Place

30 Avril 2035.

Malgré le bruit strident de mon réveil, je prends mon temps pour m'étirer pareil à un chat. Mes muscles sont tellement courbaturés que je ne rêve que de rester dans mon lit, sous la couette chaude. Surtout que ma nuit n'a pas été très bonne, j'ai de plus en plus de mal à dormir seul. Cependant la sonnerie ne me laisse pas l'opportunité de me rendormir.

J'ouvre les paupières et observe un instant mon plafond, réfléchissant à tout ce que j'ai à faire aujourd'hui. Mon esprit me rappelle que je vais voir Blake ce midi. Mes joues rougissent en me remémorant ce qu'il s'est passé il y a moins de trois jours. Un sourire incontrôlable se dessine sur mes lèvres et mes mains se posent sur mon visage pour me cacher inutilement.

Je suis seul dans ma chambre alors après avoir éteint mon réveil, je me replonge dans mes souvenirs...


Blake a sa tête sur mes cuisses et nous sommes chacun sur notre téléphone. Alors que je papote avec Elliott qui me raconte ses dernières aventures avec Hugo, mon beau brun furète sur YouTube, passant du clip d'un artiste américain à une dance practice d'un groupe de danse coréen. Je me laisse bercer par les musiques, fredonnant certaines.

Je ris à une blague de mon meilleur ami ce qui interpelle Blake. Il relève les yeux vers moi et nos regards se croisent. Je lui souris naturellement et il m'imite. Quand son attention se reporte sur sa vidéo, je lâche mon téléphone et commence à jouer avec les piercings qu'il a à l'oreille. Aujourd'hui, il a choisi des boucles noires sauf celle du milieu qui est violette. Je m'attarde plus sur celle-ci.

— Elle est nouvelle ? l'interrogé-je.

Il se contente d'un hum un peu distrait. Je ne m'en offusque pas. Ma main dévie, caresse son lobe puis frôle ses lèvres. Elles sont incroyables. Ni fines ni pleines. Elles sont de cette forme parfaite qui donne envie de les goûter dès qu'on les voit. À mon geste, il les entrouvre.

— Tu me la prêteras ?

Il embrasse mon pouce qui passait sur sa bouche avant de me répondre, tout bas :

— Si tu veux.

Mes doigts courent sur sa peau, reliant les grains de beauté qui parsèment sa joue tel un enfant. C'est soyeux, c'est beau. Bien que son clip ne soit pas terminé, il ferme les paupières, me faisant comprendre qu'il apprécie ce que je fais. Il n'y a donc pas que les câlins qu'il aime.

Je réitère mon geste. Du bout du majeur. Avec toute la douceur dont je suis capable. Son portable tombe sur son torse vêtu d'un simple débardeur blanc. Il est déjà en tenue pour dormir. Mon regard détaille le reste de son corps. Légèrement écartées, ses jambes sont repliées. De par cette position, son short a glissé, laissant visibles ses cuisses musclées. Un vrai régal pour mes yeux.

Mon autre main balaie une mèche qui a épousé les lignes de son visage. Elle s'enfouit ensuite dedans, profitant de la longueur, la douceur. Quand il soupire d'aise, je me penche en avant sans réfléchir et l'embrasse. Bien qu'il soit surpris, il répond à mon baiser sans se faire prier.

Sa main se cale dans mon cou. Il n'y a aucune possessivité dans ce geste, juste de la tendresse. Il m'encourage même à poursuivre bien que la position ne soit pas des plus agréables. Cependant, je finis par me reculer.

Sans que je comprenne comment il s'y est pris, il me tire et je bascule sur lui. Tout mon corps a suivi alors que sa tête a retrouvé le matelas. Nous ricanons comme des gamins puis quand je m'apprête à me redresser, il me garde contre lui, les bras autour de moi, dans un câlin improvisé.

— Tu restes là, souffle-t-il.

Nous échangeons un regard. Je frissonne sous l'intensité du sien. J'aimerais ne pas réagir ainsi, mais j'en suis incapable. Blake est le seul homme qui puisse faire passer autant de désir en un coup d'œil.

— Tu es magnifique, me susurre-t-il.

Mes joues s'enflamment. Une de ses mains se faufile sous le t-shirt qu'il me prête encore et toujours. Elle palpe sensuellement ma hanche avant de remonter sur mon flanc. Mais alors que je m'attendais à ce qu'elle aille plus haut, elle redescend sur ma fesse.

— J'en veux d'autres, déclare-t-il avec une petite moue.

Je souris, attendri. Je me redresse, lui tirant alors un geignement de mécontentement. D'un mouvement leste, je passe ma jambe par-dessus son bassin et m'installe confortablement, sans la moindre gêne. Je fais d'ailleurs bouger le mien à plusieurs reprises ce qui le pousse à se mordre la lèvre.

— Ce n'est pas mieux comme ça ?

Cette fois, ses deux mains se posent sur mes hanches.

— C'est parfait. Maintenant, embrasse-moi !

Je m'exécute docilement. Nous échangeons des baisers langoureux durant lesquels je poursuis mes mouvements lascifs. Je n'ai aucun doute sur le fait que cela nous plaise à tous les deux. Je ne peux pas retenir un gémissement faible quand ses mains prennent place sur mon fessier. Lentement, nous faisons ainsi monter le plaisir.

Puis je me décide à aller plus loin. Je relève son haut et dépose quelques baisers sur son torse puis ses abdos. Je m'en délecte. Je torture longuement ses tétons ce qui semble le satisfaire puisqu'il m'ordonne de continuer. Mes lèvres arrivent à la ceinture de son short, je lui mordille la peau fine de son bas-ventre. Je me déplace de manière à m'insinuer entre ses jambes.

À genoux, je peux lui retirer son habit et le balance plus loin. Son excitation commence à se voir. Je la prends en main et lui inflige des va-et-vient rapides. La voix de Blake s'élève sans retenue. De toute manière, il n'y a personne à l'appartement pour le moment. Je me penche pour lui embrasser à nouveau le ventre et l'intérieur des cuisses. Il a de nouveau plié ses jambes. J'ai envie de lui faire bien plus, mais avec le préservatif, ça gâche un peu mon plaisir.

— Hey, l'interpellé-je tout en poursuivant mes activités sur son sexe. Tu accepterais de faire un dépistage avec moi ?

Son corps se fige à ma proposition.

— Pour qu'on arrête le préservatif, précisé-je.

Il m'adresse un beau sourire et m'annonce :

— Quand tu veux !

Une chaleur m'envahit à cette phrase. Il se relève pour m'embrasser. Je suis bien, heureux. Et c'est sûrement pour ça que je bafouille maladroitement :

— Je peux... tu vois...

Ne trouvant pas le courage de lui dire clairement, ma main libre glisse jusqu'à son intimité et en caresse l'entrée.

— Oh putain, oui ! s'exclame-t-il, enthousiaste.

Il s'assoit et plonge son regard dans le mien. Il est soudain plus calme.

— Mais tu es sûr de toi ? Je ne veux pas que tu te forces.

Je hoche la tête avant de tendre le bras vers sa table de chevet dans laquelle il range toujours les capotes et le lubrifiant. Je lui donne ce dernier et lui présente mes doigts pour qu'il en mette dessus. Il fait ce que je lui ai demandé. Une fois le liquide sur ma main, j'hésite. La fois où nous avons essayé, je n'ai pas réussi. Qu'est-ce qui me dit que ça ira mieux aujourd'hui ?

— Tout va bien se passer, me rassure-t-il en s'allongeant. Je n'ai aucun doute là-dessus.

Il s'empare de mon poignet et l'amène à la bonne hauteur. Il ajoute, les yeux dans les yeux :

— Je veux que tu me prennes. Ici et maintenant.

Je me penche et l'embrasse sensuellement. Dans un élan irréfléchi, j'enfonce un premier doigt pour le préparer. Mon intrusion lui coupe la respiration, mettant fin à notre baiser. Je bouge doucement, pour bien l'habituer tout en accentuant mes gestes sur son sexe.

— C'est parfait, répète-t-il.

Il donne un coup de bassin en avant ce que je prends comme une invitation à passer à la vitesse supérieure. Je ne me fais pas supplier. J'en ai autant envie que lui. C'est le premier homme à qui je fais tout ça et le voir réagir ainsi m'encourage, me transporte, m'excite.

Cette fois, ses soupirs et ses sollicitations ont raison de tous mes vieux souvenirs. Alors avec une assurance que je ne me connais pas, j'attrape un préservatif et l'enfile. Je me positionne de manière à le surplomber, une main à côté de sa tête. Pendant un quart de seconde, j'hésite encore, mais le désir que je lis dans le regard de Blake fait disparaître toute appréhension.

— J'ai confiance en toi, me murmure-t-il.

Il se redresse pour venir m'embrasser à nouveau. Tandis que nos lèvres s'affairent, j'en profite pour lui faire l'amour. Pour la première fois. Avec lenteur et maladresse. Mais cela n'a pas d'importance pour nous...


Je reviens à moi quand mon portable vibre, m'annonçant l'arrivée d'un SMS. Chad me souhaite une bonne journée alors que nous nous rejoignons pour les cours dans une heure et demie. Je ricane et me lève, emportant mon mobile avec moi. Rapidement, je sors de ma chambre sans bruit et prépare mon petit-déjeuner. Les céréales que Sun m'a achetées, un yaourt conseillé par Chad et ma boisson, clin d'œil à Blake.

Je vais m'installer devant la télé. Pendant que je mange, je cherche une chaîne qui me convienne, mais rien ne me plaît. Finalement, je bascule sur Netflix et trouve mon bonheur. J'attrape la briquette que j'avais abandonnée sur la table basse et conduis aussitôt la paille à la bouche. Tout en aspirant le lait à la fraise, je reporte mon regard sur l'écran. Les images se succèdent, me ramenant onze ou douze ans plus tôt, quand nous étions encore à Séoul. Tayo, le petit bus, était mon dessin animé préféré à l'époque.

Un sourire étire mes lèvres quand le générique retentit au début d'un nouvel épisode. J'abaisse ma boisson et fredonne les paroles, me souvenant de toutes. Du coin de l'œil, j'aperçois Sun sortir de sa chambre sur la pointe des pieds pour ne pas réveiller Ezra qui a travaillé toute la nuit. Il va directement dans la cuisine pour faire son thé du matin.

Ma paille en bouche, je suis l'histoire jusqu'à ce que Sun me rejoigne. Il me fait un signe de tête pour me saluer et je l'imite aussitôt. Il s'installe sur le canapé derrière moi, alors que je suis assis par terre. Pendant tout l'animé, nous ne nous parlons pas, notre attention tournée sur les aventures de Tayo, comme lorsque nous étions des gamins.

La fin arrive, je repose la brique vide sur la table et bâille en m'étirant. Je me suis souvent moqué de lui quand il buvait ça, mais je le comprends à présent. C'est bon. D'ailleurs, en pensant à Blake, je récupère mon portable et commence à lui écrire un SMS.

— Ça fait bizarre de te croiser à la maison !

La voix de mon frère passe par-dessus les dialogues de notre dessin animé.

— Pardon ? m'étonné-je, en me tournant vers lui.

— Ta présence ici est de plus en plus rare, tu sais.

— Qu'est-ce que tu racontes ? J'habite là.

— Moi, je le sais, mais je crois que tu l'as oublié.

En me disant ça, un sourire taquin illumine ses traits. Je secoue la tête et marmonne un N'importe quoi bougon en reprenant ma position. Je poursuis mon message, mais ma concentration est mise à l'épreuve, perturbée par la déclaration de mon frère.

— Je ne plaisante qu'à moitié, Dae ! insiste-t-il.

Il serre un court instant mon épaule et m'explique :

— Depuis quelque temps, tu es beaucoup chez Blake. Les soirs, les weekends...

— J'étais là hier !

— Parce que c'était l'anniversaire de mariage de ses grands-parents !

Je me renfrogne un peu à cette vérité puis hausse les épaules, en marmonnant :

— On se voit pour les répétitions, l'audition approche à grands pas.

Mes joues rougissent à cause de mon mensonge plus qu'évident. Sun ricane, accentuant ma gêne. Il a raison. En ce moment, si je ne suis pas en cours, je suis presque toujours avec Blake. Nous passons énormément de temps à danser bien entendu, mais il y a une sorte de routine qui s'est installée entre nous. Une routine que je ne m'explique pas, mais qui me plaît bien trop.

— Les répétitions ont bon dos, dit-il joyeusement. Mais je vais être grand seigneur et faire comme si je te croyais.

Sans même me tourner, je lui donne une tape sur le genou. Juste pour lui montrer mon mécontentement. Mais ça ne me vaut qu'un nouveau rire.

— Allez dis-moi, vous en êtes où pour l'audition ? m'interroge-t-il plus sérieusement.

— On a terminé la chorée, lancé-je avec enthousiasme, heureux de changer de sujet. Vendredi, on l'a présentée à son prof et il a validé. Même la partie qui venait de celle de mon entrée à l'institut. Donc c'est génial !

— Super, mais ça ne m'étonne pas, souffle mon frère alors que je poursuis.

— Violet a trouvé le harnais dont Blake a besoin. Il ne manque que mon corset, mais on devrait le recevoir dans une dizaine de jours.

Le choix de mon accessoire a été plus compliqué. En plus d'en désirer un beau pas trop cher, il fallait qu'il soit assez étroit pour me permettre de danser sans gêne. Puis, quand nous avons fait les recherches, nous avons réalisé que mes mensurations étaient plus petites que prévu pour un corset pour homme. J'en ai été très surpris, mais j'ai bien dû me rendre à l'évidence.

— Vous allez être magnifiques, déclare-t-il en m'ébouriffant les cheveux.

— Surtout Blake, chuchoté-je, pour moi-même.

Je reprends l'écriture de mon message et réussis enfin à l'envoyer. J'entends Sun souffler sur sa boisson pour la refroidir.

— J'aimerais beaucoup rencontrer Blake, dit-il, presque innocemment.

— Tu deviens sénile ? Ou c'est l'amour qui te fait perdre la boule ? Tu l'as déjà rencontré !

Je ricane, me moquant ouvertement de lui.

— C'était à l'expo de Violet ce qui n'est pas le meilleur endroit pour faire réellement connaissance avec quelqu'un et puis vous vous êtes enfuis tellement vite que j'ai dû lui dire trois mots à tout casser.

Je lève les yeux au ciel, en posant mon portable par terre. Il n'y a pas que moi qui aime exagérer à priori.

— Alors tu es dans l'obligation d'organiser un dîner pour tous les quatre.

Je fais demi-tour, me cognant le genou à la table basse au passage.

— Tous les quatre ?

— Tu as raison ! Cinq, Chad voudra être de la partie s'il y a de la bouffe en jeu ! se corrige-t-il, me laissant incrédule.

— Mais... mais... pourquoi ?

Il se penche vers moi, rapprochant nos visages.

— Blake tient une place importante dans ta vie, il est normal que j'apprenne à le connaître, non ? Ça n'a posé aucun problème avec Chad !

Je déglutis. Encore une fois, il a raison. Mais c'est bizarre de mélanger ses deux parties de ma vie.

— Je compte sur toi, Dae-Dae.

Il se lève et retourne dans la cuisine où il se fait réchauffer des restes pour son petit-déjeuner. Je suis, quant à moi, incapable de bouger. Mon esprit est en ébullition, cherchant à savoir quelle place Blake a réellement dans ma vie.

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