Chapitre 30 : Elyhna

Il n'y a plus aucun bruit, simplement le son de la vie qui continue et les animaux, et les plantes qui bougent. Je suis seule maintenant. Le jeu a gagné. Le jeu m'a eue. Je les ai éloignés, eux, mes amis. Je les ai rejetés parce que j'avais besoin de tout maîtriser. J'avais envie qu'on me remarque, je voulais me sentir exister. Je voulais l'excellence pour leur prouver que je suis là. j'ai détruit mon corps, mon rire et les gens que j'aime pour leur prouver que je suis là. Mais maintenant...

Il fait noir et je ne suis plus là. La perfection m'a tuée, à coup de règles qui font mal. Je me suis meurtrie parce que je pensais que cela allait me faire avancer.

"Ô ma jolie, tu seras à jamais affreuses, le sais-tu ?"

Voilà ce que me hurlait cette ignoble infamie. Je ne pourrai peut-être plus le prononcer. J'ai besoin de me créer des plans et de les suivre, j'ai besoin d'être rassurée, d'être reconnue comme douée. Je veux qu'on me trouve jolie et qu'on admire mon corps. Il n'y a rien de plus affreux que ce jeu dans lequel je me suis lancée. Je me suis épuisée à courir, à jeûner, à vomir. J'avais ce semblant d'énergie en moi. Je sentais mes os sur chaque recoin de ma peau et ça me faisait du bien. j'allais réussir, j'allais être jolie.

Et un, et deux, et trois repas que j'ai sautés. Je ne compte plus désormais.

C'est allé au début, j'ai réussi à tout contrôler. Mais maintenant tout a changé. Je ne sais pas ce qui a vrillé, je ne sais plus quel jour c'était. Je ne peux dire quand tout a commencé ; en revanche, je sais quand tout s'est arrêté. Après de longues journées passées à l'hôpital, mon corps a lâché. Je ne sais quelle règle était de trop. Je ne sais pas ce que j'ai fait de mal, ou si, je ne le sais que trop bien. C'est à l'hôpital que j'ai compris que c'est moi et moi seule qui allait me tuer. J'ai eu peur pendant un instant. Peur de devoir me battre contre moi. Peur de mourir et de les abandonner. Je ne peux pas me faire pardonner. Je ne peux pas réparer les blessures que je leur ai faites. En voulant leur prouver que j'étais là, j'ai détruit tout le monde. En voulant hurler ma présence je leur ai fait si mal. Si mon corps était animé, je pleurerais...

Tout devient flou dans mon esprit. Tout est lourd et tout est léger. Il me semble que je vole et que je m'écrase. Mes sens s'endorment un à un. Je ne peux rien décrire. Je ne peux pas  expliquer mes sens qui s'en vont et mon esprit qui s'arrête.

Je ne peux rien décrire, alors, je peux peut-être avouer. Je peux confesser l'horreur que j'ai commise. Je me suis rendue malade pour avoir l'impression de vivre. Je me suis affamée pour l'éternité dans le seul but de vouloir exister et d'être jolie. C'est une folie qui m'emporte et qui ne m'a laissé aucune chance. Je ne sais pas quand tout a commencé, à partir de quel moment la maladie m'a emportée. Mais je sais que ce n'est pas ma faute, que je n'ai pas décidé d'être malade. Je n'ai pas décidé que ma maladie porte le nom :

Anorexie. 

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