T E N

THOMAS
faible comme un homme

Je fais glisser mon verre jusqu'à Erwan pour qu'il me le remplisse de Jaeger, vu que je venais de faire un cul-sec. J'suis déjà bien amoché et il n'est que vingt-trois heure trente, enfin j'arrondis parce que concrètement, j'commence à voir double et que j'ai la flegme de me concentrer pour lire les chiffres.

— Tarik, action ou vérité ?
— Action.
— Embrasse Rose.

Tout d'un coup, j'rigole beaucoup moins. Pourtant Mathis qui vient de lancer l'action, lui, est littéralement mort de rire malgré tout ce que je lui ai confié par rapport à la fausse blonde. Putain, j'ai vraiment le pire des potes. Comment peut-il être aussi stupide ?

J'ai vraiment plus envie de jouer. J'attrape mon verre que je vide d'une traite et je me lève. Je ne veux même pas voir ce qu'il se passe, ça me dégoute. J'suis en colère, j'me sens trahi. J'ai envie d'éclater Mathis mais aussi Tarik. Le soucis c'est que autant j'ai possiblement une chance de gagner face à Mathis, même si il est plus carré que moi, autant je sais pertinemment que je n'irai pas chercher la merde auprès du turc. Il fait une tête de plus que moi, va à la salle tous les jours et fait du rugby, troisième ligne et il me défoncerait en une minute top chrono.

Putain, ça me fout la haine.

J'me fous dans le canapé, je sors de ma poche un pocheton et commence à rouler un joint. J'ai besoin de fumer, de me vider la tête, de planer.

Mon cœur en a pris un coup, certes, et encore plus quand j'entends les applaudissements de là où se déroule ce putain d'jeu à la con. Mais c'est surtout mon égo.

Bien évidemment que Rose pourrait se taper Tarik. Il est pas mal, pas trop trop con (bien que plus que moi), et surtout, il n'a personne d'autre dans sa vie. Il n'a pas Maya dans un coin de sa tête.

Et puis en plus, bien sûr que Rose plaît à Tarik. Il faudrait être aveugle pour ne pas avoir envie de se taper une fille comme elle. Elle est super jolie, un visage doux et des yeux époustouflants. Elle a de jolies formes et surtout un putain de charme.

Pourquoi ce débile de Mathis ne m'a pas proposé cet action juste avant, quand c'était mon tour ?

J'arrive à finir de rouler, tremblant à cause de la colère, de l'alcool et aussi du manque même si j'évite de me l'avouer. C'est bien mieux de se mentir à soi-même. J'essaye de me persuader que je ne suis pas accro à cette merde, mais je ne me voile pas la face non plus. Sinon pourquoi je me suis jeté sur mon joint ?

Une fille tente de me parler, j'crois que je la connais mais vite fait. Si je me souviens bien elle s'appelle Olivia et elle est en première ST2S. Mais franchement, j'écoute rien à ce qu'elle me raconte et j'm'en branle.

Elle me frôle plusieurs fois le bras et la cuisse jusqu'au moment où elle décide de poser sa main près de mon genou et d'y exercer une pression, sûrement pour que je me concentre enfin sur elle. Mais je ne fais que me tendre. Je ne veux pas qu'elle me touche, pas comme elle le fait. J'suis quand même pas si con et je devine facilement qu'elle a juste envie de me pécho. Sauf que ce n'est pas elle que je veux, ni ce soir ni pour dans une semaine. Celle que je veux est pourtant dans la même maison, à quelques mètres de là où je me trouve.

Est-ce que c'est vraiment elle que je veux ? Ou est-ce que je la veux juste pour ce soir ?

J'en sais rien. Putain ! Ça me prends la tête.

— Dégage, je siffle, la mâchoire serrée
— Quoi ? Demande Olivia
— Casses-toi de là putain ! J'veux pas te parler, j'veux juste rester seul. Et si j'ai besoin de quelqu'un c'est certainement pas toi.
— T'es qu'un pauvre con !

J'm'en balance de ce qu'elle peut penser de moi. Elle est carrément pas mon type, ne m'a jamais accroché l'œil et n'a pas l'air du tout intéressante.

Cet anniversaire est une véritable catastrophe.

Nous fêtons les dix-sept ans de Sarah, une fille qui était dans ma classe en seconde et qui est maintenant en première ST2S parce qu'elle a redoublé sa seconde. C'est pour ça qu'il y autant de première dans la maison. Sauf qu'ils me semblent tellement peu intéressants.

Pourquoi je suis venu ? Ah oui, parce que Sarah est quand même une super pote et surtout parce qu'elle plaît énormément à Erwan qui essaye tant bien que mal de la pécho depuis nos quinze ans. Et il galère.

Une fois, bien alcoolisée, Sarah m'a confié qu'elle avait un crush sur Mathis. Je n'en ai jamais parlé à Erwan, parce que j'ai toujours eu peur de sa réaction. Est-ce qu'il serait capable de totalement tourner le dos à notre pote ? Ouai. C'est Erwan. Sur un coup de colère, il peut faire certaines actions et ne revient que rarement sur sa décision.

J'me perds un peu dans mes pensées, j'm'endors sur mon joint. Je ne sors de ma transe que lorsque je sens qu'on me le prends.

Montée de pression. J'serai capable de foutre un coup à cette personne.

Alors que je lève les yeux pour voir qui a osé me le prendre, je me retrouve happé par ce regard vert. La fumée blanche s'échappe de sa bouche et voile son visage en dessous de la lumière. Putain ce qu'elle est belle. Rose retire une nouvelle latte, s'approche de mon visage et me le souffle doucement, une lueur espiègle dans les yeux. On est très proche, trop proche. Je sens son souffle alcoolisé, et je ne peux m'empêcher de loucher sur ses lèvres. J'pourrai l'embrasser, là, maintenant.

— Viens, me souffle-t-elle doucement.

Elle attrape ma main et m'entraîne derrière elle. Nous nous retrouvons rapidement à l'étage, dans une chambre décorée tout en nuance de gris. Rose referme la porte derrière elle et se glisse lentement jusqu'à la fenêtre qu'elle ouvre en gros avant de retirer sur mon joint. Je me retrouve comme un con en plein milieu de la pièce, les idées un peu flou. Elle me fair signe d'avancer vers elle et j'me cale à ses côtés. Je récupère le joint qu'elle me tends et tire dessus tout en la regardant. Elle, elle perds son regard au loin, dans les lumières de la ville.

— Pourquoi tu n'es pas venu me parler ?
— Quand ?
— Après l'anniv de Mathis. Il y a eu cette rumeur, mais on en a jamais parlé tout les deux.
— Il n'y avait rien à dire.

Elle pose ses yeux sur moi, ses prunelles m'électrisent. Elle se rapproche un peu, attrapant ma main de libre et nouant ses doigts aux miens. Je ne peux m'empêcher de regarder encore une fois ses lèvres et je me fais violence pour ne pas lui sauter dessus quand elle se mordille la lèvres du bas.

— Moi j'crois que si.

Sa voix est si basse que j'ai l'impression de l'avoir rêvé. Elle commence à ouvrir la bouche pour dire autre chose mais je l'interromps en prenant son visage en coupe.

— Putain de merde.

Et je l'embrasse.

Je sais que là, j'suis en train de faire une connerie. Mais j'en ai envie. Et j'en ai besoin.

Rose lâche ma main pour la poser sur ma hanche et me tirer doucement vers elle. Son autre main se glisse dans ma nuque, ses longs doigts dans mes cheveux. Mes mains se déportent sur sa taille. J'ai l'impression qu'elle n'est pas assez prêt, que son corps est encore beaucoup trop loin du mien.

On approfondit notre baiser et quand elle tire sur mes cheveux, je perds les pédales. Mes mains se glissent sous ses cuisses et je la soulève. Ses jambes se croisent derrière mon dos et elle attrape ma lèvre inférieure entre ses dents. Je ne peux réprimer un grognement. Putain.

Elle se détache de moi, plongeant ses prunelles dans les miennes, la bouche légèrement entrouverte, le souffle court.

Qu'est-ce que je suis en train de faire ?

C'est une pensée qui me frappe de plein fouet. Un visage qui s'imprime au fond de ma rétine et me fait culpabiliser tout ce qu'il vient de se passer. Je dépose Rose et je m'éloigne d'elle rapidement. Je dois partir avant de vraiment franchir toutes les limites. Je ne peux pas faire ça avec Rose. Je ne peux pas.

— Thomas ?
— Je suis désolé. Je dois partir.

Je sors précipitamment de la chambre. Je descends dans le salon, attrape mes affaires et je quitte la maison. Tremblant, je sors mon téléphone et l'appelle, elle. Au bout de la troisième sonnerie, elle me réponds

— J'ai besoin de te voir.
— D'accord. Je suis chez moi.

Je ne perds pas mon temps. Je marche vite et après une vingtaine de minutes je me retrouve dans sa rue. Je la vois, assise sur le banc à côté de sa porte, emmitouflée dans un plaid.

Je m'arrête devant elle, tremblant, la peur au ventre. Qu'est-ce que j'ai fais ? Qu'est-ce que je suis en train de faire ?

— C'est toi que j'aime Maya. Et que toi.

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