Chapitre 21

Stiles avait envie de faire une connerie. Le genre de choses qui lui permettrait de retrouver sa liberté, de quitter ce loft de malheur et de se soustraire à la surveillance de ce loup – de malheur aussi, tiens. Ses yeux bifurquèrent vers la baie vitrée, vers laquelle ils ne cessaient de revenir : il pleuvait toujours. Il eut envie de soupirer. Rien ne lui disait que Derek le laisserait partir une fois que le temps se serait calmé. Têtu comme il était, l'ancien alpha serait capable de prolonger son séjour ici juste pour le plaisir de lui briser les noisettes. De l'humilier à nouveau pour ensuite faire preuve d'un semblant de chaleur à son égard... Qu'est-ce qu'il avait envie de lui dire d'aller se faire foutre ! Techniquement, il le pouvait, rien ne l'en empêchait... Rien ! Mais ces mots-là refusaient de sortir. Tous les autres étaient libres, certains étaient déjà sortis de sa bouche... Sauf ceux-là.


Ceux que ses stupides sentiments se refusaient à prononcer.

- Tu vas continuer de regarder dehors encore longtemps ?

Stiles ne sursauta pas même si la voix de Derek le surprit. Finalement, sa petite haine reprit le dessus ou plutôt... La frustration de se savoir prisonnier, enfermé avec l'homme pour qui il entretenait malgré lui une certaine attirance tout en sachant qu'elle n'était pas réciproque. De toute façon, Derek était une enflure. Qu'il le déteste était finalement une bonne chose.

- Aussi longtemps que tu joueras le rôle de Bowser et moi celui de Peach, rétorqua-t-il d'un air finalement distrait.

Plus il y pensait, plus il avait envie de la faire, sa connerie. Il ne connaissait encore ni sa nature, ni sa forme, mais il l'imaginait nécessaire. Il fallait qu'il fasse... Quelque chose de fort et de suffisamment embêtant pour que Derek le vire. Il n'y avait que ça qui pourrait marcher – si cela ne le faisait pas tuer avant. Il savait fort bien que jouer avec le feu avec un loup-garou qui ne le portait pas dans son cœur comportait des risques certains. Quoiqu'à ce stade-là, Stiles se demanda si la mort ne serait pas une idée à envisager. Bien sûr, ce ne fut pas vraiment sérieux. Il s'interrogea juste quant à ses points positifs, comme le fait de ne plus ressentir quoi que ce soit et de ne plus être sous son joug. Quand il repensait à la façon dont il l'avait fait se sentir... Si faible, si misérable... Il avait la rage.

Oh oui, il la ferait, sa connerie. Il fallait qu'elle soit hard.

- Si je t'embrassais là, comme ça, on est d'accord que tu me foutrais à la porte ? Lui demanda-t-il soudainement, l'air on ne peut plus sérieux.

Peu importait que Derek connaisse son plan – même s'il ne comptait pas faire ce qu'il venait de dire. Il prenait simplement la température pour voir ce que l'ancien alpha pourrait accepter ou ne pas supporter. L'air sincèrement perplexe qu'il afficha fut d'ailleurs comique, au point que Stiles faillit se laisser aller à un petit rire moqueur – qu'il retint au dernier moment. Il devait rester sérieux. Sa demande l'était. Il espéra néanmoins qu'elle le gênait ou, mieux, qu'elle le dégoûtait... Car à défaut de pouvoir réellement l'embêter de façon concrète pour le moment, il pouvait au moins essayer de le mettre mal à l'aise. C'est pour cela qu'il savoura malgré lui l'expression de son visage. Elle changeait de d'habitude, même si elle ne reflétait pas exactement ce qu'il voulait provoquer.

- Si je t'embrassais avec la langue, de façon bien dégueulasse, là.

S'il mettait de côté ses pauvres petits sentiments de pacotille, l'idée le faisait rire. Prononcer ces mots tout en regardant son visage se décomposer – mais dans lequel l'incrédulité dominait –, c'était un régal. Puis ainsi, si la chose venait vraiment à se produire, il aurait tout le loisir d'observer – pendant sans doute pas plus d'une seconde –, le visage de Derek se parer de toutes les émotions possibles et imaginables avant qu'il ne mette un terme définitif à sa vie. Et ce qui était au départ une blague ne lui apparut pas si impossible et peut-être même... Enviable. Disons que le moral de Stiles n'étant pas au beau fixe, bien au contraire, il en venait à penser à des choses auxquelles il n'avait pas l'habitude de réfléchir. Sentait-il que le cours de sa vie n'allait pas aller en s'arrangeant ? Possible. Le fait est qu'il pensait de moins en moins de façon positive. En cela, le retour de ses frères à Beacon Hills y était pour beaucoup... Mais le comportement de Derek aussi. Stiles ne lui pardonnerait pas l'humiliation qu'il lui avait infligée – il n'avait véritablement pas compris les intentions du loup-garou – tout comme il ne se pardonnerait pas d'avoir plus ou moins craqué devant lui. D'avoir lâché quelques larmes. D'être, encore à l'heure actuelle, faible. Sauf que contrairement à ce qu'il s'était passé quelques heures plus tôt, il avait retrouvé un peu d'énergie et de combativité. Il voulait partir et ne comptait pas abandonner cet objectif tant qu'il n'aurait pas tout essayé.

- Tu serais vraiment prêt à faire quelque chose d'aussi stupide pour pouvoir partir ? Finit par lui demander Derek en guise de réponse à sa propre question.

Si la façon dont Derek qualifiait son idée lui fit mal au cœur, Stiles n'en montra rien. Le fait que l'ancien alpha n'était pas vraiment tourné vers les hommes n'était pas quelque chose qu'il ignorait. De même, il savait fort bien que ce qu'il ressentait ne lui serait jamais renvoyé. Mais entendre ce mot-là, « stupide », le toucha malgré tout intérieurement.

- Je suis prêt à tout, Derek.

Ou presque. Mais il n'avait pas besoin de connaître cette nuance-là. Être cash et radical, c'était plus marquant, ça diminuait moins l'intensité de sa déclaration faite d'un ton finalement pas si sombre que cela. Il était un peu sec, un peu désespéré sur les bords également... Mais bon, au moins, il n'avait pas bégayé. A ce stade, chaque petite amélioration de son état était une victoire. C'était dingue comme ses émotions valsaient, instables qu'elles étaient. Stiles se sentait plus actif psychiquement parlant, mais rien ne garantissait que sa motivation dure dans le temps. En fait, elle fluctuait déjà. Il voulait partir, oui. Il le voulait vraiment.

Sauf qu'il savait que cela ne règlerait pas ses problèmes. Il se retrouverait juste à nouveau seul. Mais dès lors, il n'aurait plus à se cacher. La honte, il ne la ressentait qu'en public.

Que devant Derek.

- Tu auras beau essayer ce que tu veux, tu ne mettras pas un pied dehors tant qu'il fera ce temps-là.

Savait-il qu'il avait passé ses dernières nuits dans sa voiture ? La forêt, la toute petite cavité dans laquelle il l'avait trouvé... C'était juste une exception. Il ne réitèrerait pas et de toute façon, il n'avait pas eu l'occasion de s'y endormir – son inconfort y avait été tel qu'il aurait sans doute attendu que la nuit passe. Le fait que Stiles appréciait le confort du loft, sa chaleur, le fait d'avoir pu manger à sa faim – cet enfoiré de Hale cuisinait étrangement bien, en plus –, mais savoir qu'il avait vu certaines de ses plus grandes faiblesses lui pesait. Et il risquait d'en découvrir d'autres si ça continuait. Or, l'hyperactif se sentait suffisamment nu comme cela. Avoir lâché quelques larmes devant lui – de tous ceux qui auraient pu le voir pleurer, il était le pire –, c'était déjà bien trop pour son piètre amour propre.

Et déjà, l'abattement revenait. Car qu'il dorme ici ou dans la petite cavité qu'il avait trouvée dans la forêt, c'était finalement du pareil au même : cette nuit, il la sentirait passer. Bordel, il avait à nouveau envie de pleurer.

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