Trente-sept. [ FINAL ]
Je savais que j'étais foutue avant même de le voir. Alors que je vagabondais dans les couloirs, le cœur lourd comme une enclume, je savais que j'étais foutue. Pas parce que j'étais une fille pleine de compassion, une bonne personne qui pardonnait les fautes d'autrui. Je l'étais, car j'étais amoureuse de Thimoé, et c'était ma plus grande faiblesse dans laquelle je tirais de ma force. Je ne connaissais que l'amour toxique, égoïste, celui qui rend fou, qui n'améliore pas la personnalité, mais faisait ressortir le pire de mes travers. Donc, bien que les symptômes fussent les mêmes - tachycardie, papillons dans le ventre- ce que je ressentais pour Thimoé était différent. J'étais toujours foutrement égoïste, mais le bonheur de Thimoé m'importait, je voulais me corriger pour ne plus le blesser, et c'était réconfortant de l'aimer. Ce n'était pas un incendie qui me dévorait, en fait, c'était pile la bonne température d'un feu de cheminée nécessaire pour me réchauffer. Et juste pour ça, cette douce chaleur qui se répandait dans mon être, je savais que j'étais foutue. Que je la voulais encore. Que j'allais peut-être la transformer en un brasier impitoyable. Je prenais le risque, car il le valait bien. Thimoé Davinson valait tous les risques de ce monde !
J'étais déterminée. Il y avait une possibilité que lui veuille se séparer de moi, et seule une discussion à cœur ouvert, visage à découvert nous permettrait de connaître l'issue de notre couple dans le futur. Évidemment, je ne trouvais pas d'excuses au comportement de Thimoé, cependant pouvais-je le juger sur cette faute aussi grave, soit-elle ? N'avais-je pas fait pire en essayant de le manipuler depuis le début ?
Les questions se multipliaient sous mon crâne tandis que mes pas m'ont conduite jusqu'à la pièce dont Debby avait parlé. La main sur la poignée de la porte, j'étais prête à l'ouvrir lorsque la voix grave de Rufus a résonné.
- Il n'est pas là-dedans, a-t-il dit.
Son visage, comme le mien, portait les stigmates de la folie de Thimoé. Mais, contrairement à moi, il ne semblait pas possédé par un débat intérieur.
- Et où est-il ?
- Au bureau des moniteurs. Il discute avec sa mère par téléphone.
- Ah. D'accord, je vais m'y rendre dans ce cas. Merci.
- Mhmm.
Je m'attendais à des remontrances, des conseils ou qu'il fourre encore une fois son nez dans des affaires qui ne le regardaient pas. Il n'avait rien fait, se contentant de me fixer, comme s'il voulait me faire passer un message. Que pouvait-il dire en fin de compte ? L'avenir ressemblait à ma vision lorsque je plongeais dans les profondeurs de l'océan. Flou, piquant, incertain. Et même lui, il ne se doutait pas du déroulement de la conversation qui allait avoir lieu.
J'ai marché vite, pressée cette fois-ci, nerveuse aussi. Mon myocarde était dans tous ses états. Ses battements irréguliers frappaient si forts qu'ils s'accordaient avec le bruit de mes baskets sur le carreau. Finalement, je suis arrivée devant la porte massive entrouverte. Un filet de lumière s'y échappait. Une puissance accélération cardiaque m'a saisie brusquement à l'entente de la voix de Thimoé par-delà la cloison. L'entrebâillement ne montrait pas son visage, cependant, juste le timbre de sa voix, cette tonalité douce et râpeuse, ses quelques mots qu'il prononçait, réussissaient à bousculer mon monde. Le renverser totalement. Détruire la gravité pour que je flotte dans cette atmosphère.
Et si je réagissais ainsi alors que je ne l'avais même pas vu, qu'est-ce qui se passerait si nos regards se croisaient ?
À peine pensé-je à cela que je l'ai entendu raccrocher. Mes mains étaient moites, tremblantes. Derrière le bois se trouvait mon petit ami, l'homme le plus doux que j'avais rencontré, le plus sensible aussi. Celui qui me faisait rire, ressentir une kyrielle d'émotions, de sensations, celui que j'avais appris à aimer malgré moi. Et si j'appréhendais, j'étais tout de même impatiente, donc j'ai poussé la porte.
Il se trouvait là, derrière un grand bureau en chêne marron. Un t-shirt blanc complètement usé épousait son torse en faisant ressortir la pâleur de sa peau, les ecchymoses dessus et sa fine musculature. Il n'avait pas conscience de ma présence, tandis que chaque fibre de ma personne était attirée par lui. J'aurai juré sentir ma peau quitter mes os, mon organes désertés leur emplacement, tous courant dans la direction de Thimoé, pour se blottir contre lui. L'attraction qui nous liait dépassait celle de la terre sur un objet, la physique ne pouvait avoir d'explication à un tel phénomène. Mon âme également vibrait, dansait. Elle avait reconnu celle qui lui plaisait tant. J'étais juste enivrée, de lui, et j'avais encore soif. À l'instar d'une personne qui ne s'était pas abreuvée depuis une dizaine de jours. Il était la source d'eau que j'aimerai boire. Encore et encore. Et je comptais m'y noyer tant j'étais insatiable.
De ses bras qui m'encercleraient.
De son odeur qui chasserait mes peurs.
De ses baisers, dans mon cou, sur ma bouche... j'en voulais plus.
Plus de lui, encore et encore. Toujours en grande quantité, jamais je n'étais rassasiée. Mon amour s'est libéré de ses chaînes, à l'intérieur de mon cœur. Il a planté ses griffes dans mon cerveau et mis sous sa botte chacun de mes organes. Eux tous criaient mon amour pour Thimoé, ils lui disaient « je t'aime » de tant de façons que j'ai su. Je n'aurai pas pu me séparer de lui. Comment le pourrais-je ? Il s'écoulait dans mon sang.
Une seconde s'échappa dans le temps, nos yeux se rencontraient.
Une seconde se figea dans le temps, et nous étions prisonniers de nos sentiments. ligotés, attachés. Captifs.
Car si Thimoé ne me l'avait pas dit, je le savais, en dépit de tout ce foutoir, qu'il m'aimait comme moi, je l'aimais. Comme j'aimais la pluie, quand elle frappait fort, avalant des maisons, détruisant des champs. Je l'aimais ainsi.
Bien sûr, il a eu un mouvement de recul, prêt à fuir, ébranlé par l'émotion de ces retrouvailles précoces, avant de se raviser. La détermination qui a illuminé ses traits m'a éblouie.
- Yanaëlle, a-t-il doucement dit.
- Thimoé, ai-je répondu.
Et c'était affreusement gênant.
Les non-dits, les regrets empestaient dans la pièce. Nos sentiments aussi, cependant, les mauvaises ondes saturaient beaucoup trop. On avait tu nos maux, et à présent la communication devenait difficile parce qu'elle avait été longtemps négligée.
- C'est vraiment gênant, hein ? a-t-il ri froidement. Je... je suis tellement stressé en fait. J'ai envie de fuir et en même temps, j'ai l'impression que je risque de me désintégrer si je vais loin de toi... on a tellement de choses à se dire, n'est-ce pas ? Tu es bien venue pour qu'on parle hein ? Pas vrai ? Ou tu veux tout de suite rompre ? Pas que je veuille rompre, mais c'est la seule solution, non ?
J'ai souri, réconforté par cette série de questions due à sa nervosité. Tout ça, c'était bien Thim, pas ce monstre qui avait tout détruit il y a quelques heures.
- Je suis effectivement venue pour qu'on parle. Pas pour se dire encore des bêtises, mais bien des vérités. T'es prêt ? ai-je demandé sans le lâcher du regard.
Sa nervosité s'est muée en une détermination ferme qui faisait étinceler le marron de ses iris. Et je retombais amoureuse. Bêtement.
- Oui.
Simple et concis.
- On peut aller dans la chambre dans laquelle je suis actuellement ? Je pense que ça sera mieux, a-t-il ajouté.
J'ai inspiré.
- D'accord.
Il a avancé vers la sortie et je lui ai emboîté le pas.
Pendant que nous nous sommes avancés, je ne pouvais m'empêcher de le contempler, son dos large, la carrure de ses épaules, ses pieds nus sur le carreau. Mon estomac s'est soudainement noué, tant l'appréhension mangeait tout mon bon sens. La détermination de Thimoé ne me disait rien de bien, au contraire, j'ai cru percevoir qu'il était prêt, prêt à rompre avec moi pour mon propre bien, prêt à s'éclipser de ma vie. Évidemment, savoir qu'il voulait faire ça me réconfortait, parce que c'était mon bonheur qu'il avait toujours voulu. On avait tous deux nos torts que nous devions réparer pour repartir sur une base plus saine. Et je ne croyais pas que nos cœurs auraient pu supporter un énième chagrin, une énième blessure.
- C'est pas super classe, mais j'espère que ça te convient, a marmonné Thimoé en me sortant de mes pensées.
Nous étions dans une pièce d'un blanc immaculé contenant seulement un matelas placé sur le sol froid. À vrai dire, cette chambre était véritablement effrayante, avec une atmosphère qui me rappelait un asile. Elle devait une sorte de chambre d'isolement en cas de pétage de plombs. Ces murs devaient avoir abrité tant de désolation, de colère, de tristesse. Mais peut-être aussi de réconciliation avec soi-même, avec le monde, d'amour aussi véritable que le pouvait être celui entre deux personnes gavés d'hormones, désespérés de se retrouver dans ce monde de fous.
Je me suis raclée la gorge.
- C'est très bien.
Il ne m'a pas répondu, ni regarder, fixant obstinément le mur à ma gauche, insensible à ma présence. J'en étais presque vexée. Moi je n'arrivais pas à calmer mon rythme cardiaque, ni à l'analyser sous toutes les coutures alors que lui... il faisait comme si je n'étais pas là. Comme si je ne comptais pas plus pour lui.
- Écoute, je pense que je vais partir. Visiblement, tu n'es pas encore capable d'avoir cette conversation, ai-je soudainement annoncé, très agacée.
Il a sursauté, comme si on venait de lui verser un seau glacé au visage, les yeux hagards.
- Non ! s'est-il écrié en faisant un brusque mouvement de la main.
Ce geste, impulsif et innocent, m'a fait reculer, placer mes bras en une sorte de bouclier et provoquer une tachycardie. Et face à cela, le marron dans ses yeux était devenu aussi sombre que de la boue.
Je n'avais pas pris conscience de ce réflexe que j'avais eu, ce réflexe de m'éloigner de lui et de me protéger d'un quelconque danger, d'une quelconque attaque malveillante à mon égard. Il avait juste réagi avec brusquerie, ça lui arrivait, alors pourquoi tremblais-je ? Pourquoi je sentais l'adrénaline pulsé dans mes veines pour offrir à mon corps des prouesses physiques pour fuir ? Pourquoi avais-je cherché la porte du regard, me rapprochant inconsciemment d'elle ?
- Tu vois ? a-t-il dit en passant une main désespérée dans sa chevelure auburn. Tu as peur de moi ! Comment tu veux que je te regarde alors je t'ai frappé, bon sang ?! Tu as la marque sur ton magnifique visage, Yanaëlle ! Je m'en veux tellement, tellement...
- Pourquoi ? ai-je simplement demandé en soutenant la tempête dans son regard.
Parce que j'essayais vraiment de comprendre qu'est-ce qui s'était passé dans sa tête pour qu'il en arrive à me frapper, à me faire mal intentionnellement avant de s'écrouler dans une marre de culpabilité et de larmes. Je voulais préciser ma pensée, pour qu'il comprenne réellement ce que je lui demandais, mais il m'a interrompu en commençant à s'expliquer.
- Je... je t'en voulais, a-t-il commencé, nerveusement. Tu ne comprenais pas que je voulais ton bien, que je n'avais pas fait exprès de te blesser, et...tu ne voulais rien comprendre. J'étais agité, les voix en ont profiter pour renforcer mon trouble. Te voir avec le mec artistique a juste été la goutte d'eau de trop.
À peine son fichu discours fini, il ne me regardait plus. Je pouvais comprendre ce que cela lui faisait de se tenir à moins d'un mètre de moi, d'affronter les conséquences de sa colère. Ma joue me brûlait de nouveau, la sensation était si forte qu'elle remontait dans mes yeux, les embuant.
- Ce n'est pas de ta faute, a-t-il continué. J'ai des problèmes que je dois apprendre à gérer, j'étais juste soumis à ma schizophrénie et cette... crise me l'a fait comprendre. Je suis désolé de t'avoir blessé, Yanaëlle, tu ne peux pas savoir le mal que ça me fait de juste te savoir... triste, malheureuse surtout si j'en suis la cause. Mais je veux changer, rependre les rendez-vous chez le psy, peut-être prendre mes médocs et faire véritablement tout mon possible pour guérir. Pour ne plus jamais blesser les personnes que j'aime.
Naïvement, mon cœur s'est emballé à l'évidence que je faisais partie des personnes qu'il aimait. Bien que nous ne nous soyons jamais avoué nos sentiments, je savais qu'il était autant amoureux de moi, que moi amoureuse de lui. C'était aussi pour ça que je m'accrochais à notre relation, nous nous aimions un peu trop pour ne pas poursuivre, creuser plus profondément les fondations de notre lien pour le rendre solide.
- Je te demande pardon, Yanaëlle, a-t-il chuchoté en s'avançant doucement vers moi. Tu mérites amplement que je m'incline pour te supplier et je le ferai si c'est ce que tu veux !
- Tu veux guérir, ai-je répété.
- Oui.
- Et tu es désolé.
- Tellement, tellement...
- Est-ce que je peux te faire confiance ? Est-ce que chaque fois que la maladie gagnera, je subirai tes foudres ?
- Non ! a-t-il déclaré fermement, le cou rouge. Jamais, jamais je ne toucherai ! C'est une promesse que je me fais, Yanaëlle, et si je dois me couper les bras pour la réaliser, je vais le faire !
Rapidement, les centimètres entre nous ont si vite volés en éclats qu'il se tenait à présent devant moi. Il ne dépassait pas le mètre quatre-vingt, mais je me sentais engloutie dans la couverture de son regard. Avalée par son aura protectrice. Des frissons ont couru sur mon échine avant de joyeusement fini leur parcours dans mon cœur qui s'est brutalement accéléré. J'étais soudain consciente de notre proximité, de nos souffles saccadés, de la chaleur qui irradiait de nos corps, et de son regard. Son putain de regard trop franc, trop puissant, trop éloquent. Il disait tout ce qui ne se disait pas. Une communication visuelle qui illuminait toutes les ombres de doute qui m'assaillaient. Je ne savais plus quoi faire de mon myocarde qui frappait encore et encore, jusqu'à peut-être son point de chute.
Sa paume - aussi brûlante que le soleil- a saisi la mienne pour la poser à plat sur son muscle cardiaque. Boum, boum, boum, boum, boum, boum. C'était ce grand bruit que faisait son cœur, si fort, si puissant. Boum, boum, boum, boum, faisait-il, toujours plus affolé.
- Tu sens mon cœur, là ? a-t-il commencé quand nos yeux se sont de nouveau recroisés. Il bat pour toi. Chacuns de ses putains de battements t'appartient. Chaque putain de contractions et de relâchement est à toi. Et je te jure sur ce putain de cœur qui est entièrement à toi que jamais plus, jamais plus, je ne te ferai du mal. Quitte à me couper un organe. Tu comprends cela ? C'est une promesse que je me suis fait, et à toi aussi.
J'ai cru sentir un puissant vent souffler sur moi, tandis que je ne lâchais pas les sentiments qui défilaient dans le creux de ses prunelles. Il ne mentait pas. Tout en lui hurlait qu'il pensait, qu'il ressentait au plus profond de lui cette déclaration. Toutes sortes d'émotions se battaient en mon être intérieure. Toutes voulaient s'exprimer, laisser libre court à l'expression de leur reconnaissance envers Thimoé, envers ses mots empreints d'amour, de confiance. Finalement, c'est la joie qui avait gagné et je me suis jetée dans sur lui. Entourant son cou de mes bras et ses hanches de mes jambes. M'abreuvant de ce contact si profond, si libérateur que j'en ai gémi. Je l'ai serré plus fort, respirant à grand poumons son parfum sucré. Si bon, si bon, si bon, si bon, si booon !
J'avais l'impression que c'était ici que se trouvait mon endroit préféré. Dans tout l'univers, c'était là que j'aimais être : la place entre ses grands bras.
- Je suis désolé, désolé, désolé, a-t-il murmuré dans ma clavicule qu'il ornait de baisers.
- Je sais, et moi aussi je suis désolée, si tu savais... chuchoté-je en plantant mes ongles dans ses omoplates, embrassant son front en sueur.
- Mais pourquoi ? T'es parfaite, t'as rien fait ! C'est moi le monstre ici.
- Tu redis ça et je t'émascule, ai-je froidement déclaré en tirant sa chevelure en arrière pour qu'il puisse me voir. Je n'aurai pas du m'énerver autant, te repousser et flirter avec Arte. J'ai déconné, et je m'en excuse. Je crois que moi aussi je voulais te blesser.
- Et ben, on peut dire que j'ai gagné, a-t-il constaté tristement ma lèvre incisée.
- Ce n'était pas un concours, juste deux personnes maladroites, mais on va s'améliorer. Tu le sais, non ? Pour ne plus se blesser mutuellement.
- Oui. Enfin, j'imagine.
Mes bras refusant de le lâcher ont continué à le serrer plus fort, un désir ardent de me fondre en lui, tout de suite.
Je ne désirais que cela.
Nos peaux qui se toucheraient jusqu'à s'user l'une sur l'autre.
Nos corps qui s'emboiteraient parfaitement ensemble, formant un puzzle enfin reconstitué.
Et nos lèvres. Oui, nos lèvres qui resteraient soudées, sans jamais se décoller, cherchant dans cette étreinte l'oxygène manquant à notre vie.
Le parfum du désir m'a séduite, et guidée par son arôme sucré, j'ai saisi les joues de Thimoé pour un baiser passionnel car c'était ce qui me fallait. Ce dont j'avais besoin. Un besoin primitif et bestial qui ne demandait qu'à être assouvi. Mais alors que la chaleur des lèvres de Thimoé m'envahissait, elle m'a été brutalement arrachée. Son corps à présent si loin de moi. Trop loin.
- Qu'est-ce que tu fais ? me suis-je étonnée, dépitée, les frissons encore sur ma peau.
- Et toi, qu'est-ce que tu fais ?! Pour... Pourquoi tu m'as embrassé bon sang ?! a-t-il presque hurlé en se tirant les cheveux.
Ce n'était pas assez évident ?
- Parce que j'en avais envie. Pas toi ?
- C'est pas la question, Yanaëlle ! Tu ne peux pas embrasser un homme qui t'a violenté ! Je suis dangereux, putain, tu captes pas ?!
- Tu n'es pas dangereux ! Je reconnais que ça peut sembler stupide de continuer à sortir avec toi sachant que ça ne fait que quelques heures que le drame s'est passé, mais Thim, c'est toi et moi ! Je te connais, tu n'es pas violent, ni dangereux, tu es la définition même de la douceur ! Tu as juste fait une erreur...
- On ne frappe pas sa petite amie par erreur. Mon comportement est intolérable, je ne te mérite pas, Yanaëlle.
Il a secoué la tête, emmêlé dans ses pensées. J'espérais que les voix dans sa tête n'étaient pas entrain de lui remuer le cerveau.
- Écoute, Thimoé, ai-je dit en passant doucement ma paume sur sa joue. Tu as raison, ton geste était horrible, honteux et intolérable. Cependant, tu t'es excusé, tu m'as juré de ne plus recommencer et je te crois, et je te pardonne. Vraiment.
- Comment... ? Comment tu peux me croire putain ?!
J'ai imité son geste précédent et j'ai mis sa paume à plat sur ma poitrine gauche, sur mon palpitant. Je l'ai laissé ressentir ses battements impatients qui cognaient fort, si fort.
- À cause de ce putain de cœur qui bat pour toi. À cause de lui, je t'ai pardonné et surtout parce que je ne vaux pas mieux. Chut, tais-toi, l'ai-je interrompu alors qu'il voulait protester. Au tout début de notre relation, je t'ai menacé, je n'avais pour objectif que de te faire du mal. Et alors que nous sortons ensemble, je t'ai aussi blessé, psychologiquement bien sûr, n'empêche que j'ai déconné. Et toi, qu'est-ce tu as fait quand j'ai déconné ? Tu m'as pardonné. Pourquoi tu l'as fait ? Sachant que je pouvais encore te faire du mal, pourquoi t'es resté ?
- Parce que tu vaux tous les risques du monde, Yanaëlle.
Ça lui semblait évident.
- Exactement, c'est pareil pour moi. Comme toi, je veux prendre le risque. Je crois en notre histoire, mec ! ai-je rigolé pour détendre cette atmosphère déjà tendu.
Il a esquissé un sourire qui m'a tué.
- Vraiment ?
- Oui, je te le promets. Tu ne le ressens pas ?
En un éclair, la situation a changé, la tension est descendue et la température a pris des degrés en plus. Ce n'était plus seulement la main de Thimoé sur mon cœur affolé, non, c'était la main de Thimoé sur mon sein gauche. Mon sein gauche qu'il serrait entre ses doigts. La chair abondante sur laquelle sa paume était aplatie. Un millier de frissons ont couru sur mon échine et je me suis arc-boutée. Le désir qui s'était éteint il y a quelques instants a été si rapidement ravivé qu'il semblait me consumer. J'étais affreusement consciente de chacun des détails de notre proximité et de sa putain main qui serrait mon putain de sein.
Nous aurions dû continuer de parler, essayer de déchiffrer nos ressentis, planifier notre couple dans le futur, ou au contraire tout stopper parce que ça allait trop vite. J'aurai du lui parler de Kana, que j'allais tout faire pour ne pas la laisser interagir entre nous, que j'allais la contrôler. Il y avait tellement de non-dit entre nous, tellement d'incertitudes, de doutes, mais ils ont flambé. À l'instar des questions, de la discussion qui devait se poursuivre, ils ont flambé. Dévorer par les flammes de notre désir.
Je me suis saisie de ses lèvres en me tenant sur la pointe des pieds. Et j'ai conquis sa bouche comme si elle était mon territoire. C'était maladroit, la façon dont nos bouches se cherchaient, se chamaillaient et se poursuivaient, mais c'était si bon ! Si bon de sentir son poids sur moi, réchauffée par sa chaleur, par sa main qui tenait ma hanche pour me tenir toujours plus proche. Il a grondé lorsque j'ai tiré ses cheveux en jouant avec sa lèvre inférieure. J'ai gémi quand il m'a plaqué doucement sur le mur froid. J'avais l'impression de re-découvrir la douceur de sa bouche, la brûlante caresse qu'elle m'infligeait. C'était si délicieux que je sentais la chair de poule se répandre partout sur moi. Le bout mouillé de sa langue a m'affleurée et je l'ai laissé se mêler à la mienne. Dansant ensemble. Une valse érotique remplie de maladresse.
Plus notre baiser se prolongeait, plus je sentais mon esprit et mon cerveau se liquéfier. Le goût métallique du sang aurait dû nous arrêter, nous rappeler les heures précédentes. Seulement, Thimoé a délicatement léché ma lèvre ensanglantée, comme pour la guérir. Sa main sur mon sein exerçait une agréable pression qui me faisait soupirer encore et encore. Son pouce s'entêtait à me rendre fou en faisant des cercles sur ma hanche. L'incendie dans mon corps ne demandait qu'à être éteint. Je ne pouvais plus contrôler mes soupirs, mes gémissements, mes plaintes et lui non plus n'était pas en reste. Il grognait, grondait dans mon oreille, mordait délicatement mon cou lorsqu'il n'arrivait plus à se maîtriser. Les quelques fois où nos yeux se rencontraient restaient gravés dans ma mémoire. Il était magnifique; les lèvres rougies, les cheveux en bataille et les yeux aussi sombres que ceux d'un prédateur. J'adorais être la proie que se faisait dévorer. J'adorais la sensation de ses dents sur ma clavicule, ou juste sur mon pouls au niveau de mon cou tandis que ma poitrine était traitée comme une reine entre ses mains inexpérimentées.
Rien n'avait aussi bon goût que cela.
Rien n'était comparable à la passion qui nous ligotaient.
Et rien ne pouvait plus bon que d'être aimé de cette façon : brutale, gauche, parfaite. Un mélange de ce nous étions sans nos masques.
L'euphorie et le plaisir ont saisi mes membres et des larmes de bonheur menaçaient de couler. C'était si juste, il n'y avait aucun mal à cela.
Et une fraction de seconde plus tard, nos pupilles dilatées se sont percutées. Nous avons cessé tout geste juste pour savourer cet instant. Sa respiration hachée. Son odeur. Ses mains. Ses yeux. L'amour a fondu dans mes veines et j'ai souri en embrassant sa main.
Il m'a rendu mon sourire avant de m'embrasser avec la plus grande délicatesse au monde, mon visage pris en coupe. Ce n'était pas aussi charnel que les baisers précédents, mais c'était tout aussi bien. C'était le clapotis de nos sentiments. Rafraîchissant à l'instar d'un grand verre d'eau après des jours de déshydratation.
Il inspirait. J'expirais. Il inspirait. J'expirais. On respirait. On se respirait. Et c'était merveilleux.
— Merci d'être restée, a-t-il chuchoté sur mes lèvres engourdies qui me tiraillaient. Merci, merci encore Yanaëlle.
— Tu auras tout le temps de me rembourser dans le futur, ai-je dit.
Il a passé doucement son doigt sur ma lèvre blessée qui s'était réouverte durant notre petite interlude. Ses yeux étaient désolés de tout le mal qui s'était passé.
— On repart sur de nouvelles bases, okay ?
— Oui. Plus de mensonges ?
— Oui. Plus de pétage de plombs ?
— Oui.
— C'est parfait.
— Merci de m'accorder une nouvelle fois ta confiance, Yanaëlle. Je te jure que tu ne regretteras jamais d'avoir pris ce risque.
J'ai acquiescé parce que je n'étais pas sûre que mon cœur ressortirait indemne d'une nouvelle fissure.
Il a avancé son auriculaire et même si c'était purement enfantin, le mien s'est enroulé autour du sien.
— « Give your all to me. I'll give my all to you », a-t-il chantonné en embrassant ma pommette blessée et ma lèvre coupée.
— Promis, ai-je répondu, sa bouche contre ma bouche.
Demain était loin. Le présent avait un goût sucré d'amour.
•●•●•●•
Les fenêtres étaient fermées, les lits faits et nos bagages pliés. L'air était plus chaud, les cris des criquets résonnaient en arrière son. J'ai pris une petite inspiration en balayant du regard la chambre dans laquelle j'étais. Elle n'était pas très grande, un peu trop petite pour deux personnes, cependant... elle renfermait tant de souvenirs, de rires, de colère. C'était magnifique de voir combien de moments j'avais amassé durant ces quelques mois, des liens solides que j'avais tissé. J'avais l'impression d'avoir vécu plus d'années ici que les dix-sept déjà écoulées.
— T'es prête ? a demandé Debby en tirant sur sa valise.
— Mhmm.
— Ça fait bizarre, non ? De partir, c'est comme si c'était notre maison.
— J'avoue. Est-ce que ça vraiment que deux mois ? On aurait dit que nous étions dans une bulle intemporelle.
— Je sais, je me dis la même chose. Tu crois qu'en l'espace de deux mois le monde extérieur est toujours aussi pourri ?
— Oh, Debby, deux mille ans n'ont pas suffit à l'être humain pour qu'il devienne meilleur. Le monde doit être encore plus pourri.
— Ah ! Je me disais bien. Mais on y va, non ? Affronter ce monde.
J'ai coupé ma respiration. Quitter le camp était une étape plus difficile que prévu. C'était refermer un chapitre important du livre de ma vie, et je ne savais pas si j'étais prête. Prête pour la réalité, à vrai dire. Mais, il est vrai que j'étais aussi excitée. C'était contradictoire, et c'était totalement moi. Une myriade de petites contradictions.
— Oui, on y va, ai-je dit en relâchant ma respiration.
Nous avons fermé la porte à clé et sommes avancés dans le couloir déjà rempli de plusieurs campeuses. Elles me saluaient, faisaient la causette, des discussions et plaisanteries futiles selon moi. Toutes éprises de compassion pour mes cicatrices encore visibles, toutes méprisantes envers Thimoé. Même si je comprenais leur comportement à son égard, je leur en voulais. Elles se voulaient bienveillantes, cela partait d'une bonne intention, pourtant elle ne jugeait que la surface de la situation. Et c'était un point à retenir, l'histoire la plus simple cachait des non-dits, des vérités cachées.
Le camp était animé. Le départ était dans quelques minutes et je pouvais constater que nous nous n'étions pas les seuls à avoir fait des rencontres exceptionnelles. Il suffisait à présent de voir si elles dureront. Il était facile de tisser des liens, mais les entretenir était beaucoup plus difficile. J'évitais de me projeter dans le futur, je préférais me focaliser sur l'instant t, sur Debby et moi qui avançons vers les bus.
— Tu sais, j'ai quand même grandi durant ces vacances, a-t-elle déclaré.
— Ah oui ? Je ne trouve pas.
— Sérieusement ? Regarde, au tout début du camp, je te trouvais parfaite et je t'idéalisais. Maintenant non. Je sais que la perfection n'existe pas, que la plus part des humains portent des masques, et tous pleins de trucs. J'ai appris, donc j'ai grandi.
— Dit comme ça... mais tu restes toujours aussi infantile.
— C'est méchant ! a-t-elle ri en me cognant doucement. Quelle était ta première impression de moi et celle d'aujourd'hui ?
— Hmmm, ai-je fait mine de réfléchir. Je t'ai trouvé inutile, chiante et naïve.
— Et maintenant ? a-t-elle demandé plein d'espoir.
— Tu es juste naïve et chiante.
Je n'avais jamais vu une mine s'assombrir aussi vite. Elle a commencé à accélérer, boudant comme l'enfant qu'elle était, comportement qui m'a arrachée un rire aux éclats.
— T'es chiante comme une petite soeur ! ai-je crié en continuant de rigoler.
— Vraiment ? s'est-elle étonnée en se retournant pour me regarder.
— Évidemment.
Son sourire était plus brillant qu'un soleil au zénith.
Les places étaient presque toutes prises et Debby voulait impérativement s'asseoir avec moi. Il restait donc une place entre nous et je remerciais le Ciel qu'Arte était déjà assis avec quelqu'un d'autre. Je ne pourrais pas supporter de le côtoyer une fois encore. Surtout que je me sentais coupable vis-à-vis de Thimoé de maintenir cette amitié avec lui. En parlant de lui, il était en retard. Les moniteurs ont commencé à faire l'appel sans qu'il apparaisse.
— Thimoé Davinson ? a appelé M. Bowers. Thimoé Davinson ?
— Je suis là ! s'est écrié mon petit ami en entrant en trombe suivit de son meilleur ami. Nous sommes désolés pour le retard.
— On ne change pas les bonnes habitudes, hein ? a souri M. Bowers. Partez vous asseoir.
Mais ils n'ont pas bougé. Certaines personnes commençaient à être agacées par leur immobilité et je savais que les remontrances contre Thimoé ne tarderaient pas à affluer. C'est alors que Thimoé s'est incliné. Littéralement.
— J-je... je suis désolé ! a-t-il déclaré fort et fermement. Je suis désolé de vous avoir blessé, et pour tout le désordre que j'ai causé. Je ne peux pas vous expliquer vraiment pourquoi j'ai un tel comportement, pourquoi j'agis souvent de façon bizarre, mais mes excuses sont sincères. Vous avez le droit de m'en vouloir, c'est normal. Sachez, cependant que je suis sincèrement navré.
Rufus l'a regardé avec fierté. Et moi aussi j'étais fière de lui. Baisser la tête et avouer ses torts demandait un courage sans pareil. Mon cœur est tombé encore plus amoureux de lui.
Je ne m'attendais pas à ce que tout le monde comprenne l'effort derrière ce geste, alors je me suis mise debout, défiant toutes mes règles.
— Personnellement, ai-je doucement commencé en le fixant car il s'était relevé. Je te pardonne.
Des hoquets de surprise se sont échappés. Ma détermination restait inflexible. Et je savais que très peu de personnes pouvait comprendre l'échange silencieux entre Thim et moi. J'avais peut-être mis ma réputation en danger... mais Thimoé en valait la peine.
— Merci, a-t-il répondu la voix débordante de gratitude, merci Yanaëlle.
— Allez, partez vous asseoir maintenant, a dit Bowers, souriant.
Ils ont longé l'allée, la tête haute, les épaules légèrement tendues sous les yeux inquisiteurs. Moi je voulais me jeter dans ses bras. Donc j'ai encore pris un risque.
— Tu veux t'asseoir avec moi ? ai-je demandé assez fort pour qu'on nous entende.
J'adorais jouer avec le feu.
— T'es sûre ?
— Je prends le risque.
— Ruf ?
— Tu fais la moitié du voyage avec elle et l'autre avec moi. Compris ?
— Oui, chef !
Ils se sont souris avant de se séparer sous les jugements des campeurs. Je savais que l'attention était braquée sur nous. Je m'en fichais, j'étais focalisée sur lui, Thim, Thim et encore Thim.
Il s'est assis à la place du milieu entre Debby et moi. Par discrétion, pour ne pas que nos voisins de devant et de derrière repère la combine, nous nous avons laissé nos coudes se toucher. C'était un contact brûlant.
— Hey, ai-je souri.
— Hey, a-t-il chuchoté.
— Ça va ? Prêt pour le monde réel ?
— Un peu. Tant que je suis avec toi, je crois que ça peut aller. Et toi ?
— Ça ira aussi.
— Je n'ai jamais ressenti ça, tu sais. Autant de forte émotion opposée pour une seule personne.
— Ça ne fait que commencer, Thim. Ce n'est que le début.
Un doux silence a plané, nos regards ne se sont lâchés et je pouvais sentir le crépitement de l'amour qui se dégageait de nous. Les commissures de mes lèvres ont frissonné, je n'ai pas ou retenir mon sourire.
— Tu devrais faire ça plus souvent. Ça te va bien.
— Quoi ? ai-je demandé.
— Sourire, Yanaëlle. Tu caches un magnifique sourire derrière ton masque.
Alors mon sourire s'est naturellement élargi.
Dans l'obscurité j'errai
Et tout était tellement plus simple quand on reste caché
Quand sur nos maux on mettait des rires
Alors qu'on pleurait derrière nos sourires
J'aimais la fraîcheur de l'ombre
Mais rien ne m'avait préparé à ta chaleur
Qui dévore tout ce qui est sombre
Qui chasse tout ce qui est horreur
Aimer fort fait parfois peur
Car tu n'as plus aucun contrôle sur ton cœur
Tu prends le risque de finir
Avec une âme toujours plus meurtrie
Donc on porte des masques
On ne fait pas de moto sans casque
Tu ne m'as pas obligé à me dévoiler
Je crois que quand je t'ai vu
J'ai eu envie de te révéler
Ma véritable nature
Tu voulais tout de moi
Même le mal qui sommeille en moi
Et ne t'inquiète pas je veux tout de toi
Même l'affreux que dans tes yeux souvent je vois
C'était un pari risqué
La suite du chemin est encore flouté
Mais tu valais la peine
Que je montre toutes mes plaies
Parce que tu les aimes
Tellement plus que moi-même je m'aime
Et je crois que j'en valais la peine
Parce que tu as réussi à me faire tienne
Parce que tu connais la vérité
Derrière ma comédie parfaitement jouée
On a menti
Beaucoup de gens j'ai dupé
On a simulé
Tu te cachais derrière ta maladie
Mais l'amour nous a englouti
Aussi impétueux qu'un tsunami
Nous avons décidé de nous aimer
Même avec nos masques à l'envers
Mais les visages à découvert
Le cœur enfin libéré
De tous mensonge... seulement rempli d'honnêteté
Yanaëlle Cox.
END
FIN
●•●
Eh oui, mes lapins garous métamorphosés en gélatine c'est la fin...
Du tome 1 car rappelez vous que le tome 2 arrive 🙃
Wooooooooow
Alors qu'est-ce que ça vous fait de savoir que c'est la fin du début de cette aventure ?
Qu'avez-vous ressenti par rapport à cette fin ?
Quel est votre personnage préféré ?
Celui que vous avez détesté ?
Celui que vous voulez voir se développer dans le tome 2 ?
Hâte de rencontrer Zayne ?😏
Votre moment préféré ?
Celui qui vous a brisé le cœur ?
Êtes-vous prêts pour la suite ????
Votre avis global sur l'histoire ?
Je ne sais pas encore quand sortira le tome 2, cependant je ferais une mise à jour ici pour vous prévenir bien que je vous invite à vous abonner pour ne rien rater ! (Aussi sur mon Instagram : phanou_67)
Et surtout n'hésitez pas à partir lire mes autres histoires si celle-ci vous a plu, ça me ferait vraiment plaisir.
Mais ceci n'est pas des adieux, plutôt un aurevoir.
LISEZ ABSOLUMENT LA DERNIÈRE PARTIE DÉDIÉE À VOUS REMERCIER
ÇA COMPTE ÉNORMÉMENT POUR MOI
À TOUTE MES BIBICHES
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