chapitre 27
Finalement, Dalton se leva et fit un geste pour partir.
- Allez Vincent, on ne peut pas raisonner le monstre de Nottingham.
-Attendez. Le ton de Rory n'était pas un plaidoyer, mais plutôt un ordre.
Il sourit paresseusement devant le regard confus du comte.
-Qu'est-ce que tu lui as fait, monstre ? Vincent posa son verre sur la table et se leva, renversant son contenu.
Il frappa deux fois la table avec sa main tendue.
-Dis-moi !Rory ne savait pas quelles étaient les intentions du comte et de son laquais, et il n'était toujours pas sûr du rôle d'Éléonore dans tout cela, mais il verra à quoi ils jouent et le découvrira.
Le duc leva les yeux vers les escaliers et sa bouche se tordit en un sourire désagréable.
Eléonore venait d'arriver en courant. Elle regarda autour de la pièce à la recherche de son père et de lord Dalton.
Elle enfila une robe plus simple d'un brun terreux, un peu plus foncé que ses cheveux. Rory se demanda distraitement où elle l'avait obtenue, avant de conclure qu'elle l'avait empruntée à une servante.
Alors même que sa femme entrait, les hommes du duc remplissaient la pièce. Leurs voix rauques brisèrent le silence.
Les tables pour la nourriture n'étaient pas encore dressées, car il était trop tôt, alors quelques hommes les attrapaient tandis que d'autres apportaient les bancs. Puis, ils furent prêts à boire.
Bâillant et les yeux endormis, les spectateurs se tournèrent pour voir ce qui méritait un verre d'hydromel si tôt.
Nicolaï conduisait Naja dans la pièce principale, lui murmurant quelque chose à l'oreille.
La jeune fille rougit et regarda les hommes en colère à la table d'honneur. En voyant le duc, elle fronça les sourcils , mais acquiesça à ce que Nicolaï lui avait dit
Elle se glissa dans la cuisine et partit.Les deux invités agaçants suivirent le regard de Rory.Vincent réprima un cri d'étonnement lorsqu'il vit sa fille se diriger vers lui.
Elle avait la tête baissée, même si elle marchait très vite.
-Pour tous les saints ! Cela ne peut pas être vrai.
Il était sûr qu'elle était morte.
-Père, dit Eléonore sans plus tarder, même si sa voix tremblante trahissait son manque de confiance.
Que faites-vous ici ?Rory observait la conversation avec une indifférence feinte, ne manquant aucun détail de l'échange.
Il s'appuya en arrière sur son siège, croisa les bras et croisa sa jambe blessée sur son genou.
-Je suis venu ici pour te venger.
Vincent descendit de l'estrade à grande vitesse.
Il tenait l'épée à son côté et s'approcha de sa fille.
Eléonore tressaillit légèrement en le voyant avancer.
-Venger ? demanda Eléonore modestement et sans lever les yeux du sol.
Tremblante, elle fléchit légèrement les doigts de sa main.
-Oui, dis-moi ma fille, qu'est-ce que le monstre t'a fait ? demanda Vincent à voix haute, faisant sans doute confiance à la jeune fille pour exposer le monstre devant les soldats saxons.
Il leva une main pour la prendre et la serra fort en signe d'avertissement alors qu'il la traînait devant Rory.
Le comte gardait sa fille à distance sans montrer le moindre souci paternel pour sa sécurité.
Comme elle ne bougeait pas, il lui attrapa le bras et regarda le duc.
- Eléonore, dis-moi ce que le monstre t'a fait.
-Monstre ? grinça Eléonore.
Rory cacha son sourire. Eléonore fit mine de regarder autour d'elle dans la pièce silencieuse, ne semblant pas remarquer la rudesse avec laquelle son père la tenait.
-Ne te ridiculise pas ma fille, ou tu vas me forcer à te frapper, dit sèchement le comte.
Il leva la main en guise de menace, puis la laissa tomber.
-Mais... Eléonore essaya d'avoir l'air innocente, elle ne regardait toujours pas directement le duc dans les yeux.
-Vous avez l'air d'une servante, lança lord Dalton alors qu'il s'approchait de Vincent par derrière.
Il plissa les yeux de manière intimidante pour que l'homme ne le voie pas et, lorsqu'il parlait, il le faisait d'un ton bas et marqué.
-Que lui as-tu fait ?
- Il ne m'a rien fait papa, déclara Eléonore sans plus attendre, ignorant Dalton.Le comte baissa la main, surpris.
La jeune femme recula devant les hommes en colère, demandant de l'aide à son mari par ses yeux.
Rory se leva, mais ne vint pas à son secours.
-Rien qui puisse être considéré comme déshonorant, on m'a bien traité.
-Alors tu es toujours vierge, supposa son père, soulagé.
Bien allons-y cette nuit même, tu épouseras lord Dalton, je n'attendrai plus.
-Non. Eléonore entrelaça ses doigts et se tourna vers Rory, le suppliant de l'aider. Il resta là, immobile, déterminé à voir comment le jeu se poursuivrait.
"Que faites-vous ? Dites-leur ! Dites-leur n'importe quoi, n'importe quoi !"
Eléonore regardait Rory sans pouvoir y croire.
-Partons ! rugit Vincent avec colère.
Il l'attrapa par le bras et la traîna jusqu'à la porte.
-Vous m'avez causé trop d'ennuis !Eléonore chancela mais ne tomba pas, ses pieds traînaient durement dans la paille.
Les messieurs du duc regardaient avec désapprobation, mais ne se levaient pas pour l'aider.
L'un d'eux sortit le couteau de sa ceinture et le posa sur la table.
Tout le monde regardait Rory, prêt à se battre à son signal, mais le duc ne bougeait pas.
Le comte se tourna vers le duc, sans attendre de voir si sa fille lui obéissait.- Je vous remercie d'avoir pris soin d'elle, monseigneur.
Nous partirons, mais si je constate que vous lui avez fait du mal, je reviendrai avec l'armée du roi.
-Non père ! Je ne peux pas épouser lord Dalton ce soir.
Eléonore se tenait entre son mari et son père.
Avec Rory près d'elle, elle trouva la force dont elle avait besoin pour défier à nouveau son père.
Son épaule lui faisait mal à l'endroit où il l'avait saisie, et elle frotta le muscle meurtri.
Elle regarda la foule immobile, les implorant silencieusement de l'aidait mais personne ne bougea.
- Jeune fille insolente ! cria Vincent, ne prenant pas la peine de cacher sa colère grandissante.
Ce n'est pas à toi de prendre cette décision.
Tu as de la chance que Dalton veuille toujours t'épouser après tout ce que tu as fait après t'être enfuie comme ça.
Je t'ai élevée pour que tu sois une dame.
-Oui père, c'est à moi de décider. Je ne l'épouserai pas.
Tu ne sais pas ce qu'il m'a fait ! Eléonore voulait désespérément expliquer quel genre d'homme était Dalton, elle voulait que son père comprenne le véritable monstre qu'était le prétendant qu'il avait choisi pour elle.
Elle ouvrit la bouche, prête à lui expliquer quel genre de trahison Dalton avait commis, et prête à lui raconter ce qui était arrivé à Alma.
Dalton fit un pas en avant, comme pour protester. Il ouvrit la bouche en même temps que Eléonore, mais tous deux restèrent silencieux lorsqu'elle vit Vincent lever la main.
D'un mouvement vigoureux, il lui croisa le visage du revers de la main.
Eléonore partit sur la paille. Son nez saignait et la douleur se propageait sur son visage.
Les larmes lui remplirent les yeux alors qu'elle levait les yeux vers les hommes. Le froncement de sourcils de Dalton se transforma en un sourire. Les deux hommes la regardaient, les bras croisés. Tout son être tremblait.
Le visage de Dalton s'éclaira de satisfaction et celui de Vincent montra sa détermination. Comme elle ne bougeait pas, Vincent alla vers ses hommes.
-Emmenez-la au camp, ordonna-t-il. Allez, Dalton, finissons-en.Rory était surpris que l'homme ait fait autant d'efforts pour frapper sa fille devant tout le monde.
Jusqu'à ce moment-là, il pensait que leur interaction n'était rien d'autre qu'un jeu. Il avait vu Eléonore tomber au ralenti.
La violence de l'impact lui avait fait reculer la tête, le bruit du poing de l'homme contre le visage de la jeune fille était très fort et très réel, et du sang coulait de son nez et de sa bouche.
À l'instant où sa femme toucha le sol, il se retourna avec une force mortelle. Sautant de la plate-forme, il rejeta son bras en arrière et attrapa Vincent au menton.
-Ne touche plus ma femme ! siffla Rory.
L'ancien chancela mais ne tomba pas. Dalton resta bouche bée face à son atrocité, mais il recula d'un pas.
Le duc se tenait devant sa femme pour qu'ils ne la voient pas.
-La prochaine fois que vous toucherez à quelque chose que je possède, ce sera la dernière.
-Ta femme? demanda Dalton en secouant sa crinière blonde.
Non, c'est ma fiancée ! Tu n'as pas le droit de dire une chose pareille.
Vincent, dis quelque chose !-Non, c'était ta fiancée, c'est ma femme maintenant, répondit Rory de son ton de voix le plus raisonnable.
Il entendit Eléonore se tenir derrière lui et, s'écartant, laissa tout le monde la voir.
- Eléonore ? demanda Vincent, incrédule.Il se tourna pour regarder sa fille dans les yeux, lui demandant de nier ce que disait le duc.
-Est-ce correct? Tu as consenti à épouser ce monstre ?
-Ne le traite pas de monstre.
C'est vous les monstres, père. Toi et Dalton.
Eléonore secoua sa robe et passa sa main sur le côté avec lequel elle avait heurté le sol.
Son nez saignait abondamment et elle se frotta la main avec douleur, du sang tachant la manche de sa robe.
-Oui, je suis sa femme, et j'ai volontiers consenti à l'être.
-Tu viens avec moi, nous allons le faire annuler.
Nous allons voir le roi tout de suite.Vincent s'avança pour l'attraper, mais hésita en voyant Rory intervenir.
En gémissant, il chercha de l'aide autour de lui mais n'en trouva aucune.
La pièce se remplit des protestations chuchotées des soldats de Nottingham.
Certains hommes se levèrent même, aucun n'avait touché à sa tasse d'hydromel, car ils gardaient le groupe en vue.
Les invités maussades regardèrent courageusement autour d'eux et reculèrent.
- Ma place est ici, à côté de mon mari.
Il n'y a aucune raison d'annuler le mariage, dit Eléonore en attrapant le bras de Rory.
Et puis, avec une pointe de défi, elle regarda son mari d'un air modeste. Finalement, avec un léger sourire d'adoration, elle se tourna vers son père pour lui dire.
- Le mariage a été consommé hier soir, vérifiez la literie si vous ne me croyez pas, vous êtes arrivés très tard.Rory se tendit à ces mots.
Eléonore le regardait à travers ses cils épais et lui souriait timidement, le suppliant des yeux de la croire.
Il comprit son regard silencieux et hocha la tête.
-Je ne te crois pas, dit courageusement Dalton.
C'est une astuce, où est ta bague ? Tu ne sais même pas ce qu'est la consommation.
Pourquoi dis-tu ces choses ?Il secoua la tête et passa sa langue sur ses lèvres desséchées tout en observant la bouche de Rory.
Ses actions avaient eu l'effet escompté, au grand amusement de Rory, l'homme pâlit de fureur.
Eléonore sourit avec défi à son père.
-Tu es toujours vierge, n'est-ce pas ? demanda Dalton.
Son visage sombre était devenu rouge.
C'est ce qu'ils ont dit.
-Non ! Eléonore tremblait, mais elle ne lâchait pas son bras. Je ne suis plus vierge.
En fait, rien ne pourrait être plus éloigné de la vérité ! Nous sommes mari et femme et, pour information, nous avons consommé notre union au moins quatorze fois hier soir.
Donc c'est irréversible !Par tous les saints ! Quatorze fois en une nuit ! Le duc hallucinait que sa femme ose dire une chose pareille.
Dans le passé, il avait été fier de sa virilité, mais quatorze fois ? Sa petite femme était en réalité bien plus innocente qu'on lui avait fait croire, ou bien plus stupide.
Il fit un réel effort pour ne pas rire.
Sa femme avait de grands espoirs pour lui, et, à mesure qu'elle se rassemblait, son corps était plus que disposé à essayer de prouver que ses paroles étaient exactes.
Les servantes rassemblées là haletaient et marmonnaient de surprise.
Quelques-unes regardaient le duc avec une appréciation et un émerveillement féminin.
Les plus jeunes le regardaient avec horreur et Eléonore avec regret.
Les soldats grognaient d'admiration devant leur seigneur et quelques-uns rirent à cette idée.
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