Heart", dans des mouvements explicites que, elle seule peut voir secrètement dans un miroir.
Mais tout à coup, dans mon petit carton, l'animal s'agite d'impatience.
Axelle quitte mon regard, sans laisser paraître d'émotions et le pose sur ce que je tiens entre mes mains. Puis se déplace pour me laisser le passage.
J'entre et je progresse dans son petit couloir pour arriver au seuil du salon. J'examine avec intérêt les deux pièces juxtaposées : son petit salon et la salle à manger.
C'est un peu vieillot, et les deux pièces auraient besoin d'un peu de rafraîchissement. Mais, à part cela, c'est mignon et chaleureux.
Des petits cadres un peu partout sur les murs cachent un peu la misère et ajoute une touche féminine.
Puis sur un meuble, mise en évidence, une photo la représentant avec une jeune femme tout sourire, accompagnées d'un chien. Je me doute que cette personne est sa fameuse amie Stéphanie et la chienne, Prisca. Un gros molosse qui paraît attendrissant, enfin vu comme ça.
En fin de compte, en regardant de plus près sa décoration, l'appartement d'Axelle reflète la joie de vivre. Le bonheur et la paix intérieure. Comme sa personnalité d'ailleurs.
-Bonsoir Antonio.
Je me retourne, tenant toujours mon petit carton.
-Buonasera Axelle.
Je sais qu'elle aime que je lui parle en italien. Elle me l'a fait comprendre au téléphone. En retour elle rougit, baisse la tête et ses doigts se mettent légèrement en mouvement, troublée. Mais la relève rapidement, un peu comme une question qui aurait besoin d'une réponse.
-Pourquoi ne pas m'avoir dit qui vous étiez réellement ?
Je hausse les épaules, comme un môme pris sur le fait.
-Je voulais rester incognito. Et honnêtement, j'imaginais que notre rencontre n’allait pas se poursuive.
-Et ?
Je m'approche, doucement. A quelques centimètres d'elle, et pose mes lèvres sur les siennes. Puis éloignant les miennes de quelques millimètres, je réponds :
-Et ? Je suis là Axelle.
Malgré la petite boîte toujours dans mes mains, j'essaie de l'embrasser plus voluptueusement, mais l'objet plaqué entre nous deux devient un obstacle, sans oublier ses petits bruits émis de l'intérieur. Elle se détache de l'emprise de mes lèvres et se recule de trois pas.
-Je vois que vous n'êtes pas venu seul, ajoute-t-elle avec humour.
-Non, en effet. Il errait dans ma rue. Il m'a fait penser à vous. Au jour de notre rencontre. Perdue et un peu traumatisée.
-Traumatisée ? Moi ?
Elle pose son index sur sa poitrine et poursuit :
-Inquiète oui. De ne pas trouver de véhicules qui se stoppent. Mais certainement pas traumatisée. Du moins pas par vous.
Elle se détourne et je l'observe s'avancer dans une pièce sur le côté qui semble être la cuisine. Ses courbes chaloupent dans son pyjama de flanelle, me provoquant et me donnant des envies de la goûter.
Mais, elle fait volte-face. Et telle une séductrice, elle étire ses lèvres. Alors comme un pervers pris au piège, je lève mon regard.
-Vous avez faim Antonio ? J'ai préparé des pâtes et du café.
Je reviens rapidement à la réalité et j'éclate de rire.
(1) -Un po 'di pasta.
Puis reprenant mon sérieux, j'ajoute :
-Et beaucoup de vous.
Légèrement troublée de ma révélation qui est loin d'être fausse, elle se détourne pour reprendre la direction de la cuisine. Mais je l'interpelle :
-Mais d'abord…
-Oui ?
Je tends la petite boîte devant moi. Tandis qu'elle se retourne une seconde fois.
-C'est pour vous.
-Oh ! C'est vrai ?
Elle étire ses lèvres, heureuse de savoir que ce cadeau est pour elle. Et revenant sur ses pas, elle ouvre la petite boîte que je tiens dans mes mains, pour porter la petite boule de poils devant son visage.
-Oh il est trop mignon. Merci énormément Antonio.
A défaut de m'embrasser. La voilà qui porte le chaton à son visage et le papouille de bonheur.
Alors je vous avoue, que d'un seul coup, je voudrais être un chat. Et comme le disent les paroles de la chanson :
Quand dehors il fait froid
Attendre mon repas
Tapi au creux de tes draps
Si un jour tu préfères
A mes félines caresses
Les canines d'un chien en laisse
Tu ne comptes pas sur moi
Pour dormir sur le sofa Je te montrerai de quoi est capable un gros chat.
A ce jeu-là je suis roi.
Et la souris ce sera toi.
Soudainement, elle quitte des yeux sa boule de peluche et regarde brièvement l'horloge murale pour ajouter :
-Minuit ! Ce sera ton nom. Et je pense qu’un petit bol de lait ne te fera pas de mal.
Et comme si de rien n’était, la voici qui pose donc Minuit au sol. Se détourne de moi, et telle une déesse, s'avance, suivie de près par son nouvel ami.
Serait-elle en train de m'allumer, voire même m'aguicher ?
Mmmm ! J'avoue que j'aime beaucoup son jeu.
Et ce soir, en effet, la souris ce sera elle.
Quelques secondes plus tard, Axelle disparaît dans sa cuisine, me laissant là, planté comme un imbécile heureux, tenant toujours mon petit carton vide entre les mains.
Je décide de me secouer et cherche autour de moi où le déposer, pour enfin le mettre au sol dans un petit coin du salon.
Je retire ensuite ma veste que j'installe sur le dossier d'une chaise, devant sa table, afin de me mettre un peu plus à l'aise.
Balayant une fois de plus d'un œil curieux autour de moi, je tombe sur quelques livres traînant sur une étagère.
Je progresse vers celle-ci pour y jeter un coup d'œil.
Il paraît que c'est dans le style de lecture ou celui de la musique que l'on découvre la vraie personnalité d’un individu.
J'examine donc avec attention les titres de la tranche des livres.
Drevin, Slaves, Sinder et bien d'autres, installés l'un derrière l'autre, comme des petits soldats, ayant comme objet pour les maintenir droits, deux petits leprechauns roux et vêtus tout de vert.
Ils tiennent dans leurs mains un trèfle à quatre feuilles, symbole de chance. Ils semblent tous les deux sortir tout droit d'un conte de fée, après y avoir caché leurs petits chaudrons remplis d'or aux pieds d'un arc-enciel aux milles couleurs.
J'étire mes lèvres, tandis que les deux personnages semblent se moquer de moi dans un sourire taquin et facétieux.
-Antonio ! Installez-vous j'arrive.
La voix d'Axelle retentit brusquement, me sortant de mon analyse. Ma conclusion est que c’est une jeune femme qui a besoin de lire une certaine littérature, pour s'échapper du quotidien.
-J'espère que vous avez faim, car mes pâtes ne seront pas aussi excellentes que les vôtres.
Je me retourne pour la voir revenir sur le seuil de la porte, avec deux assiettes bien garnies. Derrière elle, Minuit qui ne la lâche pas d'une semelle.
-Votre nouveau compagnon semble vous apprécier beaucoup Axelle.
-Oui. D'ailleurs encore merci Antonio, je l'adore.
Elle progresse vers la petite table basse pour y installer nos deux repas.
-On sera mieux ici. A la bonne franquette.
Je fronce les sourcils, cherchant la signification de cette phrase et voyant mon expression. Elle ajoute sourire aux lèvres :
-Mangeons simplement.
Elle s'en retourne dans sa pièce, sous les miaous de son petit chat, pendant que je me pose sur le canapé.
-Et voilà ! Du bon café en prime !
Deux tasses fumantes se posent devant moi, dégageant un arôme très surprenant.
Je prends la mienne et la porte à mes narines, pour essayer de détecter ce parfum particulier, pendant qu'Axelle, debout, attend certainement mon verdict.
Je souffle sur le breuvage. Trempe le bout de mes lèvres. Et inspire l'odeur, comme je le ferais avec un bon vin pour m'apercevoir que celui-ci dégage un parfum de chocolat et de fruits à coque. Je lève la tête, impressionné.
-Il est bon ? Me demande-t-elle.
(2)-Favoloso !
Dis-je en italien et en embrassant le bout de mes doigts. Puis ajoutant avec une touche d'humour.
-Je veux bien croire que les pâtes ne sont pas votre point fort. Mais vous avez le mérite de savoir préparer du vrai café italien.
Elle soupire soulagée, et s'installe à mes côtés, alors que je continue ma dégustation.
J'avoue que pour ma part, le café italien est un souvenir qui a marqué mon enfance. Celui qu'il a laissé sur mes papilles.
Il faut savoir que, pour beaucoup d’entre nous, les cafés italiens restent les meilleurs cafés au monde.
D’ailleurs, mes chères lectrices, aviez-vous remarqué que les noms de boissons à base de café sont italiens ?
Espresso, ristretto, lungo, cappuccino, doppio.
Et pourtant, aucun caféier ne pousse dans mon pays. Mais voilà, il fait partie intégrante de notre culture.
Je ferme les yeux un bref instant, m'imaginant à Venise, assis sur une terrasse au soleil, avec "Il Volo" de Zucchero.
Ma tasse toujours aux bords des lèvres, j'entends même le bruit spécifique du percolateur (3) qu'utilise le Barista (4). Ce sommelier du café qui peut créer des saveurs comme un artiste le fait avec ses tableaux.
Mais un doux parfum de vanille mélangé à la cannelle me fait revenir au présent, et je tourne la tête vers celle qui trouble mes émotions.
Elle est assise à mes côtés, à quelques millimètres de moi. Elle souffle sur son café afin de le refroidir avant de le porter à ses lèvres. Ses cheveux forment un rideau transparent me laissant entrevoir ses gestes.
Alors délicatement, j'agrippe une de ses mèches. Axelle stoppe sa tasse à mi-chemin attendant certainement la suite des événements. Puis je la porte à mes narines et inspire pour m'imprégner de son parfum. Comme une caresse, je lui dégage le côté du visage.
Elle le tourne vers moi, sourit. Simplement. Et j'avance alors mon visage vers elle pour l'embrasser.
Mais Minuit rejoint d'un bond sa maîtresse, en montant sur ses genoux pour s'installer en boule et ainsi quémander des caresses.
Je crois qu'il est temps que je montre à ce petit ingrat qu'il y a un mâle de trop ici.
A suivre.
(1) Un peu de pâte.
(2) Fabuleux.
(3) Percolateur : machine à café professionnelle.
(4) Barista : est une personne spécialisée dans la préparation de boissons au café à base d'expresso. Le terme induit souvent une certaine maîtrise dans l'art de la préparation du café, allant parfois jusqu'à la notion de « sommelier de café »
Et voilà mes chères lectrices, un chapitre tout en douceur. Et bravo à celles qui ont deviné que l'animal était un chat...😉
Sachez aussi, pour ceux qui se pose la question de : " Minuit !?" C'est en référence au film Catwoman.
D'ailleurs si vous avez remarqué, ma fiction fait référence à des films, et phrases type de fims.
Encore milles merci pour vos votes, vos impressions et votre fidélité. A très bientôt pour la suite.
Et surtout prenez soin de vous et des votre..
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