8. U-N-D-O
Alors que UNDO envoie du lourd sur scène, je me fraie facilement un chemin dans la foule. Une fille me regarde attentivement, et quand nos yeux se croisent, elle me sourit vivement mais je n'y prête pas plus d'intérêt et je poursuis jusqu'à la régie au centre de la salle. Samuel, notre ingénieur son et Jo, qui gère les lumières, sont toujours là. De là où je suis, UNDO cartonne entre les jeux des spots et leur présence scénique. Malgré le fait que Adam Nolly soit bourré, il gère son show. Les bras en l'air, il bouge ses cheveux dans tous les sens, comme s'il prenait plaisir à les avoir sur le front, l'empêchant de voir une salle bondée de fans venu rien que pour lui. Les franges de sa veste en cuir vibrent à travers les faisceaux des spots de couleurs bleus.
Samuel filme la scène, oubliant même qu'il ne regarde qu'au travers d'un écran, alors qu'en face de lui se tient un spectacle exceptionnel. Jo, qui vient de remarquer ma présence, s'approche de moi et me dit quelque chose, mais la musique m'empêche de comprendre, il se baisse et se rapproche encore plus de mon oreille.
— T'as besoin de quelque chose, Nik' ?
Sur la pointe des pieds, j'essaye de faire porter ma voix au maximum :
— Vigo, il veut vous voir aux backstages.
Jo lève son pouce, puis il rejoint Sam, qui comprends rapidement et acquiesce.
Je me lance vers le bar, bondé. Il n'y a pas de places libres. Pourquoi les gens à l'arrière des salles ne regardent jamais réellement le concert ? Je reste là, les mains dans les poches, attendant que quelqu'un se bouge. Lorsque je vois une place se libérer, je m'y glisse et commande un Gin Tonic. Le barman apporte rapidement ma consommation et la pose devant moi. Je montre mon passe d'artiste qu'il regarde attentivement, avant de lever son pouce, signe que c'est ok et que je n'ai pas besoin de payer. Lorsque je me retourne, je retombe sur la fille d'avant et elle m'étudie sans retenu.
— Salut, dit-elle avec sensualité.
Elle n'est pas blonde, elle n'est pas fine, mais qu'est-ce qu'elle a du charme avec sa frange droite brune et ses cheveux lui arrivant aux dessus des épaules.
— Bonsoir.
Le bruit du concert couvre ma voix, elle vient plus près de moi et tend sa main.
— Je m'appelle Nora.
— Enchanté, Nora, dis-je en lui serrant la main.
Elle affiche le plus diabolique des sourires. Elle doit être une tigresse au lit. Mais nous repartons ce soir, une fois qu'ils auront fini de ranger le matériel, alors je cherche une excuse pour raccourcir notre discussion.
— On m'attend dans les loges, désolé, grimacé-je, emprunté.
— Oh, pas grave, fonce.
Son sourire disparaît à la seconde où elle termine sa phrase. Je tourne les talons, contourne la foule et je fonce vers la sécurité. De loin, j'aperçois qu'un des roadies de UNDO s'énerve avec les photographes qui empiètent son espace de travail. Devant moi, un homme baraqué contrôle l'entrée à l'avant-scène. Je tire sur le fil où mon passe d'artiste est attaché, après un rapide coup d'œil à ma photo et mon nom, il me laisse entrer.
Je m'arrête là un instant, regardant une dernière fois ce groupe.
— Salut L.A ! crie Adam.
La foule s'époumone à lui répondre.
— Nous allons jouer une chanson d'amour ! dit-il en tenant le micro par le câble.
La foule émet encore plus de bruit. Je ne sais pas comment c'est possible. Adam a l'air de s'en foutre, il fait des cercles avec son micro, un sourire malicieux aux lèvres.
Après une énorme gorgée de vin rouge, il se lance. Une ballade rock. D'après ce que je sais, c'est cette chanson qui les a rendus célèbre. Adam murmure presque ces paroles sombres, envoûtantes. Le refrain est parfaitement réalisé, et ses cris suppliants sont bouleversants. Dans un dernier « reste avec moi », la salle retrouve le silence, comme si la foule en attendaient encore plus.
Soudain, un photographe me bouscule et je décide de bouger dans les loges. Derrière, la scène pourrait être comparée à une fourmilière sous acide. Des roadies courent partout, pressés, d'autres remplissent les flight case de matériels ou encore changent les batteries des systèmes sans fil. Au moment où UNDO termine le concert, le matériel et le groupe doit être prêt à partir dans les quinze minutes suivant la fin du show. Des techniciens, armés de Talkie-Walkie stressent sur quelques projecteurs en surchauffent ou scotchent des mètres de câbles qui se sont décollés à force qu'on les piétine sans relâche.
Karim, quant à lui, a presque terminé de regrouper et de ranger notre matériel dans les flight case, où est noté " Fall in Pieces ", le nom de notre groupe. Je lui fais une tape amicale dans le dos, avant de continuer mon chemin. Je marche dans les longs couloirs d'un blanc immaculés. Plus loin, les membres du premier groupe rigolent à pleins poumons. L'un d'eux est nu et a le corps couvert de peinture multicolore.
— Mec ! crie l'un d'eux, une fois repéré. Ton scream est hallucinant.
Toi, t'es défoncé.
— Regarde ce que mon pote a fait, continue-t-il.
Il me montre un tableau peint avec une multitude de couleurs sans logique apparente. Ça ne ressemble à rien.
— J'ai peint ce tableau avec ma bite, sors l'autre fièrement.
Il n'est pas sérieux ? Je jette un rapide coup d'œil à son entre-jambe et constate que c'est une explication plausible.
— Je te l'offre !
Il me lance le tableau que je rattrape par reflexe. Je grimace de dégoût, ce qui les fait rire encore plus fort.
— T'inquiète, j'étais propre quand je l'ai peint, me lance-t-il avec un clin d'œil appuyé.
— Je te crois sur parole, dis-je en levant les yeux au ciel. Beh, merci.
Les gars se bidonnent de la connerie de leur pote. Il me faut une excuse.
— Le groupe m'attends. On a encore beaucoup à faire avant que la salle nous jette dehors.
— Ok, et n'oublie pas : T'as du talent ! J'ai aimé t'écouter, balance Monsieur-bite-arc-en-ciel. D'ailleurs, vous avez un stand de merchandising ?
— Ouais, à côte du vôtre, je suppose et...Merci ! conclus-je avant de disparaître dans la loge.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top