On a roulé en silence jusqu'à la plage la plus proche, je ne savais pas vraiment où aller, elle non plus. Elle s'est assise dans le sable et a enterré ses pieds. J'ai voulu m'asseoir près d'elle et je me suis rappelé que je détestais avoir du sable sur ou dans mes habits.

Je me suis quand même assis.

J'ai fait semblant de regarder la mer alors que je passais mon temps à guetter le moindre mouvement de sa part. Elle a enlevé ses mains du sable, les a secoué et m'a envoyé du sable sur le jean.

Je n'ai rien dit.

« Tu te souviens quand tu m'as demandé pourquoi Amélie se serait suicidée ? »

Elise me regarde et sa respiration est plus rapide.

« Tu m'as répondu qu'elle était idiote. »

Elle hoche la tête, la baisse, la relève et elle sourit. Un sourire désespéré.

« J'en suis sûre maintenant, elle était complètement stupide. »

Elle frappe contre le sable et je vois déjà des larmes se former.

« Incapable de vérifier la pesée de sa poudre ! »

Je me demande si je dois la prendre contre moi, la serrer. Ils font ça dans les films mais je crois qu'Elise me donnerait un coup, involontairement  j'espère.

« Elle était crédule et stupide et elle se croyait cool ! »

Elle se lève soudainement faisant voler plus de sable autour d'elle, elle parle fort en regardant la mer.

« Elle était bête, elle s'est droguée toute seule, elle s'est tuée toute seule ! »

Sa voix a déraillé, on aurait dit qu'elle essayait de rire et de pleurer à la fois.

« Elle est morte par erreur, elle est morte parce que c'est une idiote ! »

Elle a regardé le ciel en soupirant, elle a ravalé ses larmes. J'étais encore assis dans le sable, mon jean couvert de sable, et je me suis étonné à prendre la parole.

« Tu es fâchée après elle ? »

« Oui ! »

« Tu veux fumer ? »

« Merde, pourquoi pas. »

Elle se laisse tomber lourdement à côté de moi, elle prend la cigarette et la place entre ses lèvres. Je lui allume et elle soupire doucement la fumée. Je n'en prends pas, je la regarde.

Elle finit par prendre encore deux taffes avant de tousser. Elle me tend la sienne, elle a la marque rosée de son gloss dessus. Je pose mes lèvres dessus en tentant de ne pas penser à la texture douce et collante de son maquillage. Elle laisse tomber sa tête sur mon épaule, je l'entends respirer doucement, peut-être qu'elle essaie de se calmer, en tout cas c'est agréable d'être si près d'elle.

« Je veux lancer des œufs et des tomates pourries à ce type. » Dit-elle en relevant la tête et se décoiffant. Ses mèches brunes tombent sur son front, ça me donne envie de lui replacer.

« Allons-y alors. »

Elle me regarde les yeux écarquillés, et un petit sourire sur le visage.

« Pardon ? »

Sa voix devient plus joyeuse et le vide de ses yeux se remplit d'une étrange douceur quand elle me regarde.

« Tu as dit que nous étions ici pour l'aventure ? »

Elle acquiesce, je me lève avant elle et lui tend ma main.

« Allons-y. »

Elle la prend et ne la lâche plus jusqu'à ce qu'on atteigne une petite épicerie.

Je me sens libre.