Chapitre 8: Olle
Je dois me concentrer sur la route. Voilà. Je ne dois plus penser à rien. Je dois faire le vide dans mon esprit. Alors je me fixe sur mon pied droit qui appuie sur la pédale, pour ne pas penser à ses pieds à elle. Ses pieds qui dansaient tout le temps sur ma terrasse l'été. Je contemple la route, attentif, pour oublier qu'elle était imprévisible. Je ne veux plus penser à elle, à son sourire et à son rire, à ses yeux qui pétillent, et encore moins à son corps. Je ne peux plus penser à ça. Je veux faire taire toutes les pensées qui se distillent dans mon esprit.
Victor est à côté de moi. Elle lui avait parlé d'un jeu et elle ne m'a rien dit, à moi. Moi qui était son copain. Je ne comprends pas pourquoi elle a fait ça. Sur les dernières semaines, elle était distante avec moi ; elle refusait de me voir, elle ne répondait presque plus à mes messages, encore moins à mes appels. Je ne sais pas ce que j'ai fais, je ne saurai jamais. Elle a emporté la réponse avec elle.
- Elle m'évitait Victor, elle ne voulait plus qu'on se voie.
- Et tu es allé la voir, chaque jour, à l'hôpital?
- Oui, Victor. Oui, parce que je l'aime, cette fille. Je l'aime même lorsqu'elle me repousse...
Je continue de conduire. Il ne répond pas. Je ne serai plus jamais le même, elle m'a changé. En bien? En mal? Il est certain que j'ai fais quelque chose qui ne lui a pas plu, mais quoi? Je voudrais la voir, je voudrais lui parler et la serrer dans mes bras en caressant ses cheveux, comme je le faisais. Alors je pourrais lui murmurer cela:
"Elyhna fait moi confiance ! Je t'aime et je ne veux pas que tu te détruises dans ce jeu. Prend ma main, je ne te lacherai pas. Je ne sais pas ce que tu ressens, je ne sais pas ce que tu vis; mais je veux être là, je veux être avec toi. Je refuse de te laisser comme ça. Je ne veux pas te voir mourir, Elyhna, il en est hors de question que je laisse cela se produire. Je sais que tu as besoin d'aide, et je ne pourrai pas t'aider, je serai simplement là pour te faire oublier, Elyhna. Fais moi confiance, je t'en supplie ! On va aller voir quelqu'un qui peut t'aider, un adulte qui connait ce jeu et qui pourra t'aider à l'arrêter. Elyhna, ne fait pas de bêtises je t'en supplie, je tiens trop à toi pour cela !"
Mais tout cela je ne le dirai jamais, car il est trop tard ! Et toute ma vie je me souviendrai que nous avons éteint son sourire peu à peu. Défi après défi. Lorsque je l'ai appris, la douleur était tellement forte que j'ai voulu à mon tour fermé les yeux pour l'éternité. J'ai pleuré, pendant des heures, dans les bras de mes parents. Ils n'ont rien dit. Ma mère a simplement caressé mes cheveux avec cette douceur qu'elle seule pourra me donner. Elle a serré son fils détruit, contre son cœur, dans l'espoir de le réparer. Mais je l'ai entendue pleuré lorsqu'elle ne pouvait plus rien faire. Dans ses bras, j'ai imaginé Elyhna danser. Je me souviens, parfois, elle riait et elle se mettait à danser. C'était surtout le soir, quand elle était fatiguée. C'est peut-être ça qui m'a fait tomber amoureux ; c'est peut-être cet éclat de vie, ce prisme de sourires rayonnants qui font qu'elle n'était comme personne d'autre.
Pourtant, lors des dernières semaines je l'avais perdue. Elle semblait ailleurs, elle ne dansait plus et ne riait plus. Je ne sais pas ce qu'il s'est passé pour que la vie s'éteigne en elle.
Je me concentre sur la route, nous arrivons bientôt chez Emile. Pour la première fois de ma vie, il n'y aura eu aucun arrêt chez Elyhna avant celui-ci.
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