E L E V E N
ROSE
l'amour crève dans les rues
↡
Putain c'que j'ai mal. Putain c'que je me sens conne. J'suis assise sur le bord de lit, la tête entre mes mains et pleurant. J'pleure de honte et de dégoût envers moi-même. Et aussi pour mon égo qui vient de s'éclater lamentablement au sol.
J'pensais pourtant que je l'attirais. Tout me le faisais penser. Mais pas suffisamment.
Je sais très bien pourquoi il est parti. Faut pas être sorti de Saint Cyr pour savoir que par rapport à Maya, il regrettait son geste.
J'aimerai crier, mais je ne veux surtout pas qu'on vienne me déranger. Alors j'attends quelques minutes, le temps de me calmer. J'descends doucement, je décide de prendre mes affaires et de rentrer chez moi me coucher. J'me prends un dernier verre de vodka red au passage, le descends d'une traite et me dirige vers la porte.
Mais quelqu'un se met devant moi, m'empêchant de passer. Non. Tout le monde sauf lui. S'il vous plaît, tout mais pas lui.
Malheureusement, quand je relève la tête, c'est bien lui qui me barre le passage. Je réprime mes larmes. Dès que je le vois, j'ai le cœur qui se compresse et la sensation de ne plus arriver à respirer. Benjamin.
— Ça va, Rose ?
Bien évidemment, il me connaît par cœur. Il sait reconnaître quand je viens de pleurer, quand je viens de m'énerver ou quand j'suis au bord de l'implosion. Limite, il sait d'avance la moindre de mes réactions. Je ferme les yeux pour refouler les larmes, j'inspire profondément et le regarde.
J'me perdrais dans ses yeux noisettes. J'y revois tous nos moments, tous nos instants et tout mon amour pour lui.
— Laisses moi passer.
— Pas dans cet état là. Tu crois vraiment que j'vais te laisser seule alors qu'on dirait que t'es à deux doigts de la crise ?
— Va-t-en.
— Non, Rose.
Et alors que je m'apprête à le taper, il attrape mon bras. J'ai l'impression de m'écrouler. Il ne faut pas que je le touche. Mon âme déborde d'amour pour lui mais c'est tellement toxique. Faut que je m'éloigne. Il faut que je l'oublie.
J'pensais que Thomas allait m'aider mais lui-même était poursuivi par son propre démon. Et c'est égoïste de ma part de lui demander de faire un trait sur Maya juste pour ma gueule.
— Je veux rentrer chez moi, je lui dis en posant mes yeux sur lui.
— T'as fumé, fait-il remarquer sur un ton de reproches.
— Et alors ? Qu'est-ce que ça peut te foutre ?
— Arrête de te faire du mal comme ça. C'est pas toi.
— Ah bon ? Et qui te dis que ce n'est pas moi ? Qui te dis que ce n'est pas quand j'étais avec toi que je jouais un rôle ? Si j'ai envie de fumer, c'est mon problème. J'suis plus ta meuf.
Tout part de là. Je ne suis plus sa copine. Et ça depuis maintenant presque un an mais je suis incapable de l'oublier. Surtout quand il revient de temps en temps vers moi pour qu'on couche ensemble, me donner de l'espoir pendant une semaine et ensuite ne pas me décrocher un mot pendant un mois. Il faut que je décroche.
— Je te raccompagne.
— Je n'ai pas besoin de ton aide.
J'essaye d'avoir l'air la plus méchante dans ma voix. Je détache bien les mots et essaye de mettre le plus de venin possible dans ma voix.
— Si tu en as besoin. Je te connais, Rose.
Il est là le soucis. Benjamin me connait. Je crois que c'est celui qui me connait le plus d'ailleurs. Hiara et Alix sont sûrement mes meilleures amies, mais lui, il m'a vu dans mes moments les plus sombres. Il m'a vu tomber et devenir plus sombre. Il a vu chaque parcelle de mon âme se désintégrer. Il m'a vu devenir celle que je suis aujourd'hui.
J'essaye tant bien que mal de retenir mes larmes. Il m'a vu trop souvent pleurer, je ne peux pas lui donner une autre chance de me voir faible. Benjamin sait qu'il m'a gagné, qu'il peut avoir tout de moi. Il faut qu'il pense le contraire pour qu'il me lâche enfin. J'arrive à me dégager de sa main et je passe la porte. Je dois mettre le plus de distance entre lui et moi, lui et mon amour. Je presse le pas le plus possible mais je l'entends m'appeler. Pourquoi est-ce qu'il me fait ça ?
Quelques secondes après, il pose une de ses mains sur mes épaules et je me fige. Benjamin m'oblige à me tourner dans sa direction et à le regarder. J'esquisse un léger mouvement pour me dégager de tout contact physique.
— Tu veux quoi, putain ?
— T'aider.
Je me mets à rire, là en plein milieu de la rue, de la nuit et je titube légèrement. Je suis plus défoncée qu'alcoolisée, mais je sens quand même l'effet de la boisson sur mon corps. Je le sens surtout là alors que je n'arrive plus à m'arrêter de rire suite à sa connerie. M'aider ? M'aider par rapport à quoi ?
— Si tu veux vraiment m'aider, casses-toi de ma vie.
— Tu crois que c'est facile de t'oublier ? Tu crois vraiment que je pourrai passer à autre chose après tout ce qu'on a vécu ensemble ?
— C'est une putain de blague que tu me fais là.
Et surtout tellement égoïste de sa part ! Ce n'est pas moi qui ai décidé de mettre fin à notre relation l'année dernière. Je n'avais rien demandé à personne et je ne l'avais même pas vu venir d'ailleurs. « Je veux profiter de ma jeunesse. » Voilà l'excuse qu'il m'avait sorti pour m'expliquer son choix alors que j'étais en train de retenir mes larmes assise sur un banc dans le parc le plus fréquenté de la ville. J'devais être ridicule à ce moment-là.
Benjamin essaya d'attraper ma main mais je recule d'un pas. Il avance alors ses doigts vers mon visage et il frôle ma joue. Je pourrai mourir à son contact avec tout ce que je ressens pour lui. Mon cœur en déborde d'amour à ne plus savoir quoi en faire. Et lui, il est là, en train de se foutre de ma gueule. Je repousse son bras d'un mouvement sec et essaie de mettre encore plus de distance entre lui et moi.
— J'te déteste.
Et à cet instant-là, y'a pas plus vrai.
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