Lettre 1 - Noah

Lycée Victor Hugo, 30 septembre 2016, 

Gaël,

Je préfère être honnête de suite. Je voulais que tu le saches, que tu le lises avant tout autre mot : ce n'est pas dans mes habitudes de faire ça. Je ne l'ai jamais fait même. Et je ne sais pas comment le faire du coup... 

J'aurais voulu te faire croire que j'ai écrit des milliers de brouillons, que je les ai jeté en boules aux quatres coins de ma chambre... mais non. C'est pas le cas. J'ai jamais été du genre à me relire. Alors je me lance directement, sans attaches, sans filets, sans ceinture de sécurité. Je me lance comme ça dans le vide. Je me lance sans réfléchir, sans même imaginer les conséquences de mes actes. Je me lance et puis j'improviserai au fur et à mesure. 

Oui c'est fou, c'est de la folie.
Alors peut être que je suis bel et bien fou, que je suis entrain de tout foirer sur le champ, et ce, sans même m'en rendre compte. 

Mais je ne peux pas m'arrêter. Et de toute façon je ne veut pas. A quoi bon ? Cela ne servirait à rien de s'arrêter maintenant. 

Parce que chaque jour de plus ou je reste dans le silence c'est un jour de plus où je mens. 

Où je mens au monde entier. A moi. Et à toi aussi. 

Je sais que ça peut te parraitre totalement étrange, bizarre voir fantasque, cette personne à qui tu n'as jamais parlé, et qui, sortie de nulle part, t'envoie une lettre. 
Cette personne inconnue, tombée amoureuse de toi et qui t'envoie une lettre pour te dire tout cela alors que vous n'avez jamais parlé ensemble auparavant. 

Qui tombe amoureux d'une personne à qui elle n'a jamais parlé ? 

A cette question, je voudrais te répondre : "Moi". 

Parce que oui, l'Amour, c'est bien le nom de cette petite boule de lumière qui crépite au creux de mon ventre à chaque fois que je te vois. 

Cette envie  presque indécente de venir te voir, quand tu manges seul le midi et de te parler pour les millions d'éternités à venir. 

Cette maladie qui touche chacunes de mes cellules, chacuns de mes atomes, qui les force à danser ensemble, sans jamais s'arrêter (et sur un rythme endiablé quand tu es dans les parages). 

D'ailleurs, que tu sois là ou pas, ils n'y accordent que peu d'importance, du moment que tu es dans mes pensées. 
Et pour y être dans mes pensées, tu y es. Le jour, la nuit, quand l'horloge se dérègle et sonne la 25ème heure dans un cliquetis métallique et bancal. 

Ce n'est même pas volontaire. Pas fait exprès. Pas voulu. Pas demandé. Pas recherché. Parce que, pour tout te dire, j'aurais bien voulu que tu n'y sois pas. 
Cela aurait été tellement plus simple.

Pour toi, pour moi, pour nous. 

Mais on ne peut pas contrôler ce genre de choses. Choisir si on tombe malade ou non. -Et de qui-. 

Parce que malade, je le suis, et c'est à n'en pas douter. 
Je le suis quand tu passes incosciemment ta main dans tes cheveux d'ébènes avec cette volonté de les décoiffer un peu plus. 
Je le suis quand tu mordilles ton crayon de bois pendant un exercice de maths et que tu ne comprends pas l'énoncé du problème. Quand tu mordilles ce fichu crayon de bois et que m seule volonté est de prendre sa place, sur cette plage inconnue que représente tes lèvres. De les explorer jusqu'à m'y perdre. 

Alors, parlerais tu de folie quand tu lis ces mots que j'ai tracé sur le papier dans un élan incontrôlable, et sans même savoir ce que je faisais ? 

Ou n'en as-tu simplement rien à faire ? Toi, Gaël, le garçon solitaire, la pierre tombale officielle des premières S3 du Lycée Victor Hugo.

Qu'en penses tu Gaël ? 

Sincérement, 
L'Anonyme. 

PS : Si jamais tu veux me répondre, dans une folie que je crois impossible, glisse ta lettre dans le casier 333 , dans le couloir B, troisième étage du batîment numéro 3. (ce casier est vide, personne ne l'utilise depuis des années).  


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