PARTIE I - Chapitre 21

Hello la compagnie ! 

Long time, no see... Pas évident de poster par les temps qui courent, entre ma grossesse, mon déménagement, mon pas-encore-tout-à-fait-emménagement, les dernières semaines ont été chaotiques. SEULEMENT, je vois passer vos demandes de chapitres et comme le 21 est écrit depuis un moment, je me suis dis que j'allais vous le poster... pour ne pas vous laisser comme ça plus longtemps quand même ! C'était un peu cruel, je l'avoue... Il restera ensuite le chapitre 22 et 23 qui viendront clorent la première partie de l'histoire et pour être honnête, j'ai commencé le 23 mais ne l'ai pas encore terminé, donc croisons les doigts pour que j'y arrive avant la naissance de mon deuxième baby... Haha  ! Je ris mais je pleure un peu aussi...

SO ! This is it, la suite, là voilà, elle est là, enjoy !

Hâte d'avoir vos retours :-D

***

— À quoi jouez-vous ? gronde-t-il sur un timbre dangereux, féroce, particulièrement animal.

Ma peau se couvre de chair de poule et mon estomac se leste de plomb. Il est furax et ça ne l'a jamais rendu aussi désirable. Or, en dépit de ma nudité, je ne me gêne pas pour le manger des yeux, incapable de m'en empêcher, avide de choses interdites qui ne devraient même pas me traverser l'esprit.

— Quel est le problème ? minaudé-je en calant l'une de mes boucles derrière mon oreille. Ce n'est pas ce que vous vouliez ?

J'ai beau essayer de la jouer cool, relax et de faire comme si tout cela ne me touchait pas, je prends conscience de la rapidité avec laquelle ma poitrine se soulève et s'abaisse au rythme de ma respiration.

— Cessez de me prendre pour un con, j'ai passé l'âge, m'admoneste-t-il avec ardeur, la mâchoire crispée. Ce n'est pas ce que j'entendais lorsque je vous ai demandé de vous changer et vous le savez très bien.

Légèrement incliné vers moi, il m'observe sans bouger, les yeux insondables et scrutateurs. Nos visages sont trop proches et ma poitrine flambe de désir. Il suffirait que l'un de nous deux s'avance juste encore un peu pour que nos lèvres se touchent.

— Vous n'aimez pas la vue ?

Mon impertinence lui cloue le bec un quart de seconde avant de lui arracher un petit rire rauque et mon cœur se disloque dans ma poitrine.

— Vous êtes insupportable, peste-t-il en secouant la tête.

Même si nous sommes suffisamment proches l'un de l'autre, je constate avec amusement qu'il s'efforce d'éviter de jeter des coups d'œil en dessous de mes épaules. Il en a envie, je le sens, mais sa conscience et sa bonne éducation l'en empêchent.

De mon côté, n'en ayant plus rien à foutre, j'incline doucement la tête sur le côté et après un court instant de silence aussi chargé d'électricité qu'un éclair, je murmure :

— Regardez-moi, Térence

Ses yeux reviennent lentement à moi puis sombrent dans les miens, incandescents et acérés.

— Non, regardez-moi, en entier.

Je le vois se tendre dans un mouvement imperceptible, comme si tous ses muscles se bandaient en même temps. Son expression a beau ne rien laisser filtrer, je sais qu'il lutte pour ne pas céder et le spectacle de son combat intérieur est époustouflant de sensualité.

Une série de petites étincelles se mettent alors à crépiter sur toute la longueur de mon épine dorsale et, pendant une seconde, mon souffle se dilue dans la flamme de ses iris, avant qu'il ne déglutisse, puis s'autorise enfin à contempler ce qui lui est défendu.

Effrontée et séductrice, je redresse légèrement les épaules et le laisse me détailler avec lenteur, exigence et une impudeur qui m'excite si violemment que je manque de gémir à voix haute. Personne ne m'a jamais regardé comme ça, n'a jamais admirer les courbes de mon corps avec autant de culpabilité et aussi peu de scrupule.

— Vous aimez ce que vous voyez ? haleté-je, très sérieusement.

Je l'entends à peine grogner tant le son des martèlements de mon cœur bourdonne bruyamment dans mes oreilles. Tous les atomes de mon être se tendent vers lui, le désirent. Plus que tout. C'est chimique, indubitable.

— Plus que je ne pourrais jamais l'admettre..., souffle-t-il d'une voix chaude, lascive, primale.

En l'entendant, mon pouls s'emballe encore davantage, se met à battre à toute vitesse, tandis que ma respiration à bien du mal à tenir le rythme. Son aveu est terrible. Pour lui, pour moi, pour le peu de retenue qu'il reste encore entre nous et qui pourrait nous empêcher de commettre une connerie.

Ma poitrine monte et descend contre lui, frôle inlassablement les brandebourgs de sa veste alors que des petits picotements crépitent au bout de mes tétons. Mon Dieu, j'ai tellement envie de lui. Je voudrais qu'il me touche – volontairement, rien qu'une fois, juste pour éprouver l'effet que cela me ferait.

Excitée comme une folle, je serre les cuisses l'une contre l'autre, submergée par l'envie violente de frotter mon sexe contre l'une des siennes pour apaiser un tant soit peu la tension qui le fait palpiter. Trépignante, je le scrute entre mes paupières mi-closes, alourdies par le désir.

— Touchez-moi.

Le long de ses flancs, ses poings se serrent.

— Non, tranche-t-il d'un ton calme et catégorique qui me blesse malgré moi.

— Vous n'en avez pas envie ?

Malgré mon assurance, ma voix manque d'aisance.

— Ce n'est pas la question.

Sans le quitter des yeux une seconde, ma main s'enroule autour de son poing et étonnement, il me laisse le délier, puis nouer mes doigts aux siens.

— Alors, pourquoi pas ?

Ses phalanges glissent contre les miennes, longues et rugueuses. La sensation me fait trembler de la tête aux pieds et durant un court instant, l'essentiel de ce qui compte dans ma vie se concentre dans cette innocente étreinte, jusqu'à ce qu'il ne réponde :

— Parce que vous appartenez à mon frère.

L'évocation de Léandre me fait grimacer et envoie dans mon cœur une flèche empoisonnée à l'acide. Écœurée, je le lâche et recule d'un pas.

— J'appartiens à qui je décide d'appartenir et là, tout de suite, je ne lui appartiens pas du tout ! craché-je avec emportement tout en pointant le sol du doigt pour appuyer mon propos.

Il fait claquer sa langue sur son palet en signe de désapprobation, puis, dans un soupir étonnement tendre, il articule :

— Ce n'est pas aussi simple.

Ça l'est pour moi, susurré-je sans plus aucun filtre, bien décidée à obtenir de lui une quelconque réaction. À vrai dire, je n'ai jamais eu autant envie qu'un homme me touche...

— Pas même Léandre ? me teste-t-il, rusé.

Je pince les lèvres, dédaigneuse, en pensant à ce dernier, à ses talents au lit que je ne pensais réservés qu'à moi-seule. Quelle putain d'idiote.

— Votre frère ne tient même pas la comparaison.

C'est mesquin, je le sais, mais j'avoue tirer un certain réconfort dans le fait de dénigrer ses performances. Surpris, il reste une longue seconde, peut-être même plus, à me dévisager, cherchant manifestement à comprendre les raisons d'une telle désobligeance.

— Je vais faire comme si vous n'aviez jamais dit ça, rétorque-t-il avec une certaine prudence.

— C'est la vérité.

— Vous êtes ivre, réagit-il comme si cela justifiait tout.

In vino veritas.

Ma sagacité lui tire un petit rire bas puis, après avoir lâché un soupir las, il fait craquer les os de sa nuque en basculant sa tête de droite à gauche.

— Dites-moi que vous ne ressentez pas la même chose et je vous laisserais tranquille, assuré-je sans une once de sincérité.

Il me lance une œillade qui m'indique qu'il n'en croit pas un mot, non plus.

— Vous faites erreur sur mes intentions, Elsa, affirme-t-il, néanmoins.

J'esquisse une moue goguenarde en baissant les yeux sur le prodigieux renflement de son entrejambe.

Et ça ? C'est le fruit de mon imagination, peut-être ?

— Visiblement votre corps n'est pas du même avis...

Il baisse la tête sur son érection, puis la relève sans afficher le moindre embarras.

— Que voulez-vous que je vous dise ? Vous êtes à moitié nue et je suis un homme en parfait état de marche.

Sa mauvaise foi est tellement ahurissante qu'elle me laisse bouche bée un quart de seconde.

— Sérieux ? finis-je par m'exclamer, révoltée par un tel excès de stoïcisme. Après tout ce qui vient de se passer, vous allez réellement mettre ça sur le compte d'un réflexe physiologique ?

— Aussi réel que deux et deux font quatre, rétorque-t-il aussi raide que la justice, ce qui m'énerve encore plus.

— Bon sang, vous êtes plus lâche que je ne l'imaginais ! Vous qui êtes catholique, vous êtes au courant qu'une faute avouée est une faute à moitié pardonnée, n'est-ce pas ?

Mon insolence glisse sur lui sans l'atteindre et d'une voix parfaitement maîtrisée, il me répond :

— Je ne confie mes transgressions qu'à mon confesseur.

Terriblement vexée qu'il puisse nier l'évidence avec autant d'aplomb et sentant qu'il ne lâchera jamais rien sur le sujet, même si je reste persuadée que je lui plais – qu'il le veuille ou non – mon expression se met à changer, se fermant à double tour. Lorsqu'il le remarque, son regard dur est aussitôt traversé par une brève lueur de remords, me blessant alors encore un peu plus dans mon orgueil.

Oh, Madonna santa! grogné-je à voix basse en me détournant de lui dans l'intention de partir pour de bon.

Seulement, alors que je commence à tourner les talons, je l'entends murmurer pour lui-même un : « Seigneur, je vais le regretter... », qui me fait aussitôt froncer les sourcils et la seconde d'après, je sens sa main s'enrouler autour de mon poignet pour me retenir et m'attirer contre lui.

Prise par surprise, mon cœur fait un looping lorsque je sens son corps se mouler contre le mien – toujours dénudé. Ne sachant soudain plus quoi faire, je me raidis dans ses bras, les muscles crispés et les prunelles rivées sur la base de sa gorge.

— J'ai manqué d'honnêteté, souffle-t-il à quelques centimètres du haut de mon front, d'une voix désormais altérée qui fait vibrer mon estomac.

Je tente un bref regard dans sa direction avant de baisser à nouveau les paupières, troublée. Il y a dans ses yeux un feu dévastateur, éblouissant, un feu qui se consume à une vitesse inquiétante. J'aimerais lui demander à quel propos il m'a menti, mais j'en suis incapable, l'esprit encore trop subjugué par la vision de la beauté exaltée de son expression.

— Vous m'attirez, avoue-t-il d'une intonation un brin sur la défensive, comme s'il s'en voulait de ressentir une chose pareille. Vous m'attirez comme je l'ai rarement été dans ma vie. C'est ce que vous souhaitiez entendre ?

Une onde incandescente parcourt aussitôt ma colonne vertébrale et sous son effet, je ferme brièvement les yeux. L'entendre formuler son envie de moi de manière si décomplexée m'embrase au point de me faire trembler contre lui.

— Et après ? poursuit-il en glissant son index sous mon menton pour réaligner nos deux visages. En quoi cela nous avance ? Aussi tentant soit-il de pouvoir vous toucher, vous êtes la petite amie de mon frère et j'ai le double de votre âge.

Un sentiment de déception me submerge, frustrée de constater qu'il est bien plus raisonnable que moi. Pourquoi faut-il qu'il soit toujours si moral ? Ne peut-il pas débrider sa conscience, transgresser ses principes, au moins pour cette nuit ? Même si je sais qu'il a parfaitement raison, quelque chose en moi aurait voulu qu'il lâche prise, qu'il soit égoïste et ne pense à rien d'autre qu'à ses plus bas instincts.

— Léandre ne se gêne pas pour aller voir ailleurs, lui..., argué-je, puérile, dans l'espoir vain que ça le fasse changer d'avis.

Étonné par un tel aveu, il me considère un instant, puis après avoir sondé la sincérité de mon expression, il passe une main dans ses cheveux en lâchant un grondement contrarié. Visiblement, l'information ne l'étonne qu'à moitié, mais semble toutefois le décevoir.

— Et j'en suis sincèrement désolé pour vous. Léandre est... (il marque une pause, contracte la mâchoire, puis passe sa langue sur ses lèvres sans terminer sa phrase) ... Je ne suis pas comme lui, Elsa.

— Non, bien sûr..., bougonné-je, sans la moindre trace d'ironie, malgré tout mécontente de ne pas obtenir ce que je veux.

— Pour ce que cela vaut, mon frère est un fieffé abruti.

La lueur d'empathie qui passe dans ses prunelles me hérisse tout aussitôt et encore une fois, je recule.

— Non, ne soyez pas gentil, je n'ai pas besoin de votre compassion.

— Alors de quoi avez-vous besoin, Elsa ?

De brûler contre ta peau pour étouffer la douleur qui fait mal à la mienne

— D'oublier.

... ce que j'éprouve quand tu me touches et surtout quand tu ne le fais pas.

— Quoi donc ?

Tout à coup, le corps en feu et le cœur submergé par un tumulte d'émotions accablantes, je m'écarte de lui – pour de vrai cette fois – obnubilée par l'envie inopinée de plonger dans l'eau fraîche de la rivière pour noyer toute la merde que je ressens.

— Tout, réponds-je vaguement en l'enveloppant d'un dernier regard à vif avant de me détourner pour rejoindre le rivage.

Une nouvelle fois, il me surprend lorsque je l'entends me suivre et quand, dans mon dos, il me demande tout bas :

— Moi ?

Surtout vous.

J'esquisse un bref sourire en devinant le soupçon d'inquiétude dans sa voix, puis pivote pour lui faire face. Sans lui répondre, je le dévisage longuement, le regard valant mille mots et le cœur douloureusement serré dans la poitrine. Il est inutile de le lui confirmer, il a très bien compris et à l'inverse de ce que l'on pourrait imaginer, il ne s'en enorgueillit pas, bien au contraire.

Sans attendre davantage, je m'avance dans l'étendue sombre, agréablement surprise par sa température, puis finis par y plonger carrément. Après plusieurs longues secondes à nager sous l'eau, oubliant un instant les soucis qui m'éreintent, je finis par émerger doucement avant de constater, étonnée, qu'il est encore là.

Revigorée par ma baignade et l'esprit désormais plus clair, je lisse mes cheveux vers l'arrière, puis marche jusqu'à lui avant de sortir de l'eau, la peau humide et frissonnante. En dépit de ma nudité, je constate que la tension sexuelle, qui crépitait auparavant entre nous, s'est nettement estompée, soulageant ainsi considérablement la pression sous mes côtes. J'ai beau être toujours seins nus, il me laisse l'approcher sans plus la moindre trace de concupiscence dans ses yeux.

Une fois devant lui, il me tend sa veste.

— Tenez, mettez cela, vous allez attraper froid.

Reconnaissante, je le remercie du bout des lèvres, puis enfile cette dernière, retrouvant enfin une tenue légèrement plus décente. Me sentant soudain étrangement exténuée, je pousse un profond soupir et me laisse tomber à ses côtés pour m'allonger sur l'herbe.

Après avoir observé un instant les étoiles au-dessus de ma tête et alors qu'il est encore debout, je lui demande :

— Pourquoi l'amour fait-il si mal ? Rassurez-moi et dites-moi que ça s'arrange en vieillissant ?

En entendant ma question, il se retourne, puis, à ma grande stupéfaction, vient s'asseoir à côté de moi. Malgré son imposante carrure, je suis ébahie par la souplesse avec laquelle il manie son corps lorsqu'il se plie en deux pour poser ses fesses sur le sol. Une fois sur la pelouse, il cale tout naturellement l'un de ses coudes sur son genou plié avant de répondre :

— J'aimerais pouvoir vous l'assurer, mais cela serait vous mentir. L'âge ne nous fait pas aimer moins, c'est même plutôt le contraire. En revanche, l'expérience permet de relativiser la douleur. À vingt ans tout parait insurmontable, mais vous verrez que l'on devient plus raisonnable avec le temps.

Sa réponse me déprime. Si je comprends bien, non seulement la vie continue d'être douloureuse, mais en plus de ça, elle devient chiante. Tu parles d'un futur réjouissant...

Blasée, je soupire à nouveau, puis murmure :

— Je ne sais pas si j'ai envie de devenir raisonnable...

Je l'entends arracher un brin d'herbe qu'il fait aussitôt rouler entre son pouce et son index.

— Honnêtement ? Je ne vous le recommande pas.

Son petit conseil me fait glousser et sans pouvoir m'en empêcher, je me laisse rouler sur le flanc pour lui faire face, une main calée sur la nuque. L'attention focalisée sur ce qu'il a entre les doigts, je l'observe, intriguée.

J'aimerais tellement pouvoir percer l'énigme qu'est cet homme, découvrir ce qui se cache réellement derrière ses mille et une facettes. Il y a un truc sous sa surface qui m'attire, m'excite, me rend avide de plus. Quelque chose qui rayonne, m'incendie, me laisse pantelante et fiévreuse. C'est charnel.

— Comment étiez-vous à mon âge ?

Pensif, il noue avec habilité le brin pour en faire un petit nœud plat.

— Heureux, réplique-t-il finalement avec une franchise et un naturel si déconcertants qu'ils me font hausser les sourcils.

Pour être sincère, je m'attendais à quelque chose de plus quelconque, une réponse ennuyeuse et formelle, quelque chose du style : « J'étais un jeune chien fou, immature et insouciant. ». Mais manifestement, le comte d'Alayone ne fait pas comme tout le monde.

— Vous dites ça comme si vous ne l'étiez plus...

— N'exagérons rien, je le suis moins, c'est tout.

Son honnêteté me porte un coup au cœur. Bon sang, mais comment est-ce possible ? Comment un être si fascinant peut-il être malheureux ? C'est tragique et... obsédant. Si je n'étais pas qui je suis, je crois qu'il me rendrait folle. Folle d'envie de changer la donne, d'obtenir de lui ce que les autres n'ont jamais su avoir. Sans déconner, ce type est un danger public pour le cœur des femmes. Un vrai piège à gonzesses. Sublime et malheureux : le jackpot pour toute maso qui se respecte.

— Mon Dieu, c'est hyper triste, ne puis-je m'empêcher de déclarer avec une certaine spontanéité juvénile.

Il esquisse un petit sourire flegmatique qui creusent joliment les rides autour de ses yeux. Je manque d'air. Bon sang, le charme de ce mec n'a vraiment aucune limite...

— Je me console autrement.

L'esprit encore un peu alcoolisé, je me redresse sur ma main, ahurie par le sous-entendu de sa déclaration.

— Ne me dites pas que vous êtes du genre à compenser par le sexe ?!

— Non, petite insolente, réagit-il du tac au tac sans cesser de sourire, le sexe m'apporte du plaisir, pas du bonheur.

Ah. Merde. Oui, bien sûr. Enfin... comment ça ?

— Ah bon ? Je pensais pourtant que les deux allaient de pair.

— En partie, mais pas uniquement, contre-t-il avec une douceur qui me file des frissons. Même intense, le plaisir est éphémère, frivole, inconstant, tandis que le bonheur, lui, est surtout spirituel, plus profond et durable.

Je le dévore des yeux, fascinée par la façon dont il parle de toutes ces choses qui me semblent parfois si abstraites, si obscures. J'ai souvent tendance à oublier qu'il est plus vieux que moi et qu'à son âge, la vie a moins de secrets pour lui qu'elle en a pour moi.

— La Tsarine ne vous rend-t-elle pas heureux ?

L'un de ses sourcils s'arque sur son front lorsqu'il entend le surnom désobligeant de sa maîtresse et je sens directement mes joues rougir d'embarras en réalisant que je n'étais pas censée l'utiliser en sa présence.

Oups.

— Antonina est beaucoup de choses merveilleuses, affirme-t-il avec une tendresse affective qui provoque une petite pointe de jalousie dans ma poitrine, mais elle ne comble pas le vide.

Arf, c'est dur. Est-ce qu'elle est au courant ?

Des bribes de leur conversation dans le labyrinthe me reviennent alors en mémoire. « Ce que tu veux de moi, je ne peux pas te le donner. ». Tout est plus clair maintenant. Et Alexandra dans tout ça ? Comblait-elle le vide, elle ? Ou ce dernier est-il apparu après sa mort ? Difficile d'imaginer que l'on puisse avoir un tel impact sur un tel homme, même en étant plus là.

Quelle... chance.

— Pas comme le faisait votre femme ? tenté-je au culot, n'étant plus à une effronterie près.

Un muscle se contracte sur sa mâchoire et son expression se durcit.

— C'était ma femme, la question ne se pose pas.

Un silence légèrement pesant s'installe entre nous, le temps que nous rassemblions nos pensées, jusqu'à ce que, trop impulsive pour m'en empêcher, je lâche :

— La pauvre, franchement, je la plains...

Son expression devient espiègle avant qu'il ne rétorque :

— Je vous confie mes tourments et c'est elle que vous plaignez ?

Je lâche un petit rire incontrôlé en baissant la tête et je sens qu'il en profite pour m'observer. Perturbée par le poids significatif de son regard, j'humecte mes lèvres, prend le temps de reprendre ma respiration, relève les yeux puis explique :

— Non, je pense simplement qu'il doit être difficile de ne vous avoir qu'à moitié.

Dans un climat soudain délétère, nous échangeons un long regard avant que ses prunelles ne se voilent et que d'une voix sourde, il déclare :

— Elle connaissait les termes.

— Les termes..., ricané-je en levant les yeux au ciel. Êtes-vous toujours aussi clinique ?

— Rarement une fois que ces derniers ont été acceptés par ma partenaire.

Dieu tout puissant.

Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire ? Qu'il est du genre débridé et décadent ? Qu'il fait ça sans retenue ni morale ? L'image carrément érotique qui s'impose alors à moi déclenche une série de frissons électriques sur ma peau et fait tendre à rompre mes muscles intimes.

Pense à autre chose, pense à autre chose...

— Que faisiez-vous avant de reprendre la propriété familiale ? lancé-je précipitamment pour changer de sujet.

— C'est un interrogatoire ?

Son sourire indolent – d'une séduction folle, me donne envie de lui grimper dessus.

— C'est une conversation civilisée, contré-je avec malice, mais en êtes-vous seulement capable ?

Ma provocation le fait rire spontanément et comme les très rares fois où il le fait, j'en perds ma volonté de respirer.

— J'étais pilote dans l'armée de l'air.

J'ai à peine le temps de me remettre de son éclat de rire que sa réponse fait décrocher ma mâchoire. Non mais c'est une blague ? Pilote ? Sans déconner ! Ne pouvait-il pas me dire un truc moins... excitant ? Du style « assureur » ou « comptable », par exemple ? Sérieusement, je suis sûre que si je tape : « Top 10 des métiers les plus sexy » sur Google, le pilote arrive en première position.

— Vous plaisantez ? m'écrié-je avec un peu trop d'enthousiasme.

Ne l'imagine pas en uniforme, ne l'imagine pas en...

— Absolument pas, affirme-t-il avec une assurance absolue.

— Oh misère, mais vous le faites exprès ou quoi ?

Ne comprenant pas le sens de mes propos, ses paupières se plissent, confus.

— Je ne vous suis pas.

— Laissez tomber, ricané-je en balayant l'air d'un geste de la main. Est-ce que cela vous manque ?

Alors qu'il réfléchit à sa réponse, je prends conscience de l'absurdité de la situation. Lui et moi, en tête à tête, assis sur l'herbe à bavarder à la belle étoile comme deux amis qui auraient fait ça toute leur vie... C'est étrange et étonnamment naturel.

— Non, pas tellement, avoue-t-il. J'ai beaucoup aimé voler pendant plus de dix ans, mais j'ai aussi toujours eu conscience que c'était provisoire. Depuis ma naissance, j'ai été élevé dans l'optique d'endosser le rôle qui est désormais le mien. Je n'ai jamais eu la fantaisie de croire que je pouvais faire autre chose de ma vie. Au contraire et je suis reconnaissant d'avoir eu la possibilité de pouvoir faire ce que j'ai fait, sans contrainte.

— Voilà qui est très sage de votre part, plaisanté-je, impressionnée par tant de discernement. Et si vous n'étiez pas qui vous êtes, qu'auriez-vous été ?

— J'aurais probablement fait carrière dans l'aérospatial.

Bien entendu, quoi d'autre ?

— Alors vous aimez l'espace ?

— Il me fascine.

J'incline légèrement la tête sur le côté.

— Vraiment ? Moi, il aurait plutôt tendance à me faire peur. Toute cette immensité, ce vide inexploré aux limites inconnues dans lequel on peut se perdre à tout jamais. Je préfère admirer tout ça depuis la terre bien ferme, affirmé-je en tapotant le sol à côté de moi.

— D'où votre intérêt pour l'histoire et le patrimoine, j'imagine ? présume-t-il avec perspicacité.

J'acquiesce d'un mouvement de la tête avant de me redresser, puis de replier mes jambes sous mes fesses.

— J'aime comprendre ce qui m'entoure, y trouver un sens, et tout ça ne serait pas possible sans l'exploration du passé. Je suis sûre que vous serez d'accord avec l'idée que pour comprendre qui nous sommes, il faut savoir d'où nous venons. L'un ne peut pas aller sans l'autre. Seule la continuité dans le temps fait l'identité d'un individu, d'un pays et d'une nation. Il y a tant de choses à apprendre de notre histoire. Comment ne pas respecter et entretenir un tel héritage ? Qu'il soit glorieux, sanglant ou même parfois honteux.

Prise dans l'engouement de ma tirade, je réalise après un moment qu'il me fixe avec un intérêt tout neuf, différent, qui fait trépider mon cœur.

— Désolée, dis-je en rougissant d'embarras, je pourrais en parler pendant des heures...

— Je vous en prie, ne vous excusez pas.

Il continue à me dévisager avec lenteur et intensité, comme si, malgré toutes ses admonestations intérieures, il n'arrivait pas à juguler l'intensité de ses pensées.

— Pourquoi avoir choisi les monuments historiques ? embraye-t-il en se raclant la gorge.

Je fais mine de réfléchir avant de hausser les épaules.

— Parce qu'il n'y a pas plus concret que les vieilles pierres pour raconter notre histoire. Personnellement, je trouve absolument stupéfiant que le pont du Gard tienne encore debout après plus de vingt siècles d'existence !

— Je comprends, approuve-t-il avec chaleur. À moindre échelle, c'est un peu ce que je ressens tous les matins en me réveillant ici.

— Et vous ne pouvez pas savoir à quel point vous avez de la chance...

Le coin de sa lèvre s'étire sans aller jusqu'au sourire.

— L'un de mes très bons amis possède le château de Chenondry(1), si cela vous intéresse, je peux organiser une visite.

Sa proposition inattendue me tire une petite exclamation de surprise. L'un de ses potes est le propriétaire de Chenondry ? L'un des plus prestigieux châteaux de la Loire rarement ouvert au public ? Bon sang, mais que quelqu'un lui vole son carnet d'adresse !

— Si ça m'intéresse ? m'emballé-je sans en croire mes oreilles. Vous rigolez ?

Mon enthousiasme le fait sourire une nouvelle fois

— Je lui en toucherai un mot.

Au même moment, l'écho joyeux de plusieurs rires nous parvient à travers les arbres, nous rappelant amèrement que nous bien loin d'être seuls au monde et qu'à quelques mètres de là, des centaines de personnes font la fête en son honneur. C'est d'ailleurs à se demander ce qu'il fait ici, loin de tous. Ne devrait-il pas faire des ronds de jambes, serrer des pinces et flatter les égos ?

Très vite, les voix se rapprochent, des pas se font entendre et sans que nous ayons besoin de tendre l'oreille, nous reconnaissons sans mal l'appel successif de son prénom. Monsieur le comte est porté disparu et ce n'est visiblement pas passé inaperçu.

— La fête est finie.

Quelque chose dans la façon dont il le déplore me laisse entendre qu'il n'a aucune envie d'y retourner et que, si cela ne tenait qu'à lui, il resterait ici – avec moi.

— Rien ne vous oblige à les rejoindre, tenté-je dans l'espoir égoïste qu'il s'écoute, pour une fois.

— J'envie votre candeur, murmure-t-il alors que son attention se braque d'emblée sur quelque-chose par-dessus mon épaule. Hélas je crains d'être trop rationnel pour croire que ce que je désire l'emporte sur le reste.

— Téri, c'est toi ?

Un timbre féminin retentit dans mon dos et instantanément, les muscles de mon corps se tendent, alarmés. Inutile de me retourner pour découvrir l'identité du trouble-fête, je l'ai reconnue à l'inflexion si particulière de sa voix. Je suis même étonnée qu'elle n'ait pas débarqué plus tôt.

— Tonia, lui répond aussitôt Térence d'un ton un peu raide, confirmant ainsi mes soupçons.

Derrière moi, j'entends cette dernière s'avancer à pas feutrés sur le gazon et en la voyant faire, mon compagnon quitte sa position assise pour se remettre debout, brisant ainsi définitivement notre tête à tête.

De mon côté, je ne l'imite pas et reste à ma place, sans bouger. Par fierté mal placée d'abord et puis peut-être aussi par crainte de lui faire face pour la première fois, d'affronter son regard inquisiteur et probablement lourd de reproches. Celui d'une femme qui vient de surprendre son amant en compagnie d'une autre, même si nous ne faisions que discuter et que mon âge devrait normalement m'écarter de tous soupçons. Pourtant, je sais parfaitement ce qu'elle doit penser. Moi, je sais ce que j'en penserais à sa place.

— Cela fait plus d'une heure que tout le monde est à ta recherche, enchaîne-t-elle, légèrement accusatrice. Les feux d'artifice vont être tirés et ta mère insiste pour que tu sois là.

Je lève les yeux vers Térence pour jauger son état d'esprit, or, contrairement à moi qui n'en mène pas large, il ne semble pas du tout inquiété par la situation. Au contraire. À la seconde où elle est apparue, le Térence détendu et spirituel est redevenu distant et impénétrable. Et il en est plus que convaincant.

— Bien sûr, agrée-t-il tout en me tendant spontanément sa main pour m'inviter à me relever.

Étonnée par son geste, je fixe sa large paume sans oser y glisser la mienne, hésitante. A-t-il seulement conscience de l'image que nous allons lui donner lorsqu'elle découvrira ma tenue ? Ou plutôt, mon « absence » de tenue ? Comment compte-t-il justifier ça ? Ma présence à ses côtés était déjà louche, mais alors là...

— Elsa.

Son rappel à l'ordre, bien que prononcé avec tempérance, me fait sursauter et au pied du mur, j'attrape enfin sa main. Une fois debout, je prends le temps de réajuster le vêtement sur ma poitrine, mal à l'aise et sans attendre davantage, je pivote dans sa direction.

Toujours vêtue de son tutu blanc de danseuse, elle nous observe tour à tour, perplexe, avant de s'attarder un instant sur moi. D'abord intriguée, son expression se transforme très vite en quelque chose de plus... confus. Et, contrairement à ce que j'avais imaginé, il n'y a nulle trace de jalousie ou d'animosité dans son regard, juste de la pure incompréhension.

Ce qui est pire, au final.

Est-ce si difficile à croire qu'il puisse être attiré par une fille comme moi ?

Sans m'adresser le moindre mot, elle me détaille lentement de la tête aux pieds, de plus en plus incertaine et lorsque ses prunelles se posent sur la veste de Térence sur mes épaules, ses sourcils se froncent carrément.

Aïe, aïe, aïe.

Terriblement inconfortable, je me force à ne pas bouger, à ne pas me dandiner sous son regard, comme pourrait le faire une petite fille fautive. Elle a beau ne prononcer aucun mot, son silence est assourdissant et malgré la distance qui nous sépare, je peux deviner sans mal la kyrielle d'interrogations suspicieuses qui lui passent par la tête.

Que fait-il seul avec cette fille ? Dans l'un des coins les plus reculés du parc ? N'est-elle pas la petite amie de son frère ? Ce dernier est-il au courant qu'ils sont ensemble ? Qu'est-ce que c'est ce que cet accoutrement ? Et surtout, pourquoi lui a-t-il prêté sa veste ?

Déstabilisée, elle s'empresse de reporter son attention sur son amant, les yeux si loquaces que c'en est presque terrifiant. S'en suit alors, entre eux, un échange muet, chargés de sous-entendus explosifs, qui me donne l'affreuse sensation de tenir la chandelle.

Scène de ménage dans 3... 2...1...

J'imagine d'ici le truc et au risque de passer pour une poule mouillée, je ne préfère pas me trouver entre les deux lorsque cela arrivera.

— Vous devriez y aller, me conseille Térence sans la quitter des yeux, m'offrant ainsi une porte de sortie.

Reconnaissante, je ne me fais pas prier et après avoir ramassé mes affaires, je ne m'attarde pas un seul instant de plus et commence à prendre la direction du château. En dépassant Tonia, j'ose un bref coup d'œil dans sa direction et lorsque je découvre la fureur qui déforme ses traits gracieux, je détourne aussitôt la tête.

Une fois à la lisière des arbres, mon instinct me pousse à modérer la vitesse de mes pas et c'est à ce moment-là que je l'entends lui demander avec froideur :

— Peux-tu m'expliquer ce qui se passe ?

Dans la clairière tranquille, l'éclat de sa voix se répercute aux alentours et résonne jusqu'à moi. Les pieds avançant désormais au ralenti, je tends l'oreille.

— À quel propos ?

Je ne peux pas le voir, et pourtant, j'imagine sans mal l'expression de son visage : nonchalante, obscure. L'impassibilité faite homme.

— Tu te fiches de moi ? s'exclame-t-elle, dénuée de tout sang-froid. Je ne suis pas aveugle, Térence ! Qu'est-ce que tu foutais avec cette fille ? Tu couches avec elle ?

En entendant sa question, j'esquisse une grimace. Que va-t-il bien pouvoir lui répondre ? Connaissant le personnage, je ne serais pas étonnée qu'il botte en touche.

— Ne sois pas ridicule, gronde-t-il comme si sa supposition l'avait offensé.

C'est qu'il est convaincant le bougre ! S'il ne m'avait pas affirmé son attirance dix minutes plus tôt, je tomberais presque dans le panneau.

Désormais dissimulée dans l'ombre des arbres, je m'arrête et sur un coup de tête, je bifurque et vais me planquer derrière le tronc de l'un d'entre eux. C'est mal, je le sais. Je ne devrais pas rester là pour les espionner, mais il faut croire que ma curiosité maladive est bien plus forte que moi.

— Alors quoi ? Elle s'est retrouvée à poil par l'opération du Saint-Esprit ? lui crache-t-elle au visage, marquant un point difficilement irréfutable.

De ma cachette, je constate qu'ils sont désormais face à face et alors qu'elle semble à deux doigts d'exploser, lui se montre étonnement serein. Après une poignée de secondes durant lesquelles je les observe avec une avidité éhontée, il lui répond quelque chose que je n'entends pas, mais qui parait la calmer instantanément.

S'ensuit alors un long échange de regards dans le silence le plus complet avant qu'il ne pose sa main à la base de sa nuque pour l'attirer contre lui. Puis, après avoir murmuré d'autres mots mystérieux contre sa tempe, leurs yeux finissent par s'accrocher définitivement l'un à l'autre – intimes, complices – avant qu'il ne se penche lentement vers elle pour frôler ses lèvres du bout des siennes.

Le souffle suspendu, je continue de les fixer, sans-gêne, alors qu'une jalousie naïve et suffocante engourdit doucement ma poitrine. Enfin, au moment où il se jette sur sa bouche, un petit hoquet de surprise s'échappe de la mienne. L'élan incontrôlable avec laquelle il s'empare d'elle déclenche, malgré moi, une série de palpitations inattendue dans les profondeurs de mon corps, qui me fait rougir de la tête aux pieds. Sait-il que je suis encore là ? Est-ce sa façon de me faire comprendre qu'il ne se passera jamais rien entre nous ? Comment peut-il avoir envie de l'embrasser après ce qu'il m'a avoué tout à l'heure ? À moins que cela soit simplement une diversion ?

Effréné, son baiser devient rapidement exigeant, puis carrément indécent.

Bon sang de bordel de merde, c'est donc comme ça qu'il embrasse ?

Fascinée par la façon si charnelle qu'il a de le faire, je suis incapable d'esquisser l'ombre d'un geste, profondément frustrée à l'idée de ne jamais pouvoir profiter de ses talents en la matière.

Il a l'air si... sûr de ce qu'il fait. Quelle foutue injustice !

Très vite, les choses s'intensifient davantage et alors que mes yeux suivent fébrilement les mains de Térence agripper les fesses de Tonia, un craquement bruyant retentit derrière moi. Le cœur battant, je fais volte-face et plisse les paupières pour tenter d'apercevoir quelque chose dans la nuit. C'est alors que le craquement se répète une nouvelle fois et qu'à travers les arbres, je repère deux silhouettes s'avancer dans la direction des deux autres.

Merde !

Cette fois, sans hésiter davantage, je tourne les talons et pars le plus discrètement possible dans la direction opposée.


(1). Château de la Loire inventé pour les besoins de l'histoire.

***

Dites-moi touuuuuuut !

xoxo  Diane


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