Il fait noir. J'étouffe . Ils ont recouvert le coffret. Ils m'ont privée de lumière pour le reste de ma vie. Ou de ma mort, plutôt. Je crois qu'ils ont déposé sur le dessus quelques bouquets de fleurs, mais je ne saurai jamais à quoi ces gerbes ressemblent. Pour être tout à fait honnête avec vous, je ne suis pas un fantôme qui visite les gens dans la salle alentour. Je suis simplement couchée dans une position peu confortable. Ils se sont occupés de mon corps comme celui d'une poupée. Quand ils se sont lassés, ils m'ont déposée dans mon coffret, qu'ils ont ensuite sagement refermé. Ils ont posé le tout avec une lourdeur inimiaginable sur le devant de l'autel. Enfin, je crois. Je ne vois rien.
J'entends, oui, j'entends le discours soporiphique du prêtre et les paroles plus qu'humiliantes que Rose-Evi a eu le cran de déblatérer devant les autres.
Je ne comprends pas, je ne réalise pas, il manque quelque chose. Elle ne pouvait pas faire ça sans raison. Je la connais depuis longtemps, ce n'est pas son genre.
Quoi que...
Il est vrai qu'elle aime se sentir observée. Elle a besoin qu'on sache qu'elle est là. Elle a besoin d'être entendue. C'est pour cela qu'elle a pris toutes les punitions préédentes, pour qu'on la remarque. Elle a toujours eu peur de sombrer dans l'oubli le plus profond. Au final, elle a eu peur de se retrouver, un jour, à ma place. Car ce serait trop honteux. Elle n'obtiendrait jamais de reconnaissance, elle ne serait jamais célèbre. Elle disparaitrait, et, ce, pour l'éternité. J'ai eu peur de cela toute mon adolescence ; j'ai eu peur de mourir sans laisser de traces de mon passage sur terre. Alors j'ai écrit, sans attendre plus longtemps, j'ai écris qui je suis. Puis, un jour, j'ai débuté le jeu et depuis j'ai arrêté, car mon identité n'a plus d'importance, parce qu'il n'y a rien a se souvenir de qui je suis. Dans tous les cas, je ne suis qu'une fille parmi tant d'autres qui n'a rien de particulier, comme des milliers d'autres gens. Je ne suis pas une écrivaine célèbre, ni une femme d'influence. Non, je suis une figurante qui passe ainsi dans la foule immense que représente le monde. Il n'y aura plus grand monde pour se souvenir quand les personnes, ici, dans cette salle m'auront rejointe. Je ne suis rien et j'ai trop longtemps espéré devenir quelqu'un que je ne serai plus jamais. Ce jeu, savez-vous, m'a donné cette vision, m'a fait comprendre que je ne devais plus rêver ; que tout ça ne servait à rien, rien d'autre que me tuer. Alors j'ai posé mon stylo, j'ai rassemblé tout ce que j'ai écrit et je l'ai caché, là où tout le monde pourra m'oublier. Ou pas. Cette petite flamme brûle en moi. Mes écrits seront peut-être porteurs de ma reconnaissance posthume. L'espoir ne peut être détruit dans son ensemble ; on voudra toujours croire, même si notre raison le sait. On voudra à jamais croire qu'on sera célèbre, qu'on ne nous oubliera pas mais elle, comme moi, sommes condamnées à la dure et triste réalité. Je suis couchée ici, dans ce cercueil bien sombre et inconfortable et elle est assise ici, à ma cérémonie.
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